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salité des citoyens, et investis de la faculté de s'occuper des intérêts locaux : qu'y a-t-il là d'antiroyal.

Une organisation de la garde nationale, qui ne restreignît point la formation des bataillons ruraux, et ne laissât pas au caprice du pouvoir l'élection des chefs supérieurs cette organisation repoussaitelle la monarchie?

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L'affranchissement de l'instruction publique de la domination universitaire : la monarchie existe dans la moitié de l'Europe en présence de cette liberté.

Une liberté de la presse dont les exigences du fisc ne fissent point un véritable monopole : la monarchie existe en Angleterre où ces entraves n'existent pas.

Une responsabilité ministérielle qui ne fût pas sans moyens d'application, et qui ne se bornât pas à la concussion et à la trahison : était-ce attaquer Louis-Philippe?

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Une liste civile mesurée à la simplicité d'un trône populaire : demander moins de douze millions pour Louis-Philippe, était-ce conspirer contre sa royauté?

Une pairie qui prît sa source dans l'élection et qui représentât autre chose que des abus et de vieux préjugés : la jeune monarchie, cette

monarchie qui ne relevait que du peuple, qu'avaitelle de commun avec ces préjugés et ces abus? Des juges qui n'eussent pas Louis-Philippe sur la bouche et Charles X dans le cœur : et qui plus que Louis-Philippe paraissait intéressé à cette réforme ?

L'abolition du droit sur le sel, la diminution du droit sur les boissons, l'abolition de la loterie, celle des jeux et autres impôts que la morale reprouve : qu'est-ce que Louis-Philippe, né du peuple, a de commun avec ces impuretés politiques?

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Enfin, du respect au dehors, et l'attitude d'un peuple dont la liberté et l'indépendance doivent être long-temps menacées : mais vouloir sauver la France, est-ce donc vouloir perdre la royauté de Louis-Philippe?

Voilà les institutions républicaines telles que Lafayette voulait les adapter à la situation : la monarchie des barricades, fondue, identifiée avec les intérêts populaires; pas autre chose. Voilà comment Lafayette et la France entendaient le programme de l'Hôtel-de-Ville, qu'on représente aujourd'hui comme recélant le germe de tous les crimes et de toutes les calamités.

Des calamités!..... Regardez les États-Unis. Des crimes!..... Lisez la vie de Lafayette, type incarné

des institutions républicaines. Quelle tête de patriote s'élève au-dessus de la sienne? Qui mieux que lui a, pendant cinquante-six ans, détesté le crime et attaqué la puissance? Qui a obtenu plus magnifiquement la gloire des cachots (1)? Qui a pesé plus que lui sur toutes les factions qui ont voulu usurper la souveraineté nationale? Quel est, comme le demande Lacretelle, le républicain qui, pour être fidèle à ses sermens, a péri comme lui, pour la défense d'un roi? Qui a fait plus que lui pour l'ordre et la liberté? Quelle sensibilité plus expansive que la sienne s'est attachée aux droits du genre humain? Qui a bravé, fatigué Bonaparte de l'inflexibilité de ses principes? Quelle est, enfin, la renommée, sortie de la cause des peuples, qui remplit le monde de plus d'éclat et de vénération?

Tel est le grand citoyen, que les adversaires de la royauté entourée d'institutions républicaines

(1) Dans les prisons d'Olmütz, comme au pinacle du crédit, il a été également inébranlable dans son attachement aux mêmes principes. C'est un homme dont la manière de voir et de se conduire est parfaitement directe. Qui l'a observé peut savoir d'avance et avec certitude ce qu'il fera dans toute occasion...... C'est un phénomène singulier qu'un caractère comme celui de M. de Lafayette se soit développé dans les premiers rangs des gentilshommes français.

Mmc DE STAEL.

représentent, d'un côté, comme un objet de terreur; de l'autre, comme un homme faible qui n'a pour tout mérite qu'une fidélité surannée à de calamiteuses utopies.

Vous qui avez supporté tant de vices et de crimes, ne pouvez-vous donc supporter, encore quelques jours, les vertus de Lafayette!

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