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opposition, par le motif qu'ils n'avaient pas fait partie de la société, et assignèrent le sieur Cochet, et autres syndics répartiteurs, en nullité des poursuites, devant le tribunal de Béziers, lieu du domicile des opposants. Cochet et consorts proposent un déclinatoire devant le tribunal de Lille, lieu de la société qu'il s'agissait de liquider.

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Le 25 novembre 1822, jugement qui rejette le déclinatoire. -Sur l'appel porté devant la cour de Montpellier, 'arrêt du 17 décembre 1823, qui infirme, « attendu que la société israélite, dont il est question, quoique dissoute, est censée existante tant que ses dettes ne seront pas liquidées, et que, dès lors, d'après l'art. 59 du cod. de proc., toutes les contestations relatives à cette société doivent être portées devant le tribunal du lieu où elle était établie: d'où il suit que c'est mal à propos que le tribunal de Béziers s'est déclaré compétent >>.

Pourvoi en cassation par Salvador-Ayon, pour violation du 1er de l'art. 59 du cod. de proc., et fausse application du § 5 du même article.

Du 9 mai 1826, ARRÊT de la section des requêtes, M. Bolton faisant fonctions de président, M. Lasagny rapporteur, M. Odillon-Barrot avocat, par lequel:

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« LA COUR, - Sur les conclusions de M. Joubert, avocat-général ; Attendu, en droit, qu'en matière de société, tant qu'elle existe, le défen· deur doit être assigné devant le juge du lieu où elle est établie; ;- Que le juge de l'action est le juge de l'exception, lors surtout que l'exception, et par sa nature, et par la qualité des parties, rente dans les limites de sa juridiction ; - Et attendu qu'il est constant et reconnu, en fait, que par l'ordonnance royale du 24 décembre 1817 il a été déclaré que la société israélite en question, dont la liquidation n'a pas encore été faite; devait être considérée comme existante, à l'égard de ses créanciers ; que cette société était établie, non pas à Béziers, mais bien à Lille; que les contraintes dont il s'agit avaient été décernées contre Salvador-Ayon et ses neveux pour une dette à la charge de la même société; qu'enfin, c'est en qualité de défendeurs, et pour se soustraire au paiement des sommes por tées dans ces contraintes, que Salvador-Ayon et ses neveux ont proposé l'exception tirée de ce qu'ils n'avaient jamais été associés; Que, dans ces circonstances, en décidant que ce n'était pas le tribunal de première instance de Béziers, mais bien celui du lieu où la société était établie, qui, seul investi, par l'art. 59, 5e alinéa, du cod. de proc., du droit de statuer sur la demande, était aussi le seul qui devait prononcer sur l'exception proposée

contre la même demande, l'arrêt attaqué, loin de violer ledit art. 59, en a fait une juste application; REJETTE.>>

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COUR DE CASSATION.

Le propriétaire d'une habitation rurale, entièrement détachée du lieu sujet à l'exercice du droit d'entrée sur les boissons, est-il assujetti à ce droit pour le vin de sa récolte, qu'il vend chez lui en détail? (Rés. nég.)

CONTRIBUTIONS INDIRECTES, C. FEYDEL.

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Le sieur Feydel débitait dans une maison à lui appartenante, et située à Cabessut-le-Haut, du vin provenant de sa récolte; il avait payé le droit de détail, mais il se refusait à payer le droit d'entrée. Le 26 novembre 1823, la régie des contributions décerna contre lui une contrainte, à laquelle il forma opposition.-Et, le 8 juin 1824, le tribunał de Cahors rendit un jugement qui renvoie le sieur Feydel de lademande formée contre lui, par les motifs suivants : - " Attendu que l'administration ne conteste pas que le sieur Feydel se refuse seulement au paiement du droit d'entrée des vins de son cru; que son habitation n'est pas située dans un lieu sujet au droit d'entrée; qu'elle se borne à prétendre que sa qualité de propriétaire débitant l'astreint, aux termes de l'art. 21 de la loi du 28 avril 1816, au paiement du droit d'entrée; Attendu qu'en ce qui concerne le paiement du droit d'entrée, les dispositions de l'art. 20 et celles de l'art. 21 présentent une distinction extrêmement importante; qu'aux termes de l'art. 20, les propriétaires, ainsi que les débitants établis dans les lieux sujets aux droits d'entrée, sont assujettis au paiement du droit, tant pour les boissons introduites que pour les boissons fabriquées; qu'aux termes de l'art. 21, au contraire, l'obligation de payer le droit pour les débitants établis sur le territoire de la commune ne s'étend qu'aux boissons par eux reçues; que ce ne peut être sans motifs que le législateur à gardé le silence à raison des boissons fabriquées; - Attendu que la qualification du droit en lui-même et l'économie de la loi semblent indiquer à la pensée deux circonstances nécessaires pour la perception du droit : 1° un lieu sujet, 2o l'introduction dans ce lieu de

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boissons soumises; que les dispositions de l'art. 24 font connaître dans quelle forme l'introduction doit être constatée, et de quelle manière le droit sera payé; - Attendu qu'il n'est pas contesté que M. Feydel n'a fait que débiter le vin provenu de sa récolte, qui se trouvait dans sa maison; qu'il n'a pu, par conséquent, être soumis à aucune déclaration pour la perception du droit d'entrée; - Attendu qu'à la vérité, l'art. 86 assujettit aux mêmes obligations les propriétaires débitant les boissons de leur cru et les débitants de profession; qu'il résulte encore de l'art. 21 que tous les débitants établis dans un lieu soumis au droit d'entrée doivent payer ce droit sur toutes les boissons par eux reçues; - Que la loi et les arrêts assujettissent aux droits d'entrée les boissons reçues par les débitants, mais que ni dans la loi ni dans ces arrêts on ne trouve aucune décision relative aux boissons récoltées;

« Attendu que les dispositions de l'art. 85 qui accordent aux propriétaires vendant les boissons de leur cru une remise de 25 pour cent leur imposent en même temps l'obligation de ne recevoir et vendre aucune autre espèce de boissons que celles de leur cru; que l'art. 86 leur impose des conditions encore plus onéreuses, en leur prohibant toutes fournitures aux buveurs, autres que des bancs et des tables; que le paiement de la licence pour un débit peu considérable, et la privation des bénéfices qu'ils retireraient s'il l'était davantage, placent les propriétaires dans une position plus défavorable que le débitant de profession;-Attendu que, si, aux termes de l'art. 247, il est défendu aux tribunaux de prononcer des condamnation à raison des droits qui ne seraient pas formellement établis par la loi, il est impossible d'assujettir le propriétaire auquel il est défendu de recevoir des boissons à payer, pour les boissons qu'il a récoltées, le droit qui ne doit être payé par les débitants de profession que pour boissons par eux reçues; qu'on ne trouve pas dans la loi une indication assez formelle pour prononcer une condamnation; · Par ces motifs, le tribunal, jugeant en bureau ouvert, disant droit sur l'opposition, relaxe le sieur Feydel de la demande formée contre lui. »

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Pourvoi en cassation de la part de la régie, pour violation des art. 20, 21 et 40 de la loi du 28 avril 1816, et fausse interprétation des art. 85 et 86 de la même loi.

Du 15 mars 1826, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Legonidec rapportcur, MM. Cochin et Petit de Gatines avocats, par lequel :

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« LA COUR, Sur les conclusions contraires de M. Cahier, avocat-général; Attendu que, d'après l'art. 20 de la loi du 28 avril 1816, le droit d'entrée est dû généralement sur toutes les boissons introduites ou fabriquées dans l'intérieur, et destinées à la consommation du lieu sujet ; Que, par la même loi, les faubourgs sont aussi indéfiniment assujettis au droit, comme étant une partie intégrante du lieu sujet ; mais que l'art. 21 ne se sert plus de la même généralité d'expressions, puisqu'il dit seulement que ce droit sera perçu sur toutes les boissons reçues par les débitants établis sur le territoire de la commune, et qu'il n'ajoute pas, et sur les boissons fabriquées; - Que cette différence d'expressions employées par le législateur dans les deux articles oblige nécessairement à rechercher quel est le sens de ces mots, boissons reçues par les débitants; qu'ils ne présentent pas la même idée que ces mots, boissons fabriquées, et qu'on ne peut non plus admettre, comme le veut la régie, qu'ils sont l'équivalent de boissons consommées, puisque le droit d'entrée se paie à la seule réception de la boisson, quelle que soit l'époque de la consommation;

« Qu'en consultant la loi de 1816 elle-même, où ces mots se retrouvent souvent, on voit qu'ils y sont toujours pris dans l'accception naturelle qu'ils présentent, de boissons que les débitants font arriver du dehors dans leurs caves ou magasins, pour alimenter leur commerce; Qu'on peut d'autant moins faire l'application de cette partie de l'art. 21 au propriétaire d'une habitation rurale entièrement détachée du lieu sujet, et, par suite, affranchie, quand il y vend en détail les boissons provenant de son cru; qu'il lui est formellement défendu, par l'art. 85 de la loi, de comprendre dans sa vente aucune boisson autre que celle de son cru, et. par conséquent d'en recevoir pour cet objet; — Qu'il serait, dès lors, contradictoire qu'il fût astreint à payer le droit d'entrée sur les boissons vendues en détail, en vertu d'un article qui n'impose précisément à ce droit que les boissons reçues par les débitants; — Qu'ainsi, le jugement attaqué, en relaxant le sieur Feydel de la demande de la régie, dans les circonstatecs où la cause se présentait, loin de violer la loi, s'est strictement conformé à la disposition littérale de l'art. 21 de la loi du 28 avril 1816; — REJETTE.>>

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COUR DE CASSATION.

La tentative du crime de bigamie doit-elle étre considérée et punie comme le crime lui-même ? (Rés. aff.) Cod. pén., art. 2 et 340.

La loi n'ayant point défini et précisé les circonstances qui

forment le commencement d'exécution, appartient-il aux jurés de les apprécier dans leur conscience et d'après leur conviction personnelle, et leur déclaration à cet égard est-elle irréfragable? (Rés. aff.)

Ainsi le jury a-t-il pu voir, quant à la tentative du crime de bigamie, le commencement d'exécution dans le fait d'un homme déjà marié qui fait procéder aux publications d'un nouveau mariage, et se présenté ensuite, pour la célébration, à la mairie, avec la future et les témoins ? (Rés aff.) C. LE MINISTÈRE PUBLIC.

BOURGUIGNON,

Le nommé Bourguignon, quoique engagé dans les liens d'un premier mariage, se dispose à en contracter un second. Il fait faire les publications préalables, et ensuite il se présente avec la future et les témoins à la mairie, pour la célébration. Mais on découvre à temps l'existence du premier engagement, et on refuse de le marier.

Bourguignon, poursuivi par le ministère public pour crime de tentative de bigamie, est condamné à cinq ans de travaux forcés par la cour d'assises d'Evreux.

Il se pourvoit en cassation pour fausse application de l'art. 2 et violation de l'art. 340 du cod. pén.

L'art. 2, disait-on pour le demandeur, n'est pas applicable au cas dont il s'agit : en fait de bigamie, la criminalité ne commence qu'à l'exécution, et l'exécution c'est le mariage. Tel est aussi le sens que présente l'art. 340, qui, pour constituer le crime de bigamie et justifier l'application de la peine, suppose que le second mariage a été réellement contracté. La tentative n'est donc pas ici considérée comme le crime même. Et pourquoi? C'est que, jusqu'au oui fatal, le prétendu bigame est toujours le maître de se repentir, et que, s'il se repent, tout se réduit à un projet coupable, il est vrai, mais qui n'a reçu aucune exécution. Or c'est précisément ce qui est arrivé dans l'espèce. La bonne foi avec laquelle Bourguignon a lui-même avoué au maire de sa commune l'existence de son premier mariage, prouve que déjà il avait abjuré son funeste projet d'en contracter un second, en sorte que l'intention criminelle a disparu par son aveu, et que dès lors il n'y a point eu exécution dans le sens de la loi.

Du 28 juillet 1826, ARRÊT de la section criminelle, M.

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