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l'égard de ces derniers, le mariage étoit abfolument nul, & il étoit toléré à l'égard des autres. Mais Louis XIV, par fon Edit du mois de novembre 1680, déclara de tels mariages non valablement contractés en ces termes : » Vou»lons qu'à l'avenir nos Sujets de la Religion Catholique, » Apoftolique & Romaine ne puiffent, fous quelque pré» texte que ce foit, contracter mariage avec ceux de la » Religion prétendue réformée, déclarant tels mariages » non valablement contractés, & les enfans qui en pro» viendront, illégitimes & incapables de fuccéder aux biens >> meubles & immeubles de leurs peres & meres. »>

XI. Il y a des mariages qui font valables, quant au Sacrement, mais nuls pour les effets civils. Tels font les mariages de ceux qui ont été condamnés à mort, même par Sentences rendues par défaut, fi avant leur décès ils n'ont été remis dans leur premier état fuivant les Loix prefcrites par les Ordonnances. Les enfans qui naiffent de tels mariages ne font pas bâtards, mais ils font incapables de toutes fucceffions. C'eft la difpofition de l'art. 6 de la Déclaration de Louis XIII. du 26 novembre 1639. Il en feroit de même des efclaves, s'il y en avoit parmi nous; le mariage feroit bon quant au Sacrement, parce qu'à cet égard il n'y a point d'acception de perfonnes devant Dieu, fuivant le chap. 1. Extrà de conjugio fervorum, mais il seroit nul, quant aux effets civils..

XII. La même privation de toutes fucceffions a lieu pour les enfans de ceux qui ont tenu leurs mariages fecrets pendant leur vie. La même Déclaration du Roi du 26 novembre 1639 s'explique en ces termes en l'art. 5 : » De>> firant pourvoir à l'abus qui commence à s'introduire » dans notre Royaume par ceux qui tiennent leurs ma»riages fecrets & cachés pendant leur vie, contre le ref» pec qui est dû à un fi grand Sacrement, nous ordon» nons que les majeurs contractent leurs mariages publi» quement & en face de l'Eglife, avec les folemnités pref>> crites par l'Ordonnance de Blois, & déclarons les enfans » qui naîtront de ces mariages que les parties ont tenu » jusques ici ou tiendront à l'avenir cachés pendant leur » vie,

» vie, qui reffentent plutôt la honte d'un concubinage que » la dignité d'un mariage, incapables de toute fucceffion >> auffi bien que leur poftérité. » Voyez l'Arrêt du mois d'août 1662, rapporté dans le Journal des Audiences, tom. 2. liv. 1. chap. 64. Hericourt dans fes Loix eccléfiaftiques chap. 5. du Mariage art. 2. n. 83. les Caufes célebres, tom. 19. pag. 182. & fuiv.

XIII. La même peine a lieu contre les enfans qui font nés de meres que les peres ont entretenues, & qu'ils épousent à l'extrêmité de la vie, fuivant l'art. 6 de la même Déclaration & l'Edit du mois de mars 1697. Ainfi, par Arrêt du 22 décembre 1672, rapporté dans le Journal du Palais part. 2. pag. 374. & fuiv. le Parlement de Paris. déclara nul, quant aux effets civils, un mariage fait à l'extrêmité de la vie par un Maître avec fa Servante, en conféquence d'une difpenfe des trois bans. Un Arrêt du Parlement d'Aix du 23 mars 1673 déclara nulles une donation & une inftitution d'héritier, faites en faveur d'une femme épousée in extremis & de fon fils. Il eft rapporté par Boniface, tom. 4. liv. 5. tit. 2. chap. 1. L'Arrêt rapporté dans le Journal du Palais, ci-deffus cité, adjugea néanmoins à la femme une penfion de 300 liv. fur l'héritage du défunt. Et par l'Arrêt du Parlement de Paris, rapporté par Augeard tom. 2. fom. 8. il fut adjugé à trois enfans le tiers des biens en propriété, & la moitié de ce tiers en ufufruit à la mere, en déclarant que ce tiers n'étoit pas donné aux enfans comme portion héréditaire, mais par forme d'alimens.

XIV. Mais dans le cas où un majeur avoit voulu célébrer en fanté fon mariage avec une perfonne dont il avoit des enfans, & en avoit été empêché par des oppofitions & des procédures injuftes, il a été jugé par un Arrêt du 29 juillet 1717, rapporté dans le Journal des Audiences tom. 6. liv. 7. chap. 58. que le mariage n'étoit point abufif, & qu'il produifoit les effets civils, quoiqu'il eût été différé à être célébré jufqu'à la derniere maladie de celui qui l'avoit contracté.

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XV. Pour pouvoir contracter un mariage légitime, il faut avoir atteint l'âge de puberté, qui eft de quatorze ans complets pour les mâles, & de douze ans complets pour les filles, princ. Inft. de nuptiis, princ. Inft. quibus modis tutela finitur. Le mariage des impuberes eft donc nul. Les marier avant l'âge de puberté c'eft forcer la Nature, dont les Loix font inviolables; & avant cet âge, ils ne peuvent donner un confentement valable: Nec velle nec nolle habent in eo quod animi judicio fit. Mais fi après la puberté les conjoints confommoient le mariage, cette ratification le rendroit légitime. Si au contraire l'un des conjoints venoit à décéder avant que l'un ou l'autre eût atteint l'âge de puberté, il n'y auroit point de mariage, & le furvivant ne pourroit pas demander les avantages nuptiaux, comme il a été jugé par les Arrêts rapportés par Montholon fom. 138. Fevret de l'Abus liv. 5. chap. 1. n. 6. Le Grand fur la Coutume de Troyes art. 168. glof. 5. n. 27. Dans le cas néanmoins où le mariage auroit été célébré peu de tems avant la puberté, & qu'il eût été confommé, voyez les Arrêts de Bouguier lett. M. fom. 2. Hericourt dans fes Loix Eccléfiaftiques part. 3. chap. 5. art. 2. n. 69. Le Grand au lieu cité.

XVI. Le libre confentement des parties eft effentiellement requis pour la validité du mariage, & un mariage fait par force & par le mouvement d'une crainte capable d'ébranler une ame conftante, eft nul & peut être diffous, comme l'ont remarqué Ducaffe dans fon Traité de la Jurifdiction Eccléfiaftique part. 2. chap. 3. fect. 3. n. 4. Hericourt dans fes Loix Eccléfiaftiques part. 3. chap. 5. art. 2. n. 49. & fuiv. & les promeffes de mariage font nulles, fi elles ne font pas libres, comme l'enseigne Fevret de l'Abus liv. 5. chap. I. n. 4. De là vient que le mariage est prohibé entre la perfonne ravie & le raviffeur, soit qu'il s'agiffe d'un rapt de violence ou d'un rapt de féduction, fuivant la Loi unique C. de raptu virginum feu viduarum ; les Novelles 143. & 150. & le Canon de puellis 4. cauf. 36. ques. 2. Et quoique cette rigueur ait été adoucie dans la fuite, & que par la nouvelle difcipline ces mariages

aient été tolérés, il faut toujours que la perfonne ravie foit rendue à elle-même, & remife dans un lieu & en l'état de pleine liberté, avant qu'elle puiffe époufer fon raviffeur: ce qui eft fondé fur la néceffité du confentement libre des parties. Voyez Fevret dans fon Traité de l'Abus liv. 5. chap. 3. n. 31. Hericourt dans fes Loix Eccléfiaftiques part. 3. chap. 5. art. 2. n. 72. la Déclaration du Roi du 22 novembre 1730, concernant le rapt de féduction.

XVII. Dès que le confentement des parties a été donné avec les formes prefcrites par les Loix de l'Eglife & de l'Etat, le mariage eft parfait quoiqu'il n'ait pas été confommé, & les droits qui en résultent font acquis aux mariés: Nuptias non concubitus, fed confenfus facit, dit la Loi 30. D. de diverfis regulis juris. Un mari périt le long du Tibre fans avoir confommé le mariage. Il fut décidé que la femme en devoit porter le deuil: Ab uxore lugendum refponfum eft, dit la Loi 6. D. de ritu nuptiarum, & la Loi 7. ajoute que de là il peut arriver qu'une vierge ait une dot & l'action pour la demander: Ideòque poteft fieri ut in hoc cafu aliqua virgo & dotem & de dote habeat actionem. C'est ainsi qu'on l'obferve dans prefque tout le Royaume. Il n'y a que les Coutumes particulieres de quelques Provinces, fuivant lefquelles, pour gagner les avantages nuptiaux, il faut que l'époufe ait été conduite au lit nuptial, comme l'a remarqué Mortiac fur les Loix 6. & 7. D. de ritu nuptiarum.

XVIII. Il y a d'autres perfonnes dont le confentement eft néceffaire pour la validité des mariages. Parmi les Romains le confentement des peres n'étoit requis qu'aux mariages de leurs enfans qui étoient fous leur puiffance: Dum tamen fi filii familiarum fint, confenfum habeant parentum, quorum in poftetate funt. Nam hoc fieri debere & civilis & naturalis ratio fuadet, in tantum ut juffus parentis præcedere debeat, Inft. de nuptis. De forte que fi le fils étoit émancipé, il pouvoit fe marier fans le confentement de fon pere ou de fon ayeul paternel. Et par la même raifon, le confentement de la mere n'étoit jamais néceffaire, parce que les meres n'ont point les enfans fous leur puiffance.

XIX. Il en eft autrement parmi nous. Les Ordonnances de nos Rois, fans diftinction des enfans émancipés & de ceux qui font fous la puiffance paternelle, exigent le confentement des peres & même des meres dans le mariage de leurs enfans. La Loi divine oblige les enfans d'honorer leur pere & leur mere; & ils manquent à ce devoir, quand ils fe marient contre leur gré: & le rapt, qui eft un empêchement de mariage, eft toujours présumé en la perfonne des mineurs qui fe marient fans l'aveu & le confentement de leurs parens. L'Ordonnance de Blois du mois de mai 1579, article 40, s'énonce en ces termes : >> Enjoignons aux Curés, Vicaires & autres de s'enquérir >> foigneufement de la qualité de ceux qui fe voudront >> marier, s'ils font enfans de famille ou en la puiffance » d'autrui : nous leur défendons très étroitement de paffer >> outre à la célébration defdits matiages, s'il ne leur >> apparoît du confentement des peres, meres, tuteurs ou >> curateurs fur peine d'être punis comme fauteurs du crime » de rapt. » Avant cette Ordonnance, l'Edit de Henri II. du mois de février 1556, avoit ordonné » que les enfans » de famille ayant contracté, & qui contracteroient ma»riage clandeftin contre le gré, vouloir & confentement » & au defçu de leurs peres & meres, puffent, pour telle » irrévérence & ingratitude, mépris & contemnement de » leurfdits peres & meres, tranfgreffion de la Loi & Com>> mandement de Dieu, & offenfe contre le Droit & l'hon» nêteté publique, inféparable d'avec l'utilité, être par » leurfd. peres & meres & chacun d'eux, exhérédés & exclus » de leurs fucceffions. » Il y eft ajouté que pour les mêmes causes, les peres & meres pourront » révoquer toutes & >> chacunes les donations & avantages qu'ils auront faits à » leurs enfants. >> Et par l'art. 41 de l'Ordonnance de Blois, il eft porté » que les Ordonnances ci-devant faites » contre les enfans contractans mariage fans le confente» ment de leurs peres, meres, tuteurs & curateurs, foient >> gardées, mêmement celle qui permet en ce cas les ex>> hérédations.

XX. Il y a une exception à cette regle pour les ma

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