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TITRE VII.

Des Teftamens & des formes qui y font requifes.

I. La Loi 1. D. qui teftamenta facere poffunt, nous donne la définition du teftament, en ces termes: Teftamentum eft voluntatis noftræ jufta fententia de eo quod quis poft mortem fuam fieri velit. Čes mots jufta fententia marquent que le teftament doit être fait fuivant les regles prefcrites par le Droit. Les testamens reçoivent la forme des Loix civiles, & ne peuvent être valables, fi les formes qui y font requises n'ont pas été obfervées.

II. Il y a diverfes fortes de teftamens dont les formes font différentes: le teftament myftique ou folemnel, le teftament nuncupatif. Il y a des teftamens privilégiés qui exigent moins de formalités, comme le teftament entre enfans & defcendans, le teftament militaire, le teftament fait en tems de peste.

_III. Le teftament mystique ou folemnel, eft celui qui eft fait par écrit & avec les folemnités prefcrites par le Droit. La Loi hâc confultiffimâ 21. C. de teftamentis, marque les formes qui y devoient être obfervées. La Loi jubemus 29. du même titre, vouloit que fi le teftateur pouvoit écrire, le nom de l'héritier fût écrit de fa main; mais cela fut corrigé par la Novelle 119. chap. 9. d'où a été tirée l'Authentique & non obfervato eo C. de teftamentis, fuivant laquelle le teftament est valable, foit que le nom de l'héritier_foit écrit de la main du testateur ou d'une autre main: Teftamentis fubvenitur five per fe, five per alium quis infcribat nomen hæredis. L'Ordonnance des teftamens de 1735, a conservé la plus grande partie des folemnités prefcrites par la Loi hác confultiffima. Elle a rejetté celles qui ont paru inutiles, comme l'appofition des fceaux des témoins, & a donné une meilleure forme à cette forte de teftament. L'art. 9 eft en ces termes: » Lorfque le teftateur voudra faire un teftament >> mystique ou fecret, il fera tenu de figner fes difpofi

» tions, foit qu'il les ait écrites lui-même ou qu'il les ait » fait écrire par un autre. Et fera le papier qui contiendra >> lefdites difpofitions, ensemble le papier qui fervira d'en>>veloppe, s'il y en a une, clos & fcellé avec les précautions >> en tel cas requifes & accoutumées. Le teftateur présentera >> ledit papier, ainfi clos & fcellé, à fept témoins au moins, » compris le Notaire ou Tabellion, où il le fera clorre & » fceller en leur présence; & il déclarera que le contenu » audit papier, eft fon teftament écrit & figné de lui, ou » écrit par un autre & figné de lui. Ledit Notaire ou Ta» bellion en dreffera l'acte de fufcription, qui fera écrit >> fur ledit papier ou fur la feuille qui fervira d'enveloppe; » & fera ledit acte figné, tant par le teftateur que par le >> Notaire ou Tabellion, ensemble par les autres témoins, >> fans qu'il foit néceffaire d'y appofer le fceau de chacun defd. >> témoins. Tout ce que deffus fera fait de fuite & fans divertir >> à autres actes; & en cas que le teftateur, par un em>> pêchement furvenu depuis la fignature du testament, ne » puiffe figner l'acte de fufcription, il fera fait mention de » la déclaration qu'il en aura faite, fans qu'il foit befoin >> en ce cas d'augmenter le nombre des témoins ». Il eft ajouté dans l'art. 10. que » fi le teftateur ne fçait figner ou » s'il n'a pu le faire lorfqu'il a fait écrire fes difpofitions, >> il fera appellé à l'acte de fufcription, un témoin outre » le nombre porté par l'article précédent, lequel fignera » ledit acte avec les autres témoins, & il fera fait mention » de la caufe pour laquelle ledit témoin aura été appellé.

IV. Le teftament nuncupatif eft celui que le teftateur fait en préfence de fept témoins, devant lefquels il déclare fes dernieres volontés, feptem teftibus adhibitis & fuâ voluntate coràm eis nuncupatâ, §. 14. Inft. de teftamentis ordinandis L. hâc confultiffimâ 21. §. per nuncupationem 2. L. in teftamentis 26. C. de teftamentis.

V. Ce teftament fe faifoit fans écrit, & confiftoit dans la foi des témoins, qui en étoient les dépofitaires; mais il étoit fujet à bien des inconvéniens, foit parce que la preuve étoit mal affurée, foit parce que les témoins ou quelques uns d'entr'eux pouvoient mourir avant le teftateur. Pour obvier à ces inconvéniens, les Notaires furent appellés pour

rédiger par écrit les difpofitions prononcées par le testateur en présence des témoins. C'est la remarque de Vinnius sur le §. 14. Inft. de teftamentis ordinandis n. 3. Huic incommodo, dit-il, pofteà occurfum eft adhibito tabulario, qui voluntatem coràm teftibus nuncupatam acciperet, ac rem geftam fcriptura fue auctoritate confirmaret. Mantica a fait la même obfervation dans fon Traité de conjecturis ultimarum voluntatum liv. 1. tit. 6. n. 6. L'usage des teftamens nuncupatifs écrits eft fort ancien en Provence. Le teftament de Raymond Berenger, Comte de Provence, du zo juin 1238, celui du Roi René du 22 juillet 1474, celui de Charles III, dernier Comte de Provence, de la Maison d'Anjou, du 10 décembre 1481, par lequel il inftitua fes héritiers le Roi, le Dauphin & leurs fucceffeurs en la Couronne de France, tous ces tefta mens furent des teftamens nuncupatifs écrits.

VI. Après l'Ordonnance de Moulins de 1566 dont l'art. 54. rejette la preuve par témoins de toutes chofes excédant la fomme & valeur de cent livres, il ne dut plus être permis de tefter par des teftamens nuncupatifs non écrits; & c'eft ainfi qu'on l'obferva en Provence, comme l'a remarqué Duperier dans fes Maximes de Droit, tit. du Teftament nuncupatif. Cependant le Parlement de Toulouse & celui de Grenoble avoient confervé l'ufage des teftamens nuncupatifs non écrits, conformément aux Loix Romaines, comme l'attestent Maynard liv. 5. chap. 4. Expilly chap. 171. Catellan liv. 2. chap. 4. & 5. Barry de fuccef fionibus liv. 1. tit. 1. n. 6. Mais aujourd'hui la Loi eft uniforme dans tout le Royaume. Il ne peut y avoir des teftamens ni des difpofitions à caufe de mort que par écrit, fuivant l'art. 1. de l'Ordonnance des Teftamens de 1735 en ces termes : >> Toutes difpofitions teftamentaires ou à caufe » de mort, de quelque nature qu'elles foient, feront faites » par écrit. Déclarons nulles toutes celles qui ne feroient » faites que verbalement, & défendons d'en admettre la » preuve par témoins, même fous prétexte de la modicité » de la fomme dont il auroit été difpofé ». Il eft dit dans l'art. 2. » declarons pareillement nulles toutes difpofitions » qui ne feroient faites que par fignes, encore qu'elles

>> euffent été rédigées par écrit fur le fondement defdits » fignes. » Et l'art. 3. ajoute: » Voulons aussi que les >> difpofitions qui feroient faites par lettres miffives, foient >> regardées comme nulles & de nul effet.

VII. La forme des teftamens nuncupatifs a été réglée par l'article 5. de la même Ordonnance, en ces termes : » Lorsque le teftateur voudra faire un teftament nuncu» patif écrit, il en prononcera intelligiblement toutes les >> difpofitions en préfence au moins de fept témoins, y » compris le Notaire ou Tabellion, lequel écrira lefdites » difpofitions, à mefure qu'elles feront prononcées par le >>teftateur; après quoi fera fait lecture du teftament entier » audit teftateur, de laquelle lecture il fera fait mention >> par ledit Notaire ou Tabellion; & le teftament sera signé >> par le teftateur, ensemble par le Notaire ou Tabellion » & par les autres témoins; le tout, de fuite & fans divertir >> à autres actes; & en cas que le teftateur déclare qu'il >> ne fçait ou ne peut figner, il en fera fait mention.

VIII. Les teftamens entre enfans & defcendans exigent moins de formalités. Ces fortes de difpofitions font moins des libéralités qu'un partage entre enfans, confidérés comme maîtres des biens paternels fuivant la Loi in fuis 11. D. de liberis & pofthumis. Le teftament imparfait étoit valable entre enfans fuivant la Loi Hâc confultiffimâ 21. §. ex imperfecto C. de teftamentis. Et par la Novelle 107. chap. 1. le teftament entre enfans, écrit, datté & figné de la main. du teftateur ou de la teftatrice, eft valable fans témoins ni aucune autre formalité. C'est ainfi que nous l'observons comme l'a remarqué Duperier dans fes Maximes tit. des testamens privilégiés. L'Ordonnance des Teftamens de 1735 s'eft conformée à ces principes. Il eft ordonné en l'art. 15. que le nombre des témoins requis par les articles 5. 7. » 9. & 10. ne fera point néceffaire pour la validité des » teftamens, codiciles ou autres actes de derniere volonté >> faits entre enfans & defcendans dans les Pays qui font » régis par le Droit écrit; & il fuffira que lefdits tefta>> mens, codiciles ou autres actes foient faits en présence » de deux Notaires ou Tabellions, ou d'un Notaire & de » deux

b deux témoins. » Et l'article 16. maintient la forme des teftamens olographes entre enfans, en ces termes : » Vou»lons pareillement que les teftamens, codiciles ou autres » difpofitions à caufe de mort, qui feront entièrement écrits, » dattés & fignés de la main du teftateur ou de la tefta>>trice, foient valables dans lefdits Pays de Droit écrit >> entre les enfans & defcendans. Déclarons nuls tous ceux >> qui ne feroient pas revêtus au moins d'une des formes » portées par le préfent article & par le précédent.

IX. Mais ce privilege n'eft que pour les enfans & defcendans; & les difpofitions qui font faites dans de pareils testamens en faveur d'autres perfonnes que les enfans & defcendans, font nulles & de nul effet, fuivant le §. ex imperfecto de la Loi hâc confultiffimâ, & la Novelle 107. chap. 1. C'eft la difpofition de l'Ordonnance de 1735 art. 18. en ces termes : » Les difpofitions qui feront faites au profit » d'autres que les enfans & defcendans dans les teftamens » & autres actes mentionnés aux articles XV. XVI. & » XVII. feront regardées comme de nul effet, & ne feront >> exécutées que celles qui concernent lefdits enfans ou def>>cendans.

X. Le teftament militaire eft encore un teftament privilégié; c'eft le teftament de ceux qui font actuellement en expédition militaire. Suivant les Loix Romaines, de quelque maniere que le foldat eût déclaré fa derniere volonté, la preuve en étant rapportée, fon teftament étoit valable, princ. & §. 1. Inft. de militari teftamento. Si le foldat avoit écrit de fon fang fur fon fourreau, ou fur fon bouclier fa derniere volonté, ou s'il l'avoit écrite fur la pouffiere avec la pointe de fon épée, dans le combat où il avoit perdu la vie, cette volonté étoit exécutée L. Milites 15. C. de teftamento militis. Mais le foldat devoit tefter, felon le Droit commun, lorsqu'il n'étoit point en expédition militaire §. 3. Inft. de militari teftamento.

XI. L'Ordonnance de 1735 a prefcrit les formes dans lefquelles on peut faire un teftament militaire. L'art. 27 eft. en ces termes : » Les teftamens, codiciles & autres dif» positions à caufe de mort de ceux qui fervent dans nos

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