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le collège de cette petite ville (1). Ce fut aussi l'un d'eux qui construisit l'église paroissiale et la cure, qui, tout en étant situées de manière à contribuer à l'ornement du paysage, étaient utiles aux habitants, d'ailleurs peu nombreux, de la petite communauté de La Chapelle (2).

VIII.

Lorsque Paul-Esprit de Boullongne fut porté sur la liste des émigrés, les commissaires du district de Nogent vinrent apposer les scellés au château de La Chapelle. Cette opération commença le 6 décembre 1792. Mais la vente du mobilier n'eut lieu que le 23 juillet 1793. Suspendue à diverses reprises, elle fut continuée, sans être achevée, jusqu'au 4 ventôse an 11.

L'expédition de cette première vente fut transcrite sur treize cahiers et demi, contenant ensemble 1,360 pages. Le prix des objets vendus atteignit 76,977 1. 15 s., soit environ 38,000 1. en assignats. On avait vendu tout ce que l'on avait pu, même les bancs de marbre du parc et les treillages.

Les glaces, les porcelaines, les lustres n'avaient pas trouvé d'amateurs à cette vente. Sous le régime de la Terreur, les objets de luxe étaient peu recherchés. Ils furent mis de nouveau aux enchères du 11 au 15 thermidor an II (29 juillet au 2 août 1795), et produisirent 102,546 1. Mais l'assignat ne valait plus alors que 8 l. 15 s., et la valeur réelle de la vente n'atteignit pas 9,000 1. Des glaces en trois morceaux se vendirent 11,300 1., qui correspondaient à 988 1.

Quelques jours après, le 24 fructidor an III, le château et

(1) COURTALON, t. III, p. 246. AUFAUVRE, Hist. de Nogent, p. 202 et 249.

(2) Elle contenait, d'après Courtalon, 27 feux et 70 communiants. Elle est aujourd'hui réunie à la commune de Saint-Aubin.

ses dépendances, avec le parc, le jardin anglais, la pièce d'eau, les canaux et les avenues, furent mis en vente au prix de 402,300 1. Personne ne se présenta; mais l'adjudication ayant été remise au 4 vendémiaise an Iv (26 septembre 1795), les amateurs, cette fois, furent plus nombreux. Le premier d'entre eux, marchand à Nogent, offrit 2 millions. Un vigneron de Villenauxe enchérit de 400,000 1. Cinq nouvelles offres élevèrent l'enchère à 4 millions. L'ardeur des concurrents se ralentit alors, et au douzième feu le château et ses dépendances furent adjugés à Alexis Breton, de Nogent, moyennant 4,112,000 1. L'assignat de 1001. ne valant plus que 7 1., le prix réel était seulement de 287,840 1.

La ménagerie, le verger et deux prés, renfermant 56 arpents, avaient été vendus précédemment, le 2 prairial an 11, moyennant 81,000 1. (10,530 1. assignats) à la citoyenne Marie Benoît. Le tournebride fut cédé pour 8,000 1.

La ferme du château, évaluée 380,325 1., fut adjugée le 5 vendémiaire an iv à Denis Bugnot, de Villenauxe, au prix nominal de 5,000,900 1., valant 350,000 1. Une autre ferme et le moulin furent vendus le 1er thermidor de la même année à J.-B.-Jacques Rousseau, de Paris, moyennant 182,566 1. (1). Cette ferme renfermait 399 arpents. (2).

En résumé, le château et les terres de La Chapelle s'étaient vendus environ 840,000 1. et le mobilier 86,000 1. Le parc était mutilé; le château dégarni de ses terres, réduit à une partie du parc, dépouillé de ses objets d'art, n'était plus que l'ombre de lui-même. Il conserva cependant, pendant de longues années, quelques-uns des aspects qui avaient

(1) Ce prix ne doit pas être réduit en assignats.

(2) Arch. de l'Aube. Actes de ventes des biens nationaux de seconde origine. Ventes du district de Nogent, nos 1853, 1854, 1872 et 1873. Ventes du département, an IV, n° 247.

fait sa célébrité. Les jardins gardèrent plus longtemps leurs ornements que les appartements. Des contemporains se souviennent d'avoir vu les portiques ornés de coquillages qui excitaient l'enthousiasme des amateurs d'un autre âge. Le château, tout amoindri qu'il est, n'a pas été entièrement détruit; et tout n'a pas disparu de ce qui fut l'orgueil et le charme de ses anciens maîtres, tandis que non loin de là il ne reste plus rien des résidences célèbres des Colbert, à Villacerf, et des Larochefoucauld, à Estissac.

Troyes, le 19 mars 1875.

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T. XL.

RECHERCHES

SUR LA VIE ET L'ŒUVRE

DU GRAVEUR TROYEN

PHILIPPE THOMASSIN

PAR

M. EDMOND BRUWAERT

ATTACHÉ AU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Non lasciò il Tommasini del suo sangue alcun
successore se non la Fama delle proprie opere.
(Vite de' Pittori ec. del Cav. Giov. Baglione.)

Le marchand d'estampes parisien, à qui vous demanderiez aujourd'hui une des œuvres de Philippe Thomassin, hésiterait certainement à vous répondre. Non qu'il n'eût aucun souvenir du nom de cet artiste; car, après avoir fouillé dans ses plus poudreux cartons, il vous rapporterait une feuille jaunie par le temps, représentant quelque gentilhomme de la cour de Louis XIV; mais il ne vous l'offrirait pas sans un certain doute. Et en effet, il vous suffirait de lui faire remarquer que la signature est précédée du prénom de Simon ou de Henri, tandis que vous vous intéressez seulement à Philippe, un graveur non de l'Ecole française du xvII° siècle, mais de l'Ecole italienne de la fin du xvi° siècle.

Vous examinez vous-même les collections assemblées sous votre main, et, par bonheur, il vous arrive de rencontrer une

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