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cet Abrégé, nous ayant convaincu que toutes les évaluations renfermées dans ces ouvrages ne sont que la reproduction des calculs des statisticiens allemands, et surtout de Hassel, quoiqu'ils ne soient presque jamais indiqués, nous avons pensé qu'il était inutile de citer les copies, lorsque nous présentions les originaux. Cependant nous nous somines permis quelques exceptions à l'égard d'un petit nombre de géographes distingués, qui, tout en adoptant, soit en totalité, soit en partie, les évaluations des statisticiens allemands et quelquefois les

nôtres, ajoutaient à l'importance des unes ou des autres en se rangeant du côté de leurs auteurs. Nous citerons entre autres M. Letronne, M. Denaix, et MM. Eyriès et Walckenaer, et les savans rédacteurs de l'Almanach de Gotha. Notre silence à l'égard de M. Ritter vient de ce que ce géographe célebre, ayant dirigé toutes ses recherches sur la configuration physique du globe et ses rapports avec l'homme, est resté pour ainsi dire étranger aux questions qui sont du domaine de la statistique.

TABLEAU COMPARATIF

DES PRINCIPALES OPINIONS ÉMISES SUR LE NOMBRE DES HABITANS de la terre.

Habitans.

Le théologien CANZ, en 1744, réduisant la population de l'Europe à 10,000,000, ne donnait à toute la terre que.

VOLNEY, en 1804.

60,000,000 437,000,000

ISAAC VOSSIUS, d'abord 400 millions en 1685, et plus tard, en portant à 170,000,000 la population de l'Afrique et de l'Amérique, et à 30,000,000 seulement celle de l'Europe. STRUICK, vers la moitié du dix-huitième siècle.

500,000,000

500,000,000

PINKERTON (Walckenaer et Eyriès), en 1827.

MALTE-BRUN, en 1804 et en 1810

L'ORIENTAL HERALD, en 1829.

GRABERG, en 1813.

FABRI, en 1805..

BALBI, en 1816.

WORCESTER dans son Dictionnaire, publié en 1822.

640,000,000

683,440,000

686,000,000

700,000,000

704,000,000

710,000,000

718,000,000

Les rédacteurs du Journal de Trévoux, vers le milieu du dix-huitième siècle.

720,000,000

REICHARD, dans l'édition de la Géographie de Galletti, en 1822.

732,000,000

BALBI, en 1828, dans la Balance politique du globe, et le docteur VILLERME, dans son Cours de statistique hygiéniqué, en 1829.

737,000,000

MORSE, en 1812. .

766,000,000

GOLDSMITH, en 1821.

800,000,000

HASSEL, en 1828, référant ses calculs à l'année 1825, et l'Almanach de Gotha, en 1829. STEIN, en 1825 et en 1826. .

846,782,210

884,917,000

JULIUS BERGIUs, référant ses calculs à l'année 1828.

893,48,580

L'abbé de SAINT-PIERRE, dans son ouvrage sur l'Utilité des dénombremens, vers 1758; GUILBERT-CHARLES LE GENDRE, dans son Traité de l'Opinion, en accordant 250,000,000 à l'Amérique; et M. LETRONNE, en 1824.

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BIELFELD, en 1760, d'après l'analyse des opinions émises par Riccioli, Spech, Sussmilch et autres.

938,421,000

950,000,000

DENAIX, en 1828, en suivant les estimations de Hassel.

951,370,700

WALLACE, en supposant que la terre prise dans son ensemble ne saurait être ni aussi peuplée que l'Angleterre, ni même avoir la population relative de l'Espagne, portail le nombre des habitans du globe vers 1769, ǎ..

RICCIOLI, vers 1660, en accordant 100 millions à l'Europe, et en portant à 300 millions la population de l'Amérique.

1,000,000,000

Le Conversations Lexikon, à l'article Erde, en 1827, de 800,000,000 à
SUSSMILCH, en 1765, en donnant 650 millions à l'Asie, et 150 à l'Amérique

Les directeurs de la Société des missionnaires, dans leur Adress to the friends of the missionary society, en 1818..

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VOLTAIRE, en se moquant de l'estimation des auteurs de l'Histoire universelle anglaise, portait la population du globe à. Les auteurs de l'Histoire universelle anglaise,

vers le milieu du dix-huitième siècle

Cette prodigieuse disparité d'opinions, qui parait d'abord inexplicable, n'offre aucune difficulté pour tous ceux qui ont suivi la marche progressive de la géographie et de la statistique. Ils voient d'un coupd'œil quelles sont les estimations qui doivent être rejetées comme erronées, et quels sont les élémens qui ont contribué à trop élever ou à trop abaisser d'autres évaluations admises dans ce tableau. Qui ne voit, par exemple, que les évaluations du théologien Canz et du philologue Vossius, de Volney et de Struick, sont évidemment fautives en moins,

1,600,000,000 4,000,000,000

tandis que celle des auteurs de la grande Histoire universelle anglaise, de Voltaire, de Beausobre, de Sussmilch, et autres savans, le sont en plus? L'examen même le plus superficiel sur la répartition de la population assignée par ces auteurs à chaque partie du monde démontre l'absurdité de leurs calculs. Le Statistischer Umriss de Hassel. pour les années 1822 et 1824, malgré les erreurs partielles qu'on y rencontre, est toujours le plus grand travail que l'on ait encore fait à ce sujet. Nous ne connaissons que par un extrait donné

dans les Ephémérides géographiques de Weimar, la brochure publiée à Berlin en 1828 par le docteur Charles-Julius Bergius sur la population de la terre dans la mème année ; mais les résultats généraux que nous avons sous les yeux nous dé montrent que ce savant n'a pas fait toutes les recherches que demandait la solution de ce problème difficile. Nous devons porter le même jugement sur un article remarquable relatif à la même question, publié en 1829 dans l'Oriental Herald, dont nous avons cité les estimations principales. Ce que nous avons dit dans ce Mémoire, et les faits qui y sont relatés, dans l'examen de la population de chaque partie du monde, nous dispensent de poursuivre ces remarques. Cependant nous ne pouvons nous dispenser de faire observer que des savans d'ailleurs estimables, mais étrangers à ces sortes d'éLudes, dégoûtés des calculs fastidieux de la statislique, et ne se sentant peut-être pas assez forts pour surmonter les difficultés inséparables de l'éLude de cette science, ont voulu la déprécier aux yeux du public, en signalant les doutes et les apparentes contradictions.

Cette manière de procéder est tout-à-fait injuste. Que diraient les Cuvier, les Humboldt, les Brown, les Decandolle et tant d'autres naturaJustes célèbres, si, sans égard pour l'époque dif

férente à laquelle ont été imaginés les divers systèmes de classification, des géographes on statisticiens, connaissant à peine les généralités de la zoologie et de la botanique, venaient jeter du ridicule sur leurs travaux, et repousser comme inexactes les listes nombreuses de tant d'espèces animales et végétales, consignées dans ces magnifiques inventaires de l'inépuisable richesse de la nature; et cela, parce que le système de Tournefort est différent de celui de Linné, et celui-ci du système de Jussieu, parce qu'enfin Linné porte le nombre des végétaux à 8000, et celui des animaux à 3950, tandis que les naturalistes actuels évaluent les premiers à 80,000, et les seconds à 100,000! Mais abandonnons ces récriminations, qui n'ont rien à démêler avec la science qui nous occupe, et indiquons les résultats que nous avons obtenus après les longues et difficiles recherches auxquelles nous nous sommes livré pour connaître la population approximative des cinq parties du monde, résultats que nous avons publiés dans le volume de la Revue des deux Mondes. Nous espérons que nos lecteurs accorderont quelque confiance à des chiffres qui sont le fruit de l'examen consciencieux de tous les élémens dont la connaissance est nécessaire pour la solution approximative de ce problème aussi important que difficile.

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De la population des villes et de la difficulté d'en déterminer le chiffre.

Nous avons vu dans le chapitre précédent quelles sent les difficultés qui se présentent, lorsqu'on veut déterminer la population des états; nous pouvons ajouter qu'il est encore plus difficile de connaitre celle des villes. Au premier abord, cette assertion peut paraitre un paradoxe, c'est cependant une vérité incontestable. Nous allons le démontrer jusqu'à la dernière évidence, en nous aidant des observations faites par plusieurs savans eten nous appuyant sur les relations de quelques voyageurs des plus célèbres.

Lorsqu'on veut déterminer le nombre d'habitans qui se trouvent dans une ville, il faut d'abord examiner à quelle classe elle appartient; car les villes, de même que les états, doivent être divisées en deux classes: 1o celles qui sont déjà dans le domaine de la statistique ; 2o celles qui n'en font pas encore partie. A la première classe appartiennent sans distinction toutes les villes où l'on a déjà fait des recensemens assez suffisans pour faire connaitre le mouvement de la population; les autres doivent être rangées dans la

seconde classe. Ces dernières villes sont ordinairement situées dans les états qui eux-mêmes ne Font pas encore entrés dans le domaine de la statistique.

Parlons d'abord de la population des villes comprises dans la première classe. Si les voyageurs, si les géographes, si les statisticiens avaient soin de faire remarquer les diverses circonstances qui peuvent modifier le résultat de leurs calculs, lorsqu'ils indiquent la population d'une ville, nous n'aurions à signaler que quelques erreurs de peu d'importance, et qu'il est même bien difficile d'éviter, quand on évalue une population nombreuse; mais malheureusement les uns et les autres oublient de noter bien des circonstances essentielles, silence qui devient la source intarissable d'erreurs et de fausses opinions sur la population des villes. Nous allons signaler ici les omissions les plus importantes, omissions qui nuisent essentiellement aux progrès de la science: I. On néglige souvent de mentionner si les évaluations ne comprennent que les habitans qui se trouvent dans l'enceinte de la ville même,ou si elles réunissent la population des faubourgs, celle des maisons de campagne isolées, des villages, des cháteaux et des bourgs qui dépendent du territoire de la ville. De là vient cette grande variation que l'on remarque dans les tableaux statistiques des auteurs même contemporains. Les uns ne rapportent que le chiffre de la population qui existe intrà muros ; les autres y ajoutent celui des faubourgs et des fermes les plus voisines; quelquesuns enfin y comprennent la population du canton entier. Il est tel petit village du nord de la Suède et de la Norwège où l'on ne trouverait pas la cinquième partie de la population que les géographes les plus estimés lui assignent. Le chiffre de la population attribuée à la plupart des villes de l'Italie, de l'Espagne, de la monarchie anglaise, de l'empire d'Autriche, et en général à toutes les villes de l'Europe et de l'Amérique ne comprend pas seulement le nombre des habitans de la ville proprement dite, mais aussi la population des faubourgs et des communes de tout le canton. Eclaircissons ceci par quelques exemples.

D'après le recensement que l'on fit à PADOUE en 1810, cette ville possédait dans l'enceinte de ses murs 31,174 habitans; mais on en comptait 12,177 dans les faubourgs, et 17,633 dans les neuf communes qui forment le canton. Voilà trois évaluations différentes de la population de Padoue, d'après lesquelles un voyageur, un géographe et un statisticien pourraient attribuer à cette ville: 31,174 habitans seulement dans le premier cas,43,351 dans le second, et 60,984 dans le troisième. D'après le recensement qui a été fait en 1832, ces trois évaluations seraient de 36,381 habitans pour le premier cas, de 50,981 pour le second, et de 78,318 pour le troisième. En 1824, on comptait à VIENNE 289,598 habitans bourgeois, dont 49,550 demeu raient seulement dans la cité proprement dite; les autres étaient disséminés dans les trente-quatre faubourgs de cette ville et dans les cinq villages qui l'avoisinent, tels que: Herrnhals, Neulerchenfeld, Währing, Fünfhaus et Simmering,

dont la population s'élevait à 15,806. En 1826, cette capitale avait 280,805 habitans bourgeois ainsi répartis : 51,525 dans la ville proprement dite, 215,030 dans les trente-quatre faubourgs, et 14,250 dans les cinq villages qui sont hors de la ligne d'enceinte. Des auteurs contemporains, justement estimés d'ailleurs, ne sont pas d'accord non plus sur le chiffre de la population de SCHEMNITZ en Hongrie. Cette grande différence provient de ce que les uns n'ont compris dans leurs calculs que les habitans de la ville proprement dite, et que les autres ont tenu compte des habitans disséminés sur son vaste territoire, où se trouvent les célètres mines de ce nom.

La population de la ville d'ODESSA, sur laquelle les géographes sont si peu d'accord, n'avait, en 1829, dans l'intérieur des limites du port franc, que 41,552 habitans; mais si l'on y eût compris les villages qui sont en-dehors des limites, elle en aurait eu 60,000. La capitale de la Bavière, MUNICH, à laquelle on ne donne ordinairement que 60,000 ames, en avait cependant 95,718 à la fin de 1829; mais voici comment ce nombre était réparti : 79,530 dont 4863 militaires dans la ville proprement dite, 9505 dans le faubourg de Au; 4501 à Haidhausen; et 2182 à Obergiesing.

Les géographes et les statisticiens anglais comprennent dans l'évaluation de la population, les paroisses qui se trouvent dans la circonscription administrative dont la ville est le centre. Ainsi, lorsque d'après le dernier recensement fait à LoxDRES, on a porté le nombre des habitans de cette ville à 1,624,034 habitans, on a compris dans ce chiffre non-seulement la population des faubourgs, mais encore celle de toutes les paroisses qui font partie des districts de Westminster et de Southwark, quoique soumis à une juridiction differente de celle du lord-maire. Le comté de Middlesex où se trouve précisément la ville de Londres n'a, d'après le dernier recensement, que 1,358,200 habitans, nombre inférieur d'un cinquième à celui que nous avons donné plus haut. On peut en dire autant de la population de NEWCASTLE, dans laquelle on a compris celle de Gateshead, que l'on a regardé comme un de ses faubourgs, quoiqu'au fond cette banlieue n'appartienne pas au comté de Durham. Les exemples ne nous manqueront pas dans le Royaume-Uni. D'après le recensement fait en 1821, STOCKPORT. dans le comté de Chester, avait 44,957 habitans, dont 21,726 seulement demeuraient dans la ville. SHEFFIELD, dans le comté d'York, avait €2,115 habitans, dont 42,157 demeuraient dans la ville. A la même époque, ED!MBOURG, capitale de l'Ecos se, avait 138,235 habitans, mais sur ce nombre 9870 appartenaient à La Canongate, 50,597 à Saint-Cuthbert, 7025 à North-Leith, et 18,975 à South-Leith.

D'après ce que nous venons de voir, il est évident que l'on commet une erreur grave lorsqu'on veut comparer d'une manière absolue la population des villes de la Grande-Bretagne à celle des villes de la France. M. Galibert, à qui nous avions com muniqué le dernier recensement fait dans la Grande-Bretagne, a publié dans la Revue Britannique un article fort intéressant dans lequels

prouvé que, pour comparer entre elles les deux bitans, sur lesquels 55,056 étaient militaires. pulations de LONDRES et de PARIS, il faudrait En 1823, la garnison de Moscou se composait de abord ajouter à la population actuelle de Paris, 22,194 soldats sur une population de 246,545 haelle de Montrouge, de Passy, des Batignolles bitans. Au commencement de 1826, VIENNE CompIdes autres communes limitrophes; tenir compte tait, d'après Rohrer, 20,000 soldats sur une po➡nsuite du chiffre de la population flottante et de pulation de 300,000 âmes. D'après le recensement a garnison qui se trouvent à Paris, chiffre qui avait que l'on fit à PARIS en 1817, sur 713,966 habitans été omis sur le recensement; en un mot, que pour qui formaient la population de cette capitale, avoir des élémens comparables, il aurait fallu 17,073 étaient militaires; en y joignant les invalisoustraire 200,000 du chiffre de la population at- des, qui sont au nombre de 3192, il y avait alors tribuée à Londres, et en ajouter 100,000 au moins à Paris 20,265 militaires. A BERLIN, en 1826, on à celui de la population de Paris. Ce que nous ve- comptait 199,776 habitans bourgeois et 16,461 mi nons de dire de Paris et de Londres est applicable litaires. A VENISE, en 1817, il y avait 101,638 à toutes les grandes villes de la France et de bourgeois et 6700 militaires; en 1817, à VARSOVIE FAngleterre. A LYON, par exemple, le nombre 76,000 bourgeois et 10,000 militaires. A MAYENCE, des habitans passe pour bien moindre qu'il ne en 1816, il y avait 10,000 soldats sur une populal'est en effet, car on ne comprend jamais dans le tion de 25,251 habitans. A SEVASTOPOL, en Crirecensement de cette ville la population de la mée, la population ne s'élève guère qu'à 2000 Guillotière et de la Croix-Rousse, qui sont àmes; mais elle est ordinairement de 15,000, cependant comme les deux banlieues de Lyon, lorsqu'on y comprend le personnel de la flotte Landis qu'à Manchester, à Liverpool, à BIR- qui y séjourne une grande partie de l'année. A MINGHAM, à EDIMBOURG, le chiffre de la popula- OLMUTZ, le nombre des habitans s'élève à 12,000; on est toujours porté beaucoup plus haut qu'il mais si on y comprend les militaires, la populame l'est réellement par la réunion des population s'élève alors à une vingtaine de mille ames. Lions adjacentes.

On compte à PHILADELPHIE, d'après le recensement fait en 1830, 167,841 habitans, dont 80,458 demeurent dans la ville, 58,380 dans les faubourgs du Nord (Northern suburbs), et 29,003 dans les faubourgs du Sud (Southern suburbs). A la HAVANE, en 1810, on comptait 43,175 habitans dans la ville proprement dite, 28,419 dans le faubourg de la Salud, 11,625 dans celui de Jesus-Maria, 3989 dans celui de Jesus del Monte, 2588 à SaintLazare, 2290 à Horcoa, 2218 à Regla, et 2000 au Cerro. Si un voyageur ou un géographe venait à réunir dans ses évaluations la population de tous ces bourgs qui sont attenans à la ville, il attribuerait à la capitale de Cuba une population totale de 96,304 habitans.

Nous ferons observer enfin que si les géographes anglo-américains calculaient la population de BOSTON comme les géographes anglais supputent celle de leurs villes, le recensement de Boston, au lieu de ne présenter qu'un chiffre de 61,392 habitans, s'éleverait à 80,000, car alors il comprendrait les habitans de Charlestown et des autres lieux circonvoisins.

II. On omet aussi très souvent d'indiquer si les militaires tenant garnison sont compris ou non dans la supputation qu'on fait des villes dont on indique la population. Cette omission est de peu d'importance dans les villes de premier ordre comme Londres et Paris; car eu égard à la population immense qui se trouve dans ces deux capitales, la différence serait très peu sensible; mais il en est autrement, lorsqu'on parle de Pétersbourg, de Vienne et de Berlin, dont la population est relativement peu considérable, et où la garnison militaire est plus nombreuse que dans les capitales de la France et de l'Angleterre; mais cette omission est surtout très sensible, lorsqu'il s'agit des places fortes, dont la garnison fait souvent le tiers ou le quart de la population bourgeoise.

En 1813, il y avait à PÉTERSBOURG, 285,500 ha

Avec une population de 20,000 habitans, GIBRAL-
TAR possède une garnison de 5000 hommes, qui
s'élève à 10,000 dans les temps de guerre. Les
forteresses de PALMA et de PESCHIERA, dans les
provinces vénitiennes, celles de SILBerberg, de
CUSTRIM et de TORGAU, dans la monarchie prus-
sienne, renferment des garnisons qui égalent
presque la population de ces petites cités.
III. On oublie souvent aussi de dire si l'on
comprend dans le chiffre de la population les
étrangers et les prisonniers civils. Cette omis-
sion n'est pas très importante, lorsqu'il ne s'agit
que de villes populeuses; mais il n'en est pas
ainsi, lorsque leur population n'est pas très con-
sidérable. A PETERSBOURG, en 1813, la population
entière était de 285,590 habitans, et le nombre des
étrangers s'élevait à 35,687. A MADRID, en 1825,
d'après le calcul fait par M. Minano, la population
s'élevait à 201,344 habitans, et le nombre des
étrangers était de 19,931. A NAPLES, d'après le re-
censement fait en 1822, le nombre seul des étran-
gers était de 10,662, tandis que le chiffre de la
population entière s'élevait à 344,916 habitans, non
compris les militaires, les marins et les galériens.
Les détenus civils dans les prisons de PARIS, en
1817, étaient au nombre de 3235, et, en 1826, à
VILVORDE, en Belgique, ils formaient presque la
moitié de la population. A la même époque, les
petites villes de RAGNIT, dans la Prusse orientale,
de WERDEN, dans le gouvernement de Dusseldorf,
et le village de BRAUWEILER, avaient, la première,
300 prisonniers et les deux derniers, 500 chacun.
La population des hulks qui se trouvent dans les
iles BERMUDES, est encore dans une proportion
bien plus grande, par rapport à celle du chef-lieu
de cette colonie anglaise.

La population des lieux renommés par leurs eaux minérales, par leurs rendez-vous de commerce ou de dévotion, présente aussi de grandes variations à certaines époques de l'année, différences qu'il est important de constater lorsqu'on considère ces lieux sous le point de vue statisti

que. Ainsi, le petit village de BAREGES, dans le département des Hautes-Pyrénées, est presque entièrement désert pendant l'hiver, et se repeuple au beau temps. TOEPLITZ et KARLSBAD, en Bohème, BADE, en Autriche, BADE, dans le grand duché de ce nom, SPA, dans la province de Liège, WIESBADEN, dans le duché de Nassau, etc., etc., se trouvent dans le même cas. Ici les étrangers résident pendant une grande partie de l'année, et peuvent être en quelque sorte considérés comme faisant alors partie de la population permanente de ces endroits, tandis que dans les lieux qui sont devenus des rendez-vous de commerce ou de pélerinage les étrangers ne sont qu'une population occasionnelle très passagère dont la résidence n'est que de courte durée, circonstances essentielles à noter et qui donnent une idée plus exacte des villes qu'on décrit.

A MAKARIEV, petite ville sur le Volga, on compte, pendant le temps de la foire, un très grand nombre d'étrangers qu'il serait ridicule de regarder comme faisant partie de sa population. Lorsque cette foire fut transférée à NIJNI-NOVGOROD, la population de cette ville, qui est ordinairement de 14,430 habitans, s'éleva, durant la tenue de la foire, à plus de 70,000. Aujourd'hui, les Russes, les Arméniens, les Persans, les Polonais, les Allemands se rendent en si grand nombre à la foire de Novgorod, qu'on n'y compte pas moins de 150,000 personnes. A l'époque où les bateaux qui remontent ou descendent le Volga arrivent à TVER, en Russie, la population de cette ville s'accroit, dans l'espace de deux ou trois jours, de 12,000 àmes. Les foires de LEIPSICK, de FRANCFORT, en Allemagne, de SINIGAGLIA et de BERGAME, en Italie, de BEAUCAIRE, en France, attirent dans ces villes beaucoup d'étrangers, mais pour quelques jours seulement. Il en est de même des fameuses foires de DUBNO, en Volhynie, d'IRBIT et de lENISSEÏSK, dans la Russie-Asiatique, et des lieux de dévotion et de pélerinage où se rendent, à l'occasion de certaines fêtes, un grand concours de personnes : SAINT-JACQUES DE COMPOSTELLE, en Espagne, LORETTE, en Italie, TENTAH, en Egypte, la MECQUE, en Arabie, HURDWAR, JAGGERNAUT, dans l'Inde. Ce n'est pas sans intention que nous avons consigné ici ces remarques; car plusieurs voyageurs se trouvant dans ces villes à l'époque de ces solennités leur ont donné une importance qu'elles ne méritaient pas. Ainsi, on a prétendu que TANTAH était la ville la plus peuplée de la Basse-Egypte, et on lui a attribué une population qui ne s'y trouve réellement qu'à l'occasion des trois foires qui s'y tiennent à l'époque du grand pélerinage des Musulmans. IV. Il arrive souvent qu'on oublie de faire mention si, dans la population des petites villes, on comprend la cour, les employés, les nobles, les ecclésiastiques, les Israelites, et

les élèves des universités. Ainsi, ARANJUEZ, OÙ

la cour d'Espagne ne réside que pendant l'été, possède alors une population de 10,000 âmes; mais après le départ de la cour, on y compte à peine 8000 àmes. Dans certaines villes du royaume de Naples, retranchez le tribunal civil, l'intendance des finances, la grande cour criminelle et la

grande cour civile, et vous réduirez leur population de près de 1500 personnes. Ces chiffres peuvent bien se négliger sur 40,000 habitans, mais ce serait trop considérable pour des villes dont la population n'est tout au plus que de 10,000 ames; aussi, le géographe et le statisticien ne doivent pas oublier d'en parler. Dans la plupart des villes de Russie et de Hongrie, les ecclésiastiques, les nobles, les militaires et les employés de l'instruction publique, ne figurent pas sur les tables de la population. On conçoit sans peine la différence énorme que devra présenter le chiffre de la population d'une ville universitaire, suivant que l'on y ajoutera ou que l'on en retranchera le nombre des étudians qui s'y trouvent. Sur 20,434 habitans, OXFORD compte 5259 étudians, et CAMBRIDGE, sur une population de 20,917, en comple 4830. En 1829, UPSALA en avait 1478, LUND 643; en 1831, IENA en avait 650, GIESSEN, 558; en 1829, TUBINGEN, 874; BONN 1002; HEIDELBERG en avait 1264, en 1829, et GOETTINGEN, 1018, en 1832. Pour mieux apprécier le rapport qu'il y a entre la population des villes que je viens de nommer, et le nombre des étudians qui y résident, il faut savoir que UPSALA n'a à-peu-près que 4500 habitans; LUND, 4000; JENA, 5000; GIESEN et TUBINGEN, 7000; HEIDELBERG et BONN, 10,000 et GOETTINGEN tout au plus 11,000.

V. On oublie aussi très souvent de comprendre dans la population des villes, dans le territoire desquelles il y a des mines, les mineurs et leurs familles. Cette indication est cependant très importante pour les petites villes; car ces exploitations influent considérablement sur leur population, qui croit ou décroit suivant la plus ou moins grande activité des travaux. Ainsi VILLARICA dans le Brésil, qui vers la fin du siècle dernier comptait 30,000 habitans, fut réduite dans peu de temps à 8500; ainsi GUANAXUATO, au Mexique, qui en 1803, sur une population de 70,600 ames en avait 29,600 qui travaillaient aux mines d'argent, et 41,000 qui vivaient dans la cité, ne Comptait plus en 1822 que 16,141 mineurs et 15,370 habitans dans la ville, par suite des guerres civiles qui avaient suspendu les travaux des mines. VI. Enfin, on oublie presque toujours d'indiquer l'époque à laquelle l'évaluation est censée avoir été faite. Cette omission donne naissance à une foule d'erreurs. Rarement la population est stationnaire, elle diminue ou s'accroit presque toujours; et si deux auteurs donnent le chiffre de la population d'une ville à deux époques différentes, on doit remarquer aussitôt une très grande différence entre leurs supputations. N'avons-nous pas vu de nos jours le nombre des habitans de GENEVE, de HAMBOURG, de DANTZICK, de RIGA, de SARAGOSSE, de VALENCE, en Espagne, de CARTHAGENE, de VERA-CRUZ, en Amérique, diminuer sensiblement; et les tremblemens de terre n'ont-ils pas décimé, il y a peu d'années, les populations des villes les plus florissantes de VENEZUELA et du CHILI ? Par une semblable catastrophe, ALEP Se vit enlever le quart de ses habitans, et BELIDA a presque été entièrement détruite. Si la peste, fléau si terrible autrefois, n'exerce plus sa fatale influence dans nos pays civilisés, des fiè

*

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