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pérer ni même de demander aucune assistance militaire : mais elle nous rend un service non moins précieux; et en nous donnant des secours dont nous avons besoin pour les colonies, elle acquitte suffisamment la dette de la reconnaissance et de la fraternité.

La Pologne, exposée aux mêmes dangers que la France, déploie la même énergie. Ces dangers, en les rapprochant de la France, pourraient servir de base à une alliance sincère et durable; mais les distances semblent s'y opposer. Il faudrait, pour en profiter, un intermédiaire qui fût favorable à l'une et à l'autre puissance, et à l'aide duquel elles pussent entretenir des communications. Cet intermédiaire, allié fidèle de la Pologne et de la France, sera le Turc. Il est vrai qu'on a eu l'impolitique de laisser refroidir et sa haine contre les deux Puissances Impériales, et son amitié envers la France: mais il sera facile de les ranimer; car jamais le Turcn'oubliera les sacrifices qu'il a faits pendant la dernière guerre.

Telle est donc, en un mot, notre situation politique. Nous avons beaucoup d'ennemis, peu d'alliés sûrs, très peu d'amis : mais la réunion qui s'est opérée, peut produire cet heureux effet d'augmenter nos forces, et de nous donner les moyens de résister à la ligue des Puissances.

N° 3.

Décret qui détermine les mesures de sûreté générale, lorsque l'Assemblée Nationale aura déclaré la patrie en danger.

Du 5 juillet 1792.

L'Assemblée Nationale, considérant que les efforts multipliés des ennemis de l'ordre et la propagation de tous les genres de troubles dans les diverses parties de l'Empire, au moment où la nation, pour le maintien de sa liberté, est engagée dans une guerre étrangère, peuvent mettre en péril la chose publique, et faire penser que le succès de notre régénération politique est incertain;

Considérant qu'il est son devoir d'aller au-devant de cet événement possible, et de prévenir, par des dispositions fermes, sages et régulières, une confusion aussi nuisible à la liberté et aux citoyens, que le serait alors le danger lui-même ;

Voulant qu'à cette époque la surveillance soit générale, l'exécution plus active, et surtout que le glaive de la loi soit sans cesse présent à ceux qui, par une coupable inertie, par des projets perfides, ou par l'audace d'une conduite criminelle, tenteraient de déranger l'harmonie de l'État ;

Convaincue qu'en se réservant le droit de déclarer le danger, elle en éloigne l'instant, et rappelle la tranquilité dans l'ame des bons citoyens;

Pénétrée de son serment de vivre libre ou mourir, et de maintenir la constitution; forte du sentiment de ses devoirs et des vœux du peuple, pour lequel elle existe, déclare qu'il y a urgence.

L'Assemblée Nationale, après avoir entendu le rapport de sa commission des douze, et décrété l'urgence, décrète ce qui suit:

Art. 1er Lorque la sûreté intérieure ou la sûreté extérieure de l'État seront menacées, et que le Corps législatif aura jugé indispensable de prendre des mesures extraordinaires, elle le déclarera par acte du Corps législatif, conçu en ces termes:

Citoyens, la patrie est en danger!

Art. 2. Aussitôt après la déclaration publiée, les conseils du département et de district se rassembleront, et seront, ainsi que les conseils généraux des communes, en surveillance permanente : dès ce moment, aucun fonctionnaire public ne pourra s'éloigner ou rester éloigné de son poste.

Art. 3. Tous les citoyens en état de porter les armes, et ayant déjà fait le service de gardes nationales, seront aussi en état d'activité permanente.

Art. 4. Tous les citoyens seront tenus de déclarer, devant leurs municipalités respectives, le nombre et la nature des armes et munitions dont ils seront pourvus. Le refus de déclaration, ou fausse déclaration dénoncée et prouvée, seront punis par la voie de la police correctionnelle, savoir: dans le premier cas, d'un emprisonnement, dont le terme ne pourra être moindre de deux mois ni excéder une année; et dans le second cas, d'un emprisonnement,

dont le terme ne pourra être moindre d'une année, ni excéder deux ans.

Art. 5. Le corps législatif fixera le nombre des gardes nationales que chaque département devra fournir.

Art. 6. Les directoires de département en feront la répartition par districts entre les cantons, à proportion du nombre des gardes nationales de chaque canton.

Art. 7. Trois jours après la publication de l'arrêté du Directoire, les gardes nationales se rassembleront par cantons; et, sous la surveillance de la municipalité du chef-lieu, ils choisiront entre eux le nombre d'hommes que le canton devra fournir.

Art. 8. Les citoyens qui auront obtenu l'honneur de marcher les premiers au secours de la patrie en danger, se rendront trois jours après au chef-lieu de leur district: ils s'y formeront en compagnie, en présence d'un commissaire de l'administration du district, conformémement à la loi du 4 août 1791. Ils y recevront le logement sur le pied militaire, et se tiendront prêts à marcher ȧ la première réquisition.

Art. 9. Les capitaines commanderont alternativement, et par semaine, les gardes nationales choisies et réunies au chef-lieu de district.

Art. 10. Lorsque les nouvelles compagnies de gardes nationales de chaque département seront en nombre suffisant pour former un bataillon, elles se réuniront dans les lieux qui leur seront désignés par le pouvoir exécutif, et les volontaires y nommeront leur étatmajor.

Art. 11. Leur solde sera fixée sur le même pied que celle des autres volontaires nationaux : elle aura lieu du jour de la réunion au chef-lieu de canton.

Art. 12. Les armes nationales seront remises dans les chefs-lieux de canton, aux gardes nationales choisies pour la composition des nouveaux bataillons de volontaires. L'Assemblée Nationale invite tous les citoyens à confier volontairement, et pour le temps du danger, les armes dont ils sont dépositaires, à ceux qu'ils chargeront de les défendre.

Art. 13. Aussitôt la publication du présent décret, les directoires de district se fourniront chacun de mille cartouches à balles, calibre de guerre, qu'ils consérveront en lieu sain et sûr, pour en faire la distribution aux volontaires, lorsqu'ils le jugeront convenable. Le

pouvoir exécutif sera tenu de donner les ordres pour faire parvenir aux départements les objets nécessaires à la fabrication des cartouches.

Art. 14. La solde des volontaires leur sera payée sur les états qui seront délivrés par les directoires de district, ordonnancés par les directoires de département, et les quittances en seront reçues à la trésorerie nationale comme comptant.

Art. 15. Les volontaires pourront faire leur service, sans être revêtus de l'uniforme national.

Art. 16. Tout homme résidant ou voyageant en France, est tenu de porter la cocarde nationale.

Sont exceptés de la présente disposition les ambassadeurs et agents accrédités des Puissances étrangères.

Art. 17. Toute personne revêtue d'un signe de rébellion, sera poursuivie devant les tribunaux ordinaires; et, en cas qu'elle soit convaincue de l'avoir pris à dessein, elle sera punie de mort. It est ordonné à tout citoyen de l'arrêter ou de la dénoncer sur-lechamp, à peine d'être réputé complice: toute cocarde autre que celle aux trois couleurs nationales, est un signe de rébellion.

Art. 18. La déclaration du danger de la patrie ne pourra être prononcée, dans la même séance où elle aura été proposéc; et, avant tout, le ministre sera entendu sur l'état du royaume.

Art. 19. Lorsque le danger de la patrie aura cessé, l'Assembléc Nationale le déclarera par un acte du Corps législatif, conçu en ⚫ ces termes:

Citoyens, la patrie n'est plus en danger!

N° 4.

Mesures pour différentes levées de troupes,

en 1792.

1o Le décret du 22 juillet 1791 devait donner environ cent soixantedix bataillons, celui du 5 mai 1792 en porta le nombre à deux cents, et en augmenta la force de deux cent vingt-six hommes, ce qui les mettait à huit cents hommes;

2o Un décret du 24 mai ordonna la levée de cinquante-quatre com

pagnies franches, qui seraient organisées en légions, pour faire le service de troupes légères.

Des décrets postérieurs ajoutèrent une légion pour l'armée du Midi; une autre, composée d'Allobroges; une troisième, de soldats étrangers.

3o Un décret du 12 juillet prescrivait la levée de compagnies départementales;

40 Des corps de vétérans nationaux, augmentés à mesure que la guerre multipliait le nombre des hommes hors d'état d'en soutenir les fatigues, devaient être employés dans les places...

5c Deux divisions de gendarmerie seraient mises en activité à l'armée, et remplacées ;

6o Les corps de volontaires nationaux, dont la levée était déjà ordonnée, devaient être complétés;

70 Une levée de quatre-vingt-cinq mille hommes avait été décrétée, le 12 juillet. pour compléter l'armée de ligne et former quarantedeux nouveaux bataillons;

Enfin, une loi définitive réglait la force de l'armée comme il suit :

Décret ordonnant que l'armée soit portée au complet effectif de 440 à 450 mille hommes; qui détermine le mode de leur levée, et fixe le nombre de bataillons ou compagnies de volontaires à fournir par chaque département. (Du 20 juillet 1792).

L'Assemblée Nationale, considérant que le meilleur moyen de détruire efficacement la ligue toujours menaçante des ennemis conjurés contre la nation française, est de leur opposer une force imilitaire, tellement imposante par sa masse seule, qu'elle leur fasse perdre tout espoir quelconque d'envahissement, et craindre au contraire, de voir bientôt porter chez eux, avec l'étendart de la guerre, le germe précieux de la liberté, qu'ils ne cherchent à anéantir en France, que pour perpétuer l'esclavage des nations;

Considérant que le moment déclaré du danger de la patrie est aussi celui où tout citoyen doit s'empresser de venir offrir son bras pour la défendre, décrète qu'il y a urgence.

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