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maintenant il est difficile de reconnaître leur véritable origine et leur vrai caractère. Ils admettent un bon et un mauvais principe, et comme, à les en croire, le mauvais est le seul à craindre, c'est le seul qu'ils ménagent. Ils le nomment alscheikh almoazzem ou le grand scheikh. Ces sectaires se feraient plutôt massacrer que de le maudire; de plus, ils adorent le soleil à son lever. Ils ont, en outre, une grande vénération pour les prètres chrétiens.

Quant aux Vahhabites, on sait qu'ils prirent naissance en Arabie, vers le milieu du dix-huitième siècle. Ils furent appelés Vahhabites, du nom du pere de leur chef Abd-Alvahhab. Leur doctrine est celle de l'Islamisme, réduite à sa plus grande simplicite. Suivant eux, le Coran renferme une doctrine véritablement divine; mais Mahomet n'était qr'un homme ordinaire, et son nom ne doit pas figurer dans les pratiques religieuses. Tout hopBest rendu à Mahomet ou à un de ses disciples querque est un acte d'idolâtrie, et on doit le punir comme tel. En conséquence, les Valhabites se contentent de reconnaître un Dieu unique. Ils se font scrupule d'invoquer tout être mortel, et quand ils rencontrent une chapelle ou un mausolée élevé en l'honneur d'un imam ou d'un saint quelconque, ils l'abattent. Les Vahhabites, annonrant intention de chasser de l'Arabie les Turcs et lous les peuples étrangers à la presqu'ile, eurent d'abord pour partisans presque tous leurs comparites, etils occuperent un moment une partie de la Mésopotamie. Mais depuis les échecs que leur a fait éprouver Mohammed-Ali, pacha d'Egypte, ils ent été contraints de rentrer dans leurs déserts. Si de l'examen des doctrines musulmanes nous passons à la hiérarchie civile et religieuse, nous trouverons également de grandes différences. Les premiers califes étaient revêtus du pouvoir spirituel et temporel, et on les appelait califes, d'un mot arabe qui signifie vicaires. Ils étaient censes remplacer Mahomet, au caractère de prophète pres; ils furent de plus surnommés Emir-el-Moumenyn ou commandeurs des croyans. Comme, avec le temps, il s'éleva plusieurs califes à-la-fois, leur influence diminua. Maintenant il n'y a plus de calife proprement dit; le sultan de Constantinople n'est investi que de l'autorité temporelle, et c'est le mufti, qui, de concert avec les oulemas ou docleurs, juge les questions de doctrine. Le Chah de Perse est dans le même cas; il n'est pas même reretu de la plénitude de la souveraineté, puisque, ainsi que nous l'avons dit, il est censé n'exercer qu'une autorité temporaire, en attendant l'arrivée du dernier des imams. L'empereur de Maroc seul a la prétention de réunir les deux puissances, et prend quelquefois le titre de calife. Mais l'influence politique de l'empereur de Maroc est bien déchue. Les musulmans ont d'ailleurs des ministres particuliers pour l'exercice de leur culte; et ces ministres portent un nom analogue à leurs fonctions Le khatib ou prédicateur est celui qui, le vendredi, monte en chaire en présence de tout le peuple, et prie pour le souverain et toute la nation. L'imam, qui n'est ici qu'un fonctionnaire ordinaire, est celui qui, à la mosquée, fait la prière à la tête du peuple, et dont tous les assistans doivent imiter les

mouvemens; il est encore chargé de présider aux cérémonies de la circoncision, aux enterremens; en un mot, il représente nos curés. Mais aucun de ces ministres du culte ne prononce de vœux proprement dits. Tous sont libres de se marier, de changer de profession. Le même homme est tourà-tour prêtre, militaire, homme de loi, etc. On trouve aussi chez les musulmans des personnes qui font profession de mener une vie pieuse et retirée. Ces espèces de religieux sont désignés par un terme qui fait allusion à leur détachement des biens de ce monde; c'est celui de pauvre qui s'exprime en arabe par fakir, et en persan par derviche. Ceux qui se piquent d'une vie purement contemplative portent le nom de sofis. Les religieux mahométans composent plusieurs ordres différens, dont quelques-uns font remonter leur origine jusqu'aux premiers califes. La plupart des frères, car c'est ainsi qu'on les appelle, sont soumis à un noviciat sévère, et on ne les reçoit qu'après de longues épreuves. Les uns vivent en commun dans des espèces de couvens, les autres se font ermites. Les uns ont des résidences fixes, les autres sont nomades. Tous sont libres de changer d'état et peuvent choisir la carrière qui leur convient. Parmiles religieux musulmans, plusieurs de ceux qui s'adonnent à la vie contemplative se jettent dans la spiritualité la plus outrée; les livres dépositaires de leurs rêveries sont très nombreux. Ceux au contraire qui aiment le monde mènent souvent une vie déréglée, et il n'est pas d'excès auxquels ils ne se livrent. Ce sont eux dont il est question dans nos relations sous le nom de Kalenders, de Santons, etc.

Le BRAHMANISME reconnait Para-brahma pour dieu principal; mais ce dieu n'agit point, il délegue ses pouvoirs à Brahma, à Vichnou, a Chiva et à une foule de divinités subalternes préposées au gouvernement du monde. Brahma préside à la terre, Vichnou à l'eau, et Chiva au feu. Ces trois personnes ne sont pourtant qu'un seul Dieu et forment la Trinité indienne, nommée Trimourti. Les Hindous qui professent cette religion ont plusieurs livres sacrés nommés Véda ; ils sont écrits en sanscrit et forment leur code religieux et philosophique; ils admettent la métempsycose, et, d'après cette croyance, certaines castes s'abstiennent de la chair de tous les animaux. Le Brahmanisme ordonne de modérer ses passions, enseigne l'immortalité de l'âme, sa purification par les pénitences et abstinences volontaires, et une foule de pratiques religieuses. Tous les membres de cette religion, qui s'étend sur presque toute l'Inde, sont divisés dès la plus haute antiquité en quatre castes, entre lesquelles toute alliance est défendue. Ces castes sont : les Brahmes, qui sont les savans et les prêtres, et forment la classe d'où sont tirés tous les fonctionnaires publics; les Kchatriyas ou Khettris, destinés à l'état militaire; c'est d'eux que sont sortis les Radjahs, qui ont formé les principautés de l'Inde naguère indépendante; les Naires du Dekkan s'y rattachent. Les Vaishy as ou Beises, dont les attributions sont l'agriculture, l'éducation du bétail et le commerce des produits

de la terre et des objets manufacturés; ceux qui se livrent au commerce, surtout dans les pays étran

gers, portent le nom de Banians; un grand nombre de Maharattes appartiennent à cette caste. Les Soudras on Tchoutri qui sont les artisans et les Ouvriers. Chacune de ces quatre castes principales est subdivisée en plusieurs autres secondaires. Parmi les Hindous, les descendans de ceux qui, par des mariages illicites, ont dérogé aux droits des castes principales, sont compris dans les divisions ignobles et méprisées appelées Varna-Sankára. Encore au-dessous de ces castes bâtardes ou mixtes, on voit les malheureux Pariahs. Ceux-ci sont obligés de vivre dans des lieux solitaires, de fuir l'aspect d'un Hindou, de marquer leurs fontaines par un entourage d'os d'animaux, et de se livrer aux occupations les plus dégoûtantes. En revanche, ils peuvent manger de tout.

Le culte brahmanique est accompagné d'un grand nombre de cérémonies et de coutumes solennelles. Il en a d'horribles, telles que la procession du dieu de Djaggernâth, dont le char pesant écrase sous ses roues les fanatiques qui, en s'y précipitant, croient trouver à-la-fois la mort la plus glorieuse et une éternelle félicité. Il y a d'autres fêtes où règne le tumulte, où préside la licence, et où l'impudique Lingamest montré aux yeux de la multitude prosternée. Les ablutions et les lustrations forment une partie principale du culte brahmanique; les images des divinités sont lavées solennellement dans les fleuves et les étangs sacrés. Plusieurs fleuves, tels que le Gange, le Nerbouddah, le Krichna, etc., sont réputés sacrés. Les Hindous font plusieurs pélerinages; les plus célèbres qui sont encore le plus fréquentés sont,selon M. Hamilton: Djaggernȧth, Benares, Gaya, Allahabad, Tripety, Dwaaca, Somnath, Kamusseran, le lac Manasarovara, Gangaoutri, Djoalamoukhi, Omerkantake; Trimbak-Nåsser, Pervaltam, Párkar, Mathoura et Bindraband.

L'usage barbare des femmes des deux premières castes, qui s'immolent sur le cadavre de leurs époux, est un reste des sacrifices humains autrefois très fréquens. Encore dans ces derniers temps, dans les épidémies et les calamités publiques, on a vu des Brahmines se précipiter eux-mêmes du haut d'une tour, comme offrande expiatoire. Les Hindous ont un grand nombre de temples, nommés pagodes, d'un mot emprunté au persan; il y en a qui sont vraiment remarquables sous le rapport de l'architecture et de leurs dimensions.

Le BOUDDHISME ou la religion de Bouddha, qui parait s'être formée dans l'Inde environ mille ans avant J.-C. Nous ne savons pas encore positivement si c'est une réformation du Brahmanisme ou si celui-ci n'est pas d'une date postérieure dans sa forme actuelle. Le bouddhisme rejette la division des castes. Ses dogmes principaux, qui ont transformé les farouches nomades de l'Asie en peuples civilisés, et qui ont fait sentir leur influence bienfaisante jusque dans la Sibérie,sont les mêmes partout où ce culte est suivi. La hiérarchie diffère seule dans les divers pays; mais cette différence ne doit pas nous faire envisager le bouddhisme autrement que comme une religion unique, dans laquelle il n'existe aucune véritable division. Le bouddhisme, dit M. Klaproth, suppose, comme le brahmanisme, une série perpétuelle de créations

et de destructions du monde. Cette croyance, purement métaphysique, n'admet pas l'existence d'un être suprême; il est remplacé par l'espace lumineux qui renferme en soi tous les germes des êtres futurs. Mais cet espace lumineux n'est pas la région la plus haute du monde; au-dessus est placée une troisième région qui est éternelle et indestructible: c'est là que réside la cause primitive de la destruction du monde périssable. L'existence est regardée par les bouddhistes comme le véritable mal, car tout ce qui existe est sans réalité et seulement un produit de l'illusion qui trompe les sens. Pendant que toutes les parties intellectuelles, dispersées dans la matière, depuis la plus haute région lumineuse jusqu'aux régions infernales, se dépouillent de ce qu'elles ont contracté de matériel, se purifient, se perfectionnent et finissent par se réunir, l'esprit universel indestructible, qui conserve tout pendant un temps incalculable, reste dans le repos, jusqu'à ce que les lois du damata ou destin, nécessitent une création nouvelle, de laquelle sont cependant exceptés les êtres qui, en se dépouillant totalement de la matière, sont devenus Bouddhas et restent plongés dans le Nirvana ou l'éternité du néant, état opposé à celui de l'existence dans la matière. Ces êtres séjournent dans la région indestructible située au-dela de l'espace lumineux. C'est pour conserver le souvenir de la vraie doctrine, et pour rendre les hommes capables de la suivre, que ces bienheureux descendent de temps en temps sur la terre, se revêtissent d'un corps, et se montrent aux hommes. Les principaux d'entre eux ne paraissent qu'une fois : ce sont les Bouddhas proprement dits; les autres nommés Boddhisattva, se manifestent plusieurs fois par différentes incarnations, jusqu'à ce qu'ils atteignent le rang des premiers pour ne plus se montrer dans le monde. Ces êtres parfaits exercent un empire absolu sur leur ennemi, qui est la matière, et sur ses formes séduisantes. Disposant en maître de Maya, ou de l'illusion qui trompe les sens par ses métamorphoses, ils peuvent la détruire à volonté, ou se servir d'elle pour opérer le salut du genre humain. C'est de cette manière que s'effectuent toutes les incarnations des Bouddhas; leurs âmes descendent sous la forme de rayons lumineux, et prennent un corps sous l'enveloppe de Maya. Ils ne font rien sans un dessein spécial; leurs opérations ne sont jamais violentes, elles ne restreignent nullement le libre arbitre des êtres inférieurs qui sont enchaînés par la matière, et pour le salut desquels ils sont descendus.

Dans l'âge actuel du monde, quatre Bouddhas ont déjà paru; le dernier d'entre eux était Chakiamouni ou Gautama; un cinquième doit encore venir avant la destruction de ce monde, c'est le Bouddha Maitri ou Maitari. La secte de Ceylan et de l'Inde au-delà du Gange, l'annonce, au contraire, pour l'an 4457 de notre ère, époque à laquelle finira la période de 5000 ans, qui devait suivre la mort de Chakia-mouni; selon les livres cingalais, il existe une différence assez marquée, relativement à la personne du dernier Bouddha, chez les habitans de Ceylan et de l'Inde au-delà du Gange et les autres sectateurs de la même croyance.

Les Bouddhistes regardent l'univers comme ha

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bité par différentes classes d'ètres; ils sont ou tchama, c'est-à-dire reproductions par naissance; ou roupa, dieux matériels ou visibles; ou aroupa, immatériels ou invisibles. Ces êtres montent par des transmigrations progressives d'un degré inférieur à un supérieur, suivant leur bonne ou mauvaise conduite dans leur état précédent, jusqu'à ce qu'ils obtiennent finalement la béatitude du Nirvana, ou de la non-existence, c'est-à-dire d'une existence purgée de tout ce qui est matériel, et par conséquent nullement sujette aux impressions de Maya ou de l'illusion. De même que tous les êtres quittent continuellement une espèce d'existence pour une autre, de même les mondes qu'ils habitent éprouvent des changemens. Gautama lui-même ne connaît ni le commencement ni la fin de cette chaîne non interrompue de systèmes mondains. Tous les étres habitant le loka ou l'univers, produit par une succession de destructions et de reproductions, sont classés de la manière suivante: Les bommes et les dieux locaux appelés Nat, quaspectent et jugent les hommes; ils ont pour serviteurs des bons et des mauvais génies. Cette première classe a sa résidence sur la terre, et dans les régions atmosphériques qui comprennent lement Mienmo et les six cieux des Deva, placés les uns au-dessus des autres et se surpassant dans le mème ordre en éclat et en splendeur.

La seconde classe est celle des roupa ou dieux visibles; elle occupe les seize cieux plus élevés jusqu'au 22o du Brahma-loka.

Dans la troisième se trouvent les êtres immaté riels qui, ayant été des sectateurs zélés de la doctrine de Bouddha occupent les quatre cieux les plus élevés du 23o au 26°. Enfin les Bouddhas résident dans le bon ou l'empire qui couvre tous ces

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On appelle Gandjour la collection tibétaine des principaux livres classiques des anciens bouddhistes de l'Inde, dans laquelle sont même compris des ouvrages grammaticaux et lexicographiques. Elle se compose de 108 volumes. Les Tibetains et les Mongols ont construit des temples uniquement pour renfermer ces saints vo umes. Comme les sectateurs de Bouddha pensent qu'il suffit, pour que les prières adressées à la divinité deviennent efficaces, qu'elles soient mises en mouvement par un moyen quelconque (par la bouche de l'homme ou par un agent mécanique), on voit dans ces temples un grand nombre de cylindres, qui tournent constamment mus par une roue hydraulique; ils renferment les volumes du Gandjour, dont le contenu, ainsi agité, doit être d'une influence très heureuse sur le bien-être du genre humain. Dans les grandes solennités on allume aussi un guéridon garni de 108 lampes, qui représentent les 108 volumes du Gandjour, et qu'on fait tourner dans le même sens que les cylindres. Les chapelets des prêtres bouddhistes se composent également de 108 grains.

Le Bouddhisme, né dans l'Hindoustan, n'y est plus aussi généralement répandu qu'il l'était autrefois. Le peu de sectateurs qui lui restent dans cette vaste contrée y portent le nom de Bouddhas, car la croyance des Djaïnas du Dekkan est déjà un Bouddhisme modifié. Les autres Hindous

ne regardent Bouddha que comme une incarnation de Vichnou. Sa religion subsiste encore dans le Nepal dans toute sa pureté, ainsi qu'au Tibet. Elle y avait été portée autrefois, ainsi que dans la Boukharie; elle est encore en vigueur à Ceylan; de cette ile importée dans l'Inde au-delà du Gange, elle est professée dans les empires Birman et d'Annam, dans la Chine, la Corée, le Japon, par une partie considérable de la population non lettrée. Les Bouddhistes honorent Bouddha comme une intelligence suprême manifestée dans la personne de Chakia-mouni.

La hiérarchie établie dans le Tibet au xm siècle a successivement répandu son influence sur les nations mongoles et quelques Toungouses. Il faut se garder de prendre cette hiérarchie pour une branche ou modification du Bouddhisme. La personne du Dalaï-lama n'est regardée que comme une incarnation d'une divinité bouddhique, qui pendant tout le temps a eu une prédilection pour les contrées situées au nord de l'Inde. La série des Dalaï-lama actuels ne commence que dans la première moitié du xve siècle. Ils ont une hiérarchie régulière établie au Tibet et en Mongolie. Le Bouddhisme, dans ses institutions et ses pratiques extérieures, offre une ressemblance surprenante avec l'Eglise romaine. Chez les Bouddhistes on retrouve des pontifes, des patriarches chargés du gouvernement spirituel des provinces, un conseil de prêtres supérieurs qui se réunissent en conclave pour élire le pontife, et dont les insignes mêmes ressemblent à ceux de nos cardinaux, des couvens de moines et de religieuses, des prières pour les morts, la confession auriculaire, l'intercession des saints, le jeûne, le baisement des pieds, les litanies, les processions, l'eau lustrale. La DOCTRINE DES LETTRÉS, dite aussi la RELIGION DE CONFUCIUS, parce que ce philosophe célèbre en est regardé comme le réformateur et le patriarche. Elle a pour base un panthéisme philosophique, qui a été diversement interprété suivant les époques. On pense, dit M. Abel Rémusat, que, dans la haute antiquité, le dogme de l'existence d'un Dieu tout puissant et rémunérateur n'en était pas exclus, et divers passages de Confucius donnent lieu de croire que ce sage l'admettait lui-même. Mais la négligence qu'il a mise à l'inculquer à ses disciples, le sens vague des expressions qu'il a employées, et le soin qu'il a pris d'appuyer exclusivement ses idées de morale et de justice sur le principe de l'amour de l'ordre et d'une conformité mal définie avec les vues du ciel et la marche de la nature, ont permis aux philosophes qui l'ont suivi de s'égarer, au point que plusieurs d'entre eux, depuis le xu siècle de notre ère, sont tombés dans un véritable spinosisme, et ont enseigné, en s'appuyant toujours de l'autorité de leur maître, un système complexe qui tient du matérialisme et qui dégénère en athéisme. Le culte purement civil rendu au ciel, aux génies de la terre, des astres, des montagnes et des fleuves, ainsi qu'aux àmes des parens est à leurs yeux une institution sociale sans conséquence, ou du moins dont le sens peut s'interpréter de différentes manières. Ce culte ne connait pas d'images et n'a pas de prêtres; chaque

magistrat le pratique dans la sphère de ses fonctions, et l'empereur lui-même en est le patriarche. Généralement tous les lettrés de la Chine, de l'empire d'An-nam et du Japon s'y attachent sans renoncer toutefois à des usages empruntés aux autres cultes. Ils sont plus superstitieux que religieux, la conviction entre pour peu de chose dans leur conduite; mais l'habitude les soumet à des pratiques qu'ils tournent eux-mêmes en ridicule, comme la distinction des jours heureux et malheureux, les horoscopes, la métoposcopie, la divination par les sorts, etc., etc.

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Le CULTE DES ESPRITS ou le NATURALISME MYTHOLOGIQUE de l'Asie-Orientale, regardé par ses sectateurs comme la religion primitive des plus anciens habitans de la Chine. Ce culte s'est étendu au Japon, dans la Corée, chez les Toungouses, au Tonquin où il a reçu des formes diverses, et est encore actuellement professé par toute la partie de la population qui n'a pas embrassé le Bouddhisme, ni les principes de Confucius. Cette religion a beaucoup de dogmes communs avec la précédente seulement l'existence individuelle des génies et démons, indépendans des parties de la nature auxquelles ils président, y est mieux reconnue. Ce culte a dégénéré en polythéisme et en idolatrie, par l'ignorance de ceux qui l'admettent. Les prêtres et prêtresses voués au célibat pratiquent la magie, l'astrologie, la nécromancie et mille autres superstitions ridicules. On les nomme Tao-sse ou docteurs de la raison, parce qu'un de leurs dogmes fondamentaux, enseigné six siècles avant notre ère, par Lao-tseu, l'un de leurs maîtres, est celui de l'existence de la raison primordiale, qui a créé le monde, le Logos des Platoniciens.

La RELIGION DU SINTO est la plus ancienne de celles qui dominent au Japon. Elle a beaucoup de ressemblance avec le Naturalisme mythologique, dont quelques savans même la regardent comme une branche. Ce culte consiste dans l'adoration d'un être suprême; mais il reconnait aussi des dieux inférieurs, et prescrit la pratique des bonnes actions et l'abstinence des viandes. Ses temples, nommés Mia, renferment un miroir pour rappeler que si les taches du corps se peignent fidèlement dans cette sorte de glace, de même les défauts de l'âme ne peuvent demeurer cachés aux regards de la divinité. Dans quelques temples il y a une niche où se trouve la figure du dieu subalterne à qui l'édifice est dédié. La simplicité de ce culte a été considérablement altérée depuis l'introduction du Bouddhisme au Japon. Il admet les pélerinages, il a des religieuses, des confréries de divers genres et des moines; ces derniers surtout exploitent la superstition des sectaires. Quoique la croyance de Sinto soit la plus ancienne du Japon, les Dairis ou empereurs de ce pays, qui sont regardés comme descendans des dieux, suivent depuis long-temps la loi de Bouddha.

Le MAGISME ou la Religion de ZOROASTRE. Selon M. Saint-Martin ce culte très ancien admet l'existence d'un être suprême appelé Zerwan ou le temps sans bornes, d'où sont émanés deux principes, l'un bon, appelé en ancien persan Elo

ro-Mezdao, ou Oromaze par les Grecs; l'autre, mauvais, en ancien persan Enghreo-Meenioch ou Arimane, par les Grecs. Ils se combattent; le bon remportera à la fin une victoire complète. Zoroastre admet trois mondes: un supérieur, spirituel, séjour de la lumière primitive et de la force productrice; un monde moyen, visible, où règnent Oromaze, roi de la lumière, et Mithra, réunion des forces actives et passives de la nature; enfin une région inférieure des ténèbres, sėjour d'Arimane et de sa suite malfaisante, les Dews. Il reconnait une hiérarchie d'êtres célestes et purs, dérivant d'Oromaze, et que les Perses invoquent comme des génies bienfaisans. L'homme, d'origine céleste, était d'abord d'une nature lumineuse et pure; mais ayant succombé sous l'influence désastreuse d'Arimane, il perdit ses prérogatives; cependant en combattant continuellement contre le mauvais principe, il aura part à la restauration universelle de toutes choses. La plus grande partie de ce culte consiste en purifications, en ablutions, et en cérémonies qui tendent à rapprocher de la lumière. C'est devant le feu sacré qu'on les pratique et que l'on récite les différentes formules de prières prescrites dans le rituel de Zoroastre. Sa doctrine est consignée dans le Zend-Avesta, écrit dans la langue morte dite zend. Le Magisme se conserve encore parmi les Parsis ou Guèbres dans le Kerman, en Perse, à Surate et dans le Guzarat, dans l'Hindoustan. Dès le 1er siècle du christianisme, il se répandit dans l'empire Romain un culle venu de la Perse, connu sous le nom de culte Mithriaque, qui présentait de grandes ressemblances avec la religion de Zoroastre, mais dans lequel le dieu Mithra, fils d'Oromaze, chargé de la conduite du soleil et du gouvernement du monde, médiateur entre Oromaze et les hommes, était l'objet d'une adoration spéciale.

Le NANERISME ou la RELIGION DES SIKIS, instituée par Nanek, né selon M. Hamilton en 1419 dans la province de Lahore dans l'Hindoustan. On peut la regarder comme un mélange de Bralimanisme et d'Islamisme. Elle enseigne le déisme le plus pur. Les Sikhs adorent un Dieu, admettent des récompenses et des punitions futures, tolèrent toutes les religions, sur lesquelles ils ne veulent pas même entrer en discussion; croient à une incarnation secondaire de la divinité, proscrivent le culte des images et s'abstiennent de manger du porc. Ces sectaires reconnaissent l'authenticité des Veda indiens, qu'ils regardent, ainsi que le Coran, comme des livres divins; mais ils prétendent que la religion des Hindous s'est corrompue par l'introduction du polythéisme, et que l'adoration des images a éloigné le peuple de l'adoration du vrai Dieu. Ils regardent l'ablution comme un des principaux devoirs à remplir. Leurs temples n'offrent aucune idole, et leurs prières sont très simples. Cette religion a subi de grandes réformes sous le pontificat de Gourou Govind, qui mourut en 1707; les Sikhs le regardent comme un nouveau prophète et comme le fondateur de la puissance de leur nation. Les sectaires de ce culte rejettent la distinction des castes, sont censés ètre tous soldats, doivent renoncer à l'usage du tabac,

laisser croitre leur barbe et leurs cheveux. Un corps nombreux de guerriers religieux nommés Akalis est chargé de tout ce qui est relatif au culle. Il y a une espèce de baptème ou d'initiation que l'on fait subir aux sectaires adultes, cérémonie par laquelle doit passer tout individu qui veut être admis dans cette religion, qui du reste accueille tous les nouveaux sectaires qui se présentent. Ce culte est professé par la grande masse de la population du Lahore et par bous les Sikhs qui sont établis dans d'autres parbies de l'Inde.

Il est impossible de rien dire de positif sur le nombre de sectateurs attachés à chacune des religions professées aujourd'hui dans les diverses contrées du monde. Un zèle maladroit engage les divers partis à exagérer leur nombre, comme si une grande majorité était toujours l'indice d'une bonne cause. Les incrédules surtout, vers la fin duvar siècle, ont mis une importance ridicule

à exagérer le nombre des mahométans et des païens. Le chiffre de ces derniers a été aussi tres exagéré de nos jours par les missionnaires protestans dans différens tableaux qu'ils ont publiés. Plus instruits dans leurs dogmes, que versés dans les calculs compliqués qu'exige la solution de ce problème, ces bons religieux ne se sont seulement pas doutés des difficultés qu'ils avaient à surmonter pour asseoir leurs estimations sur des bases au moins probables, sinon certaines. Les longues recherches auxquelles nous nous sommes livré pour connaitre le nombre approximatif des peuples qui parlent les différentes langues du globe, et celles que nous avons dù faire pour déterminer la population des différens états, nous ont fourni une masse de faits assez nombreux pour que nous croyions ne pas nous éloigner beaucoup de la réalité en proposant les sommes suivantes, qui ne sont et ne peuvent être que de simples approximations:

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