Page images
PDF
EPUB

la mise en accusation du ministre. Cet homme s'est oublié jusqu'à frapper un chef de division fort âgé; il refuse d'ailleurs une pension de 600 fr. Le sieur Tingard, avocat à Rouen, demande que les faux monnoyeurs ne soient plus punis de mort. Cette pétition est appuyée par M. J. Lefevre et surtout par M. de Tracy, qui pense que la peine de mort rẻpugne à nos lumières et à nos idées. M. de Berbis réclame l'ordre du jour; il ne conçoit pas cet acharnement du parti contre la législation existante à cet égard. Les gouvernemens doivent être sévères, quand il s'agit de garantir la société des entreprises des malfaiteurs. M. de Tracy remonte précipitamment à la tribune. Il soutient que la société n'a pas le droit d'infliger la peine de mort à aucun de ses membres, et que le plus beau frontispice qu'une nation puisse mettre à son code pér:l, c'est Pexemption de cette peine.

M. le ministre de l'intérieur s'étonne que l'on conteste un tel droit à la société entière, et que l'on vienne l'accuser d'assassinat chaque fois qu'elle l'exerce. L'orateur, à propos d'une pétition relative seulement aux faux monnoyeurs, ne devoit point généraliser une question si importante; il y a danger grave à censurer ainsi en général nos lois pénales.

M. de Tracy obtient de nouveau la parole pour un fait personnel : il croit que le ministre n'a pas bien compris ses assertions, et qu'il n'a point dépassé son droit de député. L'ordre du jour, combattu encore par M. Girod (de l'Ain), et appuyé par M. de la Boulaye, est mis aux voix et rejeté à une foible majorité. La pétition est renvoyée au garde-des-sceaux et au bureau des renseignemens.

[ocr errors]

Le sieur Berger, à Lyon, demande que l'on révise l'organisation des monts-de-piété pour détruire leurs abus. M. Ch. Dupin s'élève fortement contre les intérêts usuraires des monts-de-piété, et par suite réitère ses observations contre la loterie. La pétition est renvoyée au ministre de l'in-` térieur.

La veuve de l'ex-conventionnel et régicide Bertrand-Lhosdinière se plaint d'un déni de justice à l'occasion d'une plainte qu'elle a portée contre le procureur du Roi à Domfront, pour mutilation du monument funéraire de son mari. (Voir le no 1469 de ce journal.)

M. le rapporteur, après avoir rapporte le texte de l'inscription que ce magistrat avoit cru devoir faire effacer (la patrie perd en lui un de ses meilleurs citoyens, et la liberté un de ses plus zélés défenseurs), expose que la cour royale de Caen a décidé qu'il n'y avoit pas lieu à suivre contre lui sur la dénonciation de la veuve Bertrand, et que la seule marche qui lui restoit étoit de se pourvoir en cassation contre cette décision. Il propose, au nom de la commission, l'ordre du jour sur le prétendu déni de justice, et le renvoi au garde-des-sceaux quant à la conduite du procureur du Roi.

M. de Pina fait d'abord remarquer l'adresse ou plutôt l'astuce avec laquelle les réclamans ont mené cette affaire: ils ont préféré faire du scandale; ils craignoient d'ailleurs une punition personnelle pour l'apposition de l'épitaphe, s'ils eussent suivi la voie naturelle des tribunaux. L'honorable membre fait sentir tout ce qu'il y a d'odieux à faire hautement l'apologie d'un criminel en traçant une inscription si révoltante dans un lieu public. C'est en vain qu'on invoqueroit le pardon du passé commandé par la Charte; le pardon n'autorise point à louer les coupables.

M. Lemercier insiste pour le renvoi au garde-des-sceaux, et attaque vivement la conduite du procureur du Roi. M. de Conny prononce, au milieu des murmures de la gauche, un discours pour justifier ce magistrat. C'est au nom de la France outragée par une inscription si coupable, c'est au non de l'honneur national que les députés doivent défendre, que je viens, dit M. de Conny, invoquer, aux cris de vive le Roi! l'ordre du jour sur une semblable pétition.

M. le garde-des-sceaux ne veut point traiter le fond d'une question aussi affligeante pour tous les bons Français. En droit, dit-il, la question est toute simple. Sur la dénonciation de la veuve Bertrand, la cour royale de Caen a rendu une ordonnance de non-lieu : il falloit recourir à la cassation plutôt que d'employer la publicité, car cela semble indiquer une combinaison de ce sentiment qui a dicté l'inscription. (Murmures à gauche.) Si le magistrat attaqué a méconnu un instant les limites de son pouvoir, il y a été porté par un grand scandale : ce seroit prolonger le scandale que de ne pas adopter l'ordre du jour en pareil cas; c'est entrer même dans l'esprit de la Charte, qui, en demandant l'oubli des votes, n'a pu permettre des apologies directes des assassins d'un bon roi.

M. Mercier, qui est révolté par un attentat aussi sacrilège que celui du procureur du Roi de Domfront, conjure le ministre d'éloigner de leurs fonctions des hommes qui encourent à ce point l'indignation publique..... M. de Charencey appuie l'ordre du jour. M. Salverte reproduit les assertions de ses amis. M. Ravez, ramenant de nouveau la question à son véritable point, soutient que ce n'est pas à la chambre à juger le magistrat, que l'affaire doit suivre son cours devant les tribunaux. Donner suite à cette pétition, seroit attaquer la chose jugée. Et pourquoi réservet-on tant de colère contre le procureur du Roi, et tant d'intérêt pour ce qui a provoqué sa conduite? Personne n'ose cependant défendre l'épitaphe. M. Pataille appuie aussi l'ordre du jour il est mis aux voix et adopté par une majorité formée du côté droit et des deux centres. Les députés se lèvent aussitôt en désordre.

:

La séance du 2 mars a été employée au renouvellement des bureaux et à la nomination de la commission des pétitions et de celle qui devra examiner la proposition de M. Sébastiani, tendant à supplier le Roi de faire rapporter par une loi nouvelle les dispositions des lois existantes qui prescrivent une retenue sur les pensions militaires. Voici le résultat de la réorganisation des bureaux :

Présidens: MM. d'Haussez, Pardessus, Janckowitz, Ravez, Bignon, de Saint-Aignan, Dumans, de la Bourdonnaye, Labbey de Pompières.

Secrétaires MM. de Mauléon, de Noailles, de Clarac, de Berbis, Benjamin Constant, Etienne, Faure, Riberolles, de Cormenin.

Commission des pétitions: MM. de Lorgeril, de Curzay, Seguy, de Ber

bis, de Schonen, Sapey, Girod, Gautier, de Bérenger.

Commission chargée de l'examen de la proposition de M. Sébastiani : MM. Jacqueminot, Amat, de Panat, Sebastiani, Lepelletier d'Aulnay, Gérard, Oberkampf, Dartigaux, Delaborde.

Il n'y a point de séance indiquée.

Le Gérant, ADRIEN LE CLERE.

[merged small][ocr errors][merged small]

Nous comptions nous étendre moins cette année que les précédentes sur les mandemens de carême, l'abondance des matériaux que nous sommes obligé de laisser en arrière à chaque numéro, sembloit nous en faire une loi; mais, d'un autre côté, l'importance et l'intérêt de plusieurs mandemens, les circonstances graves où se trouve la religion, la sagesse ou la vigueur des réflexions que ces circonstances ont inspirées à de respectables prélats, les réclamations qu'ils font entendre contre l'esprit du siècle, les salutaires conseils qu'ils opposent au délire des opinions et à la licence des écrits, tout nous force à donner au moins une idée sommaire de ces monumens de leur vigilance et de leur zèle. Ces monumens appartiennent à l'histoire de notre époque, et si nos ennemis attaquent avec amertume ces actes de l'autorité pastorale, il ne nous est pas permis de les passer sous silence, et de ne pas faire remarquer tout ce qu'a d'imposant cette unanimité du corps épíscopal dans ses alarmes, dans ses réclamations et dans ses coaseils aux fidèles. Il faut plaindre ceux qui trouvent un sujet de risée dans ces alarmes trop légitimes, et un sujet d'insultes dans ces trop justes réclamations.

M. le cardinal archevêque de Toulouse rappelle d'abord, dans son Mandement, les alarmes qu'il avoit manifestées dans celui de l'année dernière sur les progrès de l'irréligion. Ces alarmes, dit-il, ne se sont que trop réalisées; des ordonnances successives ont dépouillé les évèques de leur droit sur les écoles, ont détruit huit établissemens précieux à la religion et à la société, et ont jeté l'inquiétude et la crainte dans les autres petits séminaires. S. Em. continue ensuite en ces termes :

a D'un autre côté, à quels excès ne se sont point portés des écrivains, qui se font un jeu du sacrilège, contre la religion elle-même? C'est en vain que notre loi fondamentale a reconnu la religion catholique comme la religion de l'Etat, et lui a donné ainsi un droit incontestable au respect de tous los Français. A la faveur d'une presse licencieuse, qui ne connoît plus aucune retenue depuis qu'on a rompu les digues destinées à la contenir, on a insulté cette religion sainte par toute sorte de dérisions; on l'a outragée par toute sorte de blasphèmes, on a redoublé d'efforts pour avilir ses ministres, on a osé même attaquer son divin chef, on a osé justifier la condamnation et le supplice ignominieux du fils de Dieu!... >>

S. Em n'a même pas cru pouvoir dissimuler un autre genre de scandales, et elle déplore les outrages faits à la majesté royale par un poète, et par les éloges et les applaudissemens qu'il a reçus publiquement. Toutefois le vénerable archevêque implore les miséricordes de Dieu sur nos ennemis.

Tome LIX. L'Ami de la Religion et du Roi,

G

«Daigne le Seigneur, dit-il, avoir pitié de leur aveuglement, dissiper les ténèbres de leur esprit et toucher leur cœur! Nous détestons la licence et l'impiété, et nous nous estimerions heureux de sacrifier notre vie pour en arrêter les progrès, mais nous n'avons aucun ressentiment contre les insersés qui s'en font les sectateurs, et nous serions très-disposé à répandre notre sang, s'il étoit nécessaire, pour procurer leur conversion. »

M. l'archevêque de Toulouse parle enfin des dernières épreuves auxquelles il a été exposé :

« Si, dans une circonstance récente, nous avons cédé quelque chose à la nécessité pour conserver de précieux établissemens, notre conscience nous rend le témoignage que nous n'avons été poussés à cette démarche par aucune crainte des hommes, ni par aucun intérêt temporel. Nous avons cédé d'abord parce que nous nous y sommes crus suffisamment autorisés par l'intervention pacifique et persuasive du vicaire de Jésus-Christ, ensuite parce que notre cœur ne pouvoit résister au cruel spectacle de cinq cents élèves du sanctuaire qui erroient comme des brebis sans pasteur autour de leurs anciens asiles, et dont la vocation pouvoit être ébranlée ou même détruite par de plus longues contradictions. >>

Il manquoit à S. Em. une dernière épreuve, c'est que son Mandement ait été l'objet des attaques et des déclamations de certaines feuilles trop connues. Elles ne lui ont pas épargné, à cette occasion, les dérisions et les insultes; mais l'épiscopat et le clergé sont accoutumés désormais à ces témoignages de la malice et de la haine de leurs ennemis, et comme M. le cardinal, ils n'y opposent que les efforts du zèle et les vœux de la charité.

M. l'archevêque de Tours réfute les prétextes dont on se sert pour éluder la loi de l'abstinence; on allègue l'age, les travaux, la santé, mais ces raisons n'empêchent point de se livrer aux plaisirs. Ce n'est que quand le carême arrive que l'on commence à se plaindre de la foiblesse de la nature. Le prélat avertit aussi de ne pas compter sur des dispenses qui ne seroient pas fondées sur de graves motifs, et rappelle les exemples de ces anciens pénitens dont les austérités ont de quoi nous confondre.

M. l'archevêque d'Avignon montre combien la foi est nécessaire dans ces jours de déception et de ténèbres, et gémit sur les dangers que présente notre époque :

« Le torrent dévastateur des fausses doctrines a inoudé notre patrie; les digues de l'enfer sont rompues; la licence, sous le nom de liberté, répand avec une intarissable profusion et un acharnement diabolique ses poisons jusque dans les cabanes les plus reculées. Son souffle empesté atteint tous les ages et toutes les conditions. Repoussez avec une vive indignation ces prétendues lumières qui ne sont que ténèbres; défendez-vous de ces promesses qui ne sont que fraude; écartez de vos yeux, arrachez des mains de ceux qui vous sont chers, ou qui vous sont confiés, ces nombreux écrits dégoutans d'impiété, de sophismes et de corruption. Déplorez le sort de ces infortunés qui, s'étant imprudemment abreuvés à ces coupes empoisonnées, éprouvent, ce semble, l'affreux besoin de communiquer à ceux qui les approchent le venin qui les consume; qui blasphement contre Dieu et

son Christ, s'élèvent contre l'Eglise, sa doctrine, ses lois et ses ministres, et peu satisfaits de l'inquiétude qui les tourmente, cherchent à enlever aux autres la paix dont ils jouissent. Sans les exclure de votre charité et de vos plus ardentes prières, évitez leur société, redoutez la contagion dont ils sont atteints.

M. l'évêque de Bayonne fait voir combien la bonté de Dieu se manifeste dans la promesse du Sauveur, dans sa venue, dans son caractère, dans sa doctrine, dans ses miracles, dans sa mort, dans son empire, dans son futur jugement et dans son éternel triomphe. Le prélat s'étonne qu'une religion si bienfaisante et si pure puisse avoir des ennemis, et surtout que notre siècle en ait vu de si ardens et de si implacables ;

«La religion de nouveau triomphante, la justice, la paix, l'ordre réta blis, les ont de nouveau irrités. Ils ont multiplié à l'infini, avec une nouvelle ardeur, les écrits obscènes ou impies. Ils ont distille chaque jour et répandu en tous lieux, contre les ministres de la religion, le poison de la calomnie, et le fiel de leur malice ne s'est pas épuisé.

>> Ce n'étoit point assez pour eux de s'attacher à noircir les ministres sacrés; ils se sont enfin élevés contre le Fils de Dieu même, et le monde a été témoin d'un attentat jusqu'alors inoui. Au milieu d'une nation chrétienne, celui dont le nom adorable recoit les hommages de l'univers entier, Jésus Christ, après dix-huit cents ans de triomphe, de bienfaits et de gloire, a été cité au tribunal des impies, et le monde a gardé le silence; il a vu blasphémer son Sauveur sans frémir, et les aberrations d'une philosophic insensée en sont venues à ce point, de comprendre dans je ne sais quelle monstrueuse liberté des cultes, la faculté d'outrager impunément le culte de toutes les nations de la terre.....

» La religion ne périra pas; mais le ciel, irrité de tant de perversités, d'injustices, de calomnies, d'impiétés, de blasphemes, peut exercer encore une fois ses vengeances, et verser de nouvelles calamités sur notre infortunée patrie. Il peut lacher le frein à la fureur des méchans, et en faire les instrumens de sa colère. Notre indifférence pour les maux de la religion, pour les insultes faites à la majesté divine et au nom adorable du Sauveur, pourroient nous mériter à nous-mêmes le dernier des malheurs, celui d'être entraînés par le torrent, et de perdre le don inestimable de la foi. Il faut que notre ame s'afflige à la vue de tant de scandales. Il faut que nous venions souvent gémir devant les saints autels, supplier notre Dieu d'arrêter le débordement de tant de crimes, le conjurer de nous regarder dans sa miséricorde, de défendre son Fglise, de protéger le trône, l'auguste et pieux monarque qui l'occupe et sa royale famille, de conserver la religion à la France, d'éclairer les hommes aveugles et foibles, et de confondre ou plutôt de convertir les méchans. »

M. d'Astros ordonne donc, pour le dimanche de la Quinquagésime, une amende honorable qui se fera après la messe, le saint sacrement exposé; on y chantera le miserere, et on dira l'oraison pour la réparation des injures faites au Sauveur.

M. l'évêque de Meaux, après avoir rappelé dans son Mandement la nécessité de la pénitence, fait voir qu'elle est encore plus indispensable au

« PreviousContinue »