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en avait réglé l'épaisseur dans la supposition que la pression intérieure ne serait jamais équivalente au poids de deux atmosphères. — Le ministre de l'intérieur adresse à l'Académie une lettre que M. Allais, secrétaire de l'académie royale de France à Rome, lui a écrite concernant la quadrature du cercle. M. Peron, ex-capitaine de long cours de la marine commerçante, annonce qu'il a découvert un nouvel usage de l'instrument appelé globe terrestre (MM. de Rossel et Burckhardt, comres.). - M. Prony fait, au nom d'une commission, un rapport sur le fusil de M. Faure père, qu'on amorce avec de la poudre de muriate suroxigéné de potasse. Voici un extrait des conclusions. « Le fusit à percussion de M. Faure n'a pas les inconvéniens de ceux qui ont été précédemment inventés, et notamment de celui d'un arquebusier anglais. Son magasin de 120 amorces, éloigné du foyer d'inflammation où la poudre prend feu, n'a rien à craindre ni de la fumée, ni de la chaleur. De plus, son mécanisme est combiné de manière qu'on peut, à volonté, substituer une platine à pierre à la platine à percussion, sans rien changer au reste du fusil; tranformation qui ne peut être opérée sur les autres fusils à percussion. Les commissaires pensent que les améliorations de M. Faure méritent l'approbation de l'Académie. » M. Cauchy donne lecture d'un mémoire qui a pour objet d'exposer divers théorèmes analogues à ceux qui ont été donnés par l'auteur de la Théorie analytique de la chaleur, et qui servent à intégrer les équations propres à cette théorie. On lit un mémoire de M. Gaillon, de Dieppe, intitulé: Expériences microscopiques et physiologiques sur unc espèce de conferve marine, production animalisée, et réflexions sur plusieurs autres espèces de productions filamenteuses analogues, considérées jusqu'alors comme végétales (MM. Bosc, Duméril et Savigny, commissaires).

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Du 28. MM. Dietz, Holtz et Huk, fabricans de machines, dites roues à vapeur, prient l'Académie de prendre connaissance de la machine qui est en activité dans leurs ateliers (MM. Prony, Arago, Girard, Dupin et Dulong, commissaires). M. Payen annonce avoir reconnu que les pétales des dahlias contiennent une matière colorante très-sensible aux acides et aux alcalis. M. Bowdich adresse des dessins de différens animaux qu'il a observés dans l'île de Madère, et qu'il désire faire déposer dans la bibliothèque de l'Institut. Un double de ces dessins sera déposé au local de la Société royale, à Londres (MM. Cuvier et Duméril, commissaires). M. Magendie rend un compte verbal de l'ouvrage de M. Girard sur les calculs du cheval. – M. Gay-Lussac lit un mémoire de M. le docteur Liebig sur l'argent et le mercure fulminant (MM. Gay-Lussac et Dulong, commissaires). Il résulte du rap

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port verbal de M. Ampère, que l'Académie ne saurait accorder aucune attention à l'ouvrage de Mme Dubreuil, intitulé: Nouveau système do multiplication des fractions, et d'extraction des racines carrées, cubiques, en opposition avec le système admis. - M. Ampère communique de nouveaux résultats, que M. Savary déduit de ses formules, et qui conduisent à la détermination de l'action exercée par des aimans cylindriques pliés en arc de cercle, tant sur un élément de conducteur voltaïque que sur un cylindre électro-dynamique ou un aimant cylindrique rectiligne. M. Pelletan (Gabriel) lit un mémoire sur une nouvelle méthode d'employer le nitrate d'argent comme caustique (MM. Deyeux et Duméril, commissaires). M. Julia lit un mémoire sur la fermentation vineuse (MM. Chaptal, d'Arcet et Bulong, commissaires). A. M-T. -Académie française.-Séance du 5 août.-M. de Jouy a lu sa tragédie de Julien dans les Gaules, en cinq actes et en vers.

·Séance publique annuelle du 25 août 1823, présidée par M. de FRAYSSINOUS, évêque d'Hermopolis. Les concours de l'Académie française offrent depuis quelques années un heureux choix de sujets qui mérite d'être remarqué. On sait que le prix d'éloquence, fondé primitivement par le célèbre Balzac, devait être et fut long-tems une matière de piété ou de morale, et que le prix de poésie, fondé par M. de ClermontTonnerre, un des quarante, devait avoir pour objet l'éloge de Louis XIV. On avait déjà senti plusieurs fois le besoin de rajeunir ces exercices littéraires, lorsque l'Académie française disparut dans la tourmente de la révolution. Depuis la réorganisation de cette Société célèbre, les concours ont eu constamment pour but d'éclairer l'opinion, de suivre le progrès des lumières, de propager les institutions utiles qui se rattachent à la liberté publique et au bonheur du peuple; en un mot, ces concours n'ont plus été bornés à l'éloge d'un seul, ils ont embrassé tous les objets qui peuvent offrir des leçons ou des exemples profitables. C'est ainsi, que, tout récemment encore, on a vu l'Académie française demander aux concurrens de célébrer l'Institution du jury en France et les bienfaits de l'enseignement mutuel. Cette année, elle avait proposée l'abolition de la traite des nègres.

Depuis long-tems, la courageuse indignation des philosophes modernes avait reclamé, au nom de la miséricorde et de la pitié, contre ce trafic immoral et barbare de l'espèce humaine, condamné par la nature et par la religion, et que la vraie politique avait intérêt à réprouver. Enfin, l'abolition de cet infâme commerce a été proclamée par les princes de l'Europe, et c'est cette convention de justice et d'humanité que

l'Académie française a cru devoir proposer pour sujet de son concours de poésie.

⚫ Sans doute, comme l'a observé M. le secrétaire perpétuel, dans son rapport plein de vues nobles et profondes, exprimées avec une éloquence remarquable; sans doute, ce sujet présentait des inconvéniens et de grandes difficultés. On pouvait craindre que la juste indignation qu'excitent les crimes de la traite, et les malheurs qui en sont la conséquence inévitable, n'inspirât aux concurrens des lieux communs et des déclamations que la raison et le goût eussent également désavoués. Mais cette crainte pouvait-elle arrêter l'Académie? La littérature a ses convenances : l'art de les connaître, le mérite de les observer, font une des conditions du talent appelé à s'exercer sur de hautes questions de morale ou de politique; et, s'il arrivait une époque où la tendance des esprits fît présumer que cet art des convenances fût moins connu et moins observé, il serait sans doute également utile pour les lettres et honorable pour l'Académie française, qu'elle préférât ces sortes de sujets qui, pour être traités avec un succès durable, exigent le talent, disons, le courage de la modération. Ce goût moral qui devine les convenances, ce mérite de régler ses pensées et ses expressions n'est pas assez commun pour que l'Académie doive négliger les occasions de l'exciter, de l'applaudir et de le récompenser. »

« Une des principales difficultés du sujet, a dit aussi M. Raynouard, c'était d'en renfermer les vastes détails dans un cadre heureux, d'établir et de graduer habilement l'intérêt que ce sujet excite à un haut degré, quand on le considère tour-à-tour sous le rapport des principes de la religion; de la morale et de l'humanité, et qu'il exciterait encore très-vivement par le seul tableau des infortunes qui sont le résultat déplorable de la violation de ces principes. En général, selon l'expression de M. le secrétaire perpétuel, les concurrens ne se sont pas assez attachés à la partie philosophique et morale du sujet. Il était sans doute convenable de faire ressortir la manière coupable et barbare dont la traite s'exécute, les tourmens des victimes, les maux de leur esclavage, dernier résultat de ce trafic honteux; mais il n'était pas moins nécessaire, et surtout il était plus intéressant de consacrer en beaux vers ces maximes généreuses, ces principes sacrés qui ont fait proscrire cet odieux commerce de l'espèce humaine. Il eût été beau de prouver que, même en admettant que les effets de la traite fussent moins cruels pour ses victimes, elle serait encore, aux yeux de la religion et de la philosophie, un véritable attentat envers le genre humain. »

T: XIX. Aout 1823.

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Nous ne suivrons pas plus long-tems M. Raynouard, dont le rapport, justement applaudi, a offert tour-à-tour des considérations historiques du plus grand intérêt, et un modèle parfait de cette critique judicieuse et éclairée que le goût et le savoir peuvent seuls inspirer au talent. Hâtonsnous de parler de la pièce couronnée, qui, lue par M. Picard, a été souvent interrompue par de vifs applaudissemens. L'auteur, M. Chauvet, que nous nous honorons de compter parmi les collaborateurs de la Revue, á su éviter avec beaucoup d'art les nombreux écueils du sujet. Un cadre ingénieux qui, en fixant l'intérêt sur un petit nombre de personnages, les présente dramatiquement dans un épisode bien lié au sujet ; un style brillant et soutenu, des images poétiques, une versification harmonieuse et savante, qui exprime avec un égal succès les grandes pensées et les détails les plus rebelles à la poésie, telles sont les qualités qui distinguent cette composition, où l'on remarque aussi un heureux emploi des couleurs locales. Après une introduction pleine de verve et de mouvement, l'auteur continue ainsi :

Voyez-vous ce vaisseau qui sur les mers profondes
Vogue du Sénégal vers ces îles fécondes,

Où pour nous des roseaux coule un miel savoureux ?
Il emporte à l'exil des captifs malheureux.
Dans ce cachot flottant, l'avarice inhumaine,

Plus serrés qu'au tombeau, les presse et les enchaîne;
L'air mugit, la mer s'enfle, et leurs membres heurtés

Sur le bois déchirant roulent ensanglantés.

Un vertige inconnu, triste enfant des tempêtes,

Promène ses douleurs dans leurs flancs, dans leurs têtes;

Et l'amour du pays, en fléau transformé,

Fièvre avide, s'attache à leur sein consumé.

A chaque instant, la mort au fond de cet abîme
Descend silencieuse, et marque sa victime.

Ah! ne les plaignez pas! Dans leur adversité,

La mort, c'est l'espérance, et c'est la liberté.

Ce tableau réveille l'avare sollicitude du négrier; il rend, pour quelques instans, à ces malheureuses victimes la lumière du jour.

Il voudrait par les jeux ranimer leur tristesse;

Mais, ces infortunés que la douleur oppresse

Au doux bruit des concerts qui charmaient leurs beaux jours,

Sur leur chaine étendus, restent mucts et sourds;

Alors, un fouet cruel, que la fureur déploie,

Inflige à leur misère et la danse et la joie.

Cependant, une jeune africaine a fixé les yeux du farouche Belmar; c'est le nom du capitaine.

Les captives pleuraient. Calme dans sa douleur,
Elle seule opposait le courage au malheur.....
Et l'héroïque orgueil qui réprimait ses larmes,
De sa beauté sauvage ennoblissait les charmes.

L'auteur poursuit :

O vous, dont les attraits, brillans comme les fleurs,
De la rose à l'albâtre unissent les couleurs,
Blanches filles d'Europe, excusez mon langage:
L'ébène pâlirait auprès de son visage;

Mais qu'importe qu'il soit ou d'ébène, ou de lys?
D'un sentiment divin tous ses traits embellis,
Révèlent un cœur tendre; en ses yeux, en son âme,
L'astre qui la brunit a répandu sa flamme.
Jadis le voyageur, à l'aspect du palmier
Qui signalait au loin son chaume hospitalier,
Oubliait le désert et la soif importune.

Ce généreux penchant qui charmait sa fortune
La suit dans sa misère, et pour d'autres malheurs
Sa pitié trouve encor des secours et des pleurs.
Oui, ce don d'alléger les peines qu'on partage,
De grâce et de pudeur ce touchant assemblage,
Cet instinct des bienfaits par nos maux excité,

Femmes, c'est votre empire, et voilà la beauté.

Ce morceau, véritablement neuf en poésie et si remarquable par la fraîcheur toute gracieuse du coloris, a produit une vive sensation. L'impétueux Belmar, épris de la jeune captive, l'obsède, essaie tour-à-tour, mais en vain, les présens, la douceur, les menaces. Néali oppose un dédaigneux silence à ces fougueux transports.

Vile esclave, dit-il, te verrai-je à la fois
Repousser mes bienfaits, insulter à mes droits?
Un blanc souffrira-t-il ton mépris ou ta haine?
Tes droits et tes bienfaits! lui répond l'Africaine,
Où sont-ils ? est-ce donc mon pays désolé?
Mon époux malheureux, de tes fers accablé ?
Nos tourmens, notre exil sur un lointain rivage?

Et mon sein désormais fécond pour l'esclavage?

C'est dans ce discours, un peu trop long sans doute parce qu'il man

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