Page images
PDF
EPUB

Convaincu qu'il avait pourvu à tout par cette me- On resure insignifiante, Luckner vaquait paisiblement aux prend le détails de ses fonctions, lorsque Dumouriez, persistant d'invaprojet à reprendre ses projets sur la Belgique, fit décider au sion. conseil que l'expédition serait de nouveau tentée, en laissant cette fois au vieux maréchal, le soin de l'exécuter selon son bon plaisir.

Luckner proposa de marcher avec ce qu'il pourrait réunir de l'armée du Nord, sur Courtrai, vers la gauche; tandis que Lafayette menacerait Mons et Bruxelles, pour contenir l'ennemi et l'empêcher de renforcer son camp de Tournai. Si les Autrichiens commettait cette faute, l'armée du centre devait alors marcher réellement sur Mons et s'en emparer.

Ce mouvement à gauche était une monstruosité en stratégie; il prouve évidemment que son auteur n'avait pas les premières notions de la guerre, car c'était le mouvement inverse qu'il fallait faire, pour ramener les troupes de Dunkerque et de Lille sur Valenciennes, et les porter par leur droite sur Binche, tandis que Lafayette s'avancerait de Maubeuge et de Philippeville vers Charleroi, afin de gagner l'extrême gauche de la ligne autrichienne, de l'accabler et de refouler sur la Flandre maritime les corps battus successivement.

Luckner.

Au lieu d'en agir ainsi, Luckner rassembla ses divi- Opérasions de Famars, de Lille et de Dunkerque, sur la tions de Lys, et s'avança, le 18 juin, à Menin, avec vingt-huit mille hommes, poussant une avant-garde sur Courtrai, dont elle s'empara après un léger combat. Un corps de quatre mille hommes resta fort inutilement établi à Maulde durant cette expédition.

A l'instant même où les troupes du camp de Famars 10 juin.

partaient pour Lille, le duc Saxe-Teschen, par une marche opposée, détachait douze mille hommes du camp de Mons dans l'intention d'attaquer l'avant-garde de Affaire Lafayette, postée à Gliswelle à une lieue de Maubeuge. de et séparée de l'armée par le défilé de la Sambre.

Gliswelle

Cette entreprise, favorisée par le mauvais temps, eut un plein succès; les avant-postes furent surpris et enle→ vés au point du jour, le corps lui-même eut à peine le temps de se former; le général Gouvion, qui le commandait, ayant été tué, la défaite de ce détachement fut complète. Les renforts, arrivés à six heures du matin, déterminèrent les Autrichiens à se replier sur Mons, satisfaits d'avoir atteint le but de leur course.

D'ailleurs, le duc de Saxe-Teschen, informé du rassemblement des forces ennemies vers Lille, résolut de leur opposer un mouvement parallèle, et renforça le corps de Latour à Tournay, jusqu'à vingt mille hommes. Douze mille environ restèrent à Mons pour faire face à l'armée de Lafayette. Ce dernier semblait avoir une occasion favorable pour entreprendre quelque attaque importante; mais soit qu'il ignorât la force réelle de l'ennemi, soit qu'il mît toute son attention à prévenir 16 juin. les bouleversements qui menaçaient le trône, en iuformant l'Assemblée Nationale des complots qui se tramaient, il n'osa pas commettre son armée encore un peu ébranlée de la surprsie de Gliswelle; nous verrons plu tard que la catastrophe du 20 juin excusa assez sa circonspection.

Luckner, qui n'était pas homme de parti et n'avait aucun motif de retenue, n'en agit guère mieux pour cela.

Le duc Albert de son côté, tremblant de voir deux

petites masses ennemies se former vers ses ailes, prit un singulier moyen pour leur faire face. Déjà las d'avoir fait des dispositions passables, il dissémina entièrement le corps de Latour persuadé sans doute, qu'en mettant un poste sur chaque route, il empêcherait Luckner d'avancer. Enfin oubliant que toutes ses communications, et sa base étaient à sa gauche, il s'étendit vers la droite, pour se rapprocher de la mer du Nord; Beaulieu fut porté avec cinq mille hommes à Wicht, pour couvrir. Audenarde; Clairfayt conduisit le gros du camp de Tournai à Coeghem; le colonel Mylius revint à Harlebeck, et Latour resta avec quatre mille hommes à Tournai.

du

Maréchal
Luckner

sur

Lille.

Cette dispersion des forces impériales, à l'instant Retraite même où il eût été sage de les concentrer, fournit à Luckner une belle occasion pour tomber avec ses 28 mille hommes, sur chacun de ces petits corps. Bien loin de la saisir promptement, il se laissa prévenir; le colonel Mylius lui enleva le poste de Harlebeck avec une partie de la garnison, et les Autrichiens, enhardis par ce succès, se présentèrent devant Courtrai. Le pusillanime maréchal, déjà éperdu, convoqua aussitôt un conseil, à la suite duquel l'armée française se hâta de regagner ses frontières, n'osant pour ainsi dire soutenir l'aspect d'une poignée d'ennemis. A cette époque, les généraux se formait la plus singulière idée de la guerre; on eût dit que toute entreprise militaire devait reposer sur l'absence de l'adversaire, et que dès qu'il paraissait, il fallait décamper: on ne manqua pas, quelques années plus tard, de laver ce ridicule des chefs de 1792; mais on tomba dans l'excès contraire, en attaquant avec une impétuosité meurtrière les postes

guerre.

se vit réduit à se justifier et à demander son rempla

cement.

Le maréchal Luckner, âgé de soixante-dix ans, que nous avons vu figurer avec quelque distinction, comme officier de troupes légères, dans plusieurs escarmouches de la guerre de Hanovre, fut choisi pour lui succéder: le gouvernement n'avait pas d'idée assez juste des talents nécessaires à un général en chef, pour juger la différence qui existe entre un hussard hanovrien et un maréchal chargé du destin de la France. Luckner, qui fut toujours un homme médiocre, était devenu, en avançant en âge, pusillanime, faible, irrésolu et incapable de tout commandement.

Conseil Les premiers soins du nouveau général furent d'asde sembler un conseil de guerre, pour blâmer tout ce qui avait été fait, sans rien proposer de plus convena→ ble; il procéda, ensuite, à une nouvelle distribution des arrondissements que chaque armée devait défendre. Ce système d'assigner à plusieurs chefs sur une mênie frontière, le terrain que chacun d'eux doit particuliérement garder est des plus dangereux ; c'est le moyen d'empêcher qu'ils ne se prêtent un mutuel secours, chacun ne voulant pas laisser en prise le point qui lui est confié. Une telle répartition serait tout au plus applicable aux divisions d'une armée, subordonnées à un seul général en chef qui pût prescrire sur les lieux, et à l'instant même, tous les mouvements nécessités par les circonstances. On comprend qu'on se distribue des arrondissements pour cantonner; mais pour bien opérer à la guerre, il est indispensable de diriger toutes les forces disponibles, où le besoin l'exige, et sans égard à des répartitions de commandements.

Convaincu qu'il avait pourvu à tout par cette me- ́ On resure insignifiante, Luckner vaquait paisiblement aux prend le détails de ses fonctions, lorsque Dumouriez, persistant d'invaprojet à reprendre ses projets sur la Belgique, fit décider au conseil que l'expédition serait de nouveau tentée, en laissant cette fois au vieux maréchal, le soin de l'exécuter selon son bon plaisir.

Luckner proposa de marcher avec ce qu'il pourrait réunir de l'armée du Nord, sur Courtrai, vers la gauche; tandis que Lafayette menacerait Mons et Bruxelles, pour contenir l'ennemi et l'empêcher de renforcer son camp de Tournai. Si les Autrichiens commettait cette faute, l'armée du centre devait alors marcher réellement sur Mons et s'en emparer.

Ce mouvement à gauche était une monstruosité en stratégie ; il prouve évidemment que son auteur n'avait pas les premières notions de la guerre, car c'était le mouvement inverse qu'il fallait faire, pour ramener les troupes de Dunkerque et de Lille sur Valenciennes, et les porter par leur droite sur Binche, tandis que Lafayette s'avancerait de Maubeuge et de Philippeville vers Charleroi, afin de gagner l'extrême gauche de la ligne autrichienne, de l'accabler et de refouler sur la Flandre maritime les corps battus successivement.

sion.

Luckner.

Au lieu d'en agir ainsi, Luckner rassembla ses divi- Opérasions de Famars, de Lille et de Dunkerque, sur la tions de Lys, et s'avança, le 18 juin, à Menin, avec vingt-huit mille hommes, poussant une avant-garde sur Courtrai, dont elle s'empara après un léger combat. Un corps de quatre mille hommes resta fort inutilement établi à Maulde durant cette expédition.

A l'instant même où les troupes du camp de Famars 10 juin.

« PreviousContinue »