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sormais n'avoit plus à craindre l'injure des temps, d'un autre côté on ne tarda pas à s'apercevoir que la fécondité de ce bel art devint telle qu'à la rareté succéda bientôt une surabondance qui n'étoit pas moins déplorable.

La presse est une puissance active, forte, mais aveugle, qui accueille indistinctement tout ce qu'on lui présente, et qui, si on ne lui impose un frein, propage avec une égale indifférence et une égale profusion, la vérité comme l'erreur, les préceptes de la morale comme les excès de la licence, les productions du génie comme les frivolités du bel esprit. D'après cela, comment s'étonner si, n'ayant pas toujours été retenue dans les bornes d'une juste liberté (1),

(1) La censure n'a jamais produit tous les effets que s'en promettoient ceux qui l'ont établie, soit parce qu'elle n'a pas existé constamment et simultanément dans tous les pays où l'art typographique s'exerçoit, soit parce qu'on a toujours trouvé mille moyens de lui échapper, même dans les pays où les lois étoient le plus sévères. L'établissement de la censure en général remonte très haut, surtout en France; elle fut d'abord attribuée à l'université de Paris; on trouve des statuts de ce corps sous la date de 1323, de 1342, de 1403, qui portent que les Ecrivains de livres (l'imprimerie n'existoit pas encore), n'en pourront communiquer aucun, soit par veute soit par louage, qu'il n'ait été auparavant examiné, approuvé et corrigé par l'université. Cependant le premier livre imprimé sur lequel on trouve des traces de correction et d'approbation, n'a pas été publié en France; c'est le Petri Nigri tractatus contra perfidiam Judæorum, Eslingen, Fyner de Gerhussen, 1475, in-folio. Il porte qu'il a été corrigé et approuvé par l'évêque

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arts, on a vu s'amalgamer, soit dans l'ombre, soit au grand jour, des productions dangereuses, fruits ou de la corruption du cœur au milieu du luxe et de l'aisance dans les temps de paix, ou de l'esprit de parti toujours inséparable des grandes dissentions religieuses ou des révolutions politiques (1)?

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donna que les manuscrits lui seroient remis à lui-même, qu'il désigneroit un censeur, et qu'ensuite le manuscrit lui seroit renvoyé, et remis à l'auteur s'il y avoit lieu. C'est ce qui s'est assez observé jusqu'à la Révolution, époque où la censure, qui, depuis bien des années, n'étoit plus que de forme, a été supprimée.

Nous ne parlons point ici des Index ou catalogues de livres défendus, parce qu'ils n'ont presque point eu lieu en France. Le premier a été, dit-on, composé par l'Inquisition d'Espague et publié par ordre de Philippe II, en 1569; cela est faux. Il en existoit déjà un de Louvain, en 1550, approuvé par Charles-Quint; et on en connoît un de Venise, de 1543. V. sur les Index, notre Dictionnaire des livres condamnés au feu, tom. I, p. 253-268.

(1) Quand on compare la nature des révolutions qui ont précédé le XVe siècle, avec la marche et les résultats de celles qui l'ont suivi, on ne peut s'empêcher d'y trouver une différence notable; et nous ne doutons pas que cette différence ne soit due à la presse, qui, entre les mains de tous ceux qui ont fomenté des révolutions depuis trois siècles, a été un nouveau et puissant levier pour soulever au loin toutes les passions. C'est des commencemens du seizième siècle que date cet esprit d'agitation et de trouble qui n'a cessé de tourmenter l'Europe, soit sourdement soit ouvertement jusqu'à ce jour. Vers 1516, .Luther, imbu des principes de J. Hus, levant publiquement l'étendard de la révolte contre l'autorité pontificale, parvient à arracher du sein de l'église catholique, des peuples dont il a flatté les passions et des princes qui y ont trouvé leur intérêt; et bientôt l'Europe est en feu, le christianisme est ébranlé jusque dans ses fondemens, et des

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