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ensuite mention dans le jugement. L'avertissement peut aussi être donné par un avenir; mais si rien ne constatait que l'avoué d'une partie qui n'a pas assisté au rapport eût été prévenu, les droits de défense de cette partie sembleraient avoir été violés, et le jugement devrait être annulé (1).

Le rapporteur doit veiller à ce que la communication au ministère public, si l'affaire en est susceptible, soit faite assez à temps pour que le jugement ne soit pas retardé (Décr. 30 mars 1808, art. 86).

Si le rapporteur décède, se démet, ou ne peut par quelque autre cause faire son rapport, il doit en être commis un autre sur requête par ordonnance du président, signifiée aux avoués des autres parties trois jours au moins avant le rapport (art. 110). Il faut bien que les autres parties puissent connaître le nouveau rapporteur, afin de le récuser s'il y a lieu.

Les défenseurs, d'après l'art. 111, ne peuvent, sous aucun prétexte, prendre la parole après le rapport, et la cour suprême a appliqué cette règle à tous les rapports sans distinction qui se font devant les juridictions civiles (2). Nous croyons cette décision erronée. Que les avocats ne puissent prendre la parole après des rapports sur délibéré ou sur instruction par écrit, c'est tout simple, vu que l'instruction est alors présumée complète. Mais quand l'instruction d'une affaire commence par un rapport, nous ne voyons pas pourquoi on ne suivrait pas de préférence le mode tracé par l'art. 210 C. inst. crim. pour le jugement des appels correctionnels, où le rapport du juge n'exclut pas du tout la plaidoirie des parties.

Dans les instructions par écrit, les pièces des parties passant successivement en diverses mains, la loi a dû prendre des précautions pour en empêcher le détournement, et pour bien déterminer la personne qui serait responsable dans le cas où quelqu'une de ces pièces viendrait à s'égarer.

Il est à cet effet tenu au greffe un registre sur lequel doivent être portées toutes les productions suivant leur ordre de date. Ce registre, divisé en colonnes, doit contenir la date de la production, les noms des parties, de leurs avoués et du rapporteur; il doit être laissé une colonne en blanc (art. 108). On a déjà dit que les avoués ne peuvent prendre les productions des parties adverses en communication que sur récépissé, et ils sont responsables jusqu'à ce qu'ils aient retiré leur récépissé.

(1) Contrà, Carré, quest. 476.

(2) Cass. 24 déc. 1869 (S. 1870. 1. 278. - P. 1870.684. - D. P.70.1.139).

T. I.

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Lorsque toutes les parties ont produit, ou que les délais pour produire sont expirés, le greffier, sur la réquisition de la partie la plus diligente, doit remettre les pièces au rapporteur, qui s'en charge en signant sur la colonne laissée en blanc au registre des productions; c'est aussi sur cette colonne que doit être écrite la réquisition de la partie.

Après le jugement, le rapporteur doit rétablir les pièces au greffe, et il en est déchargé par la seule radiation de sa signature sur le registre des productions. A dater de cet instant, la responsabilité revient tout entière sur la tête du greffier.

Enfin les avoués, quand ils retirent leurs pièces, doivent émarger le registre, et cet émargement sert de décharge au greffier. L'art. 116 donnerait à penser que chacun des avoués peut retirer sa production quand bon lui semble. On conçoit toutefois qu'un avoué, en retirant son dossier, pourrait, par mégarde, prendre quelqu'une des pièces des autres parties. Le tarif y a pourvu en autorisant dans son art. 70, § 77, une sommation d'avoué à avoué pour assister au retrait des pièces, et le greffier peut refuser de remettre aucune pièce à l'un des avoués en l'absence des autres, si cette sommation ne lui est pas représentée.

$ 2. Des Délibérés.

On distingue deux espèces de délibéré : le délibéré simple et le délibéré avec nomination de rapporteur.

Le Délibéré simple a lieu lorsque les juges se retirent en la chambre du conseil pour y recueillir les avis, ou continuent la cause à l'une des prochaines audiences pour prononcer le jugement (art. 116). Il est bien en ce dernier cas que le tribunal indique le jour où le jugement sera rendu; mais la loi ne l'exigeant pas, le jugement ne peut être annulé par cela seul que le jour où il a été rendu n'aurait pas été marqué d'avance. Les parties n'ayant rien à ajouter à leur défense, il importe peu que leurs avoués n'assistent pas au jugement.

Le délibéré simple peut avoir lieu dans les affaires qui se jugent sur rapport comme dans celles qui se jugent sur plaidoirie. La seconde espèce de délibéré, particulière aux affaires qui se jugent sur plaidoirie, c'est le délibéré avec nomination de rapporteur (1). « Le tribunal, porte à cet égard l'article 93, peut

(1) La Cour de Cassation, dans deux arrêts des 21 mai 1860 (S. 1860. 1. 960. P. 1861. 272. D. P. 60. 1. 360), et 11 janvier 1865 (S. 1865. 1.126. P. 1865. 277. D. P. 65. 1. 192), a admis une troisième espèce de délibéré, le délibéré au rap

ordonner que les pièces seront mises sur le bureau pour en être délibéré au rapport d'un juge nommé par le jugement, avec indication du jour auquel le rapport sera fait. >>>

Le jugement qui ordonne le délibéré, à la différence de celui qui ordonne une instruction par écrit, ne doit pas être levé ni signifié: les parties et leurs défenseurs sont tenus de l'exécuter sur sa seule prononciation, sans sommation; et si l'une des parties ne remet point ses pièces, la cause doit être jugée sur les pièces de l'autre (art. 94), sans que le jugement devienne pour cela susceptible d'opposition.

L'indication du jour où le rapport sera fait est bien plus importante ici que ne peut l'être en matière de délibéré simple l'indication du jour où le jugement sera rendu. Dans les rapports sur délibéré, comme dans les rapports sur procès écrits, les parties ont en effet le droit de relever, au moyen de notes remises au président, les inexactitudes du rapport (art. 111), et il importe qu'elles soient mises à même d'exercer ce droit. Il y aurait donc nullité substantielle si le rapport était fait, en l'absence de quelqu'un des avoués des parties, à une audience qui n'aurait pas été」 indiquée soit par le jugement qui aurait ordonné le délibéré, soit par quelque jugement ou avenir postérieur: nullité qui ne pourrait, bien entendu, être invoquée que par celle des parties dont l'avoué n'aurait pas été présent à l'audience (1).

Le rapport sur délibéré ne doit pas être considéré comme un mode d'instruction particulier, mais seulement comme le complément des plaidoiries. Une conséquence importante qui s'induit de là, c'est qu'il y a nullité dans le jugement rendu sur rapport, si les juges qui y ont concouru n'ont pas assisté aux plaidoiries; tandis que, dans les procès instruits par écrit, il n'est nullement nécessaire que le tribunal soit composé, lors du jugement définitif, comme il l'était lorsque l'instruction écrite a été ordonnée. Nous indiquerons dans le chapitre suivant une autre conséquence non moins importante de ce même principe.

port d'un juge qui fait le rapport à la chambre du conseil. Cette jurisprudence, qui tend à atténuer la responsabilité des magistrats et peut favoriser la paresse, ne nous semble pas bonne.

(1) Cass. 26 mars 1834, 17 juillet 1838 (S. 1838. 1. 819. - P. 1838. 2. 576. -D. A. Instr. par écrit, 28).

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CHAPITRE X

Des conclusions des parties.

On distingue, au palais, les conclusions principales, et les conclusions subsidiaires.

Les conclusions principales sont celles que la partie pose en premier lieu, et qui, si elles sont accueillies, lui procurent le gain complet du procès.

Les conclusions subsidiaires ne sont posées que pour le cas où les conclusions principales seraient repoussées, et leur admission par conséquent ne procure à la partie qu'un succès incomplet.

Les parties peuvent modifier leurs conclusions tant que l'instruction n'est pas terminée. Ainsi, dans les procès qni se jugent sur plaidoirie, les conclusions peuvent être modifiées tant que les plaidoiries ne sont pas closes, et le décret du 30 mars 1808 reconnaît expressément qu'elles peuvent l'être sur l'audience. << Lorsque les avoués, porte l'art 33, changeront les conclusions par eux déposées, ou qu'ils prendront sur le barreau des conclusions nouvelles, ils seront tenus d'en remettre les copies signées d'eux au greffier, qui les portera sur les feuilles d'audience. »

Mais lorsque les plaidoiries sont closes, et que le ministère public a été entendu, ou que les juges sont à opiner, les parties ne peuvent plus être admises à changer leurs conclusions; et il en est de même, à notre avis, non-seulement quand les juges ont ordonné un simple délibéré, mais encore quand ils ont ordonné un délibéré avec nomination de rapporteur (1), parce que ce délibéré, ainsi que nous l'avons dit, ne constitue pas un mode particulier d'instruction.

Les juges peuvent même refuser d'entendre de nouvelles conclusions avant que le ministère public ait été entendu, si les plaidoiries ont été déclarées closes, et la cause renvoyée à une autre audience uniquement pour entendre le ministère public (2).

Dans les instructions par écrit, il est incontestable, que jusqu'au rapport les parties peuvent modifier les conclusions: c'est ce que l'art. 102 C. pr. suppose manifestement.

(1) Contrà, Carré, quest. 441, à la note; Cass. 7 nov. 1827 (S. chr. P. chr. D. A. Inst. par écrit, 33-2°).

(2) Cass. 2 juillet 1873 (S. 1873. 1. 305. — P. 1873. 765).

CHAPITRE XI

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De la publicité des audiences et de leur police.

Le principe important de la publicité des audiences avait déjà été posé dans la loi du 16-24 août 1790, qui disposait dans l'art. 14 du titre 2: « En toute matière civile ou criminelle, les plaidoyers, rapports et jugements seront publics. >>>

Ce principe a été reproduit dans plusieurs lois postérieures. Ainsi, aux termes de l'art. 87 C. pr., les plaidoiries doivent être publiques, excepté dans les cas où la loi ordonne qu'elles seront secrètes. Ainsi encore, aux termes de l'art. 111 du même Code, tous rapports, même sur délibéré, doivent être faits à l'audience, c'est-à-dire à l'audience publique; et l'art. 112 veut qu'il en soit de même pour les conclusions du ministère public. Ainsi enfin, d'après la loi du 20 avril 1810, art. 7, tous les jugements qui n'ont pas été rendus publiquement doivent être déclarés nuls.

La publicité ne se présume pas de plein droit; il faut qu'elle soit mentionnée dans le jugement: mais la jurisprudence admet à cet égard des équipollents. Ainsi il a été jugé nombre de fois qu'un jugement indique suffisamment la publicité quand il y est dit qu'il a été rendu à l'audience.

L'art. 87 C. pr. suppose, comme on l'a vu, des cas où d'après la loi les plaidoiries doivent être secrètes. Ces cas sont fort rares. On peut citer comme exemples les demandes en autorisation formées par des femmes mariées (C. pr. 861), et les oppositions aux taxes de dépens (Décret du 16 février 1807).

Le même article 87 apporte au principe de la publicité une autre exception en ces termes : « Pourra cependant le tribunal ordonner qu'elles (les plaidoiries) se feront à huis-clos, si la discussion publique devait entraîner du scandale ou des inconvénients graves; mais dans ce cas, le tribunal sera tenu d'en délibérer et de rendre compte de sa délibération au procureur général près la cour d'appel, et si la cause est pendante dans une cour d'appel, au ministre de la justice. »

L'article n'exige pas, pour qu'on puisse procéder à huis-clos, qu'on ait obtenu une réponse favorable du procureur général ou du ministre de la justice. Le huis-clos peut donc avoir lieu sans attendre cette réponse, mais il ne doit être observé que pour les plaidoiries : le jugement reste soumis à la règle générale de la publicité. Il est toujours aisé en effet d'éviter ou de voiler, dans les motifs d'un jugement, les détails scandaleux qui ont pu être

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