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naître les meilleurs ouvriers et pour savoir comment il fallait en faire l'inscription et la gravure. Il vient de me répondre que M. de Boze3, de l'Académie des inscriptions, décidera de l'exergue de la légende, etc.; que Bouchardon dessinera et que Marteau gravera; il ajoute que, comme l'Académie de Dijon ne lui paraît pas décidée, il lui faut un mémoire instructif auquel il répondra, soit pour le prix des coins, soit pour le marché du balancier. Si vous me permettez de vous faire mes observations à ce sujet, je vous dirai qu'il serait fort inutile de faire faire cette médaille à Genève, parce qu'elle serait très-certainement sujette à être arrêtée et confisquée. Il ne convient point aussi de mettre le portrait du fondateur; cela ne s'est jamais fait pour une médaille qui doit servir de prix; c'est tout au plus si on met son nom dans l'exergue. A l'égard du prix, on assure qu'il ne montera pas aussi haut que vous le craignez. M. de Boze ne prendra rien pour l'inscription; Bouchardon ne prendra point d'argent, et on en sera quitte pour lui envoyer une feuillette de vin de Bourgogne. Quand l'inscription sera décidée, vous saurez tout aussitôt les prix des coins et du balancier; cela dépend du dessin, selon qu'il est plus ou moins chargé. Quand vous m'aurez, monsieur, marqué vos intentions, j'écrirai à M. de Caylus, qui a bien voulu se charger de cette affaire, et qui, assurément, est plus en état que personne de la bien faire. J'ai l'honneur d'être, avec un respectueux attachement, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

BUFFON.

(Tirée des archives de l'Académie de Dijon.-Publiée, en 1819, par C. X. Girault.)

XXII

A M. ARTHUR,

MÉDECIN DU ROI, A CAYENNE'.

Au Jardin du Roi, le 4 janvier 1742.

J'ai reçu, monsieur, la caisse de curiosités que vous avez bien voulu m'adresser par la voie de M. Bélami, et je vous en fais mes remercîments. M. de Jussieu' s'est chargé de vous écrire en détail sur ce qu'elle contenait. Je serais très-fâché que vous pussiez, monsieur, vous dégoûter de rendre service. au Jardin du Roi. J'ai renouvelé mes représentations au sujet de vos appointements, et l'on vous a accordé encore une augmentation de trois cents livres ; c'est tout ce que nous avons pu faire. Vous avez obligation à M. de La Porte, qui s'est porté de fort bonne grâce à faire valoir vos raisons et les miennes auprès de M. le comte de Maurepas. Comme il protége immédiatement notre Cabinet d'histoire naturelle, qui est actuellement arrangé et dans un très-bel ordre, vous lui ferez bien votre cour si vous voulez bien, monsieur, m'adresser toutes les curiosités que vous pourrez ramasser. J'ai l'honneur d'être bien sincèrement, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

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BUFFON.

(Inédite. Communiquée par M. le docteur Tessereau. - M. Flourens en a publié un extrait.)

XXIII

AU PRÉSIDENT DE RUFFEY.

Paris, le 25 janvier 1743.

Je vous aurais, mon cher et aimable Ruffey, répondu plus tôt, et même je vous aurais prévenu si, depuis un mois que je suis de retour à Paris, je n'avais pas été très-incommodé

d'une grande fluxion qui n'est dissipée que depuis très-peu de jours. Je suis plus sensible que je ne puis vous le dire aux marques de votre souvenir et de votre amitié, et je ne crois pas que le retour de toute la mienne suffise à ma reconnaissance et aux sentiments que vous méritez et que je vous ai voués. Je vous supplie de me continuer les vôtres, qui sont si flatteurs pour moi, et je ferai toujours tout ce que je pourrai pour m'en rendre digne.

Je vous renvoie vos questions sur l'ormille apostillées. Si on désire quelque chose de plus à cet égard, je le ferai avec grand plaisir; mais, comme cette culture est aisée, il y en a tout autant qu'il en faut pour mettre au fait un jardinier.

Toutes les comédiennes ont des rhumes, des fluxions ou des ch..... p..... Cela nous prive de la représentation des pièces nouvelles. Piron1 attend l'hiver prochain pour donner Montézume, à cause de Mlle Gaussin', qui a une ou deux de ces incommodités.

M. le cardinal est toujours très-mal, et tout le monde croit que nous sommes à la veille de le perdre3. On parle d'une trêve et de quelques arrangements pour une future paix; il est à souhaiter que cet avenir ne se fasse pas attendre. Adieu, mon cher Ruffey; je vous embrasse de tout mon cœur. Quand plaira-t-il à votre vieil oncle de vous sommer par son testament de venir faire un tour dans le cabinet du Jardin du Roi, où il y a une petite caisse de curiosités qui vous attendent, et que je vous enverrai s'il ne se détermine pas bientôt? BUFFON.

(Inédite.

De la collection de M. le comte de Vesvrotte.)

XXIV

A M. ARTHUR,

MÉDECIN DU ROI, A CAYENNE.

Paris, le 10 février 1747.

Je n'ai pas reçu, monsieur, les lettres que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, et il y a environ deux ans que j'ai reçu votre avant-dernière lettre. Cela ne m'a pas fait oublier, monsieur, les services que vous avez bien voulu nous faire pour le Jardin et pour le Cabinet, et j'en ai parlé plus d'une fois à M. le comte de Maurepas et à M. de La Porte; mais la guerre fait la réponse à tout. J'espère cependant qu'au moyen d'un changement qui doit se faire dans les officiers de votre colonie, vous aurez lieu dans la suite d'ètre plus content.

Je vous ai recommandé et vous fais recommander par mes amis, et je vous assure que je l'ai fait avec la vivacité qu'inspire le désir sincère d'obliger.

Je suis bien aise que vous ayez pris quelque affection pour Buvée; c'est un honnête garçon, courageux, et qui mérite qu'on s'intéresse à ce qui le regarde. S'il m'eût envoyé quelque chose, j'eusse peut-être obtenu quelques légers appointements pour lui. Ce sont surtout des animaux que nous désirons beaucoup, et je voudrais bien qu'il vous en envoyât; et s'il y a quelques pierres figurées et d'autres pétrifications à Cayenne, je souhaiterais fort en avoir, aussi bien que des échantillons des pierres à bâtir et autres de ce pays.

Vous me feriez grand plaisir aussi de me dire si les montagnes de la Guyane sont fort considérables, et si le grand lac de Parime1, qu'on appelait le lac d'Or, est connu; si quelqu'un y a été nouvellement, et si en effet il est d'une étendue si considérable, et s'il ne reçoit aucun fleuve.

Faites-moi l'amitié de me marquer quelles sont les espèces de poissons les plus communes sur vos côtes et dans les ri

vières de cette partie des Indes. Je vous demande grâce pour toutes ces questions, et je suis persuadé que vous voudrez bien répondre ce que vous en savez. Il y a encore un fait sur lequel je voudrais bien être éclairci, c'est de savoir s'il n'y a point de coquilles pétrifiées dans les Cordilières au Pérou *. M. de La Condamine prétend en avoir cherché inutilement. Si par hasard vous trouvez quelqu'un qui puisse vous instruire sur cela, je vous en serai infiniment obligé. Faites-moi, monsieur, l'honneur de m'écrire aussi souvent que vous le pourrez, et ne doutez pas de l'attachement avec lequel je suis, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

BUFFON.

(Inédite. Communiquée par M. le docteur Tessereau. M. Flourens en a publié un extrait.)

XXV

A L'ABBÉ LE BLANC.

Montbard, le 16 octobre 1747.

2

Vous trouverez, mon cher ami, que j'ai beaucoup tardé à vous faire réponse. Ce n'est pas que je n'eusse voulu vous donner sur-le-champ toute la consolation que vous pouvez attendre de moi; mais j'ai été dans les embarras et dans l'inquiétude, et, quoique mes peines ne soient rien en comparaison des vôtres, je n'ai pas laissé de les sentir, et je n'ai pas eu le loisir de vous marquer plus tôt combien j'ai été touché de tout ce qui est arrivé1. Le récit que m'en a fait M. Daubenton m'a indigné; il y a bien de la noirceur dans le pays que vous habitez: il y a bien du courage à y être honnête homme, puisqu'on est presque sûr d'être la victime des méchants. Cependant vous ne devez pas être entièrement abattu; il n'y a que la mauvaise conscience qui puisse nous mener au désespoir. Consolez-vous donc, mon cher ami, consolez-vous dans votre vertu; lorsque votre âme sera tranquille, il vous sera

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