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Quand la charge fembloit plus confidérable, quand on penfoit qu'elle devoit être perpétuelle, il falloit avoir recours à toute forte de reffources pour y fatisfaire.

On fentoit bien qu'on ne pouvoit pas furcharger une feule branche d'impofitions déjà courbée fons le poids de fes triftes produits.

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On a fouvent mal entendu le principe bien jufte & bien fenfible qui rapproche toutes les impofitions, & qui fait fentir à quel point les droits fur les confommations retombent & pèsent fur les productions de la terre.

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C'eft une obfervation toujours jufte. Ce n'eft pas toujours un principe d'administration. Tous les impôts retombent fur les terres. Ils retombent, par les rapports d'un commerce univerfel, fur les terres de toutes les Provinces & de tous les pays. Les droits perçus à Marseille font payés par les Fabricans du Languedoc, par les propriétaires des terres du Rouflillon, par ceux même de l'Espagne, de l'Italie & du Levant.

Voulez-vous imposer fur le territoire de Marfeilie des droits payés fur les denrées qu'il ne produit pas, & fur les étrangers ou nationaux qui n'en font pas les habitans & les poffeffeurs? Les Etrangers, les voyageurs, ceux qui fai

foient quelque féjour dans les pays de Gabelle, ceux qui n'y poffédoient point de biens-fonds, payoient les droits du fel comme les possesseurs des terres & les citoyens domiciliés.

Voulez vous faire payer aux propriétaires des biens-fonds dans chaque province, des droits qu'ils n'ont pas payés, & qu'ils ne peuvent pas acquitter ?

On fent bien qu'il ne feroit poffible de rejeter toutes les impofitions fur les terres, que dans un État dont les charges & les impofitions feroient modiques, & dont le commerce ne s'étendroit pas au-delà de fon territoire.

Un tel État ne peut pas exifter dans l'Europe

& dans le dix-huitième fiécle.

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On a fenti l'injuftice & les difficultés d'une impofition purement territoriale. On vous propofe de répartir la contribution par forme d'addition proportionnelle à toutes les impofitions réelles ou perfonnelles, & aux droits d'entrées des villes tant de ceux qui appartiennent à la Nation, que de ceux qui fe lèvent au profit des villes elles-mêmes : ainfi, la contribution feroit payée par toutes les claffes des propriétaires & des capitaliftes domiciliés ; & dans les villes où des octrois font établis, elle feroit payée par tous les confommateurs.

Il n'y a pas par-tout des droits d'octrois. Il n'y en a point dans les villages, dans les gros bourgs & dans la plupart des Villes. Ainfi les confommations ne feroient impofées que dans un petit nombre de villes.

Ainfi par-tout ailleurs les non-domiciliés qui payoient les droits du fel fur leur consommation, feroient affranchis de la contribution.

Ainfi le foulagement qui devoit réfulter de la contribution des octrois, n'exifteroit pas pour la plus grande partie des habitans.

Il faudroit recourir aux impofitions perfonnelles & réelles par-tout où il n'y a point d'octroi.

Il eft des Pays de Gabelle où les impofitions générales ont été plus ménagées que la Taille.

Vous chargez la Taille dans la même proportion qui fufcitoit les plaintes du peuple.

Il est des Provinces où les propriétés font infiniment divifées, où chaque habitant, pour ainsi dire, a fa propriété.

L'Impôt fur les terres pefera fur les petits Propriétaires, & fur les Habitans des campagnes. C'est dans les mêmes Provinces où la Gabelle eft établie la Taille eft plus forte.

que

Vous cumulez deux impôts, dont chacun étoit à fon dernier terme.

Il est une proportion dans laquelle les Propriétaires de biens-fonds paieroient plus pour le remplacement qu'ils ne payoient pour la Gabelle: c'est pour éviter cette proportion, qu'on propose la contribution fur les impofitions

de

partager perfonnelles & réelles.

Mais fi la Taille territoriale eft exceffive comment pouvez-vous ajouter quelque chofe à fon excès ?

Vous n'avez pas établi la difproportion; vous la fuivez, & vous la rendez plus dure, par un accroiffement d'impôt, que ceux qui l'ont établie.

Il ne faut pas que la fuppreffion de la Gabelle foit odieufe comme la Gabelle même.

Il faut obferver que les Propriétaires des biens -fonds paieront également toutes les contributions fur les terres, fur les facultés perfonnelles & fur les confommations : c'est une obfervation toujours la même pour tous les genres d'impofitions. Les Propriétaires de biends-fonds payent feuls les impofitions territoriales, & partagent

toutes les autres.

Mais c'est auffi par cette raison qu'il faudroit connoître l'état des charges des propriétés foncières avant de les accroître.

C'est par cette raifon qu'une loi générale est fâcheufe dans l'ordre des impofitions avant qu'on ait mieux connu les valeurs territoriales & les impofitions réelles des différentes Provinces.

C'est par cette raison que j'ai toujours pensé qu'on ne pouvoit rien faire de jufte & d'utile avant de confulter les Départemens.

La Gabelle eft abolie; laiffez aux Départemens l'obligation & le foin de la remplacer.

Les Départemens choifiront le genre d'im pofition qui forme dans leur état actuel une charge moins onéreuse.

Vous ne pouvez pas diftinguer les Provinces; & vous prononcez un Décret abfolu dont vous ignorez les effets!

Laiffez le choix des moyens aux Adminiftrations locales; vous ne doutez pas qu'elles ne foulagent les claffes fouffrantes. Elles ne pourront pas les foulager, fi vous prononcez un Décret qui les impofe.

Vous ne leur donnez pas le droit de s'af franchir de la contribution, quand vous leur laiffez le choix des moyens de contribuer ; ce n'eft pas la liberté de ne pas payer que vous leur donnez, c'eft l'affurance du paiement que vous vous donnez à vous-mêmes.

יך

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