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le font fes peines! Tel eft le fyftême du Chriftianifme, que fi vous acceptez vos chagrins, vos douleurs, avec une parfaite réfignation, ils deviennent pour vous les arrhes d'un bonheur éternel. Par eux vous expiez vos péchés, vous vous perfectionnez dans la vertu, & vous devenez conforme à Jefus crucifié. Par les tribulations, en un mot, le Chrétien parvient à une grandeur d'ame, à une élévation de fentimens que la fageffe païenne n'a que foiblement apperçues,,.

,, Ces idées fi confolantes, fi raviffantes rempliffent de joie l'ame chrétienne au milieu des maux qui l'agitent; elles la foûtiennent contre les fraïeurs de la mort, ou plûtôt elle ne les éprouve pas la mort eit pour elle la fin de fes peines & le commencement de fon éternelle felicité. C'est un foldat de Jefus-Chrift qui touche au moment où il va en recevoir la couronne immortelle

Par une conféquence toute contraire & d'une vérité également fentible, l'incrédule dépourvû de tous ces fecours, doit gémir dans un triste abandon & un dépouillement total de toute confolation dans le malheur. Le tableau qu'en trace le P. H. auroit pu paroître fufpect ou exagéré, s'il ne l'avoit copié fur celui que nous en a laiffé un philofophe qui pouvoit en attefter l'exactitude par le trifte témoignage de fa propre expérience."Rien, dit Milord Shaftsbury, ,, ne peut être plus affligeant pour l'incré dule

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dule que la penfée de vivre dans un monde où mille maux font toûjours à ,, craindre, & dont les biens n'inspirent ,, guere que mépris, que haine & que dégoût; que c'eft par la perfuafion d'un Dieu & d'un état à venir, qu'un homme ,, peut retenir fa vertu & fon intégrité, dans la fituation même la plus étonnan,, te, & que dans le fyftême oppofé il eft à peine poffible, que les rigueurs de la ,, fortune ne dégoûtent pas de la vie & ne jettent pas dans les plus noires vapeurs. ,, Epicure, qui le fentit comme cet auteur, ne diffimula pas non plus que la Religion du vulgaire, quelque fabuleufe qu'elle fût, étoit encore plus utile à cet égard, que le fentiment de la fatalité, qui ôtoit tout lieu à l'efpérance & aux prieres,,.

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La légiflation du Chriftianisme eft aufli avantageufe aux hommes par fes loix pofitives que par fes loix prohibitives. Les vertus qu'elle commande, font des principes afsûrés de bonheur, comme les vices qu'elle condamne, font des fources d'affliction & de mifere. Le P. H. développé toutes les conféquences de l'amour du prochain, de la réconciliation des ennemis, du bon éxemple, de la charité envers les affligés & les pauvres, &c. Toutes ces matieres ont été bien des fois difcutées par les théologiens & les prédicateurs; mais le P. H. les montre dans un point de vue, où on ne les a peut-être point encore fuffifamment envifagées. Il les repréfente comme les caufes &

le foûtien du bonheur public; il prouve qu'elles le font en effet.

Au chapitre 24 on trouve l'influence de la Religion chrétienne fur tous les états & toutes les conditions de la fociété. On voit d'abord qu'elle eft le gage le plus afsûré de la bonne foi de l'ouvrier & du commerçant. L'hypocrifie & la fraude n'entrent point dans le cœur de l'homme fincérement chrétien, & celui qui eft affez heureux pour aimer & pratiquer les maximes évangéliques, aime mieux fouffrir les torts, qu'on lui fait, que d'en faire à perfonne. L'ordre d'une juftice exacte dans le reglement des poffeffions, l'obfervation des devoirs réciproques entre les maîtres & les domestiques, la paix & l'union des familles, l'éducation des enfans, l'équité & l'incorruptibilité des Magiftrats font les fruits précieux de la Religion chrétienne. Le P. H. traite ce dernier article avec une attention particuliere; il n'y en a pas en effet au quel la fociété générale foit plus intéreffée. "La Magiftrature eft fans doute en de bonnes mains, & elle eft digne de la plus grande confiance, quand ceux qui l'exercent font pénétrés de ces maximes; mais qu'attendre d'un Juge, qui regarde la justice & l'injustice comme des chimeres dont il peut fe jouer au gré de fes paffions? Il dépouillera le légitime poffeffeur d'un héritage, & en transférera la poffeffion à l'ufurpateur; il abfoudra le crime & condamnera l'innocence. Ce ne fera plus l'homme, ce fera la paffion qui dé

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cidera du fort des citoiens. Les loix de l'Etat ne font par une conféquence néceffaire aux yeux d'un tel Magiftrat que des loix fans force, qu'on peut éluder, ou fuivre au gré de fon caprice. L'amitié, la parenté, la recommandation, l'intérêt, peut-être même la fimple fantaifie, fuffira pour faire jouir l'injuftice des droits inconteftables de la juftice. On pourroit dire à un femblable Magiftrat Si la juftice n'eft rien, pourquoi donc voulez-vous qu'on vous refpecte? Pourquoi vous êtes vous préfenté pour veiller au bon ordre de la fociété ? S'il eft fincere, voici quelle fera fa réponfe: Je prends plaifir à duper les hommes; je cherche à me donner de la confidération aux yeux de l'imbécille vulgaire, & à pouvoir remplir, à fes dépens, mes projets d'avarice, d'ambition, ou de volupté. Reconnoît-on l'homme à cette conduite ? Oui on l'y reconnoît; mais l'homme pervers, l'homme ennemi de! la fociété, l'homme indigne de fon nom & de fon état 39.

Le P. H. développe enfuite les avantages qui résultent de l'obligation du ferment, de la prohibition de tout menfonge; & après avoir fatisfait à tous les détails, il établit deux affertions qui font le réfultat & la conféquence de tout ce qui a précédé. C'eit qu'il eft très-utile aux Souverains que leurs fujets foient chrétiens, & qu'il eft très-utile aux fujets que leur Souverain foit chrétien. La Religion du Souverain & celle des fujets forme cet accord inestimable, qui lie le

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Chef de l'Etat avec tous les individus qui le compofent, qui afsûre le regne de la juftice, de la paix, de l'abondance, de la fécurité, de tout ce qui contribue à la félicité des citoïens. "Le peuple qui eft la victime d'un gouvernement tyrannique, trouve dans un gouvernement reglé fur les maximes de l'Evangile, toute la fatisfaction qu'il peut légitimement en defirer. Perfuadé, que c'eft de Dieu qu'il tient toute fon autorité, le Souverain chrétien fait, que l'origine de cette autorité forme pour lui une obligation indifpenfable de répondre, par l'ufage qu'il en fait, aux vûes de celui qui la lui a confiée; que par la même raifon qu'il eft l'homme de Dieu, il doit être l'homme du peuple; que fon peuple eft plus encore le peuple de Dieu, qu'il n'eft le fien propre; que s'il manque de gouverner ce peuple avec autant de juftice que de bonté, il éprouvera de la part du Roi des Rois les plus terribles effets de fa vengeance; & que fi au contraire il fe conduit en Souverain felon le cœur de Dieu, il en recevra des récompenfes d'autant plus grandes, qu'il aura rencontré plus de difficultés dans l'exercice de fon autorité,,. Cette matiere eft terminée par un beau paffage de l'Evêque de Langres dans l'oraifon funebre du Roi de Sardaigne prononcée le 25 Mai 1773. La Religion eft à la fois, & le fondement folide, & le frein falutaire de leur autorité : c'est le gage de la juftice des Souverains, & de la fidélité des fujets; c'est un lien puissant qui

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