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pris ils te seront communiqués. J'espère que l'ordre se rétablira et que la loi sera exécutée. Ta présence et les mesures que tu prendras l'assureront pour toujours.

Subsistances.

Cette partie intéressante ne prête que trop des armes à la malveillance pour n'être pas l'objet de la sollicitude des administrateurs. La pénurie se fait sentir chaque jour. Les réquisitions de l'administration sont sans effet; la cupidité du possesseur de grains est à son comble. Le malheureux ne peut trouver dans son travail ou dans son revenu les moyens de subsister.

Le 24 germinal eut lieu une nouvelle séance publique au Conseil du département, sous la présidence de Laurenceot.

Un membre lui a fait au nom du directoire, dit le procèsverbal, le rapport de plusieurs affaires qui avaient en leur faveur les principes de justice, mais dont la décision excède les pouvoirs de l'administration. Le représentant s'est chargé des pièces en disant que conformément aux instructions de la Convention nationale il prononcera ce qui lui serait inspiré par l'équité.

Il a chargé le directoire de prescrire au district de faire supprimer sur-le-champ par la municipalité les inscriptions qui subsistent à l'entrée du temple de la Raison et à celle du cidevant Comité révolutionnaire de surveillance.

Il a prévenu le directoire qu'il lui ferait parvenir le soir des exemplaires d'un arrêté par lequel il charge les administrations de district, de l'exécution de la loi du 21 de ce mois relativement au désarmement des gens qui ont participé aux horreurs commises avant le 9 thermidor.

Ensuite le représentant a entendu la réclamation d'une citoyenne au nom des nourrices des enfants naturels de la patrie sur la modicité de leurs salaires et le retard qu'éprouve leur payement. Il a répondu que les demandes des nourrices lui paraissaient fondées et qu'il s'occuperait incessamment de leur rendre justice.

Le représentant du peuple a ensuite fait un discours dans lequel il a invité les citoyens à lui présenter les réclamations qu'ils pouvaient avoir à faire, en les assurant qu'il était prêt à

leur procurer une prompte justice. Il a annoncé qu'il tiendrait une séance au temple de la Raison, dont il ferait connaître le jour très prochainement. Il a assuré qu'il y ferait justice des terroristes et des dilapidateurs, et a exprimé le désir d'y voir tout le peuple l'entourer de sa franchise et de son courage pour que rien n'échappe à la représentation nationale dans laquelle ils trouveront un juge aussi inflexible qu'impartial, un consolateur et l'ami le plus sincère de la justice et de la liberté.

La Convention, à la suite des troubles de germinal, avait ordonné le désarmement de tous les citoyens connus dans leurs sections « comme ayant participé aux horreurs commises sous la tyrannie qui a précédé le 9 thermidor (loi du 21 germinal). Elle chargeait en même temps les représentants en mission de prendre dans les départements les mêmes mesures qu'elle prescrivait à Paris. Pour se conformer à ces instructions, Laurenceot rédigea la circulaire suivante aux citoyens et administrateurs des différents districts. >>

La grande et salutaire mesure que la Convention nationale vient de prendre, a été nécessitée par les mouvements insurrectionnels que se donnait la malveillance pour ressaisir la tyrannie, et pendant lesquels la résistance des patriotes a failli devenir insuffisante. Jusqu'ici, le gouvernement, s'en tenant aux principes stricts de la justice, que le peuple réclamait à grands cris, craignant d'exciter ou d'entretenir des haines toujours renaissantes, de marquer du sceau de la réprobation publique une classe nombreuse que l'on pouvait ensuite persécuter, sachant combien, dans un mouvement aussi impétueux, souvent l'arbitraire se substituait à la justice, les passions particulières empruntaient le langage du patriotisme, avait écarté des moyens qui lui paraissaient oppresseurs au milieu de la paix que le 9 thermidor et la mort des Jacobins permettaient d'espérer. Cette modération généreuse a disparu devant le salut du peuple; la liberté a manqué de périr, parce que personne ne pensait que les conspirateurs ne songeassent encore à leurs espérances coupables: au moment où on les croyait terrassés pour jamais, ils se sont remontrés avec audace. Alors il a fallu ressaisir la massue pour écraser cette hydre sans cesse renais

sante; il a fallu révolutionner contre eux, parce qu'ils allaient nous assassiner. Le combat à mort s'est engagé; le peuple a vaincu; et ce n'est que de cet instant mémorable, que l'on peut dire avec certitude que la Patrie est sauvée.

La proclamation était suivie de l'arrêté du représentant. Vingt-quatre heures après sa réception, les directoires. des districts devaient remettre à Laurenceot la liste des citoyens dont le désarmement était prescrit par la loi. Aux administrateurs Laurenceot demandait de remplir une vraie tâche de dénonciateurs. L'exécution de ses ordres ne répondit pas à son attente. C'est en vain qu'il voulut activer le zèle des officiers municipaux des communes. Ceux-ci lui opposèrent la force d'inertie et, dans certains cas, n'agirent qu'avec beaucoup de réserve, redoutant un brusque retour au pouvoir des hommes qu'ils étaient chargés de signaler comme terroristes.

(La fin au prochain numéro.)

TH. LEMAS.

M. Pingaud vient d'écrire une biographie étendue du comte d'Antraigues (1). A peine ce livre était-il paru, que la Revue des Deux Mondes et le Temps l'ont annoncé et en ont constaté l'insuffisance (2). Dispensé par ces comptes rendus bienveillants d'établir la nécessité d'une publication nouvelle, je me bornerai à indiquer quelques-unes des fautes qui devront être corrigées et les principales lacunes que je voudrais voir combler.

Un trop grand nombre de dates sont inexactes. Cela peut être, en certains cas, le fait des typographes; mais d'autres erreurs n'ont pas cette excuse. A deux reprises, pages 83 et 409, le serment du camp de Jalès se trouve placé en l'année 1791 il est en réalité du 4 octobre 1790. A deux reprises, nous voyons que le serment du Jeu de Paume fut prêté le 23 juin; M. Pingaud, avec quelques autres écrivains fantaisistes, le prend pour une suite de la séance royale.

Les faits et les textes ne sont pas moins maltraités que les dates. On a relevé, dans le Temps, la singulière inadvertance qui transforme Mirabeau en défenseur du veto sus

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Le comte d'An

(1) Un agent secret sous la Révolution et l'Empire. traigues, par L. Pingaud. Paris, Plon et Nourrit, 1893, in-8.

(2) Voir l'article de M. de Vogüé dans la Revue des Deur Mondes du 15 janvier et celui de M. Lantier dans le Temps du 18.

pensif. Il y en a bien d'autres, moins étranges en elles-mêmes, mais qui, dans une étude sur d'Antraigues, paraissent plus fâcheuses, parce qu'elles tirent davantage à conséquences. Le Mémoire sur les États généraux débute par ces mots : « Ce fut sans doute pour donner aux plus héroïques vertus une patrie digne d'elles que le ciel voulut qu'il existât des républiques. » Au lieu de cela, M. Pingaud met: «Que le peuple voulut qu'il y eût des républiques ». Le Temps le répète, et la citation court bien des chances d'être reproduite plus d'une fois avec cette altération. A la page 63, il est dit que, dans le cahier de la noblesse de Villeneuve de Berg, d'Antraigues a « gardé avec intention le silence sur la question du vote par tête ». L'auteur auraitil donc négligé, non seulement de lire avec soin, mais même de parcourir ce cahier dans lequel il prétend avoir reconnu, d'un bout à l'autre, les idées et le style de son personnage? Les articles 2 et 46 traitent expressément de la façon de voter dans les États généraux; peu de cahiers entrent sur ce point dans de plus grands détails que cet article 2. — M. Pingaud raconte, p. 79, que, le 6 février 1790, à la Constituante, «< il fut décidé que le serment de d'Antraigues ne serait reçu qu'après avoir été prêté verbalement à la tribune. » Il paraît, au contraire, que la lettre de d'Antraigues eût le même sort que celles qui ont été lues après elles et qui ne furent l'objet d'aucune résolution. Selon le procès-verbal, «<le président a fait lecture de quelques lettres qui lui ont été adressées par des membres de l'Assemblée concernant le serment civique qu'elle a décrété et prêté dans la séance de jeudi. L'ordre du jour a été réclamé et l'Assemblée a décidé que l'on passerait à l'ordre du jour (1). » M. Pingaud croit que ce fut pour se

(1) Notre collaborateur, M. Brette, dont l'obligeance est aussi grande que l'érudition, a bien voulu prendre la peine de copier ce texte sur le

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