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est utile? L'agitation dangereuse n'est jamais que celle que les factions produisent: et quelle faction peut-il y avoir,

si chacun est animé du même esprit, si les distinctions ne sont plus l'ouvrage du caprice, mais celui d'un discernement juste, éclairé par l'analyse des faits; si chacun reconnaît la nécessité d'un pouvoir, et du sacrifice d'une portion de sa liberté? Or, nous sommes assez mûris par l'expérience, pour être bien pénétrés de ces maximes; et s'il reste encore quelques individus engoués de vieux préjugés à cet égard, ou heurtés à leurs opinions exagérées, ils se trouveront tellement noyés dans le nombre de ceux qui sont fatigués de révolutions, qu'ils rougiront bientôt de leur rôle absurde. Il ne faut pour cela que la volonté du prince, c'est la mère abeille dans une rûche; on le suivra partout, dès qu'il

aura donné le signal, et qu'on saura qu'il veut le bonheur commun, sans faire acception de personne ; je l'avoue, de semblables principes sont loin de la sombre maxime, divisez pour régner. Puissent donc mes concitoyens ne voir dans ces réflexions rapides que le désir sincère de prévenir toute réaction nouvelle, de leur inspirer ces sentimens nobles, cette bienveillance universelle qui porte à ne pas exiger des autres plus qu'on ne serait, peut-être, capable de faire soimême! Puissent-ils sentir la nécessité d'immoler l'orgueil individuel qui divise tout à l'orgueil national qui réunit tout; de ne pas se croire supérieur aux autres par leur nature, mais seulement par leur position dans l'ordre social; de comprendre que le vrai but du Gouvernement est d'entretenir l'harmonie entre tous les corps; que les distinctions inu

tiles sont toujours odieuses ou ridicules, et subversives de l'émulation ; que c'est à ce même ordre social que doivent se rapporter tous les efforts particuliers; qu'il est susceptible d'une infinité de formes différentes, entre lesquelles l'és avantages et les défauts sont partagés ; que toutes exigent l'exercice d'un pouvoir quelconque, et par conséquent le sacrifice d'une portion de liberté ! Puissent-ils sentir enfin qu'il vaut mieux supporter quelques inconvéniens, que de prétendre à une perfection, qui, dans la pratique est une chimère, et dont la théorie est trop incertaine ; que ce qu'il ya de plus utile en morale, est d'apprendre à se contenter de son sort, et que la nature, pleine de sagesse, a établi entre les hommes une sorte de compensation qui fait que l'inégalité des conditions est presque toujours plus apparente que réell.

Quant à vous, Ministres, qui jouissez de la confiance de Sa Majesté, vous la méritez sans doute par vos lumières et votre dévouement pour sa personne sacrée ; mais vous ne savez pas lui faire des amis vous travaillez sans cesse à désunir ceux que vous devriez chercher à rapprocher; vous exaspérez de plus en plus des hommes qui ne veulent que la concorde; vous ne faites pas savoir au Prince, que dans le coeur d'un Roi, les intérêts de la grande famille doivent l'emporter sur toutes les affections privées. Avez-vous déjà oublié que Napoléon n'est tombé de si haut, que parce qu'il n'a jamais voulu permettre qu'on lui dît la vérité, ni qu'on la dit à la Nation française? Est-il de la diguité du Prince de chicaner sur quelques expressions obscures de la charte constitutionnelle, comme s'il en était déjà au regret

de nous l'avoir donnée? et dans le cas d'un doute, ces expressions qui sont de lui, ne doivent-elles pas toujours être interprétées de la manière la plus libérale? Un Roi ne doit-il pas aller au-delà plutôt que de rester en-deçà de ce qu'il a promis? et ne devriez-vous pas lui rappeler sans cesse ce passage sublime de la proclamation de son aïcul Henri IV, n'étant encore que Roi de Navarre : Qui peut dire du Roi de Navarre qu'il ait jamais manqué à sa parole?

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