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No. 55. (17)

18 sept. 1790

JOURNAL DES DÉPARTEMENTS, DISTRICTS ET MUNICIPALITÉS

DE LA CI-DEV. PROVINCE DE BRETAGNE;

Par une Société de Patriotes.

BULLETIN

DE LA CORRESPONDANCE DE RENNES.

Séance du 13 septembre 1790.

M. Lambert, banquier, a adressé un plan de liquidation de la dette publique qui a été renvoyé au comité de liquidation.

M. Salmon a dit qu'il regnoit à Orléans & dans les paroisses circonvoisines une fermentation considérable dont l'enlevement des grains est le prétexte. Le comité des recherches a reçu différentes lettres à ce sujet, dans lesquels on ne voit pas des faits bien précis.

L'assemblée a renvoyé le tout à ce comité réuni à celui d'agriculture, & a chargé son président d'écrire à Orléans pour calmer les esprits.

M. Antoine a donné lecture du procès-verbal de la dernière séance.

M. de Rostaing a annoncé que le comité militaire commenceroit demain son rapport sur la discipline, & successivement sur les autres parties de l'organisation militaire.

Vous avez ordonné, a dit M. d'André, de procéder à l'organisation des tribunaux de justice; & il n'y a point encore d'accusateurs publics; on pourra donc commettre impunément en leur présence toutes sortes B. tom. VII. J. tom. II. Abonnement de sept. 16

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pour

de délits. De plus, vous n'avez point pris de mesures faire parvenir aux nouveaux tribunaux les procédures criminelles qu'ils auront à juger, comme ayant pris naissance sur leur territoire. Je demande qu'il soit ordonné au comité de constitution de vous présenter, lundi prochain, ces deux parties de l'ordre judiciaire. Cette motion a été décrétée aussi-tôt.

M. Goupi. Il est instant de s'occuper du décret sur les chasses du roi, dont le projet vous a été distribué au nom des comités des domaines & de féodalité réunis. Dans le grand parc de Versailles, vous avez suspendu jusqu'au 15 de ce mois le droit des propriétaires de chasser sur leur terrein, & nous voici déjà au 13; il n'y a donc pas un instant à perdre pour rendre le décret & le sanctionner.

Vous nous avez aussi chargé de vous faire un rapport sur les terres & châteaux que le roi se réserve; mais l'empressement que nous avons mis à vous présenter celui-ci, ne nous a pas permis d'achever le second. Nous ne tarderons pas désormais.

Après une première lecture, la discussion s'est ouverte sur le projet de décret. M. Douchy a dit : le propriétaire voisin des domaines du roi est aussi bien possesseur de son champ que l'habitant des montagnes de l'Auvergne. Je demande les deux comités nous présentent des loix générales & non particulières. La justice est lézée par leur projet de décret.

que

M. Lanjuinais : J'avois dessein de demander la question préalable sur les cinq derniers articles du projet de décret.... Je suis bien aise qu'un de mes collégues m'ait prévenu, pour nous rappeller le premier aux intentions connues du roi, & aux principes de la constitution. J'adopterai volontiers les quatre premiers articles du projet; mais je serois bien fàché qu'on ne décrétât point le quatrième, qui interdit la chasse dans les parcs royaux pour deux ans ceux qui y sont propriétaires, au moins les jours où le Roi chassera en personne. Il n'y a point de François qui puisse rejetter cette disposition puisqu'elle est commandée non-seulement non-seulement par les égards qui sont dus au Roi mais encore par l'empresse

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ment qu'on doit avoir pour écarter tout ce qui pourroit mettre en danger une vie qui nous est si chère. Mais après cet article, il faut vous arrêter la loi spéciale est finie; vous ne pouvez rien décréter de ce qui suit, sans méconnoître la constitution qui pros crit tout privilège dans l'ordre de la société privée la loi qui établit égalité de peines pour le même genre de délit, le vœu du prince qui vous demande que ses plaisirs ne soient à charge à personne.

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Eh! pourquoi, s'il s'agit d'un délit de chasse sur une terre nationale réservée au roi, doubler la peine pécuniaire, trentupler celle de la prison pour défaut de paiement de la première ? Que le terrein soit affecté à la jouissance du roi ; le délit n'en est pas plus grave: c'est une violation de propriété,, ce n'est rien de plus. Le roi, comme propriétaire ou usufruitier d'un terrein, ne peut avoir aucun avantage au-dessus des autres citoyens; il n'y a rien de royal dans sa jouissance; c'est l'acte d'un particulier : donc point de diversité de peine.

On a eu tort de vous dire la loi du 21 avril ne que pouvoit convenir pour la violation d'une clôture. Ce cas est littéralement prévu dans cette loi, & puni d'une peine pécuniaire plus grave que dans les cas ordinaires ; mais la peine de prison reste la même : 24 heures pour la première fois. Et ici, le temps de la prison seroit d'un mois ! Vous n'adopterez point cette injustice.

Pourquoi donner, quand il s'agit du roi, la compétence aux juges de district, & la laisser aux municipalités, quand il s'agit du terrein des particuliers? Pourquoi des juges de district, quand il ne s'agit que d'une contravention de police, & d'une peine correctionnelle? Si l'on trouve de l'inconvénient à laisser aux municipalités cette partie de la police, si l'on croit que le décret du 6 ou 7 septembre ait dépouillé à cet égard les municipalités, qu'on le dise donc nettement, & qu'il soit certain que les mêmes juges doivent prononcer entre tous les propriétaires sur une question d'attentat à la propriété. La loi sera donc générale; & vous jugerez qu'il n'y a lieu à délibérer sur les cinq derniers articles.

L'assemblée a passé à la discussion, article par ar ticle. Il en est résulté le décret suivant :

Décret sur les chasses du roi.

L'assemblée nationale, en conformité de son décret du 7 du mois d'août 1789, voulant pourvoir à la conservation des chasses du roi, par des moyens compatibles avec le respect dû aux propriétés & à la liberté a décrété ce qui suit :

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Art. I. Il sera formé dans les domaines & biens nationaux qui seront réservés aux roi par un décret particulier, des parcs dans lesquels sa majesté exercera exclusivement le droit de chasse ; & ces parcs seront clos à la charge de la liste civile.

II. Le roi pourra, pour la formation & arrondissement de l'intérieur desdits parcs, y réunir par voie d'échanges faits de gré à gré, les propriétés particulières qui y sont enclavées, en cédant des fonds faisant partie des domaines qui lui seront réservés.

III. Les échanges seront irrévocables après qu'ils auront été décrétés par l'assemblée nationale, & sanctionnés par le roi.

IV. Il est libre à tous propriétaires ou possesseurs de fonds enclavés dans lesdits parcs, autres que ceux qui en tiennent du roi, à titre de ferme, de détruire, ou faire détruire le gibier sur leurs propriétés seulement, & de la manière qui a été reglée aux propriétaires ou possesseurs de fonds dans les autres parties du royaule décret du 21 avril dernier.

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Et néanmoins, en attendant que les échanges soient consommés, ou les clôtures faites, le droit de détruire ou faire détruire le gibier avec des armes à feu, sera suspendu pendant le cours de deux années pour tous propriétaires ou possesseurs de fonds enclavés, les jours seulement où le roi prendra en personne l'exercice de la chasse, & ce, sous les peines portées par le même décret du 21 avril dernier.

V. Les dispositions pénales contenues dans la première partie de l'article I, ainsi que dans les articles II, III, IV, V & VI du décret provisoire du 21, 22 & 26 avril dernier, auront leur plein & entier effet contre

ceux qui chasseront en quelque temps, & de quelque manière que ce soit, dans les parcs, domaines & propriétés réservés au roi, ainsi que dans les autres propriétés nationales.

VI. Seront néanmoins punies de trois mois de prison, toutes personnes qui, dans le cours des deux années prescrites, chasseront avec armes à feu dans lesdits parcs du roi, même sur leurs propriétés, les jours où sa majesté chassera en personne, & après les avertissemens portés dans l'art cle IV.

VII. Si les délinquans sont déguisés ou masqués, ou s'ils n'ont aucun domicile connu, ils seront arrêtés sur-le-champ, & traduits dans les prisons du district du lieu du délit.

VIII. Les gardes que le roi jugera à-propos d'établir pour la conservation de ses chasses seront reçus & assermentés devant les juges de district auxquels la connoissance des délits de chasse commis dans lesdits parcs & domaines qui seront réservés au roi, appartiendra conformément à l'article VII du décret du 6 septembre suivant.

IX. Les peines ci-dessus seront prononcées sommairement & à l'audience, à la poursuite du commissaire du roi, par les tribunaux du district du lieu du delit d'après les rapports des gardes-chasse.

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X. Seront au surplus exécutés les articles des 10 11 & 28 avril dernier ; & néanmoins les rapports des gardes chasse pourront être faits concurremment au greffe du tribunal du district, ou à celui de la municipalité du lieu du délit, & affirmés entre les mains d'un des juges, ou d'un officier municipal.

XI. Les décrets des 21, 22 & 26 avril dernier seront exécutés contre les gardes & autres personnes employées aux chasses du roi, ainsi & de la même manière que contre les autres délinquans.

XII. Les réglemens, loix & ordonnances ci-devant portés sur le fait des chasses du roi & les capitaineries, sont abolis.

Les plaisirs du monarque doivent être simples comme son ame & son cœur. Peut-être ses plaisirs seroient-ils plus vifs si le gibier étoit plus rare. Si l'on veut y réflé

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