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sociation les met dans le cas de répandre dans le public.

<< Parmi ces moyens, il en existe deux principaux ; le premier de donner en paiement de leurs prêts, des billets payables à vue, ou de créditer les emprunteurs de la somme qui leur est prêtée, avec faculté d'en disposer à volonté, ce qui revient au même; le second, de se rendre caissier du public, en recevant son argent contre de pareils billets ou des crédits en banque.

<< Par suite du crédit des billets de la banque et de leur commodité qui rend plus faciles les spéculations et les échanges, il arrive que beaucoup de particuliers trouvent avantageux d'y porter leurs espèces, et de prendre en échange des billets, ou de s'y faire ouvrir des comptes courans.

<«< Alors, s'apercevant de la confiance qui lui est accordée, la banque n'est plus obligée de borner la somme de ses billets, dans le public, à la somme précise du numéraire qu'elle a dans ses coffres; et, suivant le nombre de demandes qui lui sont faites, et le rapport qui s'établit entre son numéraire et la somme de ses billets circulans, elle augmente graduellement leur émission en raison de ces différences, afin de mettre à profit, par de nouveaux placemens, une partie des fonds dont son crédit lui donne la jouis

sance.

«La base de la confiance du public réside dans la persuasion où il est que les fonds de la banque sont tellement employés et disposés, qu'elle pourra toujours les réaliser de manière à faire face à toutes les demandes.

«Le crédit de la banque, comme sa plus impérieuse obligation, consiste donc à ne jamais cesser ses paiemens; pour cela aucun sacrifice ne doit lui coûter. Elle doit enfin payer jusqu'à la liquidation entière, plutôt que de se soustraire, par quelque moyen que ce soit, à ce devoir impérieux de l'honneur et de la justice.

« C'est une grande erreur de croire une banque ruinée ou détruite, quand elle s'est liquidée par la restitution des fonds à ses créanciers. Cet événement est au contraire souvent pour elle le fondement d'un nouveau crédit, car le crédit est pour tout le monde, pour les sociétés comme pour les individus, aux mêmes conditions; ponctualité rigoureuse à remplir ses engagemens, voilà son essence; modération et sagesse dans ses opérations, voilà sa théorie. Il n'est au pouvoir d'aucun individu, d'aucune société, d'aucune nation, de déroger à ces principes, sans renoncer pour jamais à toute espèce de confiance et de considération.»>

Laborde entre ensuite dans quelques détails pour montrer combien les arrêts de surséance

pour les établissemens publics et particuliers, et la doctrine qui les appuie, sont une violation manifeste des droits des hommes et des principes de justice qu'on doit maintenir dans tous les temps. La caisse d'escompte avait été plusieurs fois frappée de la défaveur qui s'attache toujours à ces arrêts. Il n'en tirait pas la conséquence qu'elle ne méritait plus l'intérêt de l'assemblée, et qu'il fallait l'abandonner dans cette triste position; il proposait, au contraire, l'établissement d'une nouvelle banque, à-peu-près semblable à celle d'Angleterre, pour remplacer la caisse d'escompte, mais en accordant à cette caisse le temps. necessaire pour opérer la liquidation de ses engagemens, et en fesant retirer ses billets de la circulation par la nouvelle banque.

En développant son projet, Laborde de Méréville fit ressortir les avantages des banques, qui, indépendamment de la baisse qu'elles tendent à produire dans l'intérêt de l'argent, rendent à l'état le service inappréciable de favoriser le commerce et l'industrie, soit par l'accroissement d'un numéraire fictif, mais réalisable à volonté, soit par la facilité et l'économie du transport. Il proposait la création de 50 mille actions de 4000 francs chacune; d'exiger des actionnaires de la nouvelle banque le dépôt d'une somme de 150 millions, pour gage de leur responsabilité; mais

il demandait pour elle deux dispositions importantes: la première, le droit de fabriquer les espèces, et de se servir de l'Hôtel des Monnaies; la seconde, d'instituer la banque pour caissier de la nation, en y fesant verser les revenus nécessaires pour acquitter la portion des dépenses nationales qui, par sa nature, ne peut pas être payée dans les provinces.

Cet arrangement donnerait, disait-il, la faculté 10 De supprimer au 1er janvier toutes les caisses publiques, et de n'en conserver qu'une dans chacun des nouveaux départemens, sous la surveillance des assemblées administratives;

2o De détruire, à commencer de la même époque, l'ancienne comptabilité, si obscure et si inutile, en la remplaçant par une nouvelle qui serait simple, claire et connue de tout le monde.

3° De supprimer par la suite toutes les chambres des comptes, en donnant aux administrations provinciales la surveillance de ceux de leurs trésoriers, et en soumettant la comptabilité de la banque à la législature;

4o D'établir la responsabilité du ministre des finances de la manière la plus positive, en soumettant la banque à la distribution annuelle des dépenses, qui serait faite par la législature, et la déterminer de manière à ce que le ministre des finances ne pût jamais l'enfreindre sans la parti

cipation de la banque; d'un autre côté, on menaçait la banque de la suppression immédiate de ses priviléges, si elle manquait à ses engagemens;

5o Enfin, de faire acquitter dans chaque département, par son trésorier, non-seulement les dépenses locales, mais encore celles que les circonstances pourraient y amener suivant leur nature: par exemple, celles des diverses fournitures de la guerre ou de la marine, des émolumens des officiers de judicature, etc., de manière qu'au moyen de la correspondance journalière, chaque caisse se trouvant garnie suivant les besoins par les caisses voisines, les dépenses seules qui l'exigeraient par leur nature seraient acquittées à Paris, et par la banque.

« Pour ce qui regarde la responsabilité du ministre des finances, ajoutait l'orateur, vous savez, messieurs, qu'elle n'existe plus en France depuis un siècle. Le successeur de M. Fouquet, effrayé de l'exemple de son prédécesseur, eut l'adresse de refuser le titre de surintendant des finances, se contenta de celui de contrôleur-général, et la charge fut ainsi supprimée. Ce surintendant avait la disposition absolue des revenus publics, et de tous les agens du fisc; il signait les ordonnances. sur le trésor royal, et répondait personnellement de l'emploi des fonds. Lors de la suppression de l'office, le roi s'en chargea, et les attributions du

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