Page images
PDF
EPUB

point obligé d'obtempérer au consentement de prorogation.-25. Les juges de paix exercent une juridiction extraordinaire, mais, en matière personnelle, ils ne sont pas des juges d'exception. - 26. Prorogation légale; demande en garantie, délai pour la former devant le juge de paix.-27. Deux espèces de garanties; en matière réelle, c'est sur le garant que repose tout le poids de la défense; secùs, en matière personnelle.

1. LA compétence d'un juge est le droit qu'il a de connaître des affaires et de procéder aux actes que la loi lui attribue.

La compétence des juges de paix est judiciaire ou extrajudiciaire, civile ou criminelle; comme juges civils, ils exercent une juridiction extraordinaire, leur compétence étant bornée aux affaires dont la connaissance leur est dévolue par la loi du 25 mai 1838 et d'autres lois spéciales. Comme juges criminels, les juges de paix tiennent le tribunal de simple police. Indépendamment de leur juridiction contentieuse en matière civile et de police, ils sont chargés de procéder à une multitude d'actes extrajudiciaires.

Nous allons parcourir les différentes matières qui peuvent être l'objet de la compétence soit judiciaire, soit extrajudiciaire des juges de paix.

S Ier.

De la compétence extrajudiciaire.

Ce traité étant principalement destiné à la juridiction contentieuse des juges de paix, nous devons nous borner à indiquer les matières qui constituent leur compétence extrajudiciaire.

Cette compétence, ou juridiction non contentieuse, consiste 1° à concilier les différends dont le jugement est réservé aux tribunaux civils ordinaires; 2° à procéder à divers actes dont la loi leur attribue la confection, ou pour lesquels elle exige leur assistance.

Conciliation.

2. La conciliation est un acte de cette juridiction que l'on

appelle gracieuse; le juge de paix étant appelé à entendre les parties, non pour les juger, mais pour chercher à les mettre d'accord, pour dresser procès-verbal, soit de leur arrangement, soit du compromis, s'il parvient à les faire transiger ou à leur faire consentir un arbitrage.

• Que cette idée était philanthropique et salutaire, de n'ou, vrir l'accès des tribunaux qu'après l'épuisement de toutes ⚫ les voies de conciliation? Pourquoi faut-il qu'une si belle ⚫ institution n'ait pas produit tout le bien qu'on devait en › attendre et que ses effets aient si peu répondu aux espé›rances? Pourquoi faut-il que le mal ait été assez grand ou du › moins le bien assez faible, pour que même de bons esprits ⚫ proposent aujourd'hui la suppression des tentatives de conciliation?»

Ainsi s'exprimait l'orateur du gouvernement, en proposant le liv. 2 du Code de procédure; et depuis la publication de ce Code, qui dispense de la tentative de conciliation une multitude de demandes, cette institution n'a fait que dégénérer, n'étant plus guère considérée, surtout dans les villes, que comme une vaine formalité qui ne sert qu'à multiplier les frais et à retarder l'expédition des affaires.

Cependant, dans les campagnes, le préliminaire de conciliation a souvent produit et peut produire encore les plus heureux effets. De quelle influence la parole et les efforts d'un juge de paix ne doivent-ils pas être sur l'esprit des habitants, quand cette fonction est remplie par un homme dont la droiture, la justesse d'esprit, les mœurs douces et conciliantes appellent l'estime générale, et qui, doué d'une capacité suffisante pour apprécier les droits de ceux qu'il est chargé de concilier, se défiera néanmoins de ses propres lumières, si l'affaire lui paraît présenter de grandes difficultés, et au lieu de les trancher arbitrairement, en ce cas, n'usera de son ascendant, que pour amener les parties à s'en rapporter aux lumières de conseils éclairés, ou à terminer le différend par la voie de l'arbitrage? Car s'il est des personnes peu disposées à se rendre justice, et à l'égard desquelles le recours aux tribunaux est la seule voie praticable, il en est aussi qui, animées d'un égal désir de se donner réciproquement tout ce qui est juste, ne sont divisées que

par l'incertitude et l'ignorance de leurs droits, ou auxquelles l'intérêt personnel fait illusion (ce qui est si ordinaire parmi les gens même les plus probes): alors le jugement par arbitres est le moyen de terminer la contestation, le plus promptement, à moins de frais possible, et d'éviter ainsi des débats judiciaires dont l'éclat est souvent fâcheux. Mais si ce moyen présente des avantages, il a aussi des inconvénients : un arbitrage confié à des ignorants peut multiplier les difficultés, au lieu de les aplanir; le devoir d'un juge de paix est donc encore d'éclairer les parties sur le choix de leurs arbitres.

Voilà tout ce que nous croyons devoir dire sur la conciliation exigée pour certaines affaires, et dont la tentative, loin d'être prohibée, serait souvent utile pour plusieurs de celles qui en sont dispensées par la loi. En traitant des prescriptions, section V, § 3, no 13, on examinera la question de savoir si, dans ce dernier cas, la citation est interruptive. On verra aussi, section IV, § 1er, no 3, quel est le degré d'authenticité des conventions consignées dans un procès-verbal du bureau de paix, et § 4 de la même section, no 29, si le juge de paix ne doit pas insérer, dans ce procès-verbal, les aveux et déclarations des parties qui ne se sont pas conciliées.

Attributions extrajudiciaires.

3. Ces attributions sont déterminées tant par les dispositions de nos Codes, que par des lois particulières.

Code civil: Les juges de paix sont chargés de convoquer et présider le conseil de famille dans tous les cas où la loi exige cette convocation, dans l'intérêt des mineurs, absents ou interdits (art. 142, 160, 175, 318, 393, 396, 406, 417, 420, 431, 480, 505, 511 et 2141); de même pour le sourd et muet, afin d'accepter une donation (936); pour la nomination des curateurs aux substitutions (1055 et 1056); pour réduire l'hypothèque générale de la femme mariée (2144), etc., etc.— Le juge de paix est chargé de recevoir le serment de l'expert qui estime les meubles appartenant à l'enfant mineur et que les père et mère préfèrent conserver en nature (453); - de dresser les actes d'émancipation, d'adoption, de tutelle officieuse (353,

363, 477 et 478); — de délivrer des actes de notoriété (70, 71, 155); — d'assister à l'inventaire du mobilier de l'absent (126); ― de rédiger les testaments dans un lieu avec lequel toute communication serait interceptée, à cause de la peste ou autre maladie contagieuse (985, 986); de dresser procès-verbal du refus ou retardement de la transcription des actes de mutation, de l'inscription des droits hypothécaires, de la délivrance des certificats requis du conservateur des hypothèques (2199).

-

Code de procédure: L'art. 571 charge le juge de paix de recevoir les déclarations des tiers saisis, domiciliés dans son ressort et hors de la ville où siège le tribunal. - D'après les art. 587, 591 et 594, il doit assister à l'ouverture des portes, à l'effet d'opérer une saisie-exécution, apposer le scellé, s'il en est requis, sur les papiers trouvés dans les pièces ou meubles ainsi ouverts, et établir un gérant à l'exploitation, en cas de saisie d'animaux ou d'ustensiles destinés à la culture. L'art. 781 le charge d'ordonner, en cas de contrainte par corps, l'arrestation du débiteur dans une maison quelconque, en s'y transportant avec l'officier ministériel. — C'est à lui que les art. 907 et suivants confient le soin d'apposer et de lever les scellés. Enfin d'après les art. 255, 305, 326 et 1035, le juge de paix peut être délégué, par les tribunaux, pour procéder à une enquête, à un interrogatoire sur faits et articles, pour recevoir le serment déféré aux parties, celui des experts, et pour procéder à toutes autres opérations quelconques (1).

[ocr errors]

Code de commerce: A défaut du président du tribunal, c'est au juge de paix à nommer les experts, pour constater, en cas de refus ou de contestation, l'état des objets transportés par un voiturier (art. 106). A l'égard des navires, il peut, dans les ports où il n'y a pas de tribunal de commerce, dresser, en exécution de l'art. 225, les procès-verbaux qu'il est obligé d'en

-

(1) Souvent aussi le juge de paix est délégué par l'autorité administrative, pour procéder aux enquêtes de commodo et incommodo. Voyez dans mon Code forestier, tom. 1, pag. 284, quelle est la forme des enquêtes de cette

nature.

voyer, dans les 24 heures, au président du tribunal de commerce le plus voisin, et le dépôt en est fait au greffe de ce tribunal (ordonnance du 1er novembre 1826). D'après l'article 234, le juge de paix peut autoriser le capitaine, s'il y a nécessité de radoub ou d'achat de victuailles, à emprunter sur le corps du vaisseau, ou à vendre des marchandises, jusqu'à concurrence de la somme que les besoins constatés exigent. Les art. 243, 245 et 414 le chargent aussi, dans les lieux où il n'y a pas de tribunal de commerce, de recevoir, soit le rapport du capitaine qui a été contraint d'abandonner son navire, rapport qui doit être envoyé sans délai au président du tribunal de commerce le plus voisin, soit la déclaration des causes qui ont obligé le capitaine à relâcher dans un port de France, et nommer des experts, afin de constater l'état des pertes et dommages, dans le lieu du déchargement du navire. — Enfin c'est le juge de paix qui doit, en cas de faillite d'un négociant, apposer les scellés, les lever sur la réquisition des syndics, assister à l'inventaire et le signer à chaque vacation (art. 449, 450, 456 et 486).

Code forestier: Les art. 161, 168 et 169 de ce Code chargent le juge de paix d'assister à l'introduction, dans l'intérieur des maisons et enclos, des gardes champêtres et forestiers qui sont à la recherche d'un délit; - de donner main-levée provisoire des bestiaux et autres objets saisis, à la charge du paiement des frais de séquestre et moyennant caution; - d'ordonner la vente des bestiaux saisis qui n'ont pas été réclamés dans les cinq jours du séquestre, ou pour lesquels il n'a pas été fourni bonne caution, et de taxer, en ce cas, les frais de séquestre et de vente. D'après l'art. 165, les rapports des gardes forestiers doivent être affirmés par-devant le juge de paix du canton ou l'un de ses suppléants, ou par-devant le maire ou l'adjoint soit de la commune de la résidence du garde, soit de celle où le délit a été commis ou constaté. —L'art. 44 du Code fluvial porte la même disposition.

4. Des lois spéciales ont accordé aux juges de paix une foule d'autres attributions.

« PreviousContinue »