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La banqueroute eft impoffible, parce que la France eft fort audeffus de fes dettes, parce qu'elle payoit fa dette annuelle fous un régime de defpotifme, & qu'elle pourra bien mieux la

le règne de la liberté.

payer fous

La banqueroute eft impoffible, parce que cet Empire à de prodi gieufes reflources, un numéraire enfoui, 'mais qui rentrera dans la circulation, quand vous ferez parvenus à diffiper la terreur panique; parce que vous avez un immenfe revenu foncier, plufieurs fois autant de revenu induftriel, les impofitions des ci-devant privilégiés, & devant vous l'avenir, les fiècles, la liberté, l'agriculture foulagée l'industrie délivrée de fes chaînes, & tout ce que promet une bonne conftitution.

?

La banqueroute eft impoffible, parce que vous n'êtes pas obligés de payer le capital de votre dette, parce qu'une boune partie de ce capital s'éteint infenfiblement, parce que vous ne devez en capital, que fix ou fept années de vos revenus ordinaires. Quoi donc un état voifin, dont le capital de la dette furpaffe la valeur entière du royaume, ce royaume étoit en vente! Quoi! ce pays eft fans alarmes! Que dis-je, meffieurs, il Aleurit, il profpère par deffus tous les autres peuples; & nous, parce que nous devons deux cent quarante millions annuels ;' parce que nons devons fix ou fept années de nos revenus; parce qu'une terreur panique fair refferer un inftant le numeraire; parce que dans la capitale, l'équilibre n'existe pas actuellement entre les efpèces & le papier, nous défefpéreront de la patrie, & nous croirons que l'état eft perdu! Nous avilirons la France à ce point, de penfer qu'elle doit périr parce que l'or & l'argent dont elle abonde fe trouve inftantanément Lefferrés.

?

La banqueroute eft impoffible, meffieurs, parce que les François ne doivent, ni ne peuvent périr; parce que banqueroute ne peut fervir qu'un petit nombre d'ames atrocés qui s'apprêtent à se réjouir fur un tas de ruine; parce qu'elle feroit funefte au roi, à l'état, au capitaliste, au rentier, à tous les créanciers, à la capile, aux provinces, & meme à l'égoïfte ou avare ou timide, qui entafle & refferre fon or.

Elle eft impoffible, parce qu'au moment de périr, s'il falloit périr, vous verriez la foule de bons citoyens dont cette ville abonde, accumuler les offres & les facrifices, & courir à l'autel de la patrie, pour faire, en un moment de courage, tout ce qui peut s'opérer aujourd'hui par une prudence continuée. Vous avez vu les factifices qu'ils favent faire. Doutez-vous qu'ils ne s'empreffent à concourir par leur générofité, à imiter les exemples que leur ent déja donnés denx diftricts, à fuivre les leçons que leur die le fage patriotifme de la comniune?

Enfin, meffieurs, je le dis, parce que j'en fuis profondément convaincu : la banqueroute eft impoffible, parce que vous êtes ici, & que, pour la faire, il n'exifte qu'un feul moyen, c'est de vous féparer.

Les impôts, dit-on, ne fe perçoivent pas! Ils fe perçoivent dans la plus grande partie du royaume : j'en atteste devant vous, meffieurs, votre propre correfpondance. Quelques impôts indireas ne fe perçoivent plus! cela eft vrai; mais on vous offre, on vous offrira, on vous trouvera des remplacemens ; vous les établirez, & le peuple les établira avec plaifir, & le peuple les payera. Peuple infortuné! bon peuple qui favez aimer, fervir obfcurément & fans affectation votre patrie & votre roi, quel eft donc votre fort? On vous opprime quand vous courbez la tête ; on vous calomnie, quand yous ofez la relever.

N'y a-t-il donc aucun mal, me dira-t-on, & nos frayeurs font-elles chimériques? Il y en a un, meffieurs; il eft grand, il eft preffant, il est du moment, & vous devez y remédier. Ce mal', c'est la ra... reté des espèces. La caule en eft facile à indiquer : c'eft qu'il y a trop de papier dans la circulation. Puifque vous favez la cause du mal, vous y trouverez le remède.

Je prends donc la liberté de vous inviter à prendre très-inceffamment en confidération le mémoire du premier miniftre des finances, ce mémoire que vous attendiez depuis quinze jours, & l'adreffe de la commune de Paris. Vous chercherez à remettre l'équi libre entre les espèces & le papier, en donnant pour ce moment quelque prépondérance aux efpèces, & un appât de confiance, qui les détermine à rentrer dans la circulation.

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Mille travaux vous preffent, à la vérité, & les peuples en attendent le fruit avec la plus grande impatience. Mais ce mal du moment eft plus preffant encore; Vous ne quitterez un inftant l'objet de vos foins infatigables, que pour y revenir plus libres plus fatisfaits; &, dégagés de la follicitude qui vous opprefle, vous acheverez la conftitution avec d'autant plus de courage, que les confolations que vous en recevrez rajeuniront votre vigueur. Les françois vous feconderont par leur patience; les ennemis du bien public verront qu'ils fe font déçus en comptant trop légèrement fur la prétendue légèreté de la nation françoife; ce peuple généreux de la capitale, ces braves compagnons de vos travaux continueront de les feconder; ils verront qu'en vous aidant & vous confervant, ils fe confervent eux-mêmes. Le roi, le peuple, tous les bons citoyens, les créanciers de l'état, la capitale & les provinces, tous auront une caufe commune : le falut de la patrie & l'achèvement de la conftitution. Avec ce noble & généreux concert, je le répète, messieurs, la banqueroute est impoffible, & la France ne peut périr.

Je conclus en vous propofant de décréter que le jour qui a été perdu, laffemaine dernière, pour la difcuffion des finances, lui fois tendu cette femaine-ci.

Qu'en conféquence, l'affemblée s'occupera des finances, jeudi, vendredi & faniedi prochain.

Que le comité des finances foit tenu de rendre compte, jeudi prochain, de fon avis, fur le mémoire remis hier par le premier ministre des finances, & fur l'adreffe préfentée par la com une de Paris.

NOUVELLES DIVERSE S.

Extrait des annales patriotiques de Mercier.

Châtelet de Paris, 22 mars

L'abbé Poulain de Launay, prêtre, chantre de l'église de Toullaine de Rennes, auteur de différens écrits très-repréhensibles contre les principes de la conftitution, transféré des prifons de Rennes en celles du châtelet, a subi interrogatoire. Cet accufé convient qu'il est l'auteur des brochures qu'on lui reproche; & son aveuglement eft tel, qu'il ne ceffe de dire qu'il feroit à fouhaiter qu'elles fuffent entre les mains de la France entière. L'abbé Poulain fe difculpera difficilement de plufieurs articles de l'information, qui tendent à prouver qu'il a cherché à foulever le peuple de Rennes.

Longwi, 9 mars.

Les troupes qui compofoient la garnifon de Luxembourg, err font prefque toutes parties les de ce mois, pour aller couper les chemins de cette ville à l'armée Brabançonne, qui, cantonnée près de Marche en Famine, fe disposoit à marcher pour venir affiéger cette fortereffe; un combat s'eft engagé le 7; il a été trèsvif; mais enfin les Brabançons font reftés vainqueurs & maîtres du champ de bataille, fans perdre beaucoup de monde; les troupes impériales ont été prefqu'entièrement défaites. Aujourd'hui il eft atrivé plufieurs voitures de bleffés à Luxembourg.

La proximité où nous fommes de Luxembourg, qui n'est qu'àfix lieues d'ici, nous procure le moyen d'en avoir des nouvelles fraîches, & je puis vous affurer que celles-ci font de toute cer titude.

L'opiniâtreté patriotique de M. Camus l'a enfin emporté : le livre rouge eft entre fes mains. Il s'agit de favoir fi ce livre et bien en fon entier, fi c'eft bien le même, & s'il contient les articles des fubfides payées aux princes étrangers depuis 1774. S'il ne contient pas ces articles, c'eft qu'il y a apparemment un autre livre rouge des affaires étrangères, qu'il faut deniander; car les miniftres n'en donneront fûrement pas l'éveil. A propos de miniftres, leurs rubriques font toujours les mêmes; ils intriguent' au dedans, ils intriguent au dehors; ils comptent beaucoup fur des troubles & des divifions dans la formation des affemblées de départemens; ils comptent beaucoup fur des plans anti-nationaux, concertés dans certaines cours du midi; ils etpèrent trouver, dans le, nouveau roi de Hongrie, un homme qui le prêtera à tous les accommodemens qu'on voudra, pour réprimer ces atômes mutins, qu'on appelle des fujets, & les foumettre abfolument à ces êtres divins qu'on appelle des princes C.....

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Dans le plan propofé par le bureau de ville de Paris, à l'affemblée nationale, pour la vente des maifons religieufes, on fuppofe que le produit en montera à plus de 200 millions; que ce produit ne s'éleveroit pas à cette fomme, fi on vendoit tous les biens à la fois que l'on doit mettre la ville en état de ne vendre que fucceffivement; & que la ville, en les achetant, les paieroit en obligations au tréforier de l'extraordinaire. On en feroit des coupons de 1000 livres, 400 liv., 200 liv., qui circuleroient fous le titre d'effets municipaux. On espère que ces effets ayant un hypothèque spécial, & étant accompagnés d'une prime, pourroient être très-recherchés, & qu'avec eux on pourroit éteindre les 160 millions que l'état doit à la caile d'efcompte, qui reviendroit alors ce qu'elle n'auroit jamais dû ceffer d'être, une caiffe de commerce.

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A RENNES,

Chez R. VATAR, fils, Libraire, Imprimeur de la correspondance de Rennes à l'affemblée nationale,

au coin des rues Châteaurenault & de l'Hermine, N.. 791, au premier étage.

No. IX.

ASSEMBLÉE NATIONALE.

Du vendredi 19 mars 1790.

BULLETIN DE LA CORRESPONDANCE

DE RENNE S.

Paris 17 mars 1790.

SÉANCE du lundi 15 mars 1790.

A Près la lecture du procès-verbal de la féance de famedi, M. le préfident a annoncé le résultat du fcrutin qui donne, la préfidence à M. Rabaut de Saint Etienne, à la majorité de 293 voix, fur 200 qu'avoit obtenu M. de la Chaife. Après les complimens d'ufage, M. le le préfident a pris féance, & l'affemblée a voté de juftes remercimens à M. l'abbé de Montefquiou.

M. Muguet a remarqué que les articles conftitutionnels concernant l'armée, n'étant pas encore acceptés, il convenoit que l'affemblée ordonnât à fon président de fe retirer par devers le roi pour demander l'accep tation ou la fanction de ce décret.

M. Bouche a ajouté que les décrets qui ordonnent aux municipalités de faire prêter le ferment civique aux gardes nationales, & celui qui porte que les directeurs des monnoies rendront compte des effets d'or & d'argent qui ont été portés aux différens hôtels des monnoies étoient dans le même cas. L'affemblée a décrété que fon président joindroit cette feconde demande à la première.

M. Merlin, rapporteur du comité de feodalité, a donné la lecture de tous les décrets de l'affemblée fur Abonnement de mars,

Tom. IV.

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