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veau, relève ce bout & le paffe à fon tour fur la cheville; on réitère cette manoeuvre par laquelle la patine eft pliée en quatre, fans que les brins de fils foient mêlés; alors on la retire, & maintenant de fes doigts les extrémités pour empêcher quelque dérangement que ce foit, on la pofe fur une planche entre quatre chevilles, & de l'une à l'autre de celles-ci on paffe un fil pour tenir la patine dans le même état; on difpofe fucceffivement les huit de la même manière, & quand elles font toutes ainfi placées l'une fur l'autre, on les réunit par une ligature à chacune des extrémités; puis retirant la patine de deffus la planchette, on liffe le fil avec

un peigne de bois pour lui donner cet air agréable de propreté, & définitivement on fait deux autres ligatures à diftances égales. Tous les quarterons de fil ainfi préparés font enveloppés chacun dans un papier bleu pour l'ordinaire, portant le numéro du fixain, l'indication du prix & du lieu de la fabrique. Les ligatures, les enveloppes font faites quelquefois avec une forte de luxe qui n'a jamais rien d'effentiel, mais dont quelques marchands ont pris l'habitude, croyant fans doute par cette apparence prévenir favorablement pour la qualité; c'est ainfi qu'on voit, liés d'un petit fil d'or, de beaux fils envoyés pour la fabrique de dentelles.

SECTION II.

Doublage & recordage de la laine & du coton.

S. PREMIER.

Des opérations du devidage, doublage & retordage fur les fils de laine.

Nous avons vu la laine, au fortir de la filature, devidée en écheveaux au moyen du devidoir à rouage, dont l'afpe a cinq quarts de tour. C'est ainfi la laine eft mife dans le commerce, & que qu'elle eft, pour l'ordinaire, achetée par le fabricant. La première chofe qu'il faffe, après avoir reçu la laine, eft de devider celle pour la chaîne à l'aide d'une tournette ordinaire fur laquelle on place l'écheveau, & du petit rouet fimple dont la broche eft chargée d'un buhot qui doit recevoir le fil. La forme de ce buhot eft d'être plus evidé par le bas, c'est-à-dire, du côté de la patte, pour qu'il contienne plus de fil; un peu renflé par le haut pour que celui-ci s'en échappe moins vite quand on le retirera; fans rebord néanmoins pour éviter le trop de réfiftance, & le frottement qui le fait caffer. On conduit le fil de manière qu'il forme une figure conique, dont le plus grand diamètre foit fur la partie la plus petite du buhot, vers la patte de celui-ci. Lorfqu'on a plufieurs de ces buhots chargés, on en fiche les broches au nombre de deux ou de trois, fuivant celui des fils qu'on veut doubler, dans une pièce de bois placée en face du rouet, de manière que les pointes de ces fufées regardant le nouveau buhot fur lequel les fils fe devident ensemble par l'extrémité des fufées, le point de rencontre du prolongement des fils fe trouve fur le buhot même. (Voyez fig. 2, pl. 111.) On dirige d'une main la réunion de ces deux fils fur le nouveau buhot, tandis que de l'autre on tourne le rouet: on fait prendre également aux fils devidès une forme conique, pour qu'ils s'échappent avec la même facilité de deffus le buhot, lorsque celui-ci, étant placé verticalement fur le

moulin à retordre, le fil se tend, fe tord & s'enroule fur le devidoir.

On pourroit abfolument ne faire qu'un devidage, c'est-à-dire, doubler les fils à mesure qu'on fait les écheveaux pour en former les bobines à retordre; mais il en pourroit réfulter l'inconvénient, de la part des ouvrières négligentes, qu'un fil caffant, on laiffât courir l'autre feul pendant quelque temps; ce qui, répété, nuiroit beaucoup. Un autre inconvénient très-grand encore, feroit que les écheveaux plus ou moins mêlés, oppofant enfin au devidage, par quelque raifon que ce foit, plus ou moins de résistance, les fils se trouveroient inégalement tendus au doublage: on ne feroit donc expofé à rien moins, par cette économie, qu'à avoir fouvent du fil mal uni, & prefque toujours inégal en groffeur & en force, en fuppofant même, dans le premier cas, ce qui feroit pourtant inévitable, qu'il ne caffât pas fréquemment au moulin à

retordre.

Le devidage du fil pour la trame fimple des draps & de plufieurs autres étoffes, confifte uniquement, la matière ayant été teinte, ou en laine, ou en écheveaux, ou ne l'ayant point encore été, à la faire paffer de deffus la tournette fur le petit canon qui, garni pour être mis dans la navette, fe nomme l'efpoule; cette opération eft la même que celle du premier devidage des fils de laine. Quant aux tra mes doubles de diverfes étoffes, on les prépare à la manière des fils de chaîne, mais on leur donne un tord beaucoup moindre.

Le moulin d'ufage pour la laine eft rond; fes différences avec le moulin dont nous avons parlé pour les fils de chanvre & de lin, fe feront affez fentir par la vue des planches & de leurs explications; nous n'entrerons donc pas ici dans une defcription détaillée de toutes fes parties; mais nous obferverons particulièrement les effets du changement de lanterne; changement dont on a l'ufage

dans tous les moulins, mais fpécialement dans celui-ci, & dont les effets font les mêmes par

tout.

Il est évident qu'en fubftituant tour-à-tour des lanternes de nombre différens de fufeaux, on changera par-là, le mouvement du rouage qui s'engrène dans cette lanterne. Or, ce rouage eft adapté à l'axe du devidoir, lequel ne reçoit de mouvement que celui qui résulte de l'engrenement de la roue dans cette lanterne, très-variable en diamètre & en nombre de fufeaux. On fait donc tourner le devidoir auffi vîte & auffi doucement qu'on veut, lorfque le mouvement des bobines eft toujours le même. Que l'on conçoive encore que le fil ne fe devide de deffus la bobine, qu'en raison de ce qu'il eft attiré par le mouvement de l'aspe, & il fera démontré que plus ce mouvement de rotation eft lent, celui des bobines étant toujours le même, plus la partie du fil devidé fera torfe. Il n'eft donc queftion, pour tordre plus ou moins le fil, que de changer la tourte ou lanterne. On en a pour cela une grande variété; & il y a une adreffe à bien juger, & du degré de tord qu'il convient de donner, eu égard à la qualité de la matière, à fa difpofition actuelle, & à fa deftination future; & à la tourte à placer, pour y parvenir

Le diamètre de la tourte étant égal à celui de la roue, les rotations de chacune feront égales. Son diamètre étant double, celle-ci tournera deux fois, quand celle-là tournera une feule; n'étant que de moitié, ce fera le contraire: ainfi, plus la lanterne fera petite, avec un nombre de dents proportionné, pour faciliter l'engrenage, plus le devidoir tournera doucement, plus le fil fera retors ; & ce degré de tord fera toujours en proportion de ce diamètre.

On a un fecond moyen pour opérer le même effet, & même pour le doubler en même temps fi l'on veut; c'eft d'agrandir ou de diminuer le diamètre du devidoir, en éloignant ou rapprochant fes côtés de l'axe, au moyen des traverses à couliffes, pratiquées par des mortaises dans l'axe même. Plus ce diamètre eft petit, plus la longueur du fil devidé eft de temps à s'y rouler, & plus elle fe terd dans cet intervalle; & vice verfá.

Lorfqu'on change de tourte, on élève & on abaiffe le devidoir proportionnément au diamètre de cette tourte, pour que la roue s'engrène toujours avec la même facilité; on l'abaiffe également à l'autre bout, pour la tenir toujours dans une pofition horisontale. Le point extérieur de tangence du tamabour n'étant pas tout-à-fait dans le plan circulaire, mais un peu en arrière, il arrive que la bobine la plus proche de chaque côté ne reçoit qu'un foible frottement de la courroie, qui même n'eft pas abfolument continu, les fils en font moins tors on pourroit remédier à cet inconvénient, par des chevilles de bois arrondies, implantées en avant plutôt qu'en arrière de ces hobines. La forme circulaire de ces moulins femble devoir retordre les fils inégalement, les longueurs de fils devidés étant tou

jours elles-mêmes inégales ; & cela feroit en effet pour la première longueur des fils: mais on y remédie en amenant d'abord tous les fils au centre du moulin, les tordant en cette pofition, & les diftribuant enfuite chacun à fa place fur le devidoir: alors le tord eft égal, parce que le fil ne fe devide plus pour chaque endroit, à proportion de l'espace que chacun a à parcourir, mais toujours également & en même longueur. Mais il résulte un autre inconvénient de l'inégale longueur de ces fils, celui de la différence de poids, & par conféquent celle de tenfion dans leur longueur. Leur pofition étant prefque horisontale, & leur pefanteur spécifique augmentant en raifon de leur longueur, il fe fait aux plus longs une plus grande courbure au centre; & lorfque les fils fe tordent ensemble, ils fe cordent quelquefois dans cette partie par bouts de longueur proportionnée à la moindre tenfion, occafionnée par la plus grande distance du devidoir à la bobine.

On obvieroit à ce dernier inconvénient, en employant, au lieu de ce moulin, celui à retordre les foies, où la longueur des fils devidės est toujours égale, & la pofition de ces fils toujours verticale.

Les fils pour chaîne de camelors-laine, se retordent en blanc & à deux fois : "on trouve cette pratique meilleure que de le faire en une; le tord en eft plus égal & plus ferme : la première avec une lanterne de vingt fufeaux, & la feconde avec celle de quinze, plus ou moins, felon la qualité de la matière.

Les fils pour chaîne de camelots - poil & de camelots-mi-foie, fe retordent en couleur, parce que le fil de laine & le fil de foie dont elles font compofées, fe teignent en écheveaux féparément, l'une & l'autre matière demandant des procédés de teinture différens. On les retord auffi de préférence, & le plus fouvent, malgré la double maind'œuvre, à deux fois, avec des lanternes de quatorze, quinze à feize fufeaux, ou quelquefois à une feulement, avec des lanternes de fix, fept à huit fufeaux; à proportion que les couleurs font des nuances fortes, parce que les hautes couleurs altérant plus la matière, elle demande plus de ménagement.

La chaîne des baracans fe tord comme celle des camelots, & plus ferme encore. Celle des étamines, dites viré-fin, ne fe tord qu'une fois avec une lanterne de fept', huit, neuf fufeaux; & les demi-fins, avec celle de neuf, de dix & onze, & ainfi des autres. Celle des ferges de Rome, de Minorque, calmandes, bafins, grains d'orge, &c. fe tord deux fois avec une lanterne de vingt à vingt-cinq fufeaux pour la première, & quinze à vingt pour la feconde, fuivant encore la qualité de la matière, fon état actuel & fa deftination future.

Le poil de la trame des camelots-poils eft fimplement viré, ce qui eft une manière de retordre légèrement. Cette opération fe fait d'une feule fois avec une lanterne de quinze, dix-huit à vingt

fufeaux.

fufeaux. Ne veut-on qu'un virage très-foible? il n'y a qu'à fubftituer une poulie à la roue du devidoir qui s'engrène dans la lanterne, & une corde ou une courroie paffée deffus, & qui embraîfe en même temps la lanterne. Cette lanterne, beaucoup plus grande que la poulie, fera tourner le devidoir beaucoup plus vite qu'elle ne tournera elle-même; & le fil y étant amené beaucoup plus tôt, y fera

moins retors.

On remarquera que la filature à corde ouverte fe fait toujours de droite à gauche, & le retordage de gauche à droite, en fens contraire par conféquent. Chaque fil fe détord un peu au premier mouvement tous s'ouvrent, s'accrochent & s'incorporent en quelque forte, puis ils fe roulent en hélices & non en fpires, comme on le dit dans l'Encyclopédie, & enfin ils forment de petites cordes; autrement chaque fil continueroit de fe tordre fur foi ils ne s'accrocheroient point l'un à l'autre, ils fe tortilleroient même de diftance en diftance par brins féparés, ils fe corderoient dans ces points. Les fils refteroient baillans, inégaux en tenfion & en force, & très-mal unis.

On dit encore dans l'Encyclopédie qu'on a vu beaucoup de perfonnes qui ne pouvoient fe faire des idées nettes de cette manoeuvre, & qui s'opiniâtroient à prétendre qu'il falloit retordre les brins dans le fens où le fil avoit été tordu.

Il ne s'enfuit autre chofe, finon que beaucoup de perfonnes n'ont pas voulu fe donner la peine de réfléchir un inftant à l'objet de leur prétention, ni de jetter les yeux fur un rouet ou un moulin à retordre; ils auroient vu qu'il n'eft aucune de ces mécaniques qui ne foit difpofée pour produire fon effet en fens contraire.

Ces difpofitions ont toujours lieu lorfqu'il eft queftion de retordre deux fils enfemble: mais lorfqu'on n'en retord qu'un pour augmenter feulement le tord de la filature, ce qui eft néceffaire dans bien des circonftances, ce qui feroit avantageux ici à plufieurs égards, fi l'on pouvoit fe plier à cette pratique, ce qui fe fait journellement à Moliens-leVidame, à Govilé, & en d'autres paroiffes des environs de celles-ci pour la fabrique des rubans de laine qui y eft confidérable: alors, ou l'on file à corde croifée, fi l'on ne change pas la difpofition des moulins à retordre pour cet objet, parce qu'il faut néceffairement retordre dans le fens de la filature en tordant le fil en fens contraire, les fibres de la matière fe défuniroient fans reffource, & cé ne feroit plus du fil; ou l'on change en effet la difpofition des moulins, comme on en use à Reims.

la

Je dis que cette pratique feroit avantageufe, parce qu'un fil de bonne matière en acquiert beaucoup plus de confiftance, & qu'elle nous mettroit dans le cas de monter des chaînes à fils fimples pour tamife, & autres étoffes à luftrer, qui en feroient beaucoup plus fufceptibles de cette forte d'apprêts. Je dis que ces fils en acquièrent beaucoup de confiftance; car j'ai vu les ouvriers, dont on vient Manufactures & Arts. Tome II. Prem. Partie.

de parler, travailler fur de femblables chaînes avec force & action, & faire ainfi jufqu'à cent cinquante aunes de rubans en un jour, un feul ru ban à la fois. Les ouvriers ordinaires en font environ cent aunes; ce qui ne fuppofe pas des ménagemens à garder fur la matière, qui n'eft cependant pas d'une qualité fupérieure, mais qui, à la vérité, eft filée plus gros pour cet objet, que quand on fe propofe de la doubler & retordre pour le même emploi. Il faut aufli obferver, dans le cas du retordage à fil double, que la partie du buhot horifontal, tournée du côté de la doubleufe, lui ferve de bafe lorfqu'il eft pofé verticalement fur le moulin à retordre; & dans le cas du retordage à fil fimple, qu'elle foit tournée du côté oppofé en même temps que le moulin à retordre agit en fens contraire.

Le fil tors, lorfque c'eft pour chaîne, se devide de nouveau fur des buhots, pour en former des bobines à ourdir. Ces buhots ne font point faits comme les précédens, mais en forme de poulie alongée ils font plus longs & d'un moindre diamètre, mais à rebords très élevés à chaque bout, pour contenir la matière dont on les charge beaucoup, pour avoir à y revenir moins fouvent : il faut cependant éviter de les trop charger, & dans la crainte que le fil ne s'éboule, & parce que fon poids pourroit augmenter fa difficulté à tourner, & faire caffer le fil à l'ourdiflage.

On fe fert dans la bonneterie d'un moulin à retordre qui eft exclufivement demeuré pour ce genre de fabrique; on pourroit cependant l'employer unilement dans la fabrique des étoffes rafes; il feroit très-propre à virer les fils, & il a de plus l'avantage de marquer les tours, quand on veut y adapter une fuite de rouages femblables à ceux du pe tit devidoir, indiqué & calculé ; mais, à la vérité, il n'eft fufceptible, ni d'autant de variations que le précédent, ni d'atteindre jamais à un très-grand degré de tord. C'eft précisément par cette dernière raifon qu'il eft particulièrement convenable pour les ouvrages de bonneterie.

Un fort chaffis qu'on peut voir (pl. II, fig. 3, ) renferme un rouage dont le mouvement donné á l'aide d'une manivelle adaptée à l'axe de la grande roue, fait tourner, par le moyen des cordes de renvoi, & les bobines portées horisontalement fur une traverse en avant, & l'afpe ou devidoir fou tenu par fon axe entre deux piliers. Le mécanifme en eft fi facile à faifir, que nous n'entrerons par ici dans de plus grands détails, toujours fatigans par les renvois continuels aux figures; mais on les trouvera à l'explication des planches. On ajoute à ce moulin, ainfi que nous l'avons dit, une hor loge par laquelle on connoît le nombre de tours de chaque écheveau : c'eft ainfi que cela fe pratique dans la plus grande manufacture de bas que nous ayons, chez MM. Senart en Santerre. La même perfonne qui fait mouvoir la manivelle, veille à l'état des fils & raccommode ceux qui viennent à

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fe caffer; on accélère ou diminue le mouvement de l'afpe, felon qu'on veut donner un tord plus ou moins grand, en plaçant la corde d'attirage dans l'une ou l'autre des rainures de diamètre différent d'une fufée adhérente à la grande roue. Voyez les planches. §. II.

Retordage du coton.

Nous aurons peu de chofe à dire de cette opération à laquelle on prépare le coton par des procédés femblables à ceux que nous avons décrits pour la laine.

en

Le coton circule dans le commerce en écheveaux formés après la filature, d'une manière fort inégale; les gens de la campagne, qui s'occupent de cette préparation, devidant cette matière, filée de différentes mains par leurs enfans ou autres, écheveaux de grandeur arbitraire. Ce n'eft, ainfi que nous l'avons obfervé déjà, que dans les manufactures de velours de coton, qu'il eft devidé fur le devidoir calculé, dont nous avons fait sentir les avantages à l'article de la FILATURE.

En général, c'est au fabricant qui achète le coton, de le devider de nouveau pour le mettre fur des bobines, le doubler enfuite, & définitivement le retordre pour les espèces d'étoffes auxquelles cette opération est néceffaire, & qui fe réduisent à-peuprès aux velours & aux bafins; on retord auffi les cotons deftinés à certaines broderies communes.

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La mécanique à retordre les fils de coton eft en forme d'ellipfe alongée, à double rang de bobines; chacun de ces rangs a fa courroie, dont le mouvement eft imprimé & communiqué par un rouage à-peu-près femblable au moulin ordinaire ; ce qui eft particulier à celui-ci, eft d'avoir deux & un cadre finué, foutenu afpes ou devidoirs horifontalement par de petites colonnes, au-deffus & parallèlement aux plans des bobines. Les angles faillans & rentrans font tels que le prolongement vertical des fils du premier rang des bobines paffe par la pointe des uns, & celui des fils du fecond rang par le fond des autres. A la pointe & au fond de ces angles font de petits trous, de petits cylindres creux, des tuyaux, des anneaux, par chacun defquels paffe un fil: il fe trouve dirigé & foutenu par-là: le frottement qu'il y reçoit l'unit davantage, & en rend le tord plus égal.

Ce cadre eft utile, en outre, en ce que, files fils fe caffent dans leur prolongement au deffus, jufqu'aux afpes, au lieu de fe brouiller avec ceux des autres bobines, ils retombent fur lui, où il eft aifé de les prendre pour les raccommoder. (Voyez pl. IV, & à fon explication, les différentes coupes de ce moulin, & le détail de fes parties. )

Un nouveau moyen de retordre avec plus d'avantage que tous les moulins indiqués ne fauroient en procurer, vient d'être découvert par le fieur

Price. Nous avons eu déjà l'occafion de parler de cet artiste ingénieux au traité de la FILATURE, en publiant la mécanique de fon invention, pour filer la laine, le coton, le chanvre & le lin. C'eft cette même mécanique aux effets de laquelle il a donné une telle extenfion qu'elle file deux fils à la fois fur une même bobine, & à ces deux opérations, de la filature & du doublage, elle joint en même temps le retordage & le devidage; toutes ces opérations faites par le même agent, & fur un grand nombre de bobines, le font en même temps avec une perfection qui ne laiffe rien à defirer. Mais l'adminiftration n'ayant rien fait, à cette occafion, pour l'auteur, fon intérêt m'infpireroit de m'en taire, quand la confiance ne me le prescriroit pas. Uniquement par ce motif, & toujours à mon grand regret, j'agirai ainfi en plufieurs circonstances que j'ai indiquées, ou que j'indiquerai. Je dois le dire, autant ici qu'ailleurs je n'ai rien négligé pour faire connoître & récompenfer les inventeurs de procédés utiles, foit comme encouragement à donner aux artistes, foit pour acquérir le droit de publier leurs découvertes, perfuadé, la matière à part, qu'il ne refte dans les arts que la diminution de la main-d'œuvre, pour mettre à l'uniffon, à cet égard, les états commerçans, à plus forte raifon pour faire pencher la balance en faveur de l'un d'eux. L'amour des arts m'a fouvent pouffé jufqu'à y employer mes propres & foibles moyens ; mais nullement fecondé depuis long-temps, je ne puis regarder comme à moi, ou au public, ce qui eft tout un, en ce cas-ci, puifque je n'acquiers que pour ré pandre, que ce que j'ai acheté, ou ce qu'on a bien voulu me donner fans restriction, & nullement ce qu'on m'a confié.

Je fais des perfonnes qui, avec l'affurance, non du favoir, car il ne certifie guère, mais de la présomption qui ne montre que mieux le vide par les efforts de le cacher, prétendent que d'abréger les opérations, en diminuant la main-d'œuvre, n'eft point une chofe fi avantageufe, que même elle eft nuifible au peuple; & ces perfonnes veulent du commerce : & elles ne voient pas que ce commerce eft en concurrence, & qu'il ne tient qu'à l'induftrie de l'emporter. Sans doute il importe peu, pour le bonheur d'un peuple, qu'il foit vêtu de bure ou de brocard; comme il ne réfulteroit rien de plus pour fon aifance de vendre pour mille écus, que de ne vendre que pour mille fols, fi tout & par-tout étoit en proportion, puifque l'argent n'eft richelle que comparativement; mais fi la lourde maffe des impôts le force, pour avoir du pain, de chercher des reffources que ne lui offre point le fol qu'il habite; que ces reffources deviennent nulles par une plus grande industrie chez un autre peuple; fi les productions des arts chez le premier font fi au-deffus par le prix, & fi au-deffous par la valeur, que celles du dernier les effacent, & que ni l'un ni l'autre peuple, & encore les autres peuples ne veulent plus que de celles-ci? que de

viendront vos arts, que deviendront vos artistes? que deviendra ce peuple dont vous faites partie,

hommes à grands projets & à petites vues, à grande importance & à petits moyens ?

EXPLICATION DES PLANCHE S.

PLANCHE PREMIÈRE.

Vignette représentant plufieurs ouvriers occupés aux diverfes préparations du fil avant & après le retordage.

Fig. 1, le déméteur affis, mettant en écheveaux du fil de mulquinerie qui a été mis dans le commerce tout ourdi, & qui, pour la dentelle, doit être foumis au retordage.

A, efpèce d'ourdiffoir en petit, qu'on nomme fimplement devidoir, de l'opération à laquelle on le fait fervir.

B, démétoir compofé d'un chaffis c, d'un afpe ou moulinet d, nommé auffi tourelle, & qui fe neut par un axe à manivelle, formé d'un fort fil de fer, & d'un voto e, ou traverse portant huit fiches chargées chacune d'un annelet. Ce voto eft quelquefois féparé du démétoir, & monté sur un chaffis particulier.

Fig. 2, bobineur pour le fil après le premier Tetordage. Quant au premier bobinage du fil à dentelle, il fe fait de deffus le moulinet où il a été mis en écheveaux, on dégage ce moulinet de fon axe, & on le place fur un axe vertical où il est maintenu par une noix, & d'où on le bobine comme le fil ordinaire; f, petit rouet nommé chariot, qu'on tourne fouvent fans manivelle, & feulement en plaçant la main fur les rayons; g, petit devidoir ordinaire ou tournette.

Fig. 3, le particheur occupé à étendre & à nettoyer les écheveaux de fil au retour du blanchifsage; il eft ordinairement affis, & il tient d'une main un petit bâton avec lequel il ouvre & tend l'écheveau, & de l'autre un couteau dont il fe fert pour couper les noeuds, & ôter les ordures qui peuvent s'y trouver; hh, les montans du partichoir; ii, barre fupérieure de trois pouces de large & d'un pouce d'épaiffeur, dont les angles font abattus pour qu'ils ne coupent pas les fils, & qui fe pofe dans deux crochets de bois fixés aux montans; 1, barre inférieure qui fe place fuivant les écheveaux à plus ou moins de diftance de la première, par des chevilles ou boutons de fer qu'on fait entrer dans les trous pratiqués aux mon

tans.

Fig. 4, l'étriqueur paffant le fil dans l'étrique pour le liffer, après que le fil, au fortir du partichoir, a été balancé, mis en tas de même fineffe & féparé par demi-livres, travail qu'on appelle le pacage.

Fig. 5, le patineur, mettant l'écheveau paffé à l'étrique fur une cheville où il le plie en deux

d'abord, puis en quatre; après quoi il met cet écheveau nommé alors patine, fur la petite planche mm garnie de quatre chevilles; puis ayant ainfi rangé huit patines les unes au-deffus des autres il les lie & les enlève de deffus la planche pour unir le fil en le peignant légèrement avec un peigne de bois. Bas de la planche.

Fig. 6, le démétoir vu en grand avec le voto. Fig.9, 8&9, le devidoir, le voto & le démétoir; les deux derniers féparés & le fil difpofé fur tout comme il doit l'être pour la formation des écheveaux.

Fig. 10, baquet où l'on met tremper les fils avant de les tordre une feconde fois.

Fig. 11, poteau auquel doit tenir une cheville où l'on paffe les écheveaux, pour les faire égoutter, à mesure qu'on les retire du baquet.

Fig. 12, l'étrique dans laquelle on fait paffer les écheveaux de fil en les ferrant fortement.

PLANCHE II.

Fig. 1, moulin à retordre les fils fins à dentelles & autres. Ce moulin, dont l'ufage eft décrit dans le texte, y eft lui-même fuffifamment expliqué pour qu'on puiffe y avoir recours,

Fig. 2, bobine, garnie de fa broche & de fon fil d'archal, vue en grand.

Fig. 3, moulin à retordre, d'ufage dans la bonneterie pour les fils de laine & de coton; A, eft la manette ou manivelle ajustée à l'arbre de fer B, qui traverse la grande roue C, qui donne le mouvement à toute la machine. Cette grande roue eft cavée sur fa circonférence, & dans fa cavité il entre une corde un peu groffe, laquelle enveloppant la petite roue D, placée fur l'arbre qui fupporte la roue de pièce E, cavée auffi très-légérement & recevant la corde fine F, qui paffe fur les poulies G & N, adhérentes aux bobines ou fufées, elle leur donne le mouvement pour retordre le fil double qu'elles foutiennent.

H, même figure, eft une entaille faite dans une pièce de bois KL, nommée le fommier. Dans cette entaille entre une pièce mobile de bois ou de fer M, à laquelle eft attachée une petite poulie I, fous laquelle paffe la corde fine F, qui donne le mouvement aux bobines. Cette pièce M & les deux autres qui ne font pas marquées, s'élèvent & fe baiffent fuivant le befoin, & fervent à donner l'extenfion ou le relâchement néceffaire à la

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