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Ce ne fera au contraire que pour tirer le Roi notre très-cher Neveu, de l'opreffion, où le Regent le tient avec tous fes fujets; par les plus grands abus qui fe foient jamais fait de l'autorité confiée.

Ce ne fera que pour procurer l'assemblée des Etats Généraux, qui feuls peuvent remédier aux maux préfens & prevenir ceux dont on n'eft que trop vifiblement menacé, nous vous exhortons à feconder nos juftes intentions & à vous unir à nous dans une vuë fi falutaire au repos public.

Nous efperons tout de vôtre zèle pour le Roi vôtre Maitre, de votre amitié pour nous & de l'attachement que vous avez à vos loix & à votre patrie, fur ce nous prions Dieu qu'il vous ait, chers & bien aimez, en fa Sainte & digne garde. Donnée au Monaftere Royal de St. Laurent le 6. de Septembre 1718.

No. VI.

Signé.

D. MIGUEL FERNAN

PHILIPPE.
& plus bas

DES DURAN.

Pretendue Requête, que l'on fupofoit présen tée au Roi Catholique au nom des trois Etats de France.

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SIRE.

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Ous les Ordres du Royaume de France viennent se jetter aux pieds de Votre Ma

jefté

jefté pour implorer fon fecours dans l'état où les reduit le Gouvernement préfent: elle n'ignore pas leurs malheurs, mais elle ne les connoit pas encore dans toute leur étendue.

Le refpect qu'ils ont pour l'autorité Royale dans quelque main qu'elle fe trouve & de quelque maniere qu'on en ufe, ne leur permet pas d'envifager d'autre moyen d'en fortir que par les fecours qu'ils ont droit d'attendre des bontez de votre Maj.

Cette Couronne eft le patrimoine de Vos Peres, celui qui la porte, tient à vous Sire par les liens les plus forts, la Nation regarde toûjours Votre Majefté comme l'Heritier préfomptif.

Dans cette vue elle se flatte de trouver dans votre cœur les mêmes fentimens qu'elle auroit trouvé dans le cœur de feu Monfeigneur, qu'elle pleure encore tous les jours. Dans cette vue elle vient expofer à vos yeux tous fes malheurs & implorer votre affiftance. La Reli gion a toûjours été le plus ferme apui des Monarchies ; Votre Majefté n'ignore pas le zèle de Louis le Grand pour la conferver dans toute fa pureté. Il femble que le premier foin du Duc d'Orleans ait été de fe faire honneur de Pirreligion. Cette irreligion l'a plongé dans des excès de licence, dont les Siècles les plus corrompus n'ont point eu d'exemple & qui en lui attirant le mépris & l'indignation des peuples, nous fait craindre à tout moment pour le Royaume, les châtimens les plus terribles de la vengeance Divine. Ce premier pas femble a voir jetté, comme une jufte punition, l'efprit d'aveuglement fur toute fa conduite: on forme des Traitez, on achette des Alliances avec

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les

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les Ennemis de la Religion, avec les Ennemis de la Monarchie, avec les Ennemis de Votre Majefté.

Les Enfans qui commencent à ouvrir les yeux, en pénétrent les motifs, il n'en est point qui ne voye, que l'on facrifie le véritable inté rêt de la Nation à une efperance que l'on ne peut fupofer fans crime, & qu'on ne peut envifager fans horreur; c'eft cependant cette cruelle fupofition qui eft l'ame de tous les Confeils, & le premier mobile de ces funeftes Traitez. C'est là ce qui dicte ces Arrêts qui renversent toutes les fortunes, c'eft là l'Idole où l'on facrifie le repos de l'Etat. A la lettre, Sire, on ne paye plus que le feul prêt des foldats, & les rentes fur la ville, pour les raifons qu'il eft aifé de pénétrer: mais pour les apointemens des Offi ciers, de quelque ordre qu'ils foient, pour les penfions acquifes au prix du fang, il n'en eft plus question.

Le Public n'a reffenti aucun fruit, ni de l'aug mentation des monnoyes, ni de la taxe des Gens d'affaires. On exige cependant les mêmes tribus que le feu Roi a exigé pendant le fort des plus longues guerres; mais dans le tems que le Roi ti roit d'une main,il repandoit de l'autre,& cette cir culation faifoit fubfifter les grands & les Peuples. Aujourd'hui les Etrangers, qui favent flater la paffion dominante, confument tout le Patri moine des Enfans.

L'unique Compagnie du Royaume qui ait la liberté de parler, a porté fes remontrances refpectueuses au pied du Trône, cette Compagnie dans laquelle on a reconnu le pouvoir de decerner la Regence, à qui l'on s'eft adreffé

pour

pour la recevoir, avec laquelle on a ftipulé en la recevant de fes mains, à laquelle on a promis publiquement & avec ferment que l'on ne vouloit être maitre que des feules graces, & que pour la Refolution des affaires, elle feroit prife a la pluralité des voix dans le Confeil de Regence; non feulement on ne l'écoute pas dans fes plus fages remontrances, mais on exclut des Confeils, les Sujets les plus dignes, d'abord qu'ils repréfentent la vérité; non feulement on ne l'écoute pas, mais la pudeur empêche de répéter à Votre Majefté les termes également honteux & injurieux dans lefquels on a répondu lorfqu'on a parlé aux Gens du Roi en particulier, fes Regiftres du Parlement en feront foi jufqu'à la posterité la plus recu lée.

Les Etats de Bretagne légitimement convoquez ont démandé qu'il leur fut permis de faire rendre compte à un Tréforier très-fufpect afin de mettre ordre à l'adminiftration de leurs finances, on leur en a fait un crime d'Etat, on a fait marcher des Troupes, comme on les fait marcher contre des Rebelles.

Enfin, Sire, on ne connoit plus de Loix, ces Edits qui confacrent encore aujourd'hui ła mémoire des Rois vos Ayeuls, ces Edits rendus avec tant de fageffe pour conferver la fainteté des mariages, & l'état de toutes les familles, on s'en joue; une Lettre de cachet les renverse, quelles fuites une telle conduite ne fait elle pas envifager? que ne fait elle pas craindre ? Nous ne nous flaterons pas vainement, Sire, en nous perfuadant, que nous entendrons de votre bouche ces paroles de cou

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fo

folation; Je fens vos maux, mais quel remede y puis-je aporter?

Il est entre les mains de Votre Majefté, quoique revêtue d'une Couronne, elle n'en eft pas moins Fils de France, & fes droits font encore mieux établis par le refpect & l'attachement des Peuples, qu'ils ne le font par la Loi du Sang. Comme Oncle du Roi Pupille, qui peut difputer à Votre Majefté le pouvoir de convoquer les Etats, pour avifer aux moyens de rétablir l'ordre, la tutele & la Regence? n'apartenoit elle pas de droit à Votre Majefté? il n'eft pas fans exemple qu'un Prince Etranger ait été Tuteur d'un Pupille; fans fortir hors de chez nous, Baudouin Comte de Flandres n'a-t-il pas eu Padministration du Royaume de France, & la Tutele de Philippe premier, fils d'Henri pre mier? Votre Majefté n'auroit pas manquée de raifons, fi elle avoit voulu attaquer la prétenfion du Duc d'Orleans? auffi toute la Francë a-t-elle fenti que Votre Majefté, loin de confulter fes Droits, n'a envifagé que le repos de l'Etat, dans la confiance d'une fage adminiftration, & toute la France a reconnu dans cette conduite le cœur d'un véritable Pere?

Votre Majefté peut s'affurer de fon côté, que tous les cœurs voleroient au devant d'El le, quand Elle paroitroit avec fa feule Maifon; elle peut conter qu'il n'y a point de Citoyen qui ne lui fervit de garde; mais, quand on fupofera, que pour plus grande fûreté, elle paroitroit à la tête d'une armée de dix mille hommes, quand on fupofera que le Duc d'Orleans paroitroit à la tête d'une armée de 60. mille hommes; Votre Majefté peut s'affurer

que

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