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saisi de l'affaire, ordonna la vue des lieux, et entendit des témoins.

Par jugement du 3 février 1806, il condamna le sieur Goes à une amende de 30 francs, et aux dommages-intérêts des plaignans, qui étaient parties civiles au procès le fermier fut acquitté.

Cette condamnation reposait sur l'article 16 de la loi du 28 septembre 179, concernant la police rurale; cet article est transcrit dans les motifs de l'arrêt rendu dans la présente cause.

Sur l'appel porté à la connaissance de la cour de justice criminelle du département de la Dyle, arrêt du 22 mars suivant, qui émende en ce que le fermier aurait été acquitté : du reste, le jugement est confirmé.

Cette leçon ne rendit pas le sieur Goes plus circonspect. Les propriétés des sieurs Mari et Lacour se trouvèrent de nouveau inondées et notablement endommagées par l'élévation excessive des eaux du moulin.

Retourner au tribunal de police correctionnelle, c'était chercher un demi-remède; il fallait couper le mal dans sa racine, en contraignant le sieur Goes à régler le cours des eaux de manière à ne plus nuire aux propriétés particulières, continuellement exposées à l'inondation.

C'est le parti que prirent les sieurs Mari et La

cour.

A cet effet, ils s'adressent au tribunal civil de Nivelles,

Bruxelles, et y demandèrent que le sieur Goes fût tenu de faire construire son déversoir de telle sorte que le cours d'eau ne fût pas interrompu, et cela d'après expertise.

Ils demandaient condamnation à dix francs par jour de retard, et en outre les dommages-intérêts nouvellement soufferts, suivant la somme déterminée par l'ajournement, ou à déterminer par experts.

25 novembre 1806, jugement par défaut qui accorde les conclusions.

Goes est appelant.

I soutient que les sieurs Mari et Delacour sont non recevables;

Que leur action est incompétemment soumise aux tribunaux civils; qu'elle est du ressort de l'autorité administrative, et qu'en tout cas le préjudice dont ils se plaignent est uniquement du fait de Constant son fermier et que c'est contre lui que la demande devait être dirigée.

La hauteur des eaux, disait-il, ne peut être réglée que par l'autorité administrative. Le texte de l'article 16 de la loi du 28 septembre 1791 est formel: il parle des moulins ou usines construites, ou à construire.

En cas de contravention, la peine sera une amende qui ne pourra excéder la peine du dédommagement.

Cette peine doit être prononcée par le tribunal de police correctionnelle.

Tome I, N. 1.

Le sieur Goes rapportait une lettre de la secrétairerie de la préfecture, constatant que ses pièces y étaient déposées pour faire fixer la hauteur des eaux; il ajoutait même, que l'on trouverait dans les mêmes pièces, la preuve des autorisations qu'il avait obtenues pour les changemens faits à son usine. Ce fait était sans doute avancé dans la vue d'augmenter ses moyens d'incompétence; car rien n'est plus facile que de le prouver par l'extrait de l'original, ou des pièces déposées.

Le sieur Goes montrait d'avance le conflit qui allait s'élever entre l'autorité judiciaire et l'autorité administrative, par le choc des deux décisions, dont l'une était sollicitée par lui à la préfecture, et l'autre demandée aux tribunaux par les intimés.

Il recourait à l'article 16 de la loi du 28 septembre 1791, pour rejeter le poids de l'action en dommages-intérêts sur son fermier.

*

Cet article porte que les propriétaires ou fermiers sont garants de tous dommages que les eaux pourraient causer aux usines ou propriétés, etc.

Propriétaires ou fermiers, selon que l'usine est exploitée par le propriétaire, ou par le fermier.

Cette division est dans la nature des choses; car comment rendrait-on le maître, qui n'occupe pas l'usine, responsable de l'élévation des eaux, au-dessus de la hauteur fixée; n'est-ce pas au fermier à diriger le déversoir?

Supposé qu'il n'existe pas de jauge, le fermier

est-il moins tenu du tort qu'il occasionne par sa négligence, à procurer aux eaux un libre cours?

Les intimés ne disconvenaient pas que le pouvoir de fixer la hauteur des eaux, fut attribué à l'autorité administrative.

Ils n'entendaient pas par leur demande provoquer un réglement dans l'intérêt général de tous les propriétaires ou riverains; c'eût été proposer aux tribunaux d'empiéter sur l'autorité administra tive; ils s'expliquaient, en disant :

C'est par la retenue des eaux qui se fait pour le moulin du sieur Goes, que nos propriétés sont endommagées.

La loi donne action pour faire réparer le tort causé par le fait d'autrui, et pour empêcher qu'il se renouvelle.

L'article 16 de la loi du 28 septembre 1791 ouvre la voie des tribunaux répressifs; mais elle suppose une contravention à un réglement qui tient titre de loi entre le propriétaire de l'usine et tous les riverains.

Si ce réglement n'existe pas, on si le propriétaire de l'usine feint de le méconnaître, celui-ci ne devient-il pas passible de l'action en indemnité du préjudice qu'il cause par son fait? C'est un particulier qui fait tort à un autre particulier.

Si la hauteur des eaux a été fixée, chaque propriétaire voisin n'est-il pas recevable à demander que l'exploitation de l'usine soit conforme au réglement

et qu'en conséquence les choses soient rétablies sur le pied de la fixation primitive?

Dans l'état de choses, le recours aux tribunaux répressifs n'offre pas une garantie suffisante.

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En vain y aurait-il plusieurs amendes successivement prononcées, que la source du mal ne serait pas tarie. Le seul moven efficace de coaction est de réduire le propriétaire de l'usine, à l'impossibilite de nuire, et d'absorber la valeur des héritages des intimés, par la retenue arbitraire des eaux de la rivière.

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-Dans les circonstances actuelles, les intimés sont autorisés à dire qu'il n'existe pas de réglement du cours d'eau. d'eau.

Celui qui a nécessairement eu lieu, lors de la construction du moulin à ardoises, a changé d'objet, par les nouvelles destinations de l'usine; et il suit de l'état présent des choses, que le sieur Goes est,squmis aux dispositions du droit commun,..

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Le sieur Goes prétend que la demande est mal dirigée; que l'inondation ne lui est pas imputable; que, si elle est réelle et préjudiciable, elle provient du fait de son fermier.....

Cette exception aurait quelque mérite, si le fermier avait une règle de conduite par un procès-verbal fixant la hauteur à laquelle il devait tenir les eaux; mais on n'en produit point.

Le fermier exploite un moulin à farine, élevé par le propriétaire sans s'être conformé à la loi; c'est

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