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ques rentes,en les faifant affigner à chaque échéance. On favoit que la question avoit été fort applaudie au comité féodal, qui avoit cru ne devoir pas prononcer la prefcription de cinq ans; en conféquence l'amendement de M. Loys fut rejeté.

M. de Juigné n'étoit vraisemblablement pas encore àl'affemblée lorsqu'elle avoit décrétéjlespremiers articles. On l'entendit s'agiter dans un bout de la falle ; & quoiqu'on ne put recueillir tout ce qu'il difoit, il paroifloit qu'il proteftoit contre les décrets rendus. On l'invita à fe rendre à la tribune pour être mieux entendu. Là, il entreprit l'éloge de la féodalité : il allégua l'antiquité & les' services de la nobleffe Françoife: il prétendit qu'on avoit promis de refpecter les droits honorifiques; & il fe perdit en déclamations, qui ne tenoient ni à l'ordre du travail de l'affemblée, ni encore moins à l'article qui étoit en délibération. Un député en fit l'observation, & M. Juigné en fut affez frappé pour quitter la tribune.

M. de Foucaud lui fuccéda, & prétendit que les décrets rendus étoient attentatoires aux droits de propriété & pouvoient faire naître beaucoup de conteftations, parcequ'il arriveroit que ceux qui n'avoient eu en partage que des droits féodaux ne manqueroient pas de reclamer contre les partages. Il s'exprima avec tant de volubilité & fi briévemet qu'on n'eut pas la peine de le rappeller à l'ordre, & comme il ne conclut à rien, non plus que M. de Juigné, il n'y eut pas à délibérer fur ce qu'ils avoient dit, & l'article fut décrété.

VII.

Tous les droits féodaux & cenfuels, enfemble toutes

les rentes, redevances & autres droits qui font rachetables par leur nature, ou par l'effet des décrets du 4 août 1789 feront à l'avenir, & jufqu'au rachat foumis pour le principal à la prescription que les différentes coutumes ont établie relativement aux immeubles réels; fans rien innover, quant à prient, en ce qui concerne la prefcription des arrérages L'article 8 fut décrété fans reclamation ni difcuffion. VIII.

Les lettres de ratification, établies par l'édit du mois de juin 1771, continueront de n'avoir d'autre effet for lefets droits, que d'en purger les arrérages, jufqu'à ce qu'il ait été pourvu par une nouvelle loi à un régime uniformae & commun à toutes les rentes & charges foncières, pour la confervation des priviléges & hypothèques."

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L'article 9 donna lieu à une férieufe difcuffion. Les uns prétendoient qu'abolir le retrait fans indemnité, de feroit autorifer à conclure, qu'il en devoit être de même des lots & ventes. D'autres propofoient d'ajouter à l'article l'abolition des droits fur les échanges. Les membre du comité repondirent à ces demandes, & l'affemblée fe borna à admettre l'ar ticle tel qu'il avoit été propofé.

I X.

Le retrait féodal, le retrait cenfuel, le droit de prefta tion féodale ou cenfuelle, & le droit de retenue feigneuriale, font abolis.

La fuite au Supplément.

6 SULLIVAN, prêtre,

SEVESTRE, fecrétaire fecrétaire&membre de la & membre de la corref

correfpondance.

pondance.

Chez R. VATAR, fils, Libraire, Imprimeur de la correfpondance de Rennes à l'affemblée nationale, ou coin des rues Châteaurenault & de l'Hermine N°. 791, au premier etage.

SUPPLÉMENT au No. Ier.

Séance du jeudi 25 février 1790.

La féance du jeudi ne fournit pas autant de décrets que la précédente, mais celui qui fut rendu est si intéreffant pour le maintien de la liberté, qu'on ne peut pas regretter qu'il ait occupé toute une féance.

La féance ouvrit par la lecture du procès-verbal. On fit part enfuite à l'affemblée de la réclamation d'un Landgrave d'Allemagne, d'une fomme de 500 mille livres due à fes fujets pour fournitures de fourages; l'affemblée renvoya ce mémoire à fon comité de liquidation.

M. Merlin membre du comité féodal, observa qu'on avoit fait plufieurs objections fur la première rédaction de l'article 10, à raison de quelques coutumes qui ne donnent aux puînés aucune part dans les biens roturiers, & leur donnoient le quint des biens féodaux ; ou qui ne donnent aux filles que le quint des biens féodaux fans part aux biens roturiers, avec des droits plus ou moins étendus au partage du mobilier & des acquêrs: il ajouta que le comité, étant circonfcrit dans le cercle de féodalité, & ne pouvant propofer une lo générale pour les fucceffions du royaume, avoit cru devoir propofer un nouveau projet de décret qui donnoit aux parens le droit d'agir comme en pays de droit écrit, jufqu'à ce qu'il eût été fait une loi générale de fucceffion pour tout le royaume.

Ce projet de décret, qui donnoit aux parens une autoritée démesurée, ne fur pas favorablement accueillie M. de la Rochefoucault, en rendant juftice au zèle du comiré, crut qu'il n'étoit pas poffible, d'après les principes décrétés le 4 août, d'augmenter à l'excès la puiffance paternelle; en conféquence, il propofa d'ordonner le partage égal, en exceptant du décret les en-fans mariés & ceux qui auront atteint l'âge de 25 ans dont les droits referont au même état,

M. Goupil propofoit d'étendre l'amendement à tous les poffeffeurs actuels.

M. Pétion vouloit qu'on décrétât la loi générale de de l'égalité du partage, en ne refpectant que les contrats fairs fous la fauvegarde de la loi de l'ancien régime le bien de l'état fe réunit, difoit-il, à la loi pour l'exiger ainfi ; il n'étoit pas propofable de mettre à la place de la loi la volonté de l'homme, & puifque notre objet étoit de ramener les hommes à l'égalité, il nẹ falloit pas s'en écartér.

M. Tronchet developpa les motifs du comité, il a fait, difoit-il, ce qu'il devoit faire, puifqu'il eft vrai qu'il n'exiftoit ni fiefs ni droit d'aîneffe par rapport à ces biens; il a fait ce qui étoit néceffaire puifqu'il a rempli fa miffion & s'eft circonfcrit dans le cercle de la féodalité,& il n'a pastrouvé d'autres moyens de parer aux inconvéniens des coutumes du Boulonnnois & de Lille que de recourir à la puiffance paternelle.

M. le Chapelier propofa un décret qui parue plus propre à remplir les vues de l'affemblée. M. Lanjuinais appuya ce décret & vouloit feulement y ajouter, en cas qu'il fut admis; mais il propofoit auffi une rédaction qu'il croyoit propre à prévenir Foute difficulté; elle étoit comme fuit.

«Toure qualité, féodale ou cenfuelle des biens eft éteinte, & tous les effets civils qui en réfultoient font abolis

Dans les fucceffions légitimes directes ou colJatérales, toutes inégalités de partage ci-devant fondées fur les qualités attribuées aux perfonnes ou aux biens, fur la diverfité de l'âge ou du fexe, ou fur toute autre diftinction font fupprimées.

در

Toute l'affemblée paroiffoit d'accord fur le principe: les ci-devant privilégiés paroiffoient euxmêmes convaincus de la néceffité de juger l'égalité, mais on étoit embarraffé fur la rédaction. On demanda, par amendement, la confervation du droit de reversibilité à la couronne des fiefs mafculins fis en Alface, obe fervant que ce feroit un moyen d'indemnifer les princes allemands ; cet amendement fut ajourné.

Plufieurs autres amendements furent propofés & rejetés, on en adopta un pour les puînés & les filles, & l'article fut décrété comme fuit:

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X.

Tous privilèges, toute féodalité & nobilité de biens étant détruits, les droits d'aîneffe & de mafculinité à l'égard des fiefs domaines & alleux nobles, & les partages înégaux, à raifon de la qualité des perfonnes, font abolis En conféquence toutes les fucceffions, tant directes que collatérales, tant mobiliaires, qu'immobiliaires, qui échoiront, à compter du jour de la publication du préfent décret, feront fans égard à l'ancienne qualité noble des biens & des perfonnes, partagées entre les héritiers, fuivant les loix, ftatuts & coutumes qui règlent les par tages entre tous les citoyens, abroge & détruit toutes les loix & coutumes à ce contraires.

Excepte du préfent décret ceux qui font actuellement mariés, ou veufs ayant des enfans, lefquels partageront entr'eux & leurs co-héritiers, conformément aux anciennes loix, les fucceffions mobiliaires & immobiliaires, directes & collatéralles, qui pourront leur échoir.

Déclare néanmoins que les puînés & les filles, dans les coutumes où ils ont eu jufqu'à préfent fur les biens tenus en fiefs plus d'avantages que fur les biens non-féodaux, continueront de prendre, dans les ci-devant fiefs, les parts à eux affignées par lefdites coutumes, jusqu'à ce qu'il ait été déterminé par l'affemblée nationale un mode définitif & uniforme de fucceffion pour tout le royaume.

Au milieu de la difcuffion, M. le préfident fit part l'affemblée d'une lettre de M. de la Luzerne qui annonce des pétitions de l'ifle Saint-Domingue, & le ministre prévenoit qu'il enverroir inceffamment un mémoire à ce fujer à l'affemblée; qu'il s'occupoit à faire le dépouillement de la quantité de pièces qui lui avoient été adreffées,

Séance du jeudi foir.

Il fut d'abord fait mention d'une foule d'adreffes de différentes villes du royaume qui expriment leur re connoiffance des décrets de l'affemblée, leur adhésion &leur zèle pour le maintien de la nouvelle conftitu

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