Page images
PDF
EPUB

éprouvette, dans laquelle on a mis de l'eau distillée. L'éprouvette est fermée imparfaitement, et l'eau portée à l'ébullition, de manière à ce que la vapeur vienne imprégner le linge. Le linge retiré de l'éprouvette répand ane odeur spermatique très prononcée mêlée à une faible odeur de lessive. On agit de la même manière avec une portion non tachée de la chemise; elle ne donne qu'une faible odeur de lessive. On place alors dans un vase à expériences les morceaux tachés et déjà soumis à l'action de la vapeur. On y ajoute ceux sur lesquels on n'avait pas encore opéré; on ajoute de l'eau distillée, et on les soumet à la macération pendant douze heures. Au bout de ce temps, le liquide, comme le linge, donne une odeur spermatique très prononcée. Les linges sont poisseux et collent aux doigts. On les comprime avec l'extrémitéd'un tube: on en exprime ensuite toute la liqueur dont ils sont imbibés, et on les dessèche à une douce chaleur; ils s'empèsent, deviennent très fermes et très raides. Une des taches est chauffée avec précaution sur un bain de sable. Elle prend peu à peu une teinte jaune très marquée. Du reste, le liquide de la macération est trouble; on l'introduit dans un petit tube; on le porte à l ébullition, il se forme aussitôt des flocons d'albumine. On filtre la liqueur et on l'évapore à la lampe à esprit-de-vin dans une capsule de verre. Au fur et à mesure que l'ébullition a lieu, le liquide prend une consistance de plus en plus visqueuse, en même temps qu'il répand une odeur spermatique plus prononcée, mais il conserve sa limpidité ; lorsqu'il est réduit au huitième de son volume à peu près, il est alors comme oléagineux; on le traite par l'alcool concentré, et aussitôt il s'y forme une quantité considérable de flocons blancs.

Des faits et expériences qui précèdent nous concluons:

1o Que les taches placées sur le derrière de la chemise d'Adélaïde Del..... sont formées, quelques unes par de la matière fécale, et la presque totalité par du sang:

2o Que parmi ces dernières, il en est trois principales qui contiennent du sang pur, et le reste est un mélange de sang et de sérosité; 3° Que les taches observées sur le devant de la chemise sont dues en presque totalité à du sperme légèrement coloré dans quelques points par du sang;

4° Que la situation respective de ces taches est tout-à-fait en rapport avec ce qui s'opérerait, si des tentatives de viol avaient lieu, et que l'éjaculation ne. se fut pas effectuée dans le vagin, mais bien au-devant et au-dessus des parties génitales.

CHAPITRE IV.

MÉDECINE LÉGALE RELATIVE AUX MARIAGES.

OPPOSITIONS AUX MARIAGES.

Législation.

Code civil, article 174, A défaut d'aucun ascendant, le frère ou la soeur, l'oncle ou la tante, le cousin ou la cousine germaine, majeurs, ne peuvent former aucune opposition que dans les cas suivans: 1^ lorsque le consentement du conseil de famille, requis par l'art. 160, n'a pas été obtenu; 2o lorsque l'opposition est fondée sur l'état de démence du futur époux. Cette opposition dont le tribunal pourra prononcer mainlevée pure et simple, ne sera jamais reçue qu'à la charge par l'opposant de provoquer l'interdiction, et d'y faire statuer dans le délai qui sera fixé par le jugement.

Cod. civ. art 173.—Le père, et à défaut du père, la mère, et à défaut de père et mère, les aïeuls et aïeules, peuvent former opposition au mariage de leurs enfans et descendans, encore que ceux-ci aient vingt-cinq aus accomplis.

Il ne peut y avoir aucun doute, d'après le texte du no 2 de l'article 174 du Code civil, que l'état de démence légalement constaté ne soit un empêchement dirimant, c'est-à-dire ab solu au mariage, puisque rien ne vicie davantage la capacité civile pour ce contrat, que le défaut de consentement qui résulte nécessairement de l'état de démence. Le médecin peut donc recevoir mission du juge de constater l'état mental d'un individu, au mariage duquel il a été formé opposition dans le cas de l'article précité. Le devoir du médecin dans cette circonstance se borne à constater l'état mental de l'individu soumis à son examen; la nature de l'aliénation; son ancienneté ; sa gravité ; ses intermittences si elle en présente; car, par l'expression démence, le législateur a entendu toute espèce d'aliénation mentale qui ne laisse pas à l'individu la

[ocr errors]

liberté d'esprit nécessaire pour prêter un consentement valable à un contrat civil, quel qu'il soit; et en particulier à celui du mariage, ainsi qu'il est exprimé en l'article 146 du Code civil; « Il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a pas de

consentement. »

Par conséquent, sous aucun prétexte et dans aucune circonstance que ce soit, le médecin ne pourra être légalement consulté.

Certes, une famille, un parent peut consulter un médecin sur le fait de savoir si l'épilepsie, une difformité du bassin, un vice de conformation quel qu'il soit, une maladie invétérée, sont des empêchemens rationnels à un mariage. Mais alors ces consulta ions sont tout-à-fait officieuses; elles rentrent dans le domaine de la médecine et non pas dans celui de la médecine légale, C'est dond à tort que l'on a abordé ce sujet dans la plupart des traités qui ont précédé le nôtre; et nous nous garderons bien d'imiter un pareil exemple.

Mais l'article 174 ne se rapporte qu'à des parens collaté raux; en est-t-il de même à l'égard de l'article 173? Ici, la loi a donné aux ascendans le droit de former opposition au mariage de leurs descendans, quel que soit l'âge de ces der niers. Cet article n'a pas limité ce droit, et par cela même, il lui a donné, en apparence, la plus grande latitude. Ne pour rait-il pas se présenter des circonstances dans lesquelles le médecin serait consulté par le magistrat sur la question de savoir si les faits matériels articulés par les ascendans existent? Nul doute à cet égard. Toutefois, une opposition au mariage dans ces sortes de cas ne pourrait être fondée qu'autant qu'elle reposerait sur les motifs qui entraînent aux yeux de la loi la nullité de mariage; et par conséquent nous renvoyons nos lecteurs au chapitre suivant, dans lequel ees motifs vont être envisagés sous ce rapport.

DES CAS DE NULLITÉ DE MARIAGE,

Cod. civ., art. 180. «Le mariage qui a été contracté sans le consentement libre des deux époux ou de l'un d'eux, ne peut être attaqué que

par l'époux ou par celui des deux dont le consentement n'a pas été libre. Lorsqu'il y a eu erreur dans la personne, le mariage ne peut être attaqué que par celui des deux époux qui a été induit en erreur. »

Cet article a été interprété dans des sens différens par les jurisconsultes et par les médecins légistes. La doctrine de ces derniers est exprimée dans les ouvrages de Médecine légale de M. Orfila par ce paragraphe, pag. 133. « Ainsi l'homme de l'art peut être appelé pour décider 1o si le consentement donné par les contractans est valable, vu qu'ils pouvaient se trouver dans un état de démence ; 2° s'il y a erreur dans la personne, c'est-à-dire si l'un des époux est impuissant ou s'il appartient à un sexe contraire à celui dont il avait cru-faire partie : d'où l'on voit que nous sommes conduits naturellement à faire l'histoire de l'impuissance et de certains vices de conformation des organes génitaux, qui donnent à un individú l'apparence d'un sexe dont il ne fait point partie. Toutefois, avant d'entamer će sujet, faisons re marquer que si le Code civil n'autorise pas expressément les demandes en nullité de mariage pour cause d'impuissance, les jurisconsultes les plus célèbres pensent, avec raison, que le mariage doit être annulé de plein droit dès qu'une cause physique s'oppose à la propagation de l'espèce; or, les principales de ces causes sont l'impuissance et certains vices de conformation des parties sexuelles...

Cette doctrine nous paraît tout-à-fait fausse et en opposition directe avec la jurisprudence actuelle; elle rentre dans l'esprit de la jurisprudence ancienne, dont on a voulu s'écarter tout-à-fait en instituant le nouveau Code civil.

Merlin, il est vrai, y a prêté l'autorité de son nom dans ses Commentaires sur l'impuissance (Répertoire de jurisprudence, tom XIV), en rapportant l'arrêt de la cour royale de Trèves, cité par M. Orfila. Mais il n'a pas été aussi loin que ce médecin légiste, et d'ailleurs les jurisconsultes postérieurs à Merlin, Toullier, par exemple, regardent l'arrêt de la cour royale de Trèves comme mal rendu, et contraire à l'esprit du Code, qui a voulu bannir sans retour ces procès scandaleux qui avaient pour prétexte des infirmités plus ou moins graves;

proscrire pour toujours les visites indécentes qui blessent la pudeur, que repousse la morale, et dont, cependant, les gens. de l'art ne peuvent tirer que des conjectures trompeuses, souvent démenties par les faits.

C'est encore à l'occasion de ce procès que Toullier émet l'observation suivante : « Si la femme s'était refusée à la visite (on voit qu'il s'agissait d'une demande en nullité de mariage faite par le mari, et fondée sur ce que sa femme n'était pas dans les conditions favorables à la propagation de l'espèce), qu'eût pu faire la cour royale de Trèves? auraitelle pu conclure que ce refus contenait une reconnaissance tacite de l'inhabilité de la femme ?>>

Et en effet, que serait un procès dans lequel il faudrait aller chercher, dans la complaisance et le consentement de la partie adverse, les preuves matérielles d'une condamnation!

Tronchet s'exprime d'une manière encore plus positive dans le procès-verbal de la discussion du Code civil, du 14 thermidor, an X. « On n'a pas fait de l'impuissance, à l'occasion de la paternité et de la filiation, l'objet d'une action en nullité; et ce silence absolu de la loi est fondé en raison; car il n'est pas de moyen de reconnaître, avec certitude l'impuissance. En général, il était dans l'esprit du projet d'anéantir cetle cause sous tous les rapports.

[ocr errors]

Ainsi donc, si l'arrêt de la cour de Trèves a pour lui la sanction de Merlin, il a contre lui l'opinion de Toullier et de Tronchet. Nous croyons devoir rentrer dans la doctrine du Code civil, exprimée par la dernière phrase du procès-verbal, du 14 thermidor, que nous venons de citer, en définissant l'erreur sur la personne dans le sens du droit romain, dans le sens du droit naturel; c'est-à-dire l'erreur dans l'union de deux individus, qui doivent être de sexe différent, conjunctio maris et feminæ. Ainsi, moi femme, je crois épouser un homme, j'épouse une femme, et vice versá; ou bien, moi homme, je crois épouser Jeanne, et par une fraude quelconque, j'épouse de fait Françoise; ce sont là des exemples d'erreur dans la personne.

Voici d'ailleurs un considérant d'un arrêt rendu par la

« PreviousContinue »