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2. S. A. R. n'entend remettre que les peines encourues; quant aux dommages-intérêts que des particuliers se croiroient en droit de prétendre, à raison de violences et voies de fait exercées sur leurs personnes et leurs propriétés, ils pourront être demandés par action civile et par les voies ordinaires.

3. Sont exceptés de la disposition de l'article 1. les fonctionnaires publics qui seroient prévenus d'escroquerie et de

concussion.

Par décret du 25 avril, MONSIEUR, lieutenant-général du royaume, «voulant consacrer le souvenir de la courageuse résistance que les habitans de l'Ouest ont long-temps opposée au renversement du trône et de l'autel, résistance dont notre cœur a été doublement touché, tant par la fidélité persévérante de ces braves François, que par les maux déplorables qu'elle a attirés sur leurs provinces, a ordonné ce qui suit:

« La ville ci-devant appelée Napoléon prendra le nom de Bourbon-Vendée ».

S. M. le Roi LOUIS XVIII a quitté Hartwell. Il a fait son entrée à Londres, le 20 avril. Le prince régent lui a rendu les plus grands honneurs, et l'a félicité de l'heureux événement qui le replace au trône de ses ancêtres. S. M. dans sa réponse a remercié S. A. R. de la part qu'elle a prise à cet événement, auquel l'Angleterre a tant contribué par sa courageuse résistance à l'ambition de l'usurpateur. Le Roi étoit accompagné de Mme. la duchesse d'Angoulême, du prince de Condé, du duc de Bourbon, et de beaucoup de gentilshommes françois. A la fin de la conférence, S. M. a revêtu le prince de Galles du cordon de l'ordre du Saint-Esprit; la joie publique s'est manifestée par des cris d'allégresse et des illuminations.

S. M. après s'être reposée quelques jours, se remit en route. Elle arriva, le 25 avril, à Calais, et dut coucher, le 26, Amiens, et le lendemain à Compiègne, où elle s'arrêtera quelques jours pour se délasser, et en même temps pour donner le temps de faire les préparatifs de son entrée dans sa capitale. Ce moment est attendu avec impatience, et les étrangers accourent de toutes parts pour être témoins de cette fête vraiment nationale.

MADRID, 26 mars.

L'un des événemens les plus étonnans de notre histoire vient enfin de s'accomplir, la délivrance de

notre bien-aimé Ferdinand, qui se trouve maintenant à Gironne, au milieu de ses fidèles sujets. Quel vaste champ cet événement fournit aux réflexions!

A cinq heures du soir, il arriva ici un courrier extraordinaire d'après les bruits qui s'étoient déjà répandus, on conjecturoit que ce courrier apportoit la nouvelle de l'arrivée de notre roi; des groupes de citoyens se formoient de tous côtés pour s'en informer. Cette nouvelle ne fut pas plutôt annoncée, que l'air retentit de mille cris de vivat, qui se prolongeoient dans toute la ville, et en peu d'instans tout Madrid fut informé de cette circonstance tant désirée. La population entière étoit répandue dans les rues, et la joie se peignoit sur toutes les physionomies.

Le soir, il y eut une illumination générale, durant laquelle l'enthousiasme du peuple se manifestoit de mille manières. Il étoit presque impossible de circuler dans les principales rues, tant la foule étoit immense et pressée. Des vivat continuels retentissoient de tous côtés, des drapeaux étoient déployés à tous les balcons, à toutes les fenêtres. Différens groupes d'hommes et de femmes, portant des torches allumées, et précédés de la musique, parcouroient tous les lieux publics; en un mot, c'étoit un véritable jubilé, dont on ne peut se former une idée qu'en le comparant à celui de la journée mémorable du 19 mars 1808. Si l'on entendoit alors les cris continuels de vive Ferdinand! périsse Godoy! cette fois l'air retentissoit des cris de vive Ferdinand! confusion à Napoléon!

Du 30 mars. Dans la séance extraordinaire des cortès, tenue le 28, où l'arrivée de Ferdinand fut annoncée à cette assemblée, on donna lecture de la lettre suivante de S. M. à la régence. Cette lettre étoit en espagnol, écrite de la main de S. M.

Gironne, le 21 mars 1814.

« J'arrive à l'instant en parfaite santé, grâce au ciel, et le » général Copons me remet la lettre de la régence, avec les » documens qui l'accompagnent. Je prendrai une connois>>sance exacte de ce qu'ils contiennent; en attendant, j'assure » la régence que je n'ai rien tant à cœur que de lui donner » des preuves de ma satisfaction, et du désir ardent que j'é>> prouve de faire tout ce qui peut contribuer au bonheur de >>mes sujets.

» C'est une grande satisfaction pour moi de me trouver sur » la terre natale, au milieu d'une nation et d'une armée aux

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» quelles je dois toute ma reconnoissance pour une fidélité >> aussi constante que généreuse ». Signé, Moi LE ROI.

Dans la matinée d'hier, un corps de troupes est sorti de la ville pour recevoir Ferdinand VII, qui doit arriver par la route de Valence; bientôt après, le cardinal de Bourbon, président de la régence, et le senor Layendo, ministre d'Etat, allèrent au-devant de S. M.

Aujourd'hui on a célébré dans l'église de Sainte-Marie, un service solennel en actions de grâces, auquel la régence et les cortès ont assisté. Ils s'étoient réunis dans la salle du congrès, d'où ils se rendirent en procession à l'église à travers un concours immense de spectateurs, et entre deux lignes de troupes. Ils étoient accompagnés des grands et des généraux du royaume, ainsi que de LL. EE. l'ambassadeur anglois et les envoyés de l'Autriche et du Portugal. Toutes les maisons sur leur chemin, étoient ornées de tapisseries. Cette solennité excita l'enthousiasme dans la foule qui remplissoit les rues.

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Du 4 avril. Assemblée des cortès. Une lettre du général Copons, en date du 30, porte que S. M. et l'infant don Carlos continuent de jouir de la meilleure santé, mais que l'infant don Antonio est tombé malade à Mataro; cependant cette indisposition donne d'autant moins d'inquiétude, que les médecins ont assuré que le prince pourroit continuer son voyage le 1°. avril.

Sur la motion du président, il a été résolu qu'il seroit donné avis au gouvernement de la part que les cortès ont prise à ces nouvelles.

L'ordre du jour ramène la discussion sur la liste civile : la régence est d'opinion que, considérant l'état de la nation espagnole et la dignité du roi d'Espagne, S. M. doit avoir annuellement 40 millions de réaux et six millions pour l'établissement de la maison royale, et que les infans d'Espagne jouiront de 150,000 ducats pour leur maison.

Du 5.-On a lu des dépêches du lord Wellington, concernant le combat qui a eu lieu près de Conchez; elles ont excité une joie très-vive.

Du 6.-Des lettres du gouvernement civil de Catalogne et d'Aragon annoncent que le roi a résolu de passer par Reuse, Sarragone, Lérida, Téruel et Valence.

Les ambassadeurs d'Angleterre et de Portugal sont partis pour Valence, où ils doivent attendre le roi.

Sur S. M. le Roi Louis XVIII.

La famille auguste, dont le retour fait en ce moment le sujet de la joie générale, est l'objet d'un intérêt bien vif et d'une curiosité bien légitime. On se plaît à connoître, et les sentimens qui l'ont occupée pendant son exil, et les différentes épreuves qu'elle a subies jusqu'au moment où elle vient d'être appelée au trône d'une manière si miraculeuse. C'est pour satisfaire cette juste curiosité, que nous allons entrer dans quelques détails sur le Roi, objet en ce moment de tant de vœux et d'hommages..

Louis-Stanislas-Xavier de France, naquit à Versailles, le 17 novembre 1755, et porta long-temps le titre de MONSIEUR, comte de Provence : il étoit le quatrième fils de ce sage et vertueux dauphin, enlevé par une mort prématurée. Il étoit le frère puîné de ce malheureux Louis XVI, dont nous avons si mal payé la bonté, la vie pure et irréprochable, l'amour pour ses peuples, le désir de faire le bien, les vertus morales et chrétiennes. Le Roi actuel a beaucoup de rapports de caractère avec cette illustre victime de la révolution. Il avoit aussi montré, au commencement de nos troubles, les mêmes vues conciliantes et modérées, qui ont si mal réussi à l'un et à l'autre. Il étoit populaire, et il resta parmi nous jusqu'au moment où il n'y eut plus d'espérance de le faire impunément. On se rappelle qu'il partît en même temps que Louis XVI. Mais il suivit une autre route, et le ciel permit qu'on ne mit pas d'importance à empêcher sa sortie de France. Tandis que le Roi étoit arrêté à Varennes, MONSIEUR arrivoit heureusement en Flandres, et il Tome Ier. L'Ami de la Relig, et du Roi. No. IV.

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alla joindre le prince son frère, et le grand nombre de gentilshommes françois qui avoient trouvé un asile dans les Etats de l'électeur de Trèves. Là ils cherchèrent vainement à lutter contre les progrès d'une révolution, qui devenoit de jour en jour plus grave et plus effrayante. Ils entendirent gronder l'orage sans pouvoir le conjurer, et ils gémirent sur les déchiremens des partis, et sur les crimes qui souillèrent leur patrie. Bientôt même ils furent forcés de quitter leur asile sur les bords du Rhin, et de s'enfoncer dans l'Allemagne à mesure que les armées françoises s'avançoient vers ce pays. Ils résidèrent successivement en différens lieux. MONSIEUR, devenu Roi, demeura quelque temps à Véronne, et on se rappelle avec quelle noble fermeté il écrivit au sénat de Venise, quand celui-ci lui intima l'ordre de sortir des Etats de la république. Sa lettre fut publiée à cette époque, dans les journaux, même en France, et fut applaudie par ce caractère de dignité qui honore un prince dans l'infortune. D'Italie, le Roi passa en Allemagne, et depuis en Russie, où un monarque généreux lui fit un traitement analogue à sa dignité. C'est-là qu'il resta plusieurs années avec quelques françois fidèles à sa fortune. Il y fut joint par l'abbé Edgeworth, ce digne ecclésiastique qui avoit rempli, auprès de Louis XVI, un courageux et triste ministère, et qu'on ne pouvoit voir sans être pénétré de respect pour sa vertu, d'estime pour son noble caractère, et d'attendrissement pour les récits touchans qu'on aimoit à entendre de sa bouche (1). Il y fut foint plus tard par MADAME, fille

(1) M. Edgeworth mourut, dit-on, à Mittau, en 1807, des suites d'une maladie qu'il contracta dans les hôpitaux où il alloit donner des secours aux prisonniers françois.

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