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Les art. 7 à 12 inclus ont été discutés et adoptés le 21 décembre 1850. (Un. Belge, no 66.)

13. La mort civile est abolie; elle ne peut être rétablie.

Mort civile. V. l'art. 25 du c. c., et les art. 18, 28, 29, 30 et 31 du code pénal.

L'art 13 de la constitution belge a repoussé d'une manière absolue et perpétuelle l'état de mort civile; on ne peut donc invoquer cet état et ses effets sur le territoire belge, fût-ce même à l'égard d'un étranger et en vertu des statuts de son pays, sans blesser la pensée morale et politique qui a dicté cet art. 13. (Arrêt de la cour de Bruxelles, 3o ch., en date du 18 juillet 1833.)

Le décret du 11 février 1831, no 45, a réglé la manière selon laquelle il est statué, jusqu'à révision du code pénal, dans le cas où la mort civile est comminée.

14. La liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la liberté de manifester ses opinions en toute matière, sont garanties, sauf la répression des délits commis à l'occasion de l'usage de ces libertés.

Des cultes. La liberté de conscience et la liberté des cultes sont le droit pour chacun de croire et de professer sa foi religieuse sans pouvoir être interdit ni persécuté de ce chef; d'exercer son culte sans que l'autorité civile puisse, par des considérations tirées de sa nature, de son plus ou moins de vérité, de sa plus ou moins bonne organisation, le prohiber, soit en tout, soit en partie, ou y intervenir, pour le régler dans le sens qu'elle jugerait le mieux en rapport avec son but, l'adoration de la Divinité, la conservation, la propagation de ses doctrines et la pratique de sa morale. Ces libertés ainsi définies n'ont rien d'incompatible avec le pouvoir qui appartient à la société civile de défendre et de punir par l'organe de la loi et que l'action des magistrats, les actes qu'elle juge contraires à l'ordre public. En conséquence les dispositions portées à cet effet n'ont pas été abrogées par la loi qui consacre la liberté des cultes et la liberté de conscience, en abolissant toute loi qui y porterait atteinte.

Tous les monuments de l'histoire, de la législation et de la jurisprudence attestent que c'est dans ces justes limites que ces libertés ont toujours été réclamées et consacrées. L'art. 14 de la constitution les y renferme en termes clairs et précis par la réserve de la répression des délits commis à l'occasion de l'usage de ces libertés. Sans ces limites, l'état social inhérent à la nature de l'homme, manquerait d'une de ses conditions essentielles, le pouvoir de la part de la société de juger et de réprimer les

actes contraires à l'ordre public. (Arrêt de la cour de cassation de Bruxelles du 27 novembre 1834, ch. crim.)

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Sauf la répression des délits. La section centrale a partagé à l'unanimité l'avis des sections; elle a cru que l'être moral, le culte, devait être responsable, tout comme l'individu, de ses actes devant la loi, et que dans les communes dont les habitants professent plusieurs religions, la nécessité de l'intervention de la loi ne peut être mise en doute. (Rapport de la section centrale.)

« Avec la tolérance, tous les cultes contribuent à maintenir l'ordre moral sur la terre : la vraie religion a de plus l'avantage de mieux enseigner le chemin du ciel. » (Macarel, Éléments de droit politique, p. 40.)

Ses opinions. La liberté des opinions est un droit naturel de l'homme. Elles doivent n'avoir à redouter aucune contrainte extérieure. Nous obliger, ou à professer celles que nous n'avons pas, ou à dissimuler celles que nous avons, serait, de la part d'un particulier, une agression si étrange, que les lois de tous les pays l'ont à peine prévue.

En ce point, les gouvernements n'ont pas plus de droits que les parti

culiers.

Dans un pays où quelques lumières auraient pénétré, la tyrannie qui contraindrait à professer des opinions que l'on n'a pas, dépraverait, autant qu'il serait en elle, les premières classes de la société, pour tromper et enchaîner les dernières. Elle entretiendrait dans le monde un commerce forcé de mensonge. Tant qu'il y serait ordonné à tous de faire semblant de croire ce que plusieurs ne pourraient pas croire, en effet, il y aurait corruption ou lâcheté dans les uns, inertie ou imbécillité dans les autres, dégradation de l'espèce humaine dans la plupart.

La noblesse et l'énergie des caractères tiennent, plus qu'on ne pense, à la franchise et à la constance des opinions; loin de les anéantir, le pouvoir doit donc en favoriser le développement. Son intérêt seul le lui conseillerait, alors même que l'équité ne lui en ferait pas un devoir.

Toutefois il ne faut pas confondre ici deux choses distinctes. Il n'est pas probable que jamais on nous force à dire ce que nous ne pensons pas ; il s'agit donc seulement de savoir jusqu'à quel point la société, ou ceux qui la régissent, peuvent nous empêcher de dire ce que nous pensons.

Hâtons-nous de reconnaître que le langage prend quelquefois le caractère d'une action. Manifester une opinion injurieuse à une personne est un acte agressif; et celui qui en est blessé ne fait, en s'y opposant, que repousser une attaque. C'est parce qu'elles sont des actions nuisibles au bienêtre et à la sûreté des individus, quelquefois même à la tranquillité générale, que la calomnie et la simple injure doivent être sévèrement réprimées.

Il est certain aussi que l'on coopère à un crime, à un délit, lorsqu'on le conseille, lorsqu'on y excite, lorsqu'on indique les moyens de le commettre : de pareils discours sont des actes de complicité, toujours punissables, s'il s'agit d'attentats contre des personnes privées, et, à plus forte raison, si

c'est l'ordre public que l'on menace. L'acte, dans ce dernier cas, prend le nom de sédition, genre sous lequel sont comprises, non pas les théories ou doctrines politiques, quelles qu'elles puissent être, mais les provocations expresses et directes à la désobéissance aux lois, les insultes publiquement faites aux dépositaires de l'autorité, les machinations qui tendent immédiatement à renverser le système public établi.

Voilà des délits ou des crimes que rien n'excuse; voilà des espèces d'opinions qu'il n'est jamais permis d'exprimer, quand même, par le plus déplorable travers, on les aurait conçues comme vraies ou légitimes.

Mais aussi ce sont les seules qu'il soit juste et utile d'interdire : la liberté de toutes les autres doit rester intacte, à l'abri de toute espèce d'entraves, d'empêchement préalable, de prohibition et de répression. (Macarel, Éléments de droit politique, p. 33 et 54.)

15. Nul ne peut être contraint de concourir d'une manière quelconque aux actes et aux cérémonies d'un culte ni d'en observer les jours de repos.

16. L'État n'a le droit d'intervenir ni dans la nomination, ni dans l'installation des ministres d'un culte quelconque, ni de défendre à ceux-ci de correspondre avec leurs supérieurs, et de publier leurs actes, sauf, en ce dernier cas, la responsabilité ordinaire en matière de presse et de publication.

Le mariage civil devra toujours précéder la bénédiction nuptiale, sauf les exceptions à établir par la loi, s'il y a lieu.

Mariage civil. Ainsi les ministres du culte ne peuvent donner la bénédiction nuptiale, qu'après que le mariage a été légalement conclu.

« Cette défense avait déjà été portée par la loi du 18 germinal an X ; elle était une mesure d'ordre public, parce qu'ensuite d'habitudes profondément invétérées dans les classes peu éclairées de la société, et résultant de la longue réunion dans la même personne des fonctions d'officier de l'état civil et de ministre du culte, l'intervention prématurée de celui-ci, du jour de la séparation de ces fonctions, devait être souvent, aux yeux de la loi, un obstacle à la conclusion légale du mariage, une cause de concubinage public, de procréation d'enfants naturels, et par conséquent une cause de désordre, ou, en d'autres termes, un acte contraire à l'ordre public, qu'il était du devoir du législateur de réprimer en le défendant, et qui, à ce titre, devait être puni et sortait des limites de la liberté des cultes. »

<< Aussi la constitution, afin de prévenir tout doute à cet égard, a renouvelé la même défense, en se bornant à y ajouter, non point l'obligation pour le législateur d'y apporter des exceptions, mais la faculté d'y en ap

porter dans le cas où il jugerait y avoir lieu de le faire, réserve conforme à la nature d'une constitution qui, ne pouvant et ne devant pas être changée aussi facilement que les lois ordinaires, doit rarement poser des règles absolues.» (Arrêt de la cour de cassation de Belgique, du 27 novembre 1854, ch. crim.)

Le procès-verbal de la séance de la chambre des représentants, dans laquelle l'art. 16 de la constitution a été adopté, porte que cet article abroge implicitement l'arrêté du gouvernement provisoire du 16 octobre 1830, (Bull.offi., no 12.)

17. L'enseignement est libre; toute mesure préventive est interdite; la répression des délits n'est réglée que par la loi.

L'instruction publique donnée aux frais de l'État, est également réglée par la loi.

Est libre. La liberté de l'enseignement est une des prérogatives les plus précieuses dont notre pays puisse s'enorgueillir. Ce droit accordé à toute science de se produire, lève tous les obstacles qui s'opposent à la diffusion des lumières; il est de ceux qui grandissent l'avenir d'une nation libre, en élevant son intelligence, car la science est l'instrument le plus certain de toute amélioration sociale, et une nation, comme un individu, devient ce que l'éducation la fait.

Il ne suffit pas toutefois que les établissements propres à réfléchir les lumières, se multiplient à l'infini, et que la séve nourricière remonte jusqu'à la plus petite ramification de l'arbre social, il faut aussi que l'instruction réponde aux besoins, aux devoirs et aux mœurs du peuple, et qu'elle soit en harmonie avec le développement, la civilisation de l'époque, car c'est d'elle que découle en partie la paix ou le désordre des familles, la tranquillité de l'État, ou les secousses qui les ébranlent. D'où naît, pour I'État, pour la province et pour la commune, le devoir de veiller sur l'instruction du peuple, de lui prêter appui, lorsque cela est nécessaire, de la secourir, lorsqu'elle est en danger.

Aux frais de l'État. La rédaction de cet article a fait naître la question de savoir si l'instruction aux frais de l'État était obligatoire pour lui, ou seulement facultative. Elle a été résolue dans le premier sens, et mise en action par la loi du 27 septembre 1855, qui a organisé l'enseignement supérieur.

« Il y a deux universités aux frais de l'État, l'une à Gand et l'autre à Liége. Chaque université comprend les facultés de philosophie et lettres, des sciences mathématiques, physiques et naturelles, de droit et de médecine. (Art. 1.) Les professeurs portent le titre de professeurs ordinaires

ou extraordinaires. (Art. 9.) Il y a dans chaque université neuf professeurs en sciences, huit en philosophie, huit en médecine, et sept en droit. En cas de nécessité, un ou deux professeurs de plus peuvent être nommés dans chacune de ces facultés. (Art. 10.) Le roi nomme les professeurs. (Art. 15.) Des agrégés peuvent être attachés aux universités. Ils sont nommés par le roi. (Art. 14.) Les agrégés peuvent remplacer les professeurs, en cas d'empêchement légitime. (Art. 15.) Les autorités académiques sont le recteur de l'université, le secrétaire, les doyens des facultés, le conseil académique et le collége des assesseurs. (Art. 16.) Chaque élève doit prendre annuellement une inscription; le droit est de 15 francs. (Art. 18.) Nul n'est admis aux leçons académiques que sur l'exhibition d'une carte délivrée par le receveur de l'université ou par le professeur. (Art. 22.) Il y a près de chaque université un commissaire du gouvernement sous le titre d'administrateurinspecteur de l'université. Ce fonctionnaire est nommé par le roi. (Art. 25.) Le gouvernement est chargé de la surveillance et de la direction des universités de l'État. (Art. 28.) Il est fait annuellement un rapport aux chambres sur la situation des universités de l'État. (Art. 30.) Le gouvernement peut appeler au professorat des étrangers d'un talent éminent, lorsque l'intérêt de l'instruction publique le réclame. (Art. 31.) Il y a, pour la philosophie et les lettres, les sciences, le droit et la médecine, deux grades, celui de candidat et celui de docteur. (Art. 36.) Des jurys, siégeant à Bruxelles, font les examens et délivrent les certificats et les diplômes pour les grades. Toute personne peut se présenter aux examens et obtenir des grades, sans distinction du temps, du lieu ou de la manière dont elle a fait ses études. (Art. 40.) Les membres des jurys d'examen sont nommés pour une année. Chacun des jurys est composé de sept membres, dont deux sont désignés par la chambre des représentants, deux par le sénat, et trois par le gouvernement. (Art. 41.) Les examens se font par écrit et oralement. (Art. 52.) Les questions sont tirées au sort, et dictées tout de suite aux récipiendaires. (Art. 54.) Tout examen oral est public; il est annoncé trois jours au moins d'avance dans le Moniteur. (Art. 56.) Après chaque examen oral, le jury délibère sur l'admission et le rang des récipiendaires. Il est dressé procès-verbal du résultat de la délibération. Ce procès-verbal mentionne le mérite de l'examen écrit et de l'examen oral; il en est donné immédiatement lecture aux récipiendaires et au public. (Art. 57.) Les certificats d'examen, les diplômes de candidat ou de docteur, sont délivrés au nom du roi. (Art. 58.) Nul n'est admis aux fonctions qui exigent un grade, s'il n'a obtenu ce grade de la manière déterminée par la présente loi. (Art. 64.) Nul ne peut pratiquer en qualité d'avocat, de médecin, de chirurgien ou d'accoucheur, s'il n'a été reçu docteur, conformément à la présente loi. Néanmoins le gouvernement peut accorder des dispenses spéciales pour certaines branches de l'art de guérir, après avoir pris l'avis du jury d'examen. (Art. 65.) Le gouvernement peut

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