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terminer la prépondérance des avis en raison de l'importance des matières. Par exemple, quand il s'agira de législation, l'on peut exiger les trois quarts au moins des suffrages, les deux tiers dans les matières d'état, la pluralité seulement pour les élections et autres affaires courantes et momentanées. Ceci n'est qu'un exemple pour expliquer mon idée, et non une proportion que je détermine.

Dans un état tel que la Pologne, où les ames ont encore un grand ressort, peut-être eût-on pu conserver dans son entier ce beau droit du liberum veto sans beaucoup de risque, et peut-être même avec avantage, pourvu qu'on eût rendu ce droit dangereux à exercer, et qu'on y eût attaché de grandes conséquences pour celui qui s'en seroit prévalu; car il est, j'ose le dire, extravagant que celui qui rompt ainsi l'activité de la diète, et laisse l'état sans ressource, s'en aille jouir chez lui tranquillement et impunément de la désolation publique qu'il a causée.

Si donc, dans une résolution presque unanime, ̧ un seul opposant conservoit le droit de l'annuler, je voudrois qu'il répondit de son opposition sur sa tête, non seulement à ses constituants dans la diétine post-comitiale; mais ensuite à toute la nation dont il a fait le malheur. Je voudrois qu'il fût ordonné par la loi que six mois après son opposition il seroit jugé solennellement par un tribunal

extraordinaire établi pour cela seul, composé dé tout ce que la nation a de plus sage, de plus illustre, et de plus respecté, et qui ne pourroit le renvoyer simplement absous, mais seroit obligé de le condamner à mort sans aucune grace, ou de lui décerner une récompense et des honneurs publics pour toute sa vie, sans pouvoir jamais prendre aucun milieu entre ces deux alternatives.

Des établissements de cette espèce, si favorables à l'énergie du courage et à l'amour de la liberté, sont trop éloignés de l'esprit moderne pour qu'on puisse espérer qu'ils soient adoptés ni goûtés; mais ils n'étoient pas inconnus aux anciens; et c'est parlà que leurs instituteurs savoient élever les ames et les enflammer au besoin d'un zéle vraiment héroïque. On a vu, dans des républiques où régnoient des lois plus dures encore, de généreux citoyens se dévouer à la mort dans le péril de la patrie pour ouvrir un avis qui pût la sauver. Un veto suivi du même danger peut sauver l'état dans l'occasion, et n'y sera jamais fort à craindre.

Oserois-je parler ici des confédérations, et n'être pas de l'avis des savants? Ils ne voient que le mal qu'elles font; il faudroit voir aussi celui qu'elles empêchent. Sans contredit la confédération est un état violent dans la république; mais il est des maux extrêmes qui rendent les remèdes violents nécessaires, et dont il faut tâcher de guérir à tout

prix. La confédération est en Pologne ce qu'étoit la dictature chez les Romains. L'une et l'autre font taire les lois dans un péril pressant, mais avec cette grande différence, que la dictature, directement contraire à la législation romaine et à l'esprit du gouvernement, a fini par le détruire, et que les confédérations, au contraire, n'étant qu'un moyen de raffermir et rétablir la constitution ébranlée par de grands efforts, peuvent tendre et renforcer le ressort relâché de l'état sans pouvoir jamais le briser. Cette forme fédérative, qui peut-être dans son origine eut une cause fortuite, me paroît être un chef-d'œuvre de politique. Par-tout où la liberté règne, elle est incessamment attaquée, et très souvent en péril. Tout état libre où les grandes crises n'ont pas été prévues est à chaque orage en danger de périr. Il n'y a que les Polonois qui de ces crises mêmes aient su tirer un nouveau moyen de maintenir la constitution. Sans les confédéra

tions, il y a long-temps que la république de Pologne ne seroit plus, et j'ai grand'peur qu'elle ne dure pas long-temps après elles si l'on prend le parti de les abolir. Jetez les yeux sur ce qui vient de se passer. Sans les confédérations l'état étoit subjugué, la liberté étoit pour jamais anéantie. Voulez-vous ôter à la république la ressource qui vient de la sauver?

Et qu'on ne pense pas que, quand le liberum

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veto sera aboli et la pluralité rétablie, les confédérations deviendront inutiles, comme si tout leur avantage consistoit dans cette pluralité. Ce n'est

pas la même chose. La puissance exécutive attachée aux confédérations leur donnera toujours, dans les besoins extrêmes, une vigueur, une activité, une célérité que ne peut avoir la diéte, forcée à marcher à pas plus lents, avec plus de formalités, et qui ne peut faire un seul mouvement irrégulier sans renverser la constitution.

Non, les confédérations sont le bouclier, l'asile, le sanctuaire de cette constitution. Tant qu'elles subsisteront, il me paroît impossible qu'elle se détruise. Il faut les laisser, mais il faut les régler. Si tous les abus étoient ôtés, les confédérations deviendroient presque inutiles. La réforme de votre gouvernement doit opérer cet effet. Il n'y aura plus que les entreprises violentes qui mettent dans la nécessité d'y recourir; mais ces entreprises sont dans l'ordre des choses qu'il faut prévoir. Au lieu donc d'abolir les confédérations, déterminez les cas où elles peuvent légitimement avoir lieu, et puis réglez-en bien la forme et l'effet, pour leur donner une sanction légale autant qu'il est possible, sans gêner leur formation ni leur activité. Il y a même de ces cas où, par le seul fait, toute la Pologne doit être à l'instant confédérée, comme, par exemple, au moment où, sous quelque pré

texte que ce soit et hors le cas d'une guerre ouverte, des troupes étrangères mettent le pied dans l'état; parcequ'enfin, quel que soit le sujet de cette entrée, et le gouvernement même y eût-il consenti, confédération chez soi n'est pas hostilité chez les autres. Lorsque, par quelque obstacle que ce puisse être, la diéte est empêchée de s'assembler au temps marqué par la loi, lorsqu'à l'instigation de qui que ce soit on fait trouver des gens de guerre au temps et au lieu de son assemblée, ou que sa forme est altérée, ou que son activité est suspendue, ou que sa liberté est gênée en quelque façon que ce soit, dans tous ces cas la confédération générale doit exister par le seul fait; les assemblées et signatures particulières n'en sont que des branches; et tous les maréchaux en doivent être subordonnés à celui qui aura été nommé le premier.

CHAPITRE X.

Administration.

Sans entrer dans des détails d'administration pour lesquels les connoissances et les vues me manquent également, je risquerai seulement sur les deux parties des finances et de la guerre quelques idées que je dois dire, puisque je les crois

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