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ne vois pas quel mal il y aurait eu d'accompa gner l'armée de la Loire, puisqu'elle se retirait en vertu d'une convention purement mi

les inculpations se sont réduites à quelques signatures de forme en très-petit nombre, pour des affaires, que la multitude de celles dont j'étais personnellement chargé, ne me permettait pas de discuter. Ce n'est pas lorsqu'on est obligé de correspondre avec quatorze armées, sans employer de secrétaire, qu'on peut s'occuper d'autre chose. Si j'avais refusé ma signature aux actes de mes Collègues, ils m'auraient refusé les leurs; toute ma machine périssait entre mes mains, et il y eût eu bien d'autres victimes. C'est bien assez que chacun ait à répondre de ce qu'il est obligé de faire par lui-même : or, dans le nombre immense de pièces que j'ai rédigées moimême au Comité, où je travaillais assidûment quinze à seize heures par jour, on n'a jamais pu m'en opposer une seule qui fût répréhensible, j'oserai même dire, qui ne fut digne d'approbation. Est-il un ministre qui voulût répondre de toutes les pièces qu'on lui fait signer de confiance? Une semblable responsabilité paraîtra toujours. insensée à ceux qui se sont trouvés à la tête des grandes administrations. Lorsqu'on veut être équitable, c'est seulement sur le caractère moral des hommes et sur l'ensemble de leurs opérations qu'on les juge. Il n'y a qu'une ignorance profonde ou une insigne mauvaise foi qui puisse faire soutenir le contraire. Je crois avoir sauvé plus de monde au Comité de salut public, que Robespierre n'en a fait périr. Ce qui prouve combien la Convention était

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litaire, dont l'objet était de sauver au moins de l'invasion, une partie de la France, sans rien préjuger d'ailleurs. Mais le fait est que je n'ai

toin de me regarder comme le complice de cet homme affreux, c'est qu'après sa mort le Comité ayant été renouvelé, j'y fus maintenu, quoiqu'il se fit alors une espèce de réaction. Ce qui prouve que dans toute la France l'opinion était la même à mon égard, c'est qu'aux élec◄ tions suivantes, pour le renouvellement du Corps-Légis latif, je fus nommé dans quinze départemens différens ; c'est que le Conseil des Cinq-cents et celui des Anciens me portèrent au Directoire, d'où je fus, à la vérité, proscrit ensuite par la révolution du 18 fructidor, mais comme royaliste et comme protecteur des émigrés, parce que je voulais que les lois fussent interprétées, autant que possible, en leur faveur, lorsqu'il était établi qu'ils n'avaient pas porté les armes contre leur patrie. Depuis ce temps encore, j'ai été nommé tribun par le SénatConservateur, puis candidat pour entrer au Sénat luimême, par le département de la Côte-d'Or, qui est le lieu de ma naissance. Tout cela n'annonce pas qu'on me regardât en France comme complice de Robespierre. Toute la Convention savait, au contraire, que c'était mon plus mortel ennemi, et que la cause de cette haine pro-→ fonde était précisément que je ne voulais point partager ses fureurs. On savait qu'il avait promis de faire tomber ma tête aussitôt qu'on croirait n'avoir plus besoin de moi; mais il se pressa trop de demander l'acte d'accu sation de ses ennemis, et ce fut la sienne qui tomba,

point

point suivi l'armée; que la dissolution des Chambres ayant eu lieu le 8 juillet, je suis parti de Paris le même jour pour me rendre à une

avec celles de Saint-Just et de Couthon, que j'avais hautement désignés depuis long-temps sous le nom de triumvirs. Je dirai même à cette occasión, que Saint-Just proposa un jour en ma présence, au Comité, mon expulsion, comme on avait prononcé quelque temps auparavant celle de Hérault de Séchelles, ce qui l'avait aussitôt mené à l'échafaud. Je répondis froidement à SaintJust qu'il sortirait du Comité avant moi, ainsi que tout le triumvirat, et le Comité, frappé de stupeur, garda le silence. D'autres personnes, auxquelles il faut absolument des coupables, ont dit que cette inimitié personnelle de Robespierre contre moi n'était que l'effet d'une rivalité de domination qu'il craignait de ma part. Mais si Robespierre avait quelque rival à craindre sous ce rapport, ce n'était certainement pas moi. Chacun sait que dans ces temps orageux il fallait, pour se mettre à la tête d'une faction, ne pas quitter les tribunes des sociétés populaires; or je n'ai jamais mis le pied, au moins à Paris, dans aucune société populaire ; je n'ai jamais occupé les tribunes des assemblées nationales que quand je n'ai pu faire autrement; et les discours sévères que j'y ai toujours tenus étaient loin de tendre à démoraliser le peuple. On a seulement pu y voir que la patrie était tout pour moi : mais on sait assez quelle est la récompense ordinaire de ceux qui se dévouent, exclusivement au service de la patrie.

campagne qui en est éloignée de douze lieues, et que je n'ai pas quittée depuis ce moment.

Le fils de Napoléon ayant été déclaré empereur de droit, il fut question de savoir comment les actes publics seraient désormais intitulés. La Commission de Gouvernement arrêta qu'ils seraient intitulés au nom du Peuple français: ce fut le sujet d'une dénonciation faite à la tribune de la Chambre des Représentans, parce qu'on prétendit que c'était laisser la porte ouverte au retour de Louis XVIII, et que par conséquent les actes devaient être intitulés au nom de Napoléon II. On croirait que cette inculpation devrait jusqu'à un certain point nous faire trouver grâce aux yeux du parti opposé. Non; ils prétendent que nous ne prîmes cet arrêté que pour ouvrir au contraire de nouveau la porte au système républicain. Cette dernière accusation n'est que ridicule, puisque l'on sait qu'en France le système républicain n'est plus qu'une théorie rejetée parmi les abstractions philosophiques. Mais la dénonciation faite à la Chambre était beaucoup plus grave; cependant elle n'eut point de suite, parce qu'il y eut, à ce sujet, une explication bénévole entre des membres de la Chambre et ceux de la Commission de Gouvernement. Les motifs de l'ar

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rêté étaient que, la souveraineté du peuple étant reconnue par tous, il ne pouvait être, dans tout état de cause, inconvenant d'intituler les actes en son nom; qu'avant d'intituler les actes au nom de Napoléon II, il fallait savoir si la nation confirmerait sa succession au trône et qu'enfin les puissances étrangères paraissant avoir résolu l'exclusion de toute la dynastie de Napoléon, quoiqu'elles eussent reconnu le droit des Français de se choisir leur Gouvernement, le nom de Napoléon II, mis en tête des actes publics, aurait pu les blesser. Les Représentans furent satisfaits de cette explication, et il semble que le parti contraire aurait dû l'être à plus forte raison; car il fallait évidemment qu'alors nous optassions entre le peuple français et Nar poléon II.

Il me serait impossible de prévoir tous les chefs d'accusation qu'une prévention aveugle peut intenter, et que la malveillance peut faire circuler sourdement contre moi. J'apprends, par exemple, qu'un des plus graves est que j'ai cherché à désorganiser l'instruction publique, en appelant aux armes les étudians des lycées et des écoles de droit et de médecine. Je déelare que, quand dans les circonstances j'aurais fait ce dont on m'accuse, je m'en applau

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