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adoptant de pareils principes, avait malheureusement le pouvoir de les faire dominer, il serait encore de sa prudence et de sa politique de dire que nous sommes en révolution; car ne seraitce pas calomnier la Monarchie, que d'avouer qu'elle a besoin des ressources dont s'étayaient les différens genres de pouvoirs qui, depuis vingt-cinq ans, ont disposé du nom et des volontés du peuple.

Ces réflexions acquerront une grande autorité, si on se donne la peine de les appliquer à la circonstance qui les a amenées. Quoi! c'est un écrit décent et honorable qui a attiré ce débordement de rage et de vociférations! . . Quoi! le Roi nous donne une constitution, et c'est un crime digne de mort , que d'en demander l'observation!

civile, que

Le Roi déclare ses ministres responsables, et c'est un crime que de lui in

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diquer en quoi ils ont prévariqué ! Le Roi veut que la presse soit libre, et c'est un crime de démontrer, par écrit, une inconstitutionnalité qui a été avouée par le Corps Législatif! On se plaint, dans un écrit, des inquiétudes qui agitent quatre millions d'acquéreurs de biens, légalement vendus par l'Etat ; et cette maladresse pour laquelle un ministre a été dénoncé au Corps Législatif et à la France entière, devient la cause d'une lâche et exécrable diffamation! Ce qui est bon et courageux dans la bouche d'un législateur gardé par la considération nationale, serait punissable dans un citoyen qui ne s'appuye que de l'évidence et de la vérité!... Un citoyen, soumis aux lois et respectueux pour les organes que le Prince a choisis, ne pourra pas se tromper, (je suppose ce que je ne crois pas) sans être assassiné par la vile et lâche milice que les despotismes éteints

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ont légué aux despotes à venir ! On ne veut pas voir que c'est trahir un bon prince que trahir la patrie, et que la vérité est aussi nécessaire à l'autorité de l'un qu'au bonheur de l'autre.

On reproche surtout au sieur Méhée de s'être élevé contre des crimes et des désordres, que certaines gens prétendent avoir été organisés dans l'intérêt de la famille réintégrée, et qui ont dû, selon ces certaines gens, être autorisés par elle mais d'abord on ne croit pas un mot de cette autorisation; et si elle était prouvée, il faudrait encore dire qu'elle n'est pas vraie, et s'élever contre ceux qui l'ont conseillée, et contre les instrumens employés à ces désordres. On sait bien que déjà une infinité de quidams commençaient à présenter à la reconnaissance du pouvoir royal les honteux services par lesquels ils ont, selon nous, retardé le desir de le voir

rétabli. Des incendiaires, des voleurs de grande route, des assassins publics, viennent de réaliser ce que l'on avait cru jusqu'à présent appartenir exclusivement à l'imagination des poètes. L'un se vante d'avoir brûlé nos vaisseaux : une héroïne, à reléguer avec les cannibales, est aujourd'hui présentée à l'admiration publique, pour avoir coupé le col (s) à son oncle qui défendait l'Etat à la tête d'une colonne républicaine. Les ar restations et vols de diligences seraient, si on laissait faire ces messieurs, récompeusés par des Croix d'honneur; et, en voyant ce signe sur la poitrine d'un

(s) C'est l'expression de la dame elle-même. On s'est bien gardé de lui rien prêter. Qu'on néglige de relever de pareils éloges, et bientôt on verra toutes les idées morales bouleversées, le fils s'honorer d'avoir massacré l'auteur de ses jours, Et, sa tête à la main, demander son salaire.

citoyen, il faudrait douter si l'on doit admirer ou frémir, et s'informer s'il a été gagné à l'attaque d'un poste autrichien ou à celle d'une diligence! Le sieur Méhée crut ( et s'il s'était trompé, il faudrait encore le remercier de l'avoir cru) que les intérêts du Roi seraient servis par celui qui lui dénoncerait cet état de choses. Les germes de discorde sontils done si rares, que l'on soit répréhensible de vouloir les écarter? Et quand ce que l'on nous dit, serait aussi vrai qu'il est impossible et faux, croit - on qu'il soit sans inconvénient de publier aujourd'hui qu'il est des cas, où, pour replacer sur le trône l'objet de ses affections, on peut brûler les vaisseaux de l'Etat, arrêter et égorger les passans, couper le col à son oncle, et semer la terre natale de débris et d'ossemens!... Supposons qu'avoir dit tout cela soit une faute, est-ce la réparer que de n'y

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