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qui, s'ils réussissent à se faire rendre justice, sont loin d'en être quittes pour une fin de non-recevoir.

Tel est, en résumé, l'aperçu de l'esprit du Code annamite; il a pour but de terrifier par la crainte des plus graves châtiments tout ce qui paraît devoir porter la plus légère atteinte à l'autorité absolue du roi d'abord et de sa famille, puis des ascendants du mari sur sa femme et ses enfants, du maître sur ses serviteurs et ses esclaves, enfin des mandarins militaires et civils sur leurs subordonnés et sur leurs administrés.

Le Code annamite n'est pas seulement un Code, c'est un recueil complet initiant à tous les rouages administratifs, civils et militaires de l'empire d'Annam, qui réglemente tout, les rites, les coutumes religieuses, les devoirs civils et militaires, ceux des administrés et des administrateurs, entrant dans les détails les plus intimes de tout ce qui peut se passer dans la vie annamite, tels que les habitudes de l'autorité sans limites des empereurs sont parvenus à les inculquer à une population d'une centaine de millions d'habitants, car ce n'est qu'une reproduction de la Chine, répandus sur une surface au moins égale au quart du globe habité.

L'esclavage. L'étranger ne peut, de prime abord, soupçonner l'existence de l'esclavage et de la traite des esclaves dans l'empire d'Annam; en effet, rien dans la couleur ne distingue l'esclave de l'homme libre; bien peu de chose le différencie de la plupart des serviteurs à gages. Il n'est donc point étonnant que ce fait de l'existence de l'esclavage échappe à la première vue.

L'esclavage, chez les Annamites, est basé sur les mêmes principes qu'en Chine. Il se recrute chez les personnes du peuple réduites à l'indigence, soit qu'elles se vendent elles-mêmes, soit que, chargées d'une nombreuse famille, elles consentent à vendre un ou plusieurs de leurs enfants. Cependant, en Cochinchine, la population Moë forme environ les sept ou huit dixièmes des esclaves. La promiscuité, comme la misère de ces populations, en même temps que le mépris professé par les Annamites à leur égard, favorise considérablement le trafic d'esclaves chez un peuple qui s'y prête du reste volontiers lui-même.

Lorsqu'un Annamite est décidé à se vendre comme esclave, c'est toujours par-devant le maire de son village que se passe le contrat, et ce sont les autorités communales qui servent de

témoins dans l'acte de vente, si l'esclave n'a plus ni père, ni mère, ni parents d'aucune sorte.

S'il s'agit d'un esclave Moi, il est en général vendu de seconde main à son véritable maître, car il a été d'abord acheté dans ses montagnes par un courtier, ou marchand d'esclaves. Lorsque les choses se passent comme il est prescrit par la loi, l'achat a lieu chez les Mo❞ avec les mêmes formalités que dans les villages annamites.

Mais beaucoup de marchands d'esclaves se livrent à des ruses coupables, engageant des jeunes garçons ou jeunes filles à venir manger sur leurs barques, et alors ils les garrottent et les enlèvent pour les vendre. La loi punit sévèrement en ce cas le marchand et l'acheteur.

Le contrat de vente une fois conclu, l'esclave devient, à porprement parler, la chose de son maître, qui peut le battre mais non cependant le tuer, car la loi se réserve de punir elle-même les esclaves des crimes dont ils peuvent se rendre coupables.

L'esclave No-Boé est en servitude pour son pays, et non-seulement lui, mais ses enfants et petits-enfants; il en est de même naturellement pour sa femme, qui ne peut être devant la loi qu'esclave elle-même. Il ne faut donc pas confondre l'esclave avec l'homme engagé, appelé Co-Cang dans le Code. Celui-ci appartient à son maître pendant la durée de son engagement, mais il demeure libre une fois l'engagement fini.

Il est de principe que l'esclave ne peut se racheter qu'avec le consentement de son maître; l'esclave n'a donc aucun droit au rachat. En général, la liberté est rendue gratuitement par son maître, soit à un vieil esclave en récompense de ses bons services, soit pour se rendre propice une divinité, ou pour la remercier de quelque bonheur arrivé dans la famille du maître. Le prix d'un esclave d'une vingtaine d'années, bien constitué, est d'environ 500 ligatures.

Les enfants se vendent 200 à 300 ligatures. Le prix des femmes, qui est à peu près le même, varie selon les aptitudes qu'elles possèdent pour le service d'une maison; il est défendu par la loi au maître d'une femme esclave d'abuser d'elle, si elle n'a pas de mari; ce serait là une insulte que toléreraient difficilement les parents de l'épouse légitime. Les esclaves mâles sont employés aux champs, mais plus

TOME IX.

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particulièrement au soin des jardins. On est un grand propriétaire d'esclaves quand on en possède une cinquantaine, ce qui prouve que l'esclavage a un but beaucoup plus domestique qu'agricole,

Sur ces cinquante esclaves, on peut compter qu'une quinzaine seulement au plus sont de race pure annamite, le reste est Moë, moitié Cambogiens, dans les six provinces du Sud,

Il y avait beaucoup d'esclaves à Gia-Dinh avant la venue des Français; ils se sont maintenant enfuis dans les provinces d'Ang-Giang et de Haï-Tien, se rapprochant ainsi du Camboge, leur ancienne patrie.

C'est en ce moment au Binh-Thuan et dans la province de Cauh-Hoa, sa voisine, que se trouvent le plus grand nombre d'esclaves. Cela a du reste toujours été ainsi, à cause du voisinage très-rapproché de nombreuses tribus de Moi. C'est dans le Binh-Thuan que de grandes barques pontées allaient chercher des esclaves, vendus régulièrement par des courtiers dont le métier est d'approvisionner les provinces voisines.

Cela donne à l'esclavage annamite une physionomie un peu différente de ce qui se passe en Chine, où la population aborigène et correspondante aux Moï de ce pays, population nommée Miao-Toe, est beaucoup trop indépendante pour se laisser réduire en esclavage. Il en résulte qu'en Chine c'est le peuple luimême qui fournit à l'esclavage, tandis que dans l'empire d'Annam il n'y entre que pour les deux ou trois dixièmes au plus.

L'esclavage ne pouvant légalement exister là où domine la France, il n'y a pas à craindre qu'il soit rétabli en Cochinchine. (Revue maritime et coloniale.)

(Moniteur du 4 janvier 1863.)

Au moment où le gouvernement s'occupe du tarif auquel doivent être soumis les actes notariés, il ne sera peut-être pas sans intérêt de jeter les yeux sur le tarif suivant, arrêté à l'assise d'Angers du 18 décembre 1385:

Copie.

Droiz de seaulx et escriptures1.

C'est l'instruccion anciennement faicte sur les proufiz et droiz des seaulx et escriptures du tabellionnage des contralz de la ville, quintes, et ressort d'Angers.

Et premièrement, des lettres appelées mémoriaux :

De une lettre de LX s. et jusques à cs. à une foiz païer et audessoubz, l'en doit prendre II s. vid.

Et de x 1. et jusques à xx 1. et auddedenz, v s.
De lettre de c 1. à une foiz païer, vIII s. IIII d.

Et audessur de c 1., pour chacune livre I denier.

Et doyvent estre faictes toutes telles lettres en queue simple. Item, des lettres à héritaige; c'est assavoir :

De lettre de v s. de rente et audesso ubz, et aussi jusques à XXX s. de rente, v s.

De lettre de LX s. de rente, VII S. VI d.

De lettre de c s. de rente, xs.

De lettre de x 1. de rente, xx s.

De lettre de xx 1. de rente qui puent estre venduz II c 1., l'on doit prendre des premières c 1., xx s.; et des secondes cl., xii d. Ainsi en est deu XXI S.

De lettre de xxx 1. de rente qui puent estre vendues i cl., l'en doit prendre des premières c 1., xx s.; et des secundes c 1., XII d.; et des darrenières c l., 1 d. pour livre.

Ainssi en est deu XXIX s. IIII d.

1 Archives de l'empire, p. 1115, fo xxxIII. Ce tarif fait partie d'une collection de textes relatifs aux anciennes coutumes de l'Anjou et du Maine antérieures à 1509, que je compte publier prochainement. Je prie instamment les lecteurs de la Revue historique qui auraient connaissance de quelques documents relatifs à ces coutumes, de vouloir bien me les signaler. Je leur en serai infiniment reconnaissant.

Et de toutes autres rentes acquises au dessur de xxx 1. de rente jusques à cl. de rente, l'en doit pour chacune livre de l'argent qui en sera payé, I d.

De c 1. de rente qui pourroient estre vendues mil 1., l'en doit pour les premières cl., xx s.; et pour les premiers xx s. après, XII d.; et pour chacune livre à compter jusques au parfait desdictes mil 1., 1 d. Ainssi est deu de c 1. de rente pour lettre, IIII 1. xv s. XI d.

Ainsi les questions qui préoccupent en ce moment se sont trouvées résolues à Angers il y a environ cinq siècles, à peu près de la même manière qu'elles le sont aujourd'hui dans la pratique.

Les actes des notaires sont tarifés. Il existe aujourd'hui presque dans chaque arrondissement un tarif qui, s'il n'a pas de caractère officiel, est au moins, la plupart du temps, accepté comme base de la taxe des honoraires des notaires.

Les tarifs d'aujourd'hui admettent deux catégories d'honoraires, les honoraires fixes et les honoraires proportionnels. Notre tarif d'Angers n'admet que les honoraires proportionnels. Les rédacteurs de ce tarif ont, sans aucun doute, fait comme tous les rédacteurs de tarifs, ils se sont occupés des actes qui se passaient le plus ordinairement devant les notaires de leur temps, ils ont plutôt sanctionné d'anciens usages qu'opéré une réforme dans la perception des honoraires réclamés par les notaires.

Notre tarif est fondé sur cette double idée, que la rémunération du travail du notaire doit être proportionnelle à l'importance de l'acte qu'il fait, mais que la proportion doit diminuer à mesure que la valeur de l'acte augmente: c'est ce que nous appelons aujourd'hui la proportionnalité décroissante.

Les actes dont il s'occupe se divisent en deux catégories, que nous appellerions aujourd'hui obligations et constitutions de

rentes.

Obligations.- Jusqu'à cent sous, on doit payer au notaire 2 sous 6 deniers, c'est un droit de 2 1/2 pour 100 sur les cent sous. Jusqu'à 20 livres on paye 5 sous, cela fait 1 1/4 pour 100 sur les 20 livres.

Le tarif ne dit pas ce qu'on doit payer pour des lettres de 20 à 100 livres.

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