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monte à la tribune pour combattre cette proposition. Bientôt il se plaint, en termes assez vifs, de ce que les ministres ne tiennent pas à certaines dispositions de la Charte. Plusieurs fois il est rappelé à la question par M. le président, et interrompu par les murmures. M. de Martignac déclare que les ministres seront toujours prêts à donner des explications sur leurs principes, parce qu'ils sont conformes à la Charte; mais que, respectant aussi la chambre et son règlement, ils ne veulent pas continuer un débat à cet égard.

M. de Cassaignoles, membre de la commission chargée de cette loi sur la dotation, annonce que le rapport pourra en être présenté dans quelques jours. La chambre fixe à samedi prochain la discussion du projet de loi relatif à la ville de Boulogue.

MM. Boulard, Viennet et Humblot-Conté font le rapport des pétitions. Sept ou huit, fort insignifiantes, sont écartées par l'ordre du jour.

Le sieur Seline, à Paris, adresse un mémoire sur la politique à suivre dans les affaires d'Orient. La commission propose l'ordre du jour, d'après ce principe fondamental de la Charte, qu'au Roi seul appartient le droit de paix et de guerre. M. Delaborde profite de cette occasion pour demander aux ministres si le traité du 6 juillet 1827 sera l'ultimatum de la générosité européenne. M. Hyde de Neuville s'étonne de cette interpellation, et déclare que les traités conclus au nom du Roi seront exécutés. M. Ch. Dupin, malgré les murmures, se plaint de voir vacant le ministère des affaires étrangères, et demande quand cessera l'interim. M. le garde-des-sceaux rappelle qu'au Roi seul appartient le choix de ses ministres, et qu'il fera ce qu'il jugera convenable pour la direction de ses affaires politiques.

M. de Montbel appuie l'ordre du jour au nom de la prérogative royale. M. Al. de Noailles pense qu'on ne devroit nullement discuter sur des pétitions aussi déplacées. M. Méchin défend ce qu'il appelle le droit sacré de pétition. L'ordre du jour est enfin adopté.

Le maire et les conseillers municipaux de Mont-St-Aignan (Seine-Infér.) se plaignent de quelques usurpations de la part de M. l'archevêque de Rouen sur les biens de la fabrique de cette commune, et de changemens de circonscriptions ordonnés par l'autorité spirituelle. La commission propose le renvoi au ministre des affaires ecclésiastiques. M. l'évêque de Beauvais s'étonne que les pétitionnaires s'adressent à la fois à l'administration et à la chambre; il attend des renseignemens sur cette affaire, et saura concilier les égards dus à M. l'archevêque et la fermeté qui convient à un ministre.

M. de Formont demande l'ordre du jour, attendu que les pétitionnaires, comme vient de le dire S. Exc., n'auroient dù s'adresser à la chambre que s'il y eût eu déni de justice. M. Duvergier de Hauranne soutient que l'invasion du du presbytère a eu lieu non pas en faveur d'un séminaire légal, mais pour un petit séminaire complètement illégal. M. l'évêque de Beauvais répond que l'un et l'autre étoient autorisés. L'ordre du jour, voté seulement par la droite, n'est point accueilli. Le renvoi est ordonné.

Une discussion sur le cumul des traitemens a offert peu de résultats. Le 30, on remarque à leurs places les généraux Hygonet et Tib. Sébastiani, qui viennent d'arriver de Morée. La chambre accorde un congé à M. Seguy, qui est malade.

M. le ministre des finances présente quatre projets de loi. Le premier porte confirmation de divers échanges et de baux emphyteotiques entre le

domaine de la couronne et plusieurs particuliers; le second tend à régler la concession faite à la ville de Paris du palais de la Bourse et de ses abords; le troisième est relatif à la refonte des anciennes monnoies d'or et d'argent, dont il peut rester encore pour 600 millions, et porte que ces pièces cesseront d'avoir cours dans cinq ans. Le quatrième a pour objet d'assurer la distribution journalière à domicile des lettres dans toutes les communes de France.

L'ordre du jour est l'ouverture de la discussion du projet de loi relatif à l'organisation des conseils d'arrondissement et de département. M. de Formont, premier orateur inscrit, s'attache à montrer les dangers qu'il y auroit d'introduire le principe d'élection dans l'administration: c'est entrer dans les voies de la souveraineté du peuple, et dépasser la Charte, qui a restreint prudemment le droit d'élection à la nomination des députés, en traçant les limites du pouvoir populaire. Il prouve que la nomination des membres des conseils appartient au hei, d'après l'article 14 de la Charte. Ce pacte fondamental est donc un vain simulacre pour ceux qui l'invo¬ quent chaque jour avec tant d'enthousiasme réel ou feint.

M. Jacqueminot prétend que la France entière attend dans cette affaire l'accomplissement de ses voeux les plus chers et les plus légitimes; que c'est le complément des libertés publiques consacrées par la Charte toutefois il trouve que c'est le moins qu'on puisse faire que d'adopter tous les amendemens proposés par la commission, attendu que le projet présenté par le gouvernement est loin de satisfaire aux besoins de la nation,

M. de Corcelles s'élève aussi contre l'insuffisance du projet ministériel, et plaisante sur les alarmes et les craintes du parti royaliste et des hommes sages. M. Etienne ne conçoit pas pourquoi le gouvernement a présenté cette loi avec tant d'hésitation, et les soins qu'il a cherché à prendre pour y éloigner toute possibilité de contact avec la politique générale de l'Etat. Il ne pourra voter le projet, si l'on n'admet le principe de l'élection directe et les autres propositions de la commission.

M. Thouvenel est ensuite appelé à la tribune; mais il ne peut obtenir de silence ni d'attention. Il lit, au milieu du bruit, un discours dans lequel il cherche à combattre toutes les objections qui s'élèvent contre le système qu'on veut introduire, et conclut en faveur des amendemens de la commission.

Commission du budget de 1830 (recettes et dépenses): MM. de Larde melle, de Rambuteau, Pardessus, Dutertre, Mestadier, de Clarac, Ravez, de Berbis, C. Perrier, Laffite, de Lastours, Humann, Aug. Perrier, Girod (de l'Ain), Gautier, B. Delessert, de Cormenin, Lefebvre.

Commission du règlement définitif de l'exercice 1827 : MM. d'Augier, de Pina, de Curzay, Amat, de Bussières, du Theil, d'Andigné, de Saunac, Thénard, Bignon, Vassal, de Calmon, Dumas, Faure, de la Bourdonnaye, de Riberolles, Delaborde, Labbey de Pompières.

Commission de l'allocation des crédits supplémentaires de 1828: MM. de Lorgeril, Allent, de Janckowitz, Haas de Belfort, Lepelletier d'Aulnay, Sapey, Lucas, Lafont, Duvergier de Hauranne.

Ces trois commissions ont élu pour présidens, la première, M. Gautier; la seconde, M. de la Bourdonnaye, et la troisième, M. Allent, et pour secrétaires, MM. de Cormenin, Delaborde et Lepelletier d'Aulnay.

Pélerinage sentimental d'un poète.

Le fils de Napoléon a été dernièrement l'objet d'un pieux pélerinage. On ne sait quelle inspiration conduisit tout à coup vers lui un poète parisien que l'on ne croyoit pas si dévot. Quelques journaux ont publié cette anecdote; mais leur récit est plein d'inexactitudes, et nous sommes obligés de le rectifier.

Le poète ne fut point rebuté comme ils l'ont dit. Au contraire, il obtint gracieusement la permission d'exercer le genre de culte que notre célèbre M. Grégoire a si heureusement désigné sous le nom de basiléolatrie. Après qu'il eut offert ses premières adorations, et que le fils du dieu Mars fut parvenu à décoller ses pieds de la bouche qui les pressoit, voici de quelle manière on s'exprima de part et d'autre.

Le poète, tirant son portefeuille : Mon prince, ne craignez rien; ce ne sont pas des vers que je vous apporte. Quand je me rappelle tout ce qu'il en a été commandé et payé par votre auguste père, à l'occasion de votre naissance, je sens parfaitement que vous n'aurez pas tout lu à l'âge de trente ans; mais il doit y avoir sous ces trois cachets quelque chose de plus intéressant. Ceci vient de votre auguste père, et est resté en dépôt, suivant ses intentions, pour ne vous être remis qu'à l'âge où, Dieu merci, vous voilà parvenu.

Le duc Donnez, mon ami, donnez..... Ah! ah! ce sont des conseils politiques pour me guider. Voyons un peu..., Tenez, vous êtes en quelque sorte de la famille par vos bons sentimens, et par la nature de votre ambassade; écoutez cela. (Puis il lit tout haut ce qui suit):

« Si Dieu prête vie à mon héritier, et répugnance contre les Bourbons à mes fidèles sujets, voici une courte instruction qui pourra lui tenir leu d'expérience, jusqu'à ce qu'il ait eu le temps de faire connoissance luimême avec l'espèce d'hommes que je lui lèguc.

>>> La France est une nation vaine et folle par excellence. Il n'y a riety qu'on ne puisse faire d'elle avec de l'énergie et un chapeau à trois cornes bien enfoncé, mais malheur à ceux qui la gáteront par trop de foiblesse ou de bonté! Elle sera bientôt maîtresse chez eux, s'il n'y prennent garde; car elle veut être menée sévèrement, et sentir le pouvoir dans ses reins pour marcher droit. Si nous n'avons jamais eu de difficultés ensemble, c'est que je l'ai tenue bridée court, comme elle demandera toujours à l'être. Aussi, quoique je l'aie rudement brusquée pour la rompre au devoir et à l'obéissance, nous n'en étions pas plus mauvais amis.

>> Que mon successeur ne s'inquiète point de l'air de jactance et des bravades révolutionnaires auxquelles la France est revenue aussitôt qu'elle m'a vu le dos tourné cela ne signifie rien quand on la connoît; vingtquatre heures de ma vieille méthode en fervient l'affaire, et ce qui prouve qu'elle est excellente, c'est qu'on s'en trouve bien de part et d'autre. Quand je devins maître de ces gens-là, ils portoient la tête encore plus haute qu'à présent, et je ne m'en suis pas embarrassé : je les ai pris fiers et insolens au dernier point; je les ai laissés extrêmement souples et modestes je les ai pris bavards; je les ai rendus muets : je les ai pris avec

toute leur anarchie et tous leurs rêves de souveraineté ; rien de plus admirable que l'état d'obéissance et de raison où je les avois mis quand nous nous sommes quittés.

» S'il arrive par hasard que les poètes, les orateurs et les journalistes révolutionnaires reprennent le ton que j'avois eu soin de leur faire perdre, que mon héritier ne s'en effraie pas; c'est l'espèce de monde qu'on peut faire taire le plus aisément : j'ai vu la plupart de ces gens-là couchés devant moi à plat ventre, demandant pour toute liberté la permission de m'enfumer de leurs vers et de leur prose. Pour des hochets et de l'argent, ils seront toujours prêts à retomber la face contre terre. »

Le poète : C'est de quoi je ne doute nullement, et si vous connoissiez leurs mœurs comme moi, vous seriez de mon avis.

Le duc : En vérité, vous me surprenez; car, à les entendre, il me semble que j'y regarderois à deux fois pour passer auprès du Constitutionnel, du Courrier français ou du ci-devant Journal de l'empire, avec une cravache

à la main.

Le poëte: Avec tout ce qu'il vous plaira, Monseigneur; ne vous gênez pas le moins du monde : nous sommes prêts à tout recevoir et endurer de votre part. Songez donc qu'il n'est pas un de nous qui n'ait marché à quatre pattes devant votre auguste père, et qui ne souhaite de recommen→ cer devant son auguste fils.

Le duc : Mais, dans ce cas, pourquoi personne ne s'avise-t-il actuellement de vous remettre tous à la raison, plutôt que de vous laisser troubler l'Etat comme vous le faites à la journée?

Le poète : Ah! mon prince, la chose est ici bien différente! Nous avons ce qu'on appelle des maîtres légitimes, que le temps, le devoir et la vieille sagesse gothique de nos ancêtres nous ont imposés: nous nous sommes déclarés en état de répugnance contre eux, et nous ne voulons pas en avoir le démenti. C'étoit pour nous débarrasser de Dieu et d'eux que la révolution a commencé, et il faut absolument qu'elle s'achève. Que les destins s'ac2 complissent! comme disoit souvent votre auguste père.

Le duc Eh bien! mon ami, je réfléchirai sur tout cela. Je suis bien aise de savoir que la raison murit et s'éclaire dans votre pays allez la retrouver, et donnez-moi souvent de ses nouvelles.

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Tels sons les détails que nous avons reçus de notre côté, au sujet du poétique pélerinage dont les journaux ont parlé d'une autre manière. Comme cependant nous n'étions pas du voyage, nous n'en pouvons garantir pour le moment que la partie sentimentale.

B.

Quelques Observations sur les doctrines du jour, par M. Lanthois (1).

J'essaierai, dit l'auteur, de porter la lumière dans les ténèbres que la France libérale a épaissies autour de nous, et de simplifier des questions qui ne sont complexes qu'en apparence. Ce qu'il y a de pire, ajoute-t-il

(1) In-8°. A Paris, chez Gautier - Laguionie, Hôtel des Fermes, et au bureau de ce journal.

dans son introduction, c'est l'éternel mensonge des docteurs du parti : parlent-ils de tolérance, ils pensent à l'oppression du catholicisme; se disentils les amis du Roi, ils méditent l'abaissement du trône; proclament-ils la liberté, ils rêvent le despotisme.

:

Ces Observations se partagent en plusieurs sujets ou chapitres; les titres en indiqueront l'objet des royalistes et des constitutionnels, du Roi et de la royauté en France, de la révolution (car il n'y en a qu'une), du patriarche de la révolution, d'une bizarrerie de la révolution, de la jeunesse dans le siècle des lumières, du régime délibératif et du régime consultatif, des deux routes de la révolution et de sa tendance unique, des influences libérales sur la littérature, de la force réelle des libéraux, de l'autorité, de la modération.

Ces chapitres sont généralement assez courts; l'auteur énonce ses pensées et laisse les développemens à la sagacité des lecteurs. Il a bien étudié le parti qu'il signale, il en apprécie avec justice le langage, les moyens et le but; il se moque avec esprit de cette manie politique qui absorbe aujourd'hui la plupart des hommes; enfin, il juge avec sagesse notre situation, nos travers, nos ridicules, nos contradictions, nos inconséquences. Cette brochure, si elle est de M. Lanthois, fait honneur à son jugement, à sa pénétration, et surtout à son dévoùment à une cause qui semble s'affoiblir chaque jour.

Etude du chrétien, ou le Disciple à la suite de son divin maître dans le jardin des Olives, devant les juges de Jérusalem et sur le Calvaire (1).

Cet ouvrage, qui paroît destiné à fournir une suite de lectures pour le carême, embrasse toute l'histoire de la Passion depuis le jardin des Oliviers jusqu'à la résurrection et à l'ascension du Sauveur. L'auteur ne s'attache pas précisément à rapporter toutes les circonstances de la Passion, qu'il suppose bien connues; il cherche plutôt à en tirer des réflexions pieuses, et à offrir au lecteur des considérations solides et instructives. Il nous paroît avoir atteint son but. Ses lectures sont bien écrites, elles sont nourries de passages de l'Ecriture, et annoncent un esprit judicieux, éclairé et accoutumé à réfléchir sur les vérités de la religion et sur les obligations du chrétien.

Il y a quarante lectures en tout, et chacune est partagée en différentes considérations qui offrent des points de repos au lecteur. Il y a quelques lectures un peu plus longues, et que l'on pourroit diviser en deux, de sorte que l'on auroit un sujet de lecture pour chaque jour de carême. Tout ce que nous avons vu de l'ouvrage nous donne lieu de croire qu'il sera bien accueilli du public, et qu'il pourra contribuer à ranimer la foi des uns et à toucher Ja piété des autres.

(1) Un vol. in-12, prix, 2 fr. et 3 fr. franc de port. A Paris et à Lyon, chez Périsse frères, et au bureau de ce journal.

Le Gérant, ADRIEN LE CLERE.

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