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Bacchus. THESPIS fut le premier qui pensa à y introduire un personnage, ou acteur, dont les récits avaient pour but de laisser reposer le chœur; ESCHYLE y en introduisit un second, et voici le dialogue établi; SOPHOCLE, pensant avec raison qu'il fallait un nombre impair pour établir une majorité, en introduisit un troisième. La tragédie grecque n'a pas ou peu dépassé ce nombre d'acteurs.

En Grèce, les acteurs étaient admis aux plus hautes fonctions et très-considérés ; à Rome, au contraire, celui qui montait sur un théâtre perdait ses droits de citoyen et était en quelque sorte entaché d'infamie.

Cette contradiction s'est continuée chez les peuples modernes en Angleterre les acteurs ont toujours joui d'une grande considération, tandis qu'en France ils étaient repoussés de la société. Ainsi, quand en Angleterre la noblesse suivait le convoi de GARRICK, on refusait en France d'enterrer MOLIÈRE et Mile LECOUVREUR. Cette déconsidération s'est beaucoup amoindrie, mais elle existe encore, ne fût-ce qu'à l'état de préjugé. C'est à ce point que le ruban de la Légion d'honneur, qui s'épanouit à la boutonnière de tant de nullités, ne décore aucun acteur, en tant que comédien.

Dans le monde on se sert indistinctement des mots « acteur » et « comédien ». C'est à tort, car il y a une énorme différence entre les deux, et tout autant qu'entre apprenti et ouvrier. Tout comédien est acteur; mais tout acteur n'est pas COMÉDIEN. L'acteur n'est souvent propre qu'à un rôle; le COMÉDIEN peut les jouer tous avec la même perfection, à quelques nuances près. C'est ainsi que GARRICK jouait Orosmane et Crispin avec le même succès; c'est aussi pour cela que notre ThéâtreFrançais nous montre autant de COMÉDIENS qu'il compte d'acteurs.

ACTION. En style dramatique l'action est

le SUJET ou le principal élément d'une pièce. D'après l'ancienne poétique elle devrait être unique et ne pas excéder le cours d'une journée. Le théâtre moderne, surtout dans le DRAME, s'est affranchi de ce joug; l'action a pris des proportions et un développement immenses de simple qu'elle était, elle est devenue tellement compliquée, que parfois le public, les acteurs et l'auteur n'y comprennent rien.

Se dit encore comme synonyme de mouve-
Il y a beaucoup d'action dans cette

ment

pièce.

AFFECTATION.

Ce que beaucoup d'ac

teurs, des deux sexes, veulent faire passer pour du NATUREL

erreur n'est pas compte.

DUBAY a dit : « L'affectation est la caricature du NATUREL. » On ne peut mieux dire.

AFFÉTERIE. - Préoccupation de ses avantages physiques et de ses moyens personnels. Ceci ne devrait regarder que le côté des dames; malheureusement il n'en est rien des deux côtés l'on « pose ».

AFFICHE.

Gluau que le directeur d'un théâtre fait apposer sur les murs de la ville où il exploite son privilége (vieux style).

Ce fut, dit-on, COSME D'OVIEDO, auteur espagnol contemporain de CERVANTES, qui inventà l'affiche dramatique. Elle ne fut en usage en France que vers la fin du xvir° siècle.

Les affiches différaient de couleurs pour chaque théâtre. Celles de l'OPÉRA étaient jaunes; celles de l'HOTEL DE BOURGOGNE étaient rouges, et le théâtre de la rue Mazarine les avait vertes. On voit que depuis longtemps MM. les directeurs nous en font voir de toutes les couleurs.

Primitivement, les affiches n'indiquaient ni le nom de l'auteur, ni les noms des acteurs.

Pour l'auteur il n'y avait pas grand mal on ne pouvait substituer une pièce à une autre ; mais l'absence des noms des acteurs permettant au CHEF D'EMPLOI de se faire remplacer, sans que les spectateurs en fussent instruits, cela occasionnait souvent des scènes tumultueuses de la part du public déçu.

Si l'affiche n'indiquait pas les noms, elle remplissait l'office des journaux de théâtres actuels et contenait un compte rendu de la pièce du jour; elle engageait le public à se pourvoir à l'avance de bonnes loges, et s'exprimait en prose et en vers. VILLIERS composa pour l'Amarillys de DU RYER, jouée à l'hôtel de Bourgogne, en 1658, une affiche en vers qui est restée le modèle du genre.

Bien faire l'affiche est une science, et chose qui n'est pas donnée au premier venu. L'affiche est le levier d'ARCHIMEDE, surtout en province. Il faut savoir disposer les titres, fabriquer les sous-titres, baptiser les ACTES et les TABLEAUX. Exemple :

LA TOUR DE NESLE

OU REINE CRIMINELLE! ÉPOUSE COUPABLE!!
MÈRE DÉNATURÉE ! ! !

Les directeurs de province excellent tout par

ticulièrement à faire l'affiche. Leur ignorance, assez générale en littérature dramatique... et autre, leur donne un aplomb qu'on ne saurait trop admirer. Nous lisions tout récemment, à la suite du titre : Le Supplice d'une Femme, cette appréciation pyramidale : « Dans cette pièce, les mots fulminent comme des coupoles intelligentes.» (Textuel.)

Voici encore deux jolies choses auxquelles nous ne changeons rien :

L'INTRIGUE ESPAGNOLE

OU

LA BARBE INTERROMPUE

CHEF-D'OEUVRE HISTORIQUE DE L'IMMORTEL
BEAUMARCHAIS.

On comprend qu'il s'agit du Barbier de SEVILLE; et puis

ALI-BABA

OU LES QUARANTE VOLEURS

MÉLODRAME HISTORIQUE A GRAND SPECTACLE

« Nota. Le directeur n'ayant pu trouver que 12 voleurs dans le pays, demande l'indulgence du public pour n'en pas offrir 40. »

L'affiche doit encore compter avec MM. les

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