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licence, comme tous les faux dieux, à ses druides qui veulent la nourrir de victimes humaines. Puissent ces prêtres cruels subir le sort de leurs prédécesseurs! Puisse l'infamie sceller à jamais la pierre déshonorée qui couvrira leurs cendres!

Et vous, mes collègues, le moment est venu; il faut choisir enfin entre une énergie qui vous sauve et la faiblesse qui perd tous les gouvernements, entre les lois et l'anarchie, entre la République et la tyrannie. Si, ôtant au crime la popularité qu'il a usurpée sur la vertu, vous déployez contre lui une grande vigueur, tout est sauvé. Si vous mollissez, jouets de toutes les factions, victimes de tous les conspirateurs, vous serez bientôt esclaves. Nous avons failli être vaincus sans combattre par ce ministère pervers, qui n'eût été que ridicule par ses forfanteries envers la France, s'il n'eût réussi par ses manœuvres à diviser deux grandes nations faites pour s'estimer, et dont la bienveillance réciproque eût maintenu la tranquillité de l'Europe. Nous avons failli succomber sous les intrigues de Pitt, de ces orateurs célèbres par leurs fougues virulentes, des Burke, des Windham, des Sheffield, qui nous ont représentés comme des cannibales, parce que nous n'avons pas voulu nous laisser dévorer par des cannibales privilégiés, je veux dire par des rois; qui, sur une terre plus d'une fois rougie de ce sang qu'ils appellent royal, se sont apitoyés avec tant de perfidie sur le sort d'un tyran, dont eux-mêmes ont prouvé la bassesse et voté la mort par leurs préparatifs hostiles et par leurs

menaces.

Citoyens, profitons des leçons de l'expérience; nous pouvons bouleverser les empires par des victoires, mais nous ne ferons des révolutions chez les peuples que par le spectacle de notre bonheur. Nous voulons renverser les trônes. Prouvons que nous savons être heureux avec une république (Murmures.) Êtes-vous fâchés que je ne me permette pas de personnalités ? . . . . . Si nos principes se propagent avec tant de lenteur chez les nations étrangères,

.....

c'est que leur éclat est obscurci par des sophismes anarchiques, des mouvements tumultueux, et surtout par un crêpe ensanglanté.

Lorsque les peuples se prosternèrent pour la première fois devant le soleil pour l'appeler père de la nature, pensez-vous qu'il fût voilé par les nuages destructeurs qui portent la tempête? Non, sans doute; brillant de gloire, il s'avançait alors dans l'immensité de l'espace, en répandant sur l'univers la fécondité et la lumière.

Eh bien! dissipons par notre fermeté ces nuages qui enveloppent notre horizon politique; foudroyons l'anarchie, non moins ennemie de la liberté que le despotisme : fondons la liberté sur les lois et une sage constitution. Bientôt vous verrez les trônes s'écrouler, les sceptres se briser, et les peuples, étendant leurs bras vers vous, proclamer par des cris de joie la fraternité universelle.

Je demande: 1° Que le conseil exécutif soit tenu de rendre compte des renseignements qu'il peut avoir sur le comité révolutionnaire et sur les événements des 9, 10 et II de ce mois;

2o Qu'il soit tenu de faire mettre en état d'arrestation les membres du comité d'insurrection, principalement Desfieux et Lazouski;

3o Que les sections de Paris et le club des Cordeliers soient tenus de donner communication de leurs registres;

4o Qu'il soit fait une adresse au peuple pour l'éclairer sur les manœuvres des contre-révolutionnaires ;

1

5o Que le Ministre de la Justice1 soit tenu de rendre compte dans les trois jours de la procédure qui, suivant votre décret d'hier, sera faite contre les auteurs de la conspiration.

1 Garat was still Minister of Justice, but was elected Minister of the Interior on the following day, 14 March, when he was succeeded as Minister of Justice by Gohier.

XI.

REPLY TO THE ACCUSATIONS OF ROBESPIERRE AGAINST THE GIRONDINS (10 April 1793).

ON 10 April 1793, Robespierre, who had long been hinting that the Girondin leaders had been in league with Dumouriez to attain supreme power, openly accused them in the tribune of the Convention. The tenour of his accusations appears so clearly from the following speech of Vergniaud, who answered him at two days afterwards (see

once, and that of Guadet, deliveeprinted in this volume,

Guadet, Speech II), that it is not but the opening and concluding sentences, which are very characteristic of Robespierre, deserve quotation. Une bagtign · faction puissante,' he began, 'conspire avec les tyrans de l'Europe pour nous donner un roi avec une constitution aristocratique; elle espère nous amener à cette transaction honteuse par la force, des armes étrangères et par les troubles du dedans. Ce système plaît à tous les aristocrates bourgeois, qui ont horreur de l'égalité, à qui l'on a fait peur, même pour leurs propriétés.' 'Je demande,' he concluded, ‘que les individus de la famille d'Orléans, dite Égalité, soient traduits devant le Tribunal Révolutionnaire, ainsi que Sillery, sa femme, Valence et tous les hommes spécialement attachés à cette maison; que ce Tribunal soit également chargé d'instruire le procès de tous les autres complices de Dumouriez. Oserai-je nommer ici des patriotes tels que Brissot, Vergniaud, Gensonné, Guadet?'

J'OSERAI répondre à M. Robespierre qui, par un roman perfide, artificieusement écrit dans le silence du cabinet, et par de froides ironies, vient provoquer de nouvelles discordes dans le sein de la Convention. J'oserai lui répondre sans méditation; je n'ai pas, comme lui, besoin d'art : il suffit de mon âme.

Je parlerai-non pour moi; c'est le cœur navré de la plus profonde douleur, que, lorsque la patrie réclame tous les instants de notre existence politique, je vois la Convention

réduite par des dénonciations où l'absurdité seule peut égaler la scélératesse, à la nécessité de s'occuper de misérables intérêts individuels; je parlerai pour la patrie, au sort de laquelle, sur les bords de l'abîme où on l'a conduite, les destinées d'un de ses représentants qui peut et qui veut la servir, ne sont pas tout-à-fait étrangères; je parlerai non pour moi, je sais que dans les révolutions la lie des nations s'agite, et, s'élevant sur la surface politique, paraît quelques moments dominer les hommes de bien. Dans mon intérêt personnel, j'aurais attendu patiemment que ce règne passager s'évanouît; mais puisqu'on brise le ressort qui comprimait mon âme indignée, je parlerai pour éclairer la France qu'on égare. Ma voix qui, de cette tribune, a porté plus d'une fois la terreur dans ce palais d'où elle a concouru à précipiter le tyran, la portera aussi dans l'âme des scélérats qui voudraient substituer leur tyrannie à celle de la royauté.

Je vais d'abord réfuter les ridicules accusations de M. Robespierre. Je parlerai ensuite de la pétition1 qui vous a été dénoncée par Pétion 2, et que M. Robespierre a su si bien vous faire perdre de vue; et à mon tour, je ferai connaître à la France les véritables complices de Dumouriez. Je déclare au reste que, dans les accusations tout étant personnel, je n'entends point ravir à mes collègues dénoncés l'avantage de se défendre eux-mêmes, et que je réponds pour moi seul.

Je déclare enfin que je parlerai avec toute l'énergie qui convient à un homme libre, mais que je veillerai sur moi

1 A petition had been presented to the Convention on 8 April by the Section Mauconseil demanding the accusation and trial of the Girondin leaders.

? Pétion (Jerome), born at Chartres, 1753; his father a procureur; himself an avocat there, 1778; published Les Lois civiles, 1782, and Essai sur le mariage, 1784; elected to the States-General by bailliage of Chartres, 1789; sate on the left; elected Mayor of Paris, 14 November 1791; elected to the Convention by the Eure-et-Loire, 1792; first President of the Convention; acted with the Girondins; proscribed, 2 June 1793; after the failure of the Norman rising hidden at St. Émilion; found dead in a field, 20 June 1794.

pour me préserver des passions qui pourraient amortir le feu de celle qui doit nous animer tous, de l'amour de la République. En vain on cherche à m'aigrir. Je ne seconderai pas les projets infâmes de ceux qui, pour faciliter le triomphe des puissances liguées contre nous, travaillent à distraire notre attention des mesures nécessaires à notre défense, et s'efforcent de nous faire entr'égorger comme les soldats de Cadmus, pour livrer notre place vacante au despote qu'ils ont l'audace de vouloir vous donner.

Première inculpation. Robespierre nous accuse de nous être opposés, dans le mois de Juillet, à la déchéance de Louis Capet.

Je réponds que dans un discours que j'ai prononcé le 3 Juillet1, moi le premier, à cette tribune, j'ai parlé de déchéance; et si, sous le poids de la grande accusation de M. Robespierre, il m'était permis de dire quelque bien de moi, j'ajouterais que peut-être l'énergie de mon discours ne contribua pas peu préparer les mouvements révolutionnaires. A la vérité, des patriotes ardents, dont le zèle était inconciliable avec aucune espèce de réflexion, sans avoir étudié l'opinion publique; sans avoir pris les moyens qui pouvaient la former et la mûrir; sans s'être assurés que dans les départements on ne regarderait pas la seule mesure qui pût les sauver comme un parjure de la part de l'Assemblée Législative; sans avoir combiné aucune des précautions qui devaient assurer le succès de cette mesure extraordinaire, crièrent avec emportement à la déchéance. Je crus devoir modérer l'impétuosité d'un mouvement qui, bien dirigé, faisait triompher la liberté; qui, désordonné comme celui du 20 Juin, la perdit à jamais. Où d'ailleurs nous aurait mené la déchéance, si, comme ils le demandaient, on l'eût prononcée en vertu de la Constitution? À tous les désordres qui auraient pu naître de la minorité d'un nouveau roi et du despotisme d'un régent; au maintien de la Constitution et de la royauté. Eh bien! dans la Commission des Vingt-et1 Speech VI, pp. 297-316.

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