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aux frontières. Massacres des 2 et 3 septembre. — La République est proclamée. Dumouriez tourné par les Prussiens tient ferme dans l'Argonne et se réunit à Kellermann et aux renforts tirés du Nord. Canonnade de Valmy. - Les alliés dégoûtés par ce simulacre de combat et par les maladies, effrayés de voir les promesses des émigrés dénuées de fondement, prennent le parti de la retraite et sont trop heureux de l'exécuter. Custine profite du départ des Autrichiens pour déboucher de Landau sur Mayence, dont il s'empare au moyen des intelligences qu'il s'est ménagées. Le duc Albert avec l'armée des Pays-Bas bombarde Lille sans succès. Embarras des Prussiens; ils s'en tirent par une retraite précipitée sur Coblentz.Dumouriez, au lieu de les poursuivre et de couper les Autrichiens en Belgique, fait un grand détour pour aller attaquer de front le duc Albert vers Mons. Le roi de Sardaigne ayant ac

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cédé le 12 juillet à la coalition, Montesquiou soumet la Savoie, et Anselme envahit le comté de Nice.

CHAPITRE V.

Premières opérations des armées du Nord, du Centre et du Rhin.

L'ASSEMBLÉE NATIONALE, décidée à relever le gant qu'on lui avait jeté par la déclaration de Pilnitz, ordonna la formation de quatre armées.

Au Nord, le maréchal Rochambeau commandait, de Dunkerque à Philippeville, quarante mille hommes, huit mille chevaux.

Au Centre, le général Lafayette avait quarante-cinq mille hommes et sept mille chevaux, chargés de la défense entre Philippeville et la Lauter.

Le maréchal Luckner, avec trente-cinq mille hommes d'infanterie et huit mille de cavalerie, observait le

cours du Rhin depuis sa sortie de la Suisse jusqu'à Lauterbourg.

Au Midi, le général Montesquiou avec cinquante mille hommes, devait observer les Alpes et les Pyrénées; mais cette dernière armée n'était pas rassemblée, et se trouvait encore répandue dans les garnisons de l'intérieur et de ces deux frontières. La divergence et l'éloignement des ailes de ce commandement, indiquent assez qu'à cette époque on ne craignait encore rien des cours de Turin et de Madrid.

Ces armées, imposantes seulement sur les tableaux d'organisation, devaient encore s'affaiblir de moitié pour mettre des garnisons dans les places, dès l'instant où elles étaient restreintes à la défensive. D'ailleurs, les troupes excitées par les agitateurs, comme on l'a vu au chapitre IV, éprouvaient tous les funestes effets de l'esprit d'insurbordination, si imprudemment introduit parmi elles.

Le maréchal Rochambeau s'était empressé de prendre des mesures pour la défense des frontières qui lui étaient confiées. Les places de première ligne furent mises en bon état, et des camps retranchés établis à Sedan, Maubeuge et Dunkerque, couvrirent les ailes et le centre de ce front d'opérations.

Malgré leurs dispositions hostiles, les cabinets euro- Mesures péens n'avaient fait aucun préparatif sérieux, et tout des alliés jusqu'ici s'était borné de leur part à des menaces. La cour de Madrid hésitait à rompre les nœuds d'une alliance dont le maintien faisait la base de sa propre conservation. L'Angleterre observait encore une neutralitó perfide. Les troupes de Catherine, à peine disponibles par la paix de Jassy, se rapprochaient des frontières

méridionales de la Pologne, où elles avaient une destination plus convenable à ses intérêts que la course chevaleresque méditée par Gustave. L'Autriche et la Prusse se trouvaient donc les seules puissances engagées dans l'arène, et les princes de Hesse, qui n'étaient guère que des généraux prussiens, avaient résolu d'y joindre quelques auxiliaires.

C'était beaucoup que la Prusse mit en campagne cinquante mille hommes pour une expédition si loin de sa base. L'Empereur n'en avait pas quarante mille en Belgique et plus de vingt-cinq mille sur le Rhin. On ne savait pas ce qu'était devenu le brillant état militaire de Joseph II; si la guerre contre les Turcs en diminua les cadres, on avait eu tout le temps, depuis les conférences de Pilnitz, de réparer les pertes, et ce n'eût pas. été un effort bien extraordinaire pour la monarchie autrichienne de porter quatre-vingt mille hommes vers Mayence ou Philipsbourg. Elle s'était contentée d'en rassembler sept à huit mille aux ordres du prince d'Esterhazy pour couvrir le Brisgau, et dix-huit à vingt mille, sous le prince de Hohenlohe-Kirchberg, dans les environs de Rastadt. A ces faibles moyens, il faut ajouter les différents corps d'émigrés cantonnés dans le pays de Trèves et de Coblentz, et celui de Condé organisé dans le margraviat de Baden.

Ces forces mises en mouvement après la déclaration de guerre, n'étaient attendues sur le Rhin qu'à la fin de juillet.

Par suite des stipulations arrêtées entre les cours de Vienne et de Berlin, l'armée principale de la coalition, forte d'environ cent mille hommes, devait être confiée au duc de Brunswick, dont nous avons rapporté plu

sieurs exploits comme prince héréditaire (Voyez l'Histoire de la guerre de Sept ans). Elle était destinée à agir par le centre contre la frontière de Champagne, tandis que des corps moins nombreux garderaient la défensive en Belgique et sur le Rhin afin de couvrir ses flancs.

Nous développerons le plan de cette invasion au chapitre qui en rendra compte, nous bornant dans celui-ci à retracer les premiers coups portés en Flandre, qui contre l'attente du cabinet de Vienne, devint d'abord le théâtre des opérations; mais avant tout, il ne sera pas inutile de rappeler l'état dans lequel se trouvait ce pays. La lutte sanglante qui délivra les Provinces-Unies du État joug de Philippe II, et les événements qui enlevèrent de la Bella Belgique au domaine de Philippe V, pour la faire passer à la maison d'Autriche, après la guerre de la succession d'Espagne, sont assez connus. On sait également que la république de Hollande et l'Angleterre, présidant aux fameux traités d'Utrecht et de Munster, firent souscrire le cabinet de Vienne au traité des Barrières et à la clôture de l'Escaut,

L'industrie, qui pendant deux siècles, avait fait des Pays-Bas la contrée la plus florissante de l'Europe, suivit bientôt sa marche ordinaire; perfectionnée chez les nations voisines, contrariée dans son essor par les guerres civiles et celles contre Louis XIV, elle quitta. les villes de la Flandre et du Hainaut, pour se réfugier en Angleterre, en Allemagne et même en France.

Les changements survenus dans ces provinces, étaient les résultats de la situation générale des affaires, et non de la domination impériale. Depuis un siècle la Belgi

que en

1792.

que jouissait d'un repos qui ne fut troublé que par les quatre campagnes du maréchal de Saxe, auxquelles la paix d'Aix-la-Chapelle mit fin en 1748. Quoique déchue de sa splendeur, elle était encore riche et heureuse ; la maison d'Autriche l'administrait avec douceur : si elle en retirait des soldats et des impôts, ces charges étaient cependant modérées et réparties par les États du pays. Le gouvernement autrichien essentiellement paternel, à pour principe de se contenter d'acquérir des provinces, sans renverser leur administration intérieure, ni les fouler par des institutions contraires à leurs usages. Les libertés dont jouit le Tyrol, et les droits des diètes hongroises en sont la preuve.

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Cette longue tranquillité fut un instant troublée ; Joseph II, après s'être affranchi de la sujétion du traité des Barrières, avait essayé de rétablir la liberté de l'Escaut; non content de travailler ainsi à la prospérité de ces provinces, il voulut étendre ses réformes sur leurs institutions et attaquer l'objet de leurs affections. Nous avons déjà dit, dans le chapitre I", que poussé par un esprit de perfectionnement qui ne plaît pas toujours aux peuples, comme l'Espagne et la Vendée l'ont prouvé de nos jours, ce prince porta atteinte aux droits de la noblesse, du clergé et des universités. Les États de la Flandre, puis ceux du Brabant, protestèrent avec force contre ces innovations, et l'Empereur employant tour-à-tour les voies de rigueur et de conciliation, parvint à contenir le pays dans l'obéissance jusqu'en 1789. Alors n'étant pas soutenue par des forces suffisantes, les États profitèrent de l'embarras où il se trouvait, par la guerre avec les Turcs, pour secouer le jong; les faibles garnisons autrichiennes furent attaquées et chassées

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