Page images
PDF
EPUB

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Les journaux révolutionnaires ne sont pas contens, comme de raison, du dernier Mandement de M. l'archevêque de Paris: il les sèvre de calomnie, et les réduit à un petit ordinaire qui n'est pas de leur goût. Afin de s'en dédommager, et de détruire autant que possible le facheux effet du Mandement, ils se sont mis dès le lendemain à chicaner le prélat sur la ferme des chaises d'église. Ils trouvent que c'est un impôt ridicule, mal assis et illégal, qui écrase les pauvres fidèles. Une chose curieuse seroit de savoir en quoi il pèse sur les fidèles du Constitutionnel, et ce que la ferme des chaises d'église peut gagner par an avec ses abonnés.

- Le Roi, informé par M. Saullay de Laistre, sous-préfet d'Hazebrouck, de l'incendie de la filature de MM. Genot, à Bailleul, vient de mettre à la disposition de ce magistrat une somme de 1000 fr., pour être répartie par lui entre les plus malheureuses victimes de cet évènement. Peu de jours auparavant, une somme de 500 fr. avoit été distribuée aux ouvriers de cette fabrique par M. de Laistre, de la part de M. le Dauphin.

Le Roi, voulant remédier aux principaux inconvéniens du jeu de la loterie, et réduire les frais administratifs de son service, a, par ordonnance du 22 de ce mois, décidé que la loterie ne pourroit être établie dans les buit départemens où elle n'existoit pas (Basses et Hautes-Alpes, Aveyron, Cantal, Corrèze, Corse, Creuse, Lozère), et qu'elle seroit supprimée définitivement dans les 28 ci-après: Allier, Ardèche, Arriège, Aude, Charente, Côtes-du-Nord, Dordogne, Drôme, Eure-et-Loir, Gers, Indre, Landes, Loir-et-Cher, Haute-Loire, Lot, Lot-et-Garonne, Haute-Marne, Mayenne, Meuse, Nièvre, Haute-Saône, Deux-Sèvres, Tarn, Tarn-etGaronne, Vendée, Haute-Vienne, Vosges, Yonne. Le minimum des mises, qui étoit de 50 cent., est fixé à 2 fr. Les remises accordées aux receveurs de loterie sont réduites à 5 pour 100 sur les premiers 100,000 fr., à 4 sur les seconds 100,000 fr., à 3 pour les 50,000 f. suivans, à 2 sur les 50,000 f. suivans, enfin à 1 pour 100 sur les recettes au-delà de 300,000 fr. Cette ordonnance recevra son exécution à partir du 1er janvier 1830.

-M. le baron Thirat de Saint-Agnan, chef de division au ministère de la guerre, est nommé intendant militaire, et M. le chevalier de Chalard, colonel d'infanterie, est promu au grade de maréchal-de-camp.

-C'est mardi 24 que M. le nonce a présenté au Roi, en audience particulière, la lettre du sacré Collège pour annoncer la mort du pape Léon XII. Son Exc. a été conduite à cette audience, avec tout le cérémonial convenable, par MM. les barons de Lalive et de Viviers, introducteurs des ambassadeurs.

-Mercredi dernier, MADAME, duchesse de Berri, a présidé l'association des orphelines dite de l'œuvre de Saint-André, placée sous la protection de MADEMOISELLE.

Il y a eu, mercredi, un service solennel dans l'église de Sainte-Geneviève, à l'occasion de la translation du corps du célèbre Soufflot, architecte, au talent duquel on doit ce beau monument. M. l'abbé Desjardins, archidiacre de Sainte-Geneviève, a officié, assisté de deux missionnaires.

-La frégate française la Thétis, qui servoit de quartier-général aux révolutionnaires portugais dans le Tage, vient enfin de recevoir l'ordre de quitter Lisbonne.

- La feuille ministérielle du soir dément le bruit avancé par quelques journaux, qu'une nouvelle expédition alloit être envoyée en Morée, et seroit portée à 25,000 hommes.

-Christine-Louise de Bade, née princesse de Nassau, et veuve du margrave Frédéric, est morte à Carlsruhe, le 19 février, à l'âge de 53 ans.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Le 25, l'ordre du jour est la discussion de la proposition de M. Marschall, tendant à ce que les projets de loi d'intérêts locaux soient votés par assis et levé, à moins que cinq députés ne réclament le scrutin secret.

M. de Berbis appuie l'économie de temps à laquelle vise M. Marschall; mais il faudroit concilier ce but avec les règles fondamentales, et laisser aux lois qu'on vote le caractère d'authenticité qui résulte d'une majorité bien constatée. Il propose donc d'amender ainsi l'article: Lorsque plusieurs lois relatives à des intérêts locaux, présentées ensemble, renvoyées à une commission unique, et comprises dans un seul rapport, ne donneront lieu à aucune réclamation, elles seront successivement votées par assis et levé, et il sera voté sur l'ensemble au scrutin secret. Dans le cas où une discussion s'éleveroit à l'occasion d'une ou plusieurs de ces lois, il sera voté au scrutin sur chacune de celles qui y auront donné lieu.

M. le ministre de l'intérieur appuie l'amendement de M. de Berbis, comme se trouvant mieux en harmonie avec l'article 18 de la Charte que la proposition de M. Marschall. L'amendement de M. de Berbis, combattu par MM. Lefevre, rapporteur de la commission, et Marschall, et défendu par M. Al. de Noailles et de Schonen, est mis aux voix et adopté à l'unanimité.

L'application de cette disposition nouvelle se fait sur-le-champ aux vingt-six projets de loi tendant à modifier des limites dans autant de départemens. Ils sont adoptés successivement par assis et levé sans aucune discussion, et ensuite collectivement au scrutin, par 256 boules blanches contre 8 boules noires.

La chambre se forme ensuite en comité secret. On assure que M. Sébastiani a développé de nouveau sa proposition tendant à exempter de toute retenue les pensions militaires au-dessous de goo fr., et que M. le ministre des finances a déclaré que, sans s'opposer à ce que cette proposition füt discutée et mise en délibération, il se réservoit tous les moyens de la combattre. La prise en considération, ajoute-t-on, a été adoptée à une grande majorité.

Connoissez-vous les édits et ordonnances du 4° siècle, par lesquels les empereurs du Bas-Empire ont défendu à Louis XVIII et à Charles X de souffrir des Lazaristes et des missionnaires dans leurs Etats? Connoissezvous l'opinion de Tacite, de Pline et de Strabon sur la discipline actuelle de l'église de France? Savez-vous ce que le roi Clovis a décidé au sujet de la congrégation du Saint-Esprit, des Trapistes, et des autres établissemens religieux du 19e siècle?

Eh bien! si vous ignorez tout cela, tâchez de lire les pétitions que deux avocats du barreau de Paris viennent d'adresser à la chambre des députés, l'une contre les missions, et l'autre contre les missionnaires. Vous y verrez que l'empereur Théodose, que l'empereur Valens, que l'historien Strabon et Pline le Naturaliste ont fort désapprouvé les ordonnances royales rendues depuis la restauration, en faveur du culte catholique ; mais qu'en revanche ils approuvent fort le décret rendu le 18 août 1792, par la Convention nationale, cinq jours après qu'elle eut brisé le trône de Louis XVI, et renfermé le roi lui-même dans la tour du Temple.

Quoique tout ceci ait l'air d'une plaisanterie, rien n'est plus vrai cependant. Les pétitions actuelles sont fondées sur ce décret de la Convention et sur les édits des anciens empereurs de Constantinople. Elles établissent que l'autorité royale n'a rien à y revoir, et que c'est la seule loi compatible avec les autres harmonies de l'ordre légal.

B.

Un catholique anglais, fort connu par ses ouvrages et par ses disgraces, est mort le 4 janvier à Paris, où il étoit fixé depuis plusieurs années : c'est M. Francis Plowden, ancien avocat à Londres et auteur de beaucoup d'écrits historiques et politiques. Il étoit frère de Charles Plowden, Jésuite et président du collège de Stonyhurst, qui mourut le 13 juin 1821 en Franche-Comté, en revenant de Rome, comme nous l'annonçames no 729. Francis Plowden fut élevé au collège anglais de Saint-Omer, et, quoique catholique, fut reçu docteur ès lois en l'université d'Oxford, en récompense de son zèle à défendre la constitution anglaise. Il publia quelques ouvrages de législation et de politique; mais ayant frondé la conduite du gouvernement anglais dans son Histoire de l'Irlande, il fut poursuivi devant les tribunaux, et condamné à une amende énorme de 5000 liv. sterl. L'impossibilité où il étoit de la payer le força de quitter l'Angleterre. Il se retira en France, où il a toujours résidé depuis, et il obtint une petite pension sur les fonds des collèges britanniques et un logement dans l'ancien collège anglais. Depuis plusieurs années, le dépérissement de sa santé faisoit pressentir sa fin. Il avoit été marié, et laisse un fils et deux filles.

Ses principaux ouvrages sont un Examen des droits naturels des sujets britanniques, 1784, in-8°; une Histoire abrégée de l'empire britannique pendant les vingt derniers mois, 1794, in-8°; une Histoire abrégée de l'empire britannique en 1794, 1795, in-8°; l'Eglise et l'Etat, ou Recherche sur l'origine, la nature et l'étendue de l'autorité ecclésiastique

et civile dans ses rapports avec la constitution anglaise, 1795, in-4°; Revue historique de l'état de l'Irlande, 1803, 3 vol. in-4°; Histoire d'Irlande, 1812, 5 vol. in-8°; deux Lettres historiques à sir John Cox Hippisley, in-8°; deux Lettres historiques à Charles O'Connor ou Columbanus, 1812 et 1813, in-8°; Subordination humaine, Paris, 1824, in-8°, etc. Ce dernier écrit est une espèce de dissertation sur l'autorité spirituelle et civile dans ses rapports avec la question de l'émancipation ; mais l'auteur y embrasse beaucoup d'objets et y fait de fréquentes digressions. Il parle des Jésuites, des jansenistes, et surtout de M. Butler, avocat anglais et écrivain très-connu, auquel il paroît en vouloir extrêmement. Il est difficile de méconnoître dans cet écrit diffus, obscur et amer, l'effet de l'age et de l'exil sur une tête ardente. M. Plowden étoit d'ailleurs un homme aussi estimable qu'instruit, dont les premiers écrits ont eu une jaste répu– tation.

Réponse à un article inséré dans le Journal de Genève, numéro du 5 février 1829.

Lettre de M. Vuarin, curé de Genève, à M. le conseiller Rigaud, premier syndic de la république et canton de Genève.

Genève, 13 février 1829.

M. le premier syndic, le numéro du Journal du Genève du 5 février courant, que j'ai l'honneur de vous adresser, renferme un article qui commence par ces mots : Un des détenus catholiques, et finit par ceux-ci : Persévérer dans une conduite répréhensible.

J'ai l'honneur de vous déclarer, M. le syndic, que, dans la circonstance dont il est question, je ne me suis écarté ni de la ligne de mon devoir, ni de la ligne de mes droits, soit pour le fond, soit pour la forme. Je me suis borné à rappeler par ma conduite aussi calme que ferine, à un jeune homme, les règles des convenances et les principes du droit canonique qu'il a paru avoir oubliés.

Parmi les bienfaits signalés dont la ville de Genève doit tous les jours bénir la Providence, le plus précieux sans contredit, aux yeux de la foi, est de lui avoir rendu le culte antique de ses pères qu'elle avoit professé pendant plus de treize siècles. Le concordat de 1801, auquel elle est redevable de ce prodige de miséricorde, a établi une et une seule paroisse catholique dans l'enceinte de ses murs, et pour la desserte de la banlieue. Le titre canonique de l'érection de cette paroisse est daté du 17 septembre 1803.

Le devoir de l'obéissance envers mon évêque m'a appelé à la direction de cette paroisse depuis vingt-trois ans. Le titre de ma nomination est du 24 février 1806.

Jusqu'au 31 janvier dernier inclusivement, aucun acte canonique, ni même aucun titre coloré n'avoit dérogé au dispositif, ni aux conséquences légales de ces actes. Un jeune homme a prétendu exercer, d'abord à mon insu, puis contre ma volonté, ainsi qu'il conste par la déclaration ci

jointe, (1) les fonctions de propré curé dans l'église et dans le cimetière, dont les clefs me sont confiées. J'ai dit à M. l'aumônier des prisons: Non licet. Celui-ci, au lieu d'écouter la voix de son devoir, et même de respecter les simples convenances, a préféré se promener triomphalement en voiture depuis les prisons jusqu'au cimetière, précédé du corbillard qui conduisoit son paroissien. Je ne suis responsable de ces voies de fait et de ces puérilités ni devant les hommes, ni devant Dieu. L'honneur et le mé rite en appartiennent tout entiers aux acteurs et aux approbateurs de la scène.

J'aime à croire que ce jeune homme n'a puisé ni dans son cœur, ni dans sa conscience, la règle de la conduite étrange qu'il a tenue, mais qu'il a été influencé et égaré par des conseillers malavisés ou perfides. A l'âge où il est, son zèle a encore besoin de la maturité que donne l'expérience. J'éprouve de la consolation à lui rendre cette justice auprès du chef du gouvernement, en me rappelant celle qu'il m'a lui-même rendue, il y a quelques années, très-spontanément et d'abondance de cœur. Je suis persuadé, M. le syndic, que vous lirez avec intérêt la lettre qu'il m'écrivit de Rome sur la fin de 1822; j'ai l'honneur de vous en transmettre une copie (2). Je sais que les tribunaux me sont ouverts pour demander justice contre les calomnies et les fausses assertions énoncées dans le Journal de Genève, ct l'impartialité dont s'honorent les respectables magistrats qui les composent m'est un gage du zèle et de l'équité qu'ils mettroient à faire droit à ma juste plainte. Il est permis au curé de Genève, qui peut présenter avec assurance son front et ses cheveux blancs dans toute la cité, de dédaigner la calomnie.

Les collaborateurs de ce journal sont sans doute bien innocons dans leur ignorance du droit canon; mais je suis surpris qu'aucun n'ait été inspiré même par le sens commun. Ceux d'entr'eux qui sont chefs de famille savent que le droit des clés, dans toute maison bien réglée, n'appartient qu'au chef. Ceux qui seroient administrateurs ou militaires savent que le droit des clés, pour toute la ville, est réservé à M. le syndic de la garde; ceux qui seroient jurisconsultes et légistes auroient du retenir leur plume jusqu'à dues informations.

Il est étonnant qu'ils aient osé outrager le gouvernement et des magistrats qui savent respecter le caractère dont ils sont revêtus, et qui connoissent sans doute l'étendue de leurs attributions et les limites de leurs pouvoirs, qu'ils les aient outrages, dis-je, jusqu'à leur faire jouer dans ce

(1) Nous soussignés vicaires de la paroisse catholique de Genève, déclarons et certifions que M. Moglia a voulu, hier 31 janvier, faire dans l'église, ainsi qu'au cimetière, la cérémonie religieuse pour l'inhumation d'un prisonnier, d'abord à l'insu, puis contre la volonté positive et connue de M. le curé, et qu'il s'est conduit dans cette circonstance d'une manière contraire à toutes les convenances et à toutes les règles.

Genève, 1er février 1829.

Signé, SUBLET et GAVAIRON, vicaires.

(2) Cette lettre de M. Moglia, datée du 11 décembre 1822, étoit pleine de témoignages de son respect et de sa reconnoissance pour M. le curé de Genève. Elle attestoit également les sentimens d'estime et de bienveillance du saint Père et de plusieurs prélats pour le respectable pasteur.

« PreviousContinue »