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24. Nulle autorisation préalable n'est nécessaire pour exercer des poursuites contre les fonctionnaires publics, pour faits de leur administration, sauf ce qui est statué à l'égard des ministres.

Disc. et adop., le 21 février 1831. ( Un. Belge, no 111.)

V. les art. 89 et 90 ci-après.

TITRE III.

Des pouvoirs.

Le 15 novembre 1830, la proposition de déterminer la nature du gouvernement fut renvoyée en sections: discutée aux séances des 19, 20 et 22 novembre, elle eut pour résultat l'adoption de la monarchie héréditaire et représentative, votée par 174 voix contre 13 qui se prononcèrent pour la république. ( Union Belge, no 30, 34, 35 et 38.)

Présentation et rapport par M. Raikem, le 25 décembre 1850. Discussion et adoption, le 3 janvier 1831. ( Union Belge, nos 68 et 69. )

25. Tous les pouvoirs émanent de la nation.

Ils sont exercés de la manière établie par la constitution.

Tous les pouvoirs. Des sections avaient demandé que l'on énonçât que les pouvoirs qui émanaient de la nation étaient les pouvoirs constitutionnels, d'autres les pouvoirs politiques. La section centrale a cru qu'il était inutile de l'exprimer; il lui a paru évident que lorsqu'une constitution parle des pouvoirs qu'elle établit, elle n'énonce que les pouvoirs constitutionnels. (Rapport de la section centrale. )

«En s'attachant au positif de la constitution, on y voit qu'elle a nettement donné au pouvoir exécutif et au pouvoir judiciaire une identité ou égalité d'origine (art. 25); qu'elle dit non moins positivement que ces pouvoirs ne s'exercent que de la manière établie par la constitution (même art. 25). La conséquence juridique et directe de ces propositions est, pour chacun de ces pouvoirs, l'obligation de rester dans sa limite constitutionnelle; ainsi l'un ne peut s'arroger sur l'autre un droit de commandement ou de suprématie, puisque la constitution ne le donne dans aucune de ses dispositions.» (Arrêt de la Cour de Bruxelles, 2o ch., en date du 28 juin 1834.)

« Le peuple doit, comme peuple, participer à tous les pouvoirs, et ce n'est même que par cette universalité de coopération qu'il apprend à connaitre la chose publique, à s'y intéresser, et à s'en rendre digne. » (Simonde de Sismondi, Études sur les constitutions des peuples libres, p. 69.)

26. Le pouvoir législatif s'exerce collectivement par le roi, la chambre des représentants et le sénat.

S'exerce collectivement. Le pouvoir législatif est exercé collectivement par le roi, la chambre des représentants et le sénat, parce que, comme tous les pouvoirs en Belgique, il émane directement de la nation. Cet article est une conséquence naturelle de l'art. 25.

Dans la délibération du sénat des 8 et 9 décembre 1851, et dans celle de la chambre des représentants des 15 et 16 du même mois, on a examiné la question de savoir si les chambres peuvent abandonner au roi le règlement d'un droit qui rentre, pour les cas ordinaires, dans le domaine de la loi. La majorité semble avoir reconnu que lorsque la loi elle-même détermine les limites dans lesquelles le pouvoir royal peut agir, dans un cas déterminé, il ne saurait y avoir aucune inconstitutionnalité, le roi n'étant jamais chargé alors que de l'exécution d'une loi. (Moniteur Belge des 10, 11, 17 et 18 décembre 1831.)

Par le roi. Si l'État est monarchique, il est indispensable d'admettre le monarque à prendre part à la puissance législative. Car, sans cela, ce monarque ne serait pas même l'égal des représentants du peuple, et le gouvernement passerait de la monarchie à la république.

Le monarque concourra donc à la confection des lois; et, outre les avantages inhérents à sa qualité de chef de l'État, il aura, comme les représentants du peuple, la faculté d'empêcher.

Ainsi s'organisera le pouvoir législatif; et, ses divers éléments étant contenus l'un par l'autre, il y aura, sur ce point, l'équilibre qui seul peut offrir les garanties sociales nécessaires. (Macarel, Éléments de droit politique, p. 51.)

27. L'initiative appartient à chacune des trois branches du pouvoir législatif.

Néanmoins toute loi relative aux recettes ou aux dépenses de l'État, ou au contingent de l'armée, doit d'abord être votée par la chambre des représentants.

L'initiative. Aux yeux de la raison, le droit de concourir à faire la loi renferme celui de la proposer.

Il est des cas où il ne convient pas que le prince propose certaines lois, qui cependant sont nécessaires; il en est d'autres où, le prince étant trompé par de mauvais conseillers, il est indispensable que les chambres proposent ces mêmes lois, qui autrement ne seraient jamais proposées. L'initiative ne doit donc pas appartenir exclusivement au roi, mais bien

à chacune des branches du pouvoir législatif. (Hello, Du régime consti

tutionnel, p. 408.)

D'abord être votée. Il ne faut pas donner à cette disposition plus de portée qu'elle n'en a. Ainsi le droit d'initiative de la chambre des représentants doit être restreint aux budgets, aux emprunts, enfin aux lois, dont le but principal est financier, et aux lois sur le contingent de l'armée; mais il ne faut pas admettre que toutes les lois dans lesquelles, à propos de l'exécution de l'un ou de l'autre article, intervient une dépense, doivent être votées d'abord par la chambre des représentants: si on adoptait cette opinion, que deviendrait le droit d'initiative du sénat, et dans quel cas serait-il appelé à l'exercer?

V. la discussion au sénat du projet portant création d'un conseil d'État.. (Moniteur du 27 avril 1854.)

28. L'interprétation des lois, par voie d'autorité, n'appartient qu'au pouvoir législatif.

L'interprétation. La constitution n'a rien voulu déterminer quant au mode à suivre pour arriver à l'interprétation par voie d'autorité; elle s'est bornée à poser le principe que cette interprétation n'appartient qu'au pouvoir législatif. (Rapport de la section centrale du 25 décembre 1830.)

« La loi du 4 août 1832 a déterminé dans quels cas il y a lieu à interprétation, et quelles formes doivent être suivies pour obtenir la loi interprétative; mais ses dispositions, on ne peut se le dissimuler, sont loin d'avoir rempli le vœu du pouvoir constituant, qui, en laissant au législateur le soin de régler cette matière, lui avait indiqué la nécessité de faire une distinction convenable entre les lois administratives et celles qui règlent plus particulièrement les droits des citoyens. » (Isidore Plaisant, Pasinomie, introduction à la 3o série. )

« Il n'appartient qu'aux volontés qui font les lois d'en émettre des interprétations générales obligatoires autrement le roi, ses ministres et leurs agents seraient des constitutions, des lois vivantes; il n'y aurait plus, à vrai dire, ni constitutions ni lois.» (Lanjuinais, Essai sur la charte, t. 1, p. 239.)

par

29. Au roi appartient le pouvoir exécutif, tel qu'il est réglé la constitution.

Pouvoir exécutif. Le roi n'a d'autres pouvoirs que ceux que lui confère la constitution. Ce principe, clairement exprimé, sanctionne la séparation des pouvoirs, base de tout l'édifice constitutionnel. (V. l'art. 78 et sa note.

V. aussi, sur l'étendue du pouvoir exécutif, l'art. 60 et suivant, ainsi que les notes.)

« Les lois, une fois faites, ayant une vertu constante et durable, qui oblige à les respecter et à s'y soumettre continuellement, il est nécessaire qu'il y ait au sein de la société une puissance qui fasse exécuter ces lois, et qui rende sensible la force que chacun des membres du corps politique a remise entre les mains du chef de l'État. »

« A quoi serviraient, en effet, à un peuple, les plus belles lois du monde, si elles n'étaient fidèlement exécutées? Elles se réduiraient alors à de vaines sentences; au fond, elles ne seraient d'aucune utilité pour la société. L'exécution doit donc suivre la volonté. »

«La puissance à laquelle est confiée cette haute mission, est la puissance exécutive ou exécutrice.» (Macarel, Éléments de droit politique, p. 11. )

30. Le pouvoir judiciaire est exercé par les cours et tribunaux.

Les arrêts et jugements sont exécutés au nom du roi.

Exécutés au nom du roi. Le pouvoir judiciaire est indépendant des autres pouvoirs. Il est exercé par les cours et tribunaux ; l'action du pouvoir exécutif ne commence que quand il s'agit d'exécuter leurs décisions. (Rapport de la section centrale.) Voy. les art. 92, 93, 94, 135 et 136 ciaprès, ainsi que leurs notes.

« Le pouvoir judiciaire consiste dans le droit de punir les crimes, et de régler les intérêts privés par l'application des lois civiles et pénales.

» Le pouvoir judiciaire est donc l'un des organes de la puissance législative; il la met aussi en action. C'est lui qui, faisant prévaloir les droits du plus faible sur les prétentions du plus fort, assure le règne de la loi et la paix entre les citoyens. C'est lui aussi qui forme la morale publique, en flétrissant les actions malhonnêtes, et en frappant de peines proportionnelles ceux qui ont commis des actions criminelles. En un mot, c'est cette autorité tutélaire qui donne à chacun cette opinion de sa sûreté, sans laquelle l'homme, inquiet sur sa liberté, sur sa fortune, sur son existence même, ne fait rien pour acquérir, parce qu'il n'est pas sûr de conserver; se hâte même de consommer ce qu'il possède, parce qu'il craint d'être dépouillé, et se regarde enfin comme étranger dans sa propre patrie.

» Tels sont les caractères principaux de ce pouvoir; tels sont aussi les résultats de son existence.» (Macarel, Éléments de droit politique, p. 12.) En France, la charte de l'an VIII ne reconnaissant que deux pouvoirs dans l'État, ne considérait le pouvoir judiciaire que comme une branche du pouvoir exécutif. La charte de 1850 a confirmé ce principe, en laissant subsister la déclaration, que toute justice émane du roi. La constitution

belge proclame, au contraire, le principe que tous les pouvoirs émanent de la nation (art. 25); elle établit l'autorité judiciaire sur une ligne parallèle aux autres pouvoirs. Par suite nos tribunaux jugent en vertu d'un mandat qu'ils tiennent de la nation et dont ils ne sont comptables qu'envers elle. L'exécution des lois, cette autre branche du pouvoir exécutif, est exercée au nom du roi à qui appartient toute puissance de commandement. Telle est donc la double base de l'autorité judiciaire en Belgique, la nation et le roi; l'une, source de tous les pouvoirs, conférant le droit de juger, l'autre investissant du droit de commandement.

Nous voyons par les articles 30, 29 et 26, qu'en Belgique l'ordre social est basé sur le principe tutélaire de l'entière séparation des pouvoirs sociaux.

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Lorsque, dans la même personne ou dans le même corps de magistra»ture, la puissance législative est réunie à la puissance exécutive, il n'y » a point de liberté, parce qu'on peut craindre que le même monarque ou » le même sénat ne fasse des lois tyranniques, pour les exécuter tyranni>> quement.'»>

Ainsi parle Montesquieu; voici comment Rousseau exprime la même idée :

« S'il était possible que le souverain, comme tel, eut la puissance exé>>cutive, le droit et le fait seraient tellement confondus, qu'on ne saurait plus ce qui est loi et ce qui ne l'est pas ; et le corps politique serait bien» tôt en proie à la violence contre laquelle il fut institué. » (Contrat social, ch. 16.)

« Il n'y a point encore de liberté, continue Montesquieu, si la puis»sance de juger n'est pas séparée de la puissance législative et du pouvoir >> exécutif (administratif proprement dit). Si elle était jointe à la puis»sance législative, le pouvoir sur la vie et la liberté des citoyens serait >> arbitraire, car le juge serait législateur. Si elle était jointe au pouvoir » exécutif (administratif), le juge pourrait avoir la force d'un oppresseur.

>> Tout serait perdu, si le même homme ou le mème corps exerçait » ces trois pouvoirs : celui de faire les lois, celui d'exécuter les résolutions » publiques, et celui de juger les crimes et les différends des particuliers. » Le même homme ou le même corps aurait, comme exécuteur des lois, >> toute la puissance qu'il se serait donnée comme législateur. Il pourrait >> ravager l'État par ses volontés générales, et comme il aurait encore la puissance de juger, il pourrait détruire chaque citoyen par ses volontés particulières.

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» La séparation des pouvoirs sociaux est donc la plus efficace des garan»ties que puisse désirer et obtenir le corps politique.» (Macarel, Éléments de droit politique, p. 49, 50 et 55). Elle affranchit, en effet, les différents pouvoirs de toute entrave, et met les citoyens à l'abri de toute tyrannie. Elle assurera toujours 'a fidèle exécution des lois et le règne de la justice. Mais

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