Page images
PDF
EPUB

Dans la quatrième, des règles relatives à l'exercice du droit de Chaffe :

Dans la cinquième, des amendes & des peines qu'encourent ceux qui contreviennent aux règlemens des Chaffes:

Dans la fixième, des juges compétens pour connoître des matières concernant la Chaffe: Dans la feptième, de la Chaffe du loup.

PREMIÈRE

PARTI E.

De l'origine de la Chaffe. La Chaffe eft un des plus anciens exercices. On peut en rapporter l'origine au befoin de garantir les troupeaux des loups, & d'empêcher les animaux fauvages de ravager les moiffons: on trouva dans la chair de quelques-uns des alimens fains; dans les peaux de prefque tous une reffource très-prompte pour les vêtemens: on fut intéreffé de plus d'une manière à la deftrution des bêtes malfaifantes on n'examina guère quel droit on avoit fur les autres & on les tua toutes indiftinctement, excepté celles dont on efpéra de grands fervices en les confervant.

[ocr errors]

L'homme devint donc un animal très-redoutable pour tous les autres animaux. Les espèces fe dévorèrent les unes les autres, & l'homme les dévora toutes. Il étudia leur manière de vivre pour les furprendre plus facilement; il varia fes embûches felon la variété de leur caractère & de leurs allures; il inftruifit le chien; il monta fur le cheval; il s'arma du dard; il aiguifa la flèche ; & bientôt il fit tomber fous fes coups le lion, le tigre, l'ours, le léopard: il perça de fa main depuis l'animal terrible qui rugit dans les forêts, jufqu'à celui qui fait retentir les airs

de fes chants innocens, & l'art de les détruire fut un art très-étendu, très-exercé, très-utile, & par conféquent fort honoré.

On voit en général que l'exercice de la Chaffe a été dans tous les fiècles & chez toutes les nations d'autant plus commun, qu'elles étoient moins civilifées. Nos pères beaucoup plus ignorans que nous étoient beaucoup plus grands

chaffeurs.

DEUXIÈME PARTIE.

Des anciennes lois concernant la Chaffe. Suivant le droit naturel, la Chaffe étoit libre à tous les hommes mais le droit civil de chaque nation a apporté des restrictions à cette liberté indéfinie.

Solon voyant que le peuple d'Athènes négligeoit les arts méchaniques pour s'adonner à la Chaffe, la défendit au peuple, défense qui fut depuis méprifée.

Chez les Romains chacun pouvoit chaffer foit dans fon fonds foit dans celui d'autrui; mais il étoit libre au propriétaire de chaque héritage d'empêcher qu'un autre particulier n'entrat dans fon fonds, foit pour chaffer ou

autrement.

En France dans le commencement de la monarchie, la Chaffe étoit libre de même que chez les Romains.

La loi falique contenoit cependant plufieurs règlemens pour la Chaffe; elle défendoit de voler ou de tuer un cerf élevé & dreffé pour la Chaffe, comme cela fe pratiquoit alors; elle ordonnoit que fi ce cerf avoit déja chaffé & que fon maître pût prouver d'avoir tué par fon

AJ

moyen deux ou trois bêtes, le délit feroit puni de quarante fous d'amende ; que fi le cerf n'avoit point encore fervi à la Chaffe, l'amende ne feroit que de trente-cinq fous.

Cette même loi prononçoit auffi des peines contre ceux qui tueroient un cerf ou un fanglier qu'un autre chaffeur pourfuivoit, ou qui vole roient le gibier des autres ou les chiens & oi feaux qu'ils auroient élevés pour la Chaffe.

Mais on ne trouve aucune loi quii reftreignît alors la liberté naturelle de la Chaffe. La loi . falique femble plutôt fuppofer qu'elle étoit encore permise à toutes fortes de perfonnes indif tinctement,

On ne voit pas précisément en quel temps la liberté de la Chaffe commença d'être restreinte à certaines períonnes & à certaines formes. Il paroît feulement que dès le commencement de la monarchie Françoife, les princes & la nobleffe en faifoient leur amufement lorfqu'ils n'é, toient pas occupés à la guerre; que nos rois donnoient dès-lors une attention particulière à fa confervation de la Chaffe; que pour cet effet ils établirent un maître veneur (appelé depuis grand veneur) qui étoit l'un des grands officiers de leur maifon, & que fous ce premier officier ils établirent des foreftiers pour la confervation de leurs forêts, des bêtes fauves & du gibier.

Dès le temps de la première race de nos rois le fait de la Chaffe dans les forêts du roi fut un crime capital, temoin ce chambellan que Gontran roi de Bourgogne fit lapider pour avoir tué un buffle dans la forêt de Vaffac, autrement de Vangenne.

Sous la feconde race, les forêts étoient défenfables; Charlemagne enjoint aux foreftiers de les bien garder; les capitulaires de Charlesle-Chauve défignent les forêts où fes commenfaux ni même fon fils ne pourroient pas chaffer; mais ces défenses ne concernoient que les forêts & non pas la Chaffe en général.

Un concile de Tours convoqué fous l'autorité de Charlemagne en 813, défend aux eccléfiaftiques d'aller à la Chaffe, de même que d'aller au bal & à la comédie. Cette défenfe particulière aux eccléfiaftiques fembleroit prouver que la Chaffe étoit encore permife aux autres particuliers, du moins hors des forêts du roi.

Vers la fin de la feconde race & au commencement de la troifième, les gouverneurs des provinces & des villes qui n'étoient que de fimples officiers s'étant attribué la propriété de leurs gouvernemens à la charge de l'hommage, il y a apparence que ces nouveaux feigneurs & ceux auxquels ils fous-inféodèrent quelque portion de leur territoire, continuèrent de tenir les forêts & les autres terres de leur feigneurie en défense par rapport à la Chaffe, comme elles l'étoient lorfqu'elles appartenoient au roi.

Il étoit défendu alors aux roturiers, fous peine d'amende, de chaffer dans les garennes du feigneur : c'eft ainfi que s'expliquent les établiffemens de faint Louis faits en r270. On appeloit garenne toute terre en défense: il y avoit alors

des garennes de lièvres auffi-bien que de lapins

& des garennes d'eau.

Les anciennes coutumes de Beauvoifis rédigées en 1283, portent que ceux qui dérobent des lapins ou autres groffes bêtes fauvages dans

la garenne d'autrui, s'ils font pris de nuit, feront pendus; & fi c'eft de jour, ils feront punis par amende d'argent; favoir, de foixante livres, fi c'est un gentilhomme, & de foixante fous, fi c'eft un homme de pofte.

Les privilèges que Charles V accorda en 1371 aux habitans de Mailly-le-Château, portent que celui qui fera accufé d'avoir chaffé en plaine dans la garenne du feigneur fera cru fur fon fermeut, s'il jure qu'il n'a point chaffé; que s'il ne veut pas faire ce ferment, il payera l'amende..

Il étoit donc défendu dès-lors, tant aux nobles qu'aux roturiers, de chaffer dans les forêts du roi & fur les terres d'autrui en général; mais on ne voit pas qu'il fût encore défendu, foit aux nobles ou aux roturiers, de chaffer fur leurs propres terres.

Il paroît même que la Chaffe étoit permise aux nobles, du moins dans certaines provinces, comme en Dauphiné, où ils jouiffent encore de ce droit, fuivant des lettres de Charles V de 1367

A l'égard des roturiers, on voit que les habitans de certaines villes & provinces obtinrent auffi la permiffion de Chaffe.

On en trouve un exemple dans des lettres de 1357 fuivant lefquelles les habitans du bailliage de Revel & de la fénéchauffée de Toulouse étant incommodés des bêtes fauvages, obtinrent du maître général des eaux & forêts, la permiffion d'aller à la chaffe jour & nuit avec des chiens & des domeftiques, etiam cum ramerio feu rameriis; ce qui paroît fignifier des branches d'arbre dont on fe fervoit pour faire des battues.

[ocr errors]
« PreviousContinue »