Page images
PDF
EPUB

spéciale, prêteront le serment professionnel en ces termes : « Je jure obéissance à la Constitution..... Je jure et promets aussi de bien et loyalement remplir mes fonctions, et d'observer en tout les devoirs qu'elles m'imposent. >>>

Suivant un arrêt de la Cour suprême du 5 novembre 1853, il y a présomption légale qu'un avocat appelé à compléter un tribunal a prêté le serment prescrit par les lois, tant que le contraire n'est pas justifié. Or, cette preuve contraire paraîtrait fort difficile à faire, à raison surtout de l'usage où sont les cours, aux audiences de rentrée, de recevoir le renouvellement du serment des avocats présents à la barre, sans qu'il en soit dressé de procès-verbal. Nous pensons donc que les parties sont censées avoir reconnu qu'un avocat appelé pour compléter avait renouvelé dûment son serment quand elles n'ont pas formé d'opposition à ce qu'il siégeât.

L'autorité qui doit recevoir le serment, diffère suivant la nature des fonctions. Les membres de la Cour de Cassation doivent prêter serment devant cette cour; les avocats aux conseils entre les mains du garde des sceaux (Ord. du 10 septembre 1817); les membres des cours d'appel, des tribunaux civils, et les avocats (1) doivent prêter serment devant la cour d'appel (Décr. du 24 messidor an XII, Ord. 20 nov. 1822); les juges de paix et leurs suppléants, les notaires, les avoués, les commissaires-priseurs et les huissiers, devant le tribunal civil (Décr. 24 messidor an XII, L. 25 ventose an XI, L. 22 ventose an XII, Décr. 14 juin 1813); les juges des tribunaux de commerce, devant la cour d'appel ou le tribunal civil, suivant les cas indiqués dans l'art. 629 du Code de commerce.

Les premiers présidents et procureurs généraux peuvent prêter leur serment entre les mains du chef de l'Etat ou d'un commissaire par lui délégué (Ordonnance du 13 mars 1815).

Dans la plupart des cas, la prestation de serment, à raison de la solennité qui l'accompagne, vaut installation. Il est d'usage toutefois que les premiers présidents et procureurs généraux, après avoir prêté serment entre les mains du chef de l'Etat, et les magistrats des tribunaux, après avoir prêté leur serment devant la cour d'appel, soient installés ensuite dans leur compagnie en audience solennelle; mais l'omission de cette formalité ne saurait influer sur les pouvoirs du fonctionnaire.

(1) Ha été jugé par un arrêt de la Cour de Cass. du 3 mars 1840 (S. 1840.1.193.. - P. 1840. 1. 251), qu'une cour d'appel ne peut point refuser le serment d'un licencié en droit qui veut acquérir le titre d'avocat.

La prestation préalable de serment est au contraire une condition substantielle des pouvoirs du fonctionnaire, en sorte que tout ce qu'il aurait fait avant cette prestation de serment serait radicalement nul. Que si une personne avait été nommée à un emploi, quoiqu'elle ne réunît pas les conditions d'aptitude ou d'âge. ou quelques autres exigées par les lois, le chef de l'Etat paraîtrait en droit, il est vrai, de rétracter sa nomination; mais il semble que les tribunaux ne sauraient, sans excès de pouvoir, annuler les actes faits par ce fonctionnaire, sous le prétexte qu'il aurait été irrégulièrement nommé.

Ajoutons, en terminant, que lorsqu'un fonctionnaire change de ressort, il doit prêter, ce semble, un nouveau serment, quoique la nature de ses fonctions ne change pas; parce que le caractère d'un fonctionnaire n'existe que dans les limites de son ressort, et qu'en allant dans un autre, il doit être considéré dans ce dernier comme exerçant des fonctions nouvelles. Il y aurait dès lors nullité dans les actes qu'il ferait avant cette nouvelle prestation de serment (1).

Il semble aussi que le serment doit être renouvelé lorsque, dans le même ressort, le fonctionnaire est promu à des fonctions supérieures, comme lorsque de juge il devient président, ou de substitut procureur (Inst. min. du 27 oct. 1829). Les actes que ce fonctionnaire aurait faits avant la nouvelle prestation de serment ne seraient donc valables qu'autant qu'il aurait pu les faire également en son ancienne qualité, qu'il conserve naturellement toujours jusqu'à ce qu'il ait rempli les formalités nécessaires pour acquérir la nouvelle.

CHAPITRE XII

Des Incompatibilités.

Il est des incompatibilités qui résultent de la nature même des choses; il en est d'autres qui sont établies par des textes particuliers. Il suffira d'indiquer les principales.

Les fonctions de magistrature auprès des tribunaux civils et

(1) La Cour de Cassation a décidé le contraire dans le cas d'un procureur général qui était passé d'une cour à une autre sans réitérer le premier serment qu'il avait prêté devant le souverain. Dans ce cas-là même, la chose pour nous reste douteuse. L'arrêt est du 21 juillet 1832 (D. A. Serment, 70. P. 1833. 1. 338. S. 1863. 1. 63).

des cours sont incompatibles avec toutes autres (1); celles des juges suppléants peuvent cependant être cumulées, et le sont même ordinairement, avec la profession d'avocat ou d'avoué. Aussi la loi du 27 mars 1791, art. 8, se borne-t-elle à déclarer que les fonctions de juge-suppléant sont incompatibles avec celles d'huissier ou de greffier près du tribunal auquel ces juges sont attachés, et de percepteur des contributions.

Il semble que les fonctions de greffier en chef de cour el de greffier des tribunaux civils ou de commerce doivent entraîner les mêmes incompatibilités que les emplois de magis

trature.

La profession d'avocat est incompatible avec les fonctions de préfet, sous-préfet et conseiller de préfecture; avec celles de greffier, de notaire et d'avoué; avec les emplois à gages et ceux d'agent comptable, avec toute espèce de négoce. En sont exclues les personnes exerçant la profession d'agent d'affaires (Ord. du 20 novembre 1833, art. 42, et loi du 21 juin 1865, art. 3).

Les fonctions de notaire sont incompatibles avec celles de greffier, d'avoué, d'huissier, de préposé à la recette des contribution directes et indirectes, de commissaire de police et de commissaire-priseur (Loi du 25 ventose an XI, art. 7).

Les fonctions d'avoué paraissent présenter des incompatibilités analogues. Celles d'huissier sont incompatibles avec toute autre fonction salariée (Décret 14 juin 1813, art. 30 et 41).

Les fonctions de commissaire-priseur sont incompatibles avec la profession de marchand de meubles, de tapissier, de fripier, et avec la qualité d'associé à un commerce de cette nature; mais ailleurs qu'à Paris, elles sont compatibles avec celles de greffier de justice de paix ou de tribunal de police, et d'huissier (Ord. du 26 juin 1816, art. 41 et 12).

(1) Il n'y a pas de distinction à faire entre les fonctions gratuites et les fonctions salariées; ainsi les juges ne peuvent pas plus exercer les fonctions de maire ou d'adjoint que celles de préfet ou de conseiller de préfecture. Mais il n'est pas douteux qu'ils peuvent faire partie de toutes les assemblées délibérantes, Corps législatif, conseils généraux ou d'arrondissement, conseils municipaux, fabriques, commissions administratives des hospices, etc.

Quant à la question de savoir si des magistrats peuvent être appelés à occuper des chaires dans les écoles de droit, Carré la résout d'une manière affirmative (Lois de l'organisation et de la compétence, quest. 66). Cette doctrine s'appuie sur de nombreux précédents.

CHAPITRE XIII

Des peines disciplinaires et de l'Autorité qui peut les infliger.

Après avoir parlé des diverses professions qui se rattachent à l'ordre judiciaire, nous croyons devoir dire quelques mots des peines de discipline qui peuvent être infligées à ceux qui manquent aux devoirs de leur profession.

§ler. Des peines disciplinaires qui peuvent étre prononcées contre les Magistrats et les Greffiers.

Ces peines sont indiquées dans le chapitre 7 de la loi du 20 avril 1810. Ce sont, à l'égard des juges, la censure simple, la censure avec réprimande, qui emporte de droit privation de traitement pendant un mois, la suspension provisoire, qui emporte la privation de traitement pendant sa durée, et la déchéance.

Les trois premières de ces peines peuvent être prononcées, en la chambre du conseil, par les tribunaux de première instance, s'il s'agit d'un juge de ces tribunaux, ou bien d'un membre de justice de paix ou d'un juge de police de leur arrondissement; lorsqu'il s'agit d'un membre de cour d'appel ou de cour d'assises, l'application des peines prémentionnées ne peut être faite que par la cour d'appel, en chambre du conseil. Les cours d'appel peuvent aussi exercer les droits de discipline attribués aux tribunaux de première instance lorsque ceux-ci négligent de le faire, et donner en ce cas à ces tribunaux un avertissement d'être plus exacts à l'avenir. Dans aucun cas, la décision ne peut être prise qu'après que le juge inculpé a été entendu et appelé, et sur les conclusions du ministère public.

Les décisions disciplinaires prononcées par les tribunaux de première instance ne peuvent être mises à exécution qu'après avoir été soumises à la cour d'appel; celles des cours ellesmêmes, quand elles prononcent ou confirment la censure, ne peuvent être mises à exécution qu'après avoir été approuvées par le garde des sceaux; mais en cas de suspension provisoire, le juge doit, en attendant, s'abstenir de ses fonctions.

Quant à la déchéance, elle ne peut être prononcée que sur la dénonciation du garde des sceaux et par la Cour de Cassation: tout jugement de condamnation rendu contre un juge à une peine, même de simple police, peut donner lieu à la destitution, si le garde des sceaux juge le fait assez grave.

L'art. 57 de la loi du 20 avril 1810 permet aussi au garde des sceaux de mander auprès de lui tout membre des cours et tribunaux pour s'expliquer sur les faits qui lui seraient imputés.

Les officiers du ministère public ne peuvent être rappelés à leurs devoirs que par le procureur général de leur ressort ou le ministre de la justice. Les tribunaux et cours peuvent seulement avertir le procureur général et le ministre, quand ils estiment qu'un magistrat du parquet est répréhensible.

Les greffiers peuvent être avertis ou réprimandés par les présidents de leurs cours et tribunaux respectifs, et être dénoncés, s'il y a lieu, au ministre de la justice.

§ 2. Des peines disciplinaires contre les Avocats, Avoués
et Huissiers.

Parlons d'abord des peines qui peuvent être prononcées ou provoquées par les conseils ou chambres de discipline; nous parlerons ensuite de l'autorité disciplinaire que les cours et tribunaux peuvent exercer directement.

Les peines de discipline contre les avocats sont : l'avertissement, la réprimande, l'interdiction temporaire qui ne peut excéder le terme d'une année, et la radiation du tableau (Ord. 20 novembre 1822, art. 18). A l'égard des avocats à la Cour de Cassation, ils paraissent encore régis, sous le rapport de la discipline, par le titre 17 du règlement de 1738 (Ord. 10 juillet 1814). L'ordonnance du 10 septembre 1817 leur rend communes au surplus les règles de discipline auxquelles se trouvent soumis les avocats près les tribunaux et les cours

Quant aux avoués, les peines disciplinaires qui peuvent être prononcées par leur chambre sont le rappel à l'ordre, la censure simple par la décision même, la censure avec réprimande par le président à l'avoué en personne dans la chambre assemblée, et l'interdiction de l'entrée de la chambre (Arrêté du 13 frimaire an IX, art. 8). A l'égard de la suspension, la chambre, renforcée par la voie du sort d'un nombre égal d'avoués étrangers à la chambre plus un, ne peut émettre qu'un simple avis, et c'est le tribunal ou la cour qui doit prononcer (Décret 6 juillet 1810, art. 63).

La chambre des huissiers peut prononcer les mêmes peines que celles des avoués, si ce n'est qu'elle ne peut interdire

« PreviousContinue »