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donna à des excès qui préparerent la ruine de la monarchie persienne. Philippe de Macédoine nous offre un exemple d'un autre genre, Auffi-tôt qu'il fe vit pere, il écrivit à Ariftote une lettre conçue en ces termes : » Je vous fais favoir que les dieux m'ont donné un fils. Ce n'eft pas autant fa naiflance qui me réjouit, que fon bonheur d'être né pendant qu'Ariftote le trouve encore parmi les mortels pour le guider dans fes inftructions. » J'efpere, qu'élevé

fous vos yeux & par vos foins, il deviendrá un ❤ jour digne du rang où le ciel l'a fait naître. «<< Voilà un prince qui connoît tout le prix d'une bonne éducation. Le fils eut les mênies fentimens un hiftorien nous affure qu'Alexandre aima Ariftote comme un fecend pere : » je dois » la vie à l'un, dit-il, & la vertu à l'autre. «

Mais ce n'eft pas affez pour un prince que de procurer une bonne éducation à fes propres enfans tous les enfans qui naiffent dans fes états ont le même droit à fes foins. La négligence de ce devoir facré devint fatale aux beaux projets & aux loix excellentes de Numa, comme l'obterve Plutarque; & fi Lycurgue n'avoit pas eu l'art de refondre fes loix dans les mœurs des Lacédémoniens par le moyen de l'éducation, le ferment, qu'avant fa mort il leur fit prêter pour l'observation de fes préceptes, n'auroit été qu'un foible garant de leur autorité.

On eft bien loin d'ignorer l'importance de l'éducation; difons plutôt que tous les fiecles L'ont reconnue les anciens Païens ne croyoient pas même que leurs dieux avoient pu s'en paf

fer. La fable nous représente Jupiter comme l'éleve des Graces, & Apollon comme celui de Mercure. L'inftruction de la jeuneffe étoit aufh regardée comme un foin digne des divinités mêmes on voit Cérès enfeigner l'agriculture au jeune Triptoleme, & Calliope inftruire dans l'art de l'harmonie fon fils Orphée. Les philofophes & les favans de tous les tems ont dévoué une grande partie de leurs foins à l'éducation publique ; & combien d'établiffemens n'avons-nous pas pour cet objet? Auffi apprend on par-tout les fciences. Il ne refte, pour perfectionner l'ouvrage, qu'une méthode plus fuivie pour former les jeunes cœurs à l'amour de la religion, de la vertu & des devoirs de la vie fociale. Voilà de quoi devroient s'occuper les législateurs.

MÉMOIRE fur l'objet le plus important de l'agriculture; par M. J. CALIGNON, cultivateur à Are-fur-Tille, diftriét de Dijon, électeur du département de la Côte-d'Or. A Dijon, de l'imprimerie de P. Cauffe, 1791. Brochure in-8vo. de 24 pages.

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UE nous voyions paroître un grand nom→ bre de mémoires de ce genre, faits par des cultivateurs, & nous pourrons dire que l'agriculture fait de grands progrès parmi nous. Les découvertes font fans doute une chose très-importante; mais il eft, pour le moins auffi in

téreffant de répandre les pratiques utiles, déjà connues, & qui ne font pas généralement adopFées. Ce n'eft point au favant qui ne connoît que fes livres & fon cabinet, qu'il appartient d'inspirer de la confiance; c'eft aux cultivateurs mêmes qui peuvent dire : J'ai fait, & fait avec fuccès, pendant un tel efpace de tems, & de telle ou telle maniere, ce qui m'avoit été recommandé. A ce titre, le mémoire de M. Calignon eft une production précieuse, puisqu'il prouve, par des expériences multipliées, combien il eft utile de femer clair & de chauler convenablement fes femailles, deux points négligés encore par le plus grand nombre des cultivateurs.

Les laboureurs du département de la Côted'Or, & fur-tout ceux du diftrict de Dijon, fement plus d'un tiers, quelquefois plus d'une moitié de la quantité de grains qu'il conviendroit de confier à la terre. Dans les bonnes terres, comme dans les médiocres, ils fement environ quatre méfures de bled par journal (le journal eft compofé de 360 perches de 9 pieds & demi, & la mesure de Dijon, en bled de femence, pefe au moins 45 livres); ils excedent même cette quantité dans quelques endroits. De-là, tous les inconvéniens qui résultent des femences trop épaiffes, & que nous avons indiqués plus d'une fois, notamment en rapportant un mémoire de M. Parmentier.

Ici, nous allons laiffer parler M. Calignon ; les faits qu'il cite ont trop d'intérêt pour n'être qu'indiqués dans une feuille confacrée entièrement à la partie expérimentale de l'agriculture.

› Un fait, dit-il, qu'il eft bon de faire con> noître, & qui s'eft paffé fous les yeux de la > commune de Ceffey, canton de Genlis, de› montre la vérité de ce que j'avance. M. Bar» tet, cultivateur & maire de cet endroit, qui fuit, pour les femailles, la méthode que fes peres lui ont enfeignée, avoit préparé aux femailles de l'année derniere 1790, deux facs > de femens, l'an de quatre mesures, l'autre de > deux & demi, pour femer deux champs, con> tenant, l'an un journal, l'autre deux riers de ⚫ journal. Les quatre mesures étoient destinées > au champ du journal : mais le domestique ♦ chargé de femer les deux champs, échangea ⚫ les deux facs par mégarde, il fema les deux > mefures & demie dans le journal, & les quatre ⚫ mesures dans les deux tiers. Quand son erreur fut ▾ découverte. M. Bartet crut que cette étour› derie lui feroit préjudiciable: mais fe rappellant fur le champ ce que je lui avois dit plu fieurs fois au fujet des femailles, il regarda ⚫ cet accident comme une expérience que le > hafard le forçoit de faire; elle lui a parfai> tement réuffi. Son journal, femé avec deux > mesures & demie, a été la plus belle piece, la > plus productrice de fa récolte; au contraire, le champ de deux tiers de journal, dans le >quel on avoit femé quatre mefures, qui étoit

auffi bien cultivé, aufli bien engraiffé que > l'autre, a produit, proportion de la conte» nance gardée, bien moins que le premier. » Ce n'eft point fur un feul journal, continue M. Calignon, fur une quantité médiocre de

> terrain, que je pratique cette méthode. J'ai femé, l'année derniere, plus de deux cents journaux de froment, dans lefquels je n'ai > pas mis plus de deux mefares de feinens par > journal. Cependant na récolte a été, non> feulement fort belle, mais encore très-fupé> rieure à celle des autres cultivateurs du pays, > Mes voifins croyoient au mois d'Avril, que > mes bleds étoient beaucoup trop clairs; j'ai > même effuyé à ce fujet quelques ironies, quelques plaifanteries ameres, fur lesquelles j'ai gardé le filence, bien certain que le résultat de la récolte y répondroit mieux que tous > mes raifonnemens. En effet, ces voifins ont > paru très-étonnés, à la moiffon, que mes > bleds aient produit une quantité de gerbes » pour le moins égales aux leurs ; mais quelle

différence n'ont-ils pas remarqué dans la groffeur & la bonté des épis? Elle eft telle, qu'il faut à mes voifins douze gerbes, & qu'il n'en faut que huit des miennes pour faire une mesure. « Mais, difent quelques cultivateurs, vous êtes peut-être redevable de cet avantage à la maniere dont les faifons fe font conduites cette an née. Et voilà, pourfuit M. Calignon, l'ob

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jection qui m'a été faite par quelques gens obftinément attachés à la routine). Si l'hiver > eût été violent, fi les infectes ou d'autres accidens euffent détruit une partie de vos grains de femences, alors vos bleds auroient été beaucoup trop clairs, les mauvaises herbes y > auroient pouffé en abondance, & auroient » étouffé le bon grain, &c. Je réponds, 1°. que,

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