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>> et cela pour

poison pour faire mourir la reine, être conduit et nourri jusqu'à Paris, sans qu'il lui en coûtât rien; tout le monde conçoit que, dans tous les tems, on auroit sévèrement puni une plaisanterie si indécente et si alarmante pour la nation.

Quant à sa lettre au pape, dans laquelle il le supplioit de l'excommunier, afin qu'il ne fût pas brûlé, parce queson hôtesse, voulant allumer un fagot de bois qui avoit peine à prendre, avoit dit : « Que ce fagot >> étoit excommunié de la gueule du pape. » De pareilles plaisanteries supposent un degré de familiarité qu'il n'étoit pas donné à Rabelais d'avoir avec sa Sainteté; ou si c'étoit à titre de ce qu'on appeloit alors des foux, que Rabelais prenoit ces libertés, le philosophe Anaxarque lui eût dit avec raison: « Vous » devriez gagner un peu mieux votre argent, et nous » donner de meilleures plaisanteries.

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On ne sait pas non plus ce qu'il faut penser de sa manière de s'introduire chez le chancelier Duprat, en parlant latin à son suisse qui ne l'entendoit pas parlant ensuite grec à celui que le suisse fit venir comme entendant le latin, et puis parlant hébreu à celui qui vint comme entendant le grec, et ainsi de suite, jusqu'à sept à huit langues. La maison du chancelier Duprat étoit-elle donc si remplie de savans, ayant chacun le département d'une langue? Quoiqu'il en soit, il s'agissoit de faire rétablir les priviléges de l'université de Montpellier, que le chancelier avoit supprimés, et ils furent rétablis à la sollicitation de Rabelais, qui occupoit une chaire de médecin dans cette université. Sa robe y étoit restée, et tous ceux qui prenoient le bonnet de docteur en méde

cine, étoient revêtus de la robe de Rabelais. Après avoir été d'abord cordelier, puis bénédictin, puis médécin, Rabelais fut dans la suite, chanoine, et enfin curé de Meudon. Tous ces états étoient bien sérieux pour un homme si gai et si libre, toujours porté au plaisir et aux bouffonneries: c'est précisé ment ce contraste de son état et de son humeur qui a fait sa célébrité. Il plaisanta, même en mourant ; mais il eut encore le malheur de plaisanter mal dans ce dernier moment, s'il est vrai qu'il se soit fait mettre un vêtement nommé Domino, pour avoir le plaisir de dire : « Beati qui in Domino moriuntur. »

Quant à son livre si vanté, si long-tems admiré, nous ne pouvons mieux faire que de rapporter le jugement qu'en a porté Voltaire lui-même, auprès duquel les plaisanteries impies de Rabelais auroient dû lui faire trouver grâce:

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<«< Rabelais, dans son extravagant et inintelligible livre, a répandu une extrême gaîté et une plus grande impertinence; il a prodigué l'érudition, les ordures » et l'ennui; un bon conte de deux pages est acheté » par des volumes de sottises; il n'y a que quelques » personnes d'un goût bizarre qui se piquent d'en> tendre et d'estimer tout cet ouvrage.

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L'an 1688, le 1 mars, Les comédiens Français firent l'ouverture de leur théâtre dans un jeu de paume de la rue des Fossés-Saint-Germains-des-Prés.

qui

L'an 1699, le 1 mars, Arrêt du conseil, ordonne aux comédiens de donner le sixième de la recette aux pauvres de l'Hôpital-Général.

Ce même jour on paya 3 l. 12 s. au théâtre aux

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secondes loges 36 s., au parterre, 18 s. On ne payoit avant ce tems que 15 s. au parterre, et 10 s. aux galeries:

Un clerc, pour quinze sols, sans craindre le holà,
Peut aller au parterre attaquer Attila.

Mais lorsque, pour des pièces nouvelles, les comédiens étoient obligés à des frais extraordinaires, ils s'adressoient au lieutenant civil du châtelet, qui leur permet toit d'augmenter leur entrée durant le cours des représentations de la pièce nouvelle.

L'an 1730, le 1 mars, Mort de Valbonnais.

Jean-Pierre Bourcheras de Valbonnais, fils d'un conseiller au parlement de Grenoble, fut aussi conseiller au même parlement, puis premier président de la chambre des comptes de Grenoble, et conseiller d'Etat. Il étoit né en 165 1. Dans sa jeunesse, il voyagea beaucoup en Italie, en Hollande, en Angleterre. Dans le cours de ses voyages, il se trouva, le 6 juin 1672, au terrible combat de Sooutsbaye, que la flotte anglaise, commandée par le duc d'Yorck (depuis Jacques II) et jointe à la flotte française, commandée par le comte d'Estrées (depuis maréchal de France ), livroit au célèbre Ruyter. Valbonnais étoit apparemment comme passager sur la flotte anglaise. Ce spectacle le dégoûta pour jamais, et des batailles navales et des voyages. Il revint s'attacher, pour le reste de sa vie, aux paisibles travaux des lettres et de la magistrature. Il eut le malheur de devenir aveugle de bonne heure, et il l'étoit lorsqu'il publia, et même lorsqu'il composa son Histoire du Dauphiné, en deux volumes in-folio. Valbonnais a laissé en manuscrit, un Nobiliaire de la même province.

L'an 1732, le 1 mars, Mort de Chirac.

Pierre Chirac, né dans le Rouergue, en 1650, membre de l'Académie des sciences, remplaça le célèbre Dodard à la cour, en 1730, et fut en même tems le premier médecin du roi et le premier médecin de sou siècle.

Il fit une espèce de révolution dans la médecine; il introduisit l'usage de la saignée du pied dans la petite vérole, ayant remarqué que dans ceux qui étoient morts de cette maladie, il y avoit inflammation de cerveau, et que si la saignée avoit quelquefois été suivie de la mort, c'est qu'on y avoit toujours recours trop tard. M. Silva disoit qu'il appartenoit à M Chirac d'être législateur en médecine.

Le duc d'Orléans, blessé dangereusement à la funeste bataillede Turin, étoit sur le point de perdre le bras; Chirac imagina de lui faire mettre ce bras dans les eaux de Balaruc, ce qui produisit une guérison prompte, parfaite et presque miraculeuse.

Chirac ne réussit à Paris qu'à force de mérite; il avoit tout ce qu'il falloit pour ne pas réussir. Il parloit peu, sans agrément, et sèchement. « Il pré>> sentoit, dit Fontenelle, aux malades, l'idée désobligeante, quoique vraie, qu'il y avoit de la fan» taisie et de la vision dans leurs infirmités; il leur >> nioit sans détour jusqu'à leur sentiment même. Et » combien les femmes principalement en devoient» elles être choquées?

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L'an 1781, le mars, Mort de Sainte-Palaye. Jean-Baptiste de la Curne de Sainte-Palaye naquit à Auxerre en 1697. L'Histoire de France, l'Histoire de la Langue et des Antiquités françaises l'occupèrent

ute sa vie. Aussi savant que son ami, M. de Foncemagne, et plus laborieux, ou du moins plus porté à écrire, il avoit entrepris et exécuté, en grande partie, les plus vastes ouvrages. Son Glossaire français universel, où chaque mot étoit accompagné de preu ves et d'exemples des différens sens dans lesquels il avoit été pris, dans les divers tems, et par les différens auteurs, auroit été le monument le plus précieux de son érudition. Il a laissé en manuscrits, une Histoire particulière des Variations successives de la langue française, et un Dictionnaire des Antiquités françaises. Ces grands et utiles ouvrages seront peut-être imprimés un jour, quand on compte ra davantage sur le goût du public pour une saine érudition. Cela est d'autant plus à desirer, que Sainte-Palaye, par un style pur et simple, qui ne manque pas d'élégance, sait donner à l'érudition tout l'agrément dont elle est susceptible. On peut en donner pour preuve, ses Mémoires sur la Chevalerie, que les femmes même lisent avec plaisir.

Sainte-Palaye a rempli le recueil de l'Académie des inscriptions et belles lettres de savans Mémoires, qui éclaircissent divers points de l'Histoire de France, et qui ont, comme ceux de Foncemagne, le mérite de faire autorité. C'est lui qui, par des notices exactes, a fixé nos idées sur les écrivains des premiers tems de notre histoire. Mais il n'étoit point entièrement renfermé dans les antiquités françaises: quelquefois it

faisoit des excursions heureuses dans l'histoire ancienne, témoin la manière dont il concilia Denisd'Halycarnase et Tite - Live, sur six des premiers consulats de Rome.

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