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une fituation verticale, pour en tirer les cordes jufqu'à ce qu'on les ait tous parcourus, & que le deffin foit exécuté dans fon entier ; après quoi on reprendra la fuite dans le même ordre.

cée de deux trous dans le fens de la longueur du crochet; voici comment M. DE LA SALLE monte toutes les cordes de fon rame, & fixe à leur extrémité ce crochet: la corde du rame prend fon origine au-deffus de la corde des arcades, elle traverie la planche du caffin du rame, paffe dans l'une des deux gorges des deux poulies correspondantes du caffin du rame & du caffin du tirage, defcend jusqu'à la planche des crochets, paffe par un des trous de cette planche, traverse la tête du crochet, repaffe par le trou contigu au premier, remonte jufqu'au caffin où elle s'appuie fur l'autre gorge des mêmes poulies qu'elle a embraffé dans fon premier paffage, & va rejoindre le point d'où elle eft partie; on fent qu'il en eft de même de toutes les cordes du

rame.

» Le principal mérite de cette construction est d'avoir donné au crochet une pofition fixe & conftante, à laquelle il revient toujours, malgré le jeu & les mouvemens de la tire; comme le crochet eft fufpendu à une corde fixée aux deux trous invariables par où elle a paffé l'un avant lautre, après avoir traversé la tête du crochet, cette corde ramène toujours entre ces deux trous, par le contre-poids des aiguilles, la tête du crochet qui eft fixée per

» Suivant le fyftême que l'on vient d'expofer, on voit que les cordes des famples chargés de lacs, tiennent au rame par autant de noeuds qu'il y a de cordes dans le fample & dans le rame; que les famples chargés de lacs ne peuvent être enlevés de ce métier, ni fervir qu'au travail de ce même métier; enforte qu'on eft aftreint à y exercer le même deffin marqué fur les lacs de tous les famples adhérens fi donc on a befoin de fabriquer une autre étoffe, on ne peut le faire qu'en dépaffant tous les fils de lacs, & en les detachant des cordes des famples, qui pour lors font en état de recevoir de nouvelles combinaifons de fils de lacs, déterminés par la lecture d`un nouveau deffin. Or, ces opérations entraînent deux inconvéniens fort grands; 1o. celui de détruire tous les veftiges du premier deffin, attaché au fample; 2°. celui de fufpendre pendant le dépaffage des lacs, pendant la lecture du nouveau deffin & la façon des lacs, le travail de l'ouvrier & de la tireute fur le métier. Ce font ces inconvéniens qui frappant M. DE LA SALLE, lui firent naître fes premières vues de ré-pendiculairement, de telle forte que le bec du croformes; il chercha donc le moyen de détacher du rame le fample chargé de lacs fans dépaffer les fils de lacs, & de lui fubftituer un autre fample tout chargé de fes lacs; fa première idée fut celle d'employer des crochets pour attacher & détacher les famples au métier; mais il falloit à cet équipage une forme qui fût compatible avec tous les mouvemens des cordes du rame & du fample, & qui n'en genât pas le jeu ; ce ne fut qu'après plufieurs tentatives que M. DE LA SALLE parvint enfin au degré de fimplicité & de perfection dont nous pou-mée de petites tringles de bois parallèles contenues vons plutôt faire l'éloge que la description.

chet eft toujours tourné du même côté : en confidérant donc l'affemblage des crochets, on apperçoit feize rangées de crochets affujettis à des lignes droites, ayant leur bec difpofé du même côté, & laiffant des intervalles égaux entre chacune de ces rangées.

» C'eft à ces crochets que M. DE LA SALLE attache les cordes des famples chargés de fils de lacs, & voici comment il eft parvenu à remplir cet objet le plus important de fon travail; la planche qu'il attache à l'extrémité de fon fample, eft for

dans un cadre, & féparées par des vuides égaux aux pleins des tringles; elles font percées de trous correfpondans à ceux qui, dans la planche des crochets, fervent à fixer la tête de ces crochets ; cette

» Pour donner cependant une idée des réformes que M. DE LA SALLE a faites à l'ancien métier, d'après ces vues, il faut concevoir d'abord que le rame du métier de M. DE LA SALLE eft entre deux caf-planche étant ainfi difpofée, M. DE LA SALLE fait fins, ce qui maintient fes cordes dans une fituation parfaitement horizontale; chacun de ces caffins eft compofé de quatre cents poulies, comme dans les anciens métiers ; il eft incliné de même, avec cette différence que les poulies des caffins de M. DE LA SALLE ont une double gorge à leur circonférence, & font plus grandes que les anciennes : un de ces caffins, qu'il nomme caffin du rame, eft au-deffus des arcades: au pied de ce caffin, M. DE LA SALLE a fixé une planche percée de trous, dans lesquels les cordes de rame fe diftribuent uniformément avant que d'atteindre la planche des arcades.

» L'autre caffin eft placé au-deffus du tirage; au pied de ce caffin eft attachée dans une fituation horizontale la planche que nous appelons la planche des crochets: cette planche eft percée de feize rangées de vingt-fix trous doubles, avec cet équipage &un crochet de fer, dont la tête de plomb eft per. Manufactures & Arts. Tome II. Prem, Partic

paffer chaque corde du sample du deffous au-deffus, dans un trou d'une tringle, pour rentrer du deffus au-deffous par le trou correfpondant d'une tringle voifine; cette corde fait en conféquence une boucle ou collet qui fe préfente fur le vuide ménagé entre deux tringles; toutes les cordes du fample étant ainfi paffees, préfentent autant de collets ou de boucles qu'il y a de crochets ; & ces boucles font diftribuées dans le même ordre.

» Si donc on approche la planche du fample gar nie de boucles, de la planche des crochets, & qu'on la préfente de maniere que les rangées des boucles foient à côté du bec des crochets, qu'on lève cette planche, & qu'on introduife les crochets dans les vuides des tringles; qu'enfuite, par un mouvement latéral, on faffe avancer les boucles fur les becs des crochets, abaiffant auffi tôt la planche du fample, toutes les cordes du fample feront engagées dans un

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crochet correfpondant; & comme chaque boucle eft l'extrémité d'une des cordes du fample, le fample fera attaché à chaque corde de rame, dont les crochets font auffi l'extrémité; & ce qu'il y a de bien effentiel, chaque corde du rame & du fample fera attachée dans l'ordre qu'il convient pour l'exécution des deflins; en conféquence, chacune des cordes du rame pourra obéir au mouvement de la tire, communiqué à chaque corde du fample, auffi sûrement, que fi elles euffent été nouées enfemble, comme dans l'ancien métier; on conçoit auffi que les boucles des cordes du fample fe détacheront des crochets du rame, avec la même aifance & la même facilité qu'on les a attachées ; il fuffit pour cela de dégager les boucles des becs des crochets, ce qui s'exécute par des mouvemens femblables & contraires à ceux que nous avons indiqués.

"On trouvera peut-être que nous avons écrit longuement un équipage, dont le principal mèrite eft d'èrre fimple, & dont l'application fe fait dans un inftant; mais nous n'avons pu nous refufer à indiquer les précautions, & l'adreffe avec lefquelles on a évité les inconvénients & les obftacles. Nous pouvons reprendre en deux mots ce que nous venons de dire; qu'on fuppofe des crochets rangés par ordre, & attachés à l'extrémité des cordes du. rame; qu'à ces crochets foient préfentées quatre cents boucles qui s'engagent en un inftant dans ces crochets ; voilà ce que M. DE LA SALLE, par l'appareil décrit, exécuté avec tine promptitude & une facilité qui étonne toujours.

»De toute cette nouvelle conftruction, on voit naître en foule des avantages que nous allons parcourir. » 1°. Par le moyen de ce nouvel équipage que nous venons de décrire, & dont nous avons montré l'application, on peut attacher au métier, dans un inftant, un fample chargé de ces cordes de lacs, & l'ôter fuivant le befoin.

» En conféquence de cette facilité, de remettre & d'ôter les famples, comme on ne monte qu'un fample à la fois fur un métier, un deffin qui comprend dix, douze, & même feize famples, peut être diftribué par parties, & en même-tems fur quatre à cinq métiers, & paffer fucceffivement à tous ces métiers, fans en retarder les opérations; ainfi la même étoffe fe fabriquera fur ces métiers, fans qu'il foit néceffaire de lire un deffin plus d'une fois, ce qui diminue la dépenfe des cordes & du lifage, & fur-tout épargne le tems qu'il auroit fallu faire perdre aux ouvriers & aux tireufes de chacun de ces métiers, en fufpendant, comme dans l'ancien fyftême, leur travail pendant deux mois environ qu'auroit duré le lifage & la façon des lacs de ce deflin; on conçoit qu'outre l'avantage de cette épargne, un feul deffin produit le même avantage que quatre à cinq lifages du méme deffin dans l'ancien fyftême.

» 2o. En fubftituant fi aifément un fample à un on exécutera avec le nouveau métier, des

autre,

deffins d'une hauteur indéfinie, au point même d'étre difpenfé de faire reparoître les mêmes fleurs ou les mêmes deffins dans une robe, ou dans un lez de tapifferie; les deffins auront donc plus de variété & plus d'étendue.

"

» 3°. Comme on pourra mettre en réserve les famples d'un deflin, & qu'ils feront tous prêts à être remontés à la première commiffion, on fera en état de fatisfaire promptement aux demandes qui fe feroient dans la fabrique.

» 4°. Dès qu'un fample eft chargé de lacs, il faut avoir attention de vérifier très-exactement les fautes & les erreurs de la lifeuse & de la faifeufe de lacs, la première fois que l'on exécute le deffin, ce qui demande un certain tems: dans le fyftême de M. DE LA SALLE, cette vérification une fois faite, fervira par la fuite pour tous les deffins qu'on aura mis en réserve; & lorfqu'on les reprendra, on ne rencontrera plus ces mêmes difficultés; on aura des famples éprouvés; au lieu que dans l'ancien fyftême, chaque fois qu'on reprend un deffin, on le lit & on eft obligé de le vérifier; nous n'infifterons pas fur les avantages de cette nouvelle découverte, parce que, pour les préfenter dans un détail fuffifant, il faudroit expofer ici toute l'économie actuelle du commerce de Lyon, fi dépendant des variations de la mode.

» On fent, d'après ce que nous venons de dire, que pour profiter des avantages du métier de M. DE LA SALLE, il eft néceffaire de lire les deffins, & de faire enfuite les lacs fur les famples, fans que ces famples foient attachés actuellement au métier; c'est pour remplir cette nouvelle vue néceffairement dépendante de la première réforme, que M. DE LA SALLE a conftruit une machine particulière, deftinée au lifage; elle eft compofée d'un double caffin garni d'un rame de quatre cents cordes, aux extrémités defquelles font des planches & des crochets, comme dans le nouveau miétier décrit ci-de us; au moyen du double équipage de crochets, M. DE LA SALLE y attache d'un côté un fample garni de fa planche à collets, pour fervir an lifage, & de l'autre côté un fample garni auffi d'une femblable planche, pour y faire les lacs après le lifage. Ce double équipage eft monté fur un bâtis de bois conftruit de manière les famples puiffent s'y fixer fuivant les befoins de la li feufe & de la faifeufe de lacs; par le détail qui précède, on voit que M. DE LA SALLE a tiré de fon métier les pièces qui étoient neceffaires, pour y attacher les famples & les ôter à volonté ; & que la machine du lifage eft parfaitement femblable quant aux caffins, au rame, aux planches des crochets & aux crochets. Voici cependant une addition effentielle à fon ufage. Dans le métier, les cordes de rame, entre les deux caffins, font horizontales, difpofition très favorable à leur jeu; au lieu que dans la machine du lifage, ces cordes font un angle fort aigu, étant pliées par le poids des plombs ou aiguilles fufpendues à des cordes verticales, qui paffent

que

dans une planche femblable à celle des arcades. M. DE LA SALLE a jugé néceffaire de placer ces contrepoids au milieu des cordes du rame, pour que les petits efforts que peuvent faire en même tems la lifeufe d'un côté & la faifeufe de lacs de l'autre, ne dérangeaffent rien dans les cordes du rame, & que les deux ouvrières appliquées à la même machine, ne puiffent fe nuire ou s'interrompre dans leur travail particulier; d'ailleurs ces plombs ramènent toujours les cordes des famples dans leur pofition, après que la lifeufe ou la faifeufe de lacs les ont détachées en avant, pour y paffer les fils d'embarbes ou de gavaffines. Au moyen de cette nouvelle machine, le travail de la lifeufe devient indépendant de l'opération de la faifeufe de lacs, & fur-tout du travail du métier; on fent aifément quelle économie de tems & d'hommes il résulte naturellement de la féparation de tous ces travaux. Une lifeufe pourra, munie de cette machine & d'un fample, lire chez elle tous les deffins dont on aura befoin, fans fe déranger, fans être obligée d'aller chez le fabricant chercher uu métier auquel fes famples étoient invariablement attachés ; il en eft de même de la faifeufe de lacs qui prendra les famples des mains de la lifeufe, & fera les lacs à côté d'elle; cette machine lui fervira de même à dépaffer les lacs d'un deffin qui ne fera plus utile.

« Il ne nous refte plus, pour achever de rendre compte des réformes de M. DE LA SALLE, qu'à parler du nouvel équipage qu'il a adapté à fon métier, pour exécuter le tirage, & faciliter le travail de la tireufe, en la faifant tirer aflife. Plufieurs artiftes s'étoient déjà occupés de ces vues vraiment louables; car il eft queftion de la confervation des ti reufes, qui périffent prefque toutes, après un certain tems, par les jambes ou par des defcentes; mais ce qu'ils ont exécuté jufqu'à préfent, a entrainé d'ailleurs tant d'inconvénients, que leurs efforts ont été infructueux. Nous pourrions citer le métier de M. Falcon, où les filles qui remplaçoient les tireufes, n'étoient occupées qu'à préfenter, affifes, une fuite de cartons troués; ce que M. DE LA SALLE nous offre eft fimple, plus afforti aux manipulations ordinaires de la fabrication actuelle, & pare à tous les accidens dont nous avons parlé, fans furcharger le métier de pièces inutiles & embarraffantes.

Cet équipage eft compofé de deux montans & de deux traverfes; celle d'en bas eft fixée au fol de l'attelier par une vis, autour de laquelle l'affemblage peut tourner; un peu au-deffus de cette bafe en un cric qui fert à abaifier le bâton des famples, & à donner une tenfion convenable aux fils du fample & aux cordes du rame; de telle forte que les maillons de verre foient fur un même plan. Les cordes du fample font maintenues en avant du côté de la tireufe par deux rouleaux entre lefquels s'exécute le tirage; la tireuse eft affife fur une chaise élevée; elle faifit les fils de lacs pour amener à elle, les cordes du fample réunies par ces fils. Ce mou

vement latéral n'exige pas à beaucoup près un effort auffi confidérable, que le mouvement fimple de bas en haut, qui a lieu dans le tirage ordinaire; la tireufe ayant fait par cet effort lattéral une ouverture entre les cordes du íample, en détachant celles qu'amènent à elles les fils de lacs, elle y fait entrer une cheville mobile du dehors en dedans, & du dedans au-dehors par des marches. Lorfque la che ville eft engagée entre les cordes du fample, la tireufe abaille encore davantage les cordes à l'aide d'un levier, qui fait mouvoir en bas les points d'appui de la cheville du tirage; elle dégage enfuite la cheville des cordes du fample par le mouvement d'une marche. C'eft ainfi que pendant tout le jour, fans efforts fenfibles, & toujours affife, elle continue le même fervice; fouvent même lorfque les cordes du fample qu'il s'agit de tirer font peu nombreufes, la tireufe ne fe fert pas de la cheville du tirage, l'effort latéral lui fuffifant. On voit que M. DE LA SALLE a fait entrer dans ce mécanime le levier & la cheville de la machine de Garon; mais il a tellement perfectionné leur jeu & leur fervice, que c'eft une opération toute nouvelle.

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Après avoir décrit en particulier chacun des nouveaux mécanismes de M. DE LA SALLE, & montré leurs avantages particuliers, nous allons infifter par la fuite fur les avantages qui réfultent de la réunion de ces diverfes machines, & des applications qu'on peut en faire pour la perfection de la fabrique de foie.

" M. DE LA SALLE étoit trop pénétré des principes d'une bonne fabrication, pour les avoir perdus de vue dans les différentes réformes qu'il a faites à fon métier; auffi en introduifant de nouvelles pièces pour fatisfaire à fes vues particulières, il a toujours été attentif à rendre parfaitement libre & égal le jeu des fils de la chaine qu'exige le tirage. C'est toujours d'après ce plan que dans fon équipage il a placé deux caffins & la planche du rame ; au moyen de ces pièces, les cordes du rame font affujéties à une diftribution régulière qui les ifole fur toute leur longueur, ce qui prévient tout frottement & toute confufion dans l'ordre de ces cordes; outre qu'elles ne font gênées par aucun corps étranger, elles éprouvent une tension uniforme dans toute leur étendue, fi on les fuit depuis le bâton du fample jufqu'aux aiguilles qui fe balancent au-deffous de la chaîne.

» De même dans l'équipage nouveau que M. DE LA SALLE ajoute à fon métier, pour attacher & détacher les famples, il n'y a rien qui nuife au jeu libre des cordes du rame & du fample. Lorfque les. deux planches des crochets & du fample ont fervi à fixer le fample au métier, elles n'oppofent plus aucun obftacle; car les crochets s'abaiffent & remontent fans rencontrer dans toute l'étendue de leurs mouvemens la planche des crochets ; elle ne fert qu'à les maintenir dans leur état de repos dont ils fortent fans effort.

» De même après que la planche des famples a

fervi pour engager les boucles dans les crochets, elle eft abandonnée à fon propre poids, & elle defcend jufqu'aux noeuds qui l'attachent à l'extrémité fupérieure du fample. A cette diftance, elle fert à maintenir toutes les cordes du fample dans un intervalle fuffifant, pour empêcher tout frottement de la part des crochets qui defcendent & remontent entre les deux planches, fans frotter contre aucune des cordes voifines. Il réfulte de toutes ces difpofitions raifonnées, & particulièrement de la tenfion uniforme des cordes du rame, ainfi que de leur jeu libre, que tous les fils de la chaîne font foulevés également par le tirage, & que la tireufe en abaiffant les cordes du fample de trois à quatre pouces élève d'autant les fils de la chaîne; par conféquent les paquets de fil qui fe détachent de la chaîne ne préfentent aucun fil qui traîne; l'ouvrier paffe l'efpoulain avec aifance; les fleurs qu'il broche font bien déterminées, & leurs différens contours tracés nettement sur le fond de l'étoffe.

» Il réfulte encore un fecond avantage de cette conftruction: comme toutes les cordes font ifolées, les feules cordes comprises dans les fils de lacs, participent au jeu de la tire, & les pris & les laiffes font bien diftin&s, parce qu'il n'y a point de fuivage. Il n'en eft pas de même dans l'ancien métier ; les cordes du rame étant furchargées & embarraffées du poids énorme des famples qui font diftribués fur toute fa longueur, ne peuvent conferver une fituation horizontale; elles font courbées irrégulièrement, inégalement tendues, & comprimées l'une contre l'autre. Lorsque la tireuse agit, elle eft obligée de forcer les rapprochemens qui exigent de fa part de grands efforts; les cordes des famples abaiffées de deux ou trois pouces, ne peuvent communiquer un raccourciffement égal aux cordes du zame auffi irrégulièrement tendues; delà cette inégalité dans l'élévation des fils de la chaîne, qui fait que fouvent l'efpoulain ne peut pas embraffer la totalité des fils foulevés, & paffe à travers ; ceci rend le travail des fleurs fouvent inexact; on fent auffi que les fils du rame éprouvant des frottemens mutuels, une corde levée entraîne fouvent la corde voifine; enforte que dans les deffins où il y a des points comptés d'un pris & d'un laiffé, les fleurs occupent irrégulièrement le fond de l'étoffe fans être terminées.

"

huit ou dix famples, & le rétabliffement de ces cotdes coûte des peines infinies, & un tems précieux. » Jufqu'à prefent nous n'avons parlé dans la defcription du métier & de la machine du lifage, que d'un équipage a deux caflin garnis de quatre cents poulies, & propre au jeu de quatre cents cordes; M. DE LA SALLE a conftruit fon métier & fa machine du lifage de manière à y pouvoir placer un double équipage de deux caffins chacun, lorsqu'il eft queftion de fabriquer une étoffe de huits cents, ou de lire des deffins de huit cents. Le métier de M. DE LA SALLE fera donc propre à fabriquer une étoffe de huit cents, comme une de quatre cents. Dans le premier cas, le double équipage des deux caffins fera garni de cordes de rame, qui feront mouvoir les huit cents maillons des fils de la chaîne, & le deffin occupera toute la largeur de l'étoffe. Dans le fecond cas, où il eft queftion de la fabrication d'une étoffe de quatre cents, un feul équipage garni de quatre cents cordes de rame eft employe, & fait mouvoir les huit cents cordes des arcades, & par la même fuite les huits cents maillons de la chaîne; car alors une corde de rame prend deux cordes d'arcades, & le deffin eft répété deux fois fur la largeur de l'étoffe.

» Si nous paffons à la machine du lifage, nous verrons de même que dans le cas des deffins de huit cents, il faudra placer deux famples de quatre cents l'un à côté de l'autre, & lire le deffin en ne formant qu'un feul affemblage des huit cents cordes & des deux famples; ce fera la même chofe, lorfqu'il faudra faire les lacs fur les cordes d'embarbe. Ainfi, un fample de huit cents, fuivant le fyftême de M. DE LA SALLE, eft composé de deux famples de quatre cents, attachés à chacun des deux équipages des rames de quatre cents. L'on voit que tout tend à la fimplicité dans ce fyftéme, &

que par conféquent toutes les opérations du métier de M. DE LA SALLE font auffi peu compliquées pour les huit cents que pour les quatre cents, fi l'on confidère le jeu & le mouvement des cordes des famples & des rames; ce qui eft un mérite effentiel, & dépendant toujours du même plan que nous développons.

» Nous finirons ce rapport par l'expofition d'un des avantages les plus frappans qui résulte des réformes de M. DE LA SALLE, par la diftribution régulière des trous dont font garnies les planches des famples & celles des crochets. M. DE LA SALLE 2 trouvé le moyen de les attacher les unes aux autres dans tous les rapports poffibles, & d'opérer en conféquence tous les changemens de fituation dans le deffin broché fur les étoffes. En attachant, par exemple, les collets ou boucles des cordes du fam

» Cette même fimplicité dans l'équipage du métier de M. DE LA SALLE, a encore un très-grand avantage, lorfqu'il caffe des cordes dans le fample ou dans le rame. Comme on n'attache qu'un feul fample au metier de M. DE LA SALLE, & que chaque corde du rame & du fample aboutit aux crochets, on les retrouve aifément, & on les rétablit de même; le mal eft prefque auffitôt réparé qu'apple dans un ordre renversé par rapport aux cordes perçu, mais on n'a pas la même facilité dans l'ancien métier; tous les famples que comporte un deffin font adhérens au rame. S'il caffe un fil dans le rame, on ne peut facilement retrouver ces différens paffages de corde à travers les fils de lacs de

du rame; enforte que les collets des cordes du rame qui étoient à droite dans la première difpofi tion, foient engagés dans les crochets du rame qui étoient à gauche, & que par ce moyen toutes les parties du deffin dirigées par les lacs fe trouvent

Yenverfées, il opère ce qu'on appelle le reverfible, problème de fabrication dont la folution a été cherchée jufqu'ici fans fuccès. Dans tous les deffins à fleurs, les deffins font compofes de façon que la feconde moitié fe préfente fous une nouvelle face pour faire fymérrie avec la première. Dans cette circonstance, M. DE LA SALLE fe contente de taire lire la moitié du deffin; & avec cette moitié, il exécute autre fur l'étoffe en retournant la planche du fample d'angle en angle pris fur la diagonale, & l'attachant fuivant cette nouvelle difpofition à la planche immobile des crochets; ce qui s'exécute, comme l'on fait, très-promptement. L'équipage de la tireufe fe retourne de même fur fon pivot, & fuit le déplacement de la planche du femple; on voit bien que d'après ce nouvel arrangement, la tireufe abaiffant les cordes du fample dans le même ordre indiqué par la gavaffinière, ne tirera plus les mémes cordes du rame, & par conféquent ne foulevera plus les mêmes maillons de la chaîne qui feront foulevés dans un ordre renversé par rapport à la largeur de l'étoffe: donc le deffin fe trouvera retourné quant à fa largeur. Dans l'ancien métier pour avoir le reversible, il faut lire le dessin en entier, tant pour la partie où il eft renversé, que pour la partie où il fe préfente dans le premier ordre. M. DE LA SALLE épargne donc la moitié des frais qu'occafionne le lifage de ces fortes de deffins, qui font plus que les trois quarts des defins exécutés à Lyon. M. DE LA SALLE peut auffi en mettant une planche à boucles à l'extrémité inférieure du fample, retourner le fample du haut en bas, & opérer le reverfible fur la longueur de l'étoffe, ce qui produit dans bien des cas un effet agréable & recherché. On peut par ce moyen obtenir le reverfible fur la longueur de l'étoffe, & fur la largeur; ou bien on attache la planche inférieure du fample à la planche des crochets, en la retournant feulement, & la déplaçant d'angle en angle pris fur le même côté ; ou bien on la retourne en la déplaçant d'angle en angle pris fur la diagonale. Dans le premier cas, les fleurs feront difpo

fées fur l'étoffe de la même manière quant à la largeur, mais renversées quant à la longueur. Dans le fecond cas, elles feront renverfées, & quant à la longueur, & quant à la largeur de l'étoffe. Nous oublions de faire remarquer ici que les planches des famples ne font fufceptibles de produire le reverfible, foit dans un fens, foit dans un autre que dans le cas que les rangées des collets & des crochets font en nombre pair; car alors toutes les cordes font réellement déplacées, & paffent de droite à gauche, ou d'avant en arrière, & ce qui en eft une fuite, toutes les parties du dessin qu'elles repréfentent font déplacées. On voit que dans le cas d'un nombre impair dans les rangées, la rangée du milieu n'éprouveroit pas de dérangement, ce qui altéreroit le deffin d'une manière très-bizarre.

» L'académie a pu juger, par le détail qui précède, du mérite & dés avantages des découvertes de M. DE LA SALLE ; elles annoncent une connoiffance profonde des procédés de l'art de la fabrication des étoffes, & font faites pour produire une heureuse révolution dans la fabrication. & dans le commerce de ces étoffes: peu d'artiftes peuvent fe flatter d'avoir introduit dans un art des réformes

auffi avantageufes, & dont l'application foit auffi facile à faire aux befoins actuels de cet art, & ce qui eft fi important, plus propre à économiser le tems & les hommes; nous croyons en conféquence qu'elles ne fauroient trop tôt être adoptées pour l'accroiffement de notre induftrie & de notre commerce, & qu'elles ne peuvent occuper une place trop diftinguće dans le recueil des machines approuvées par l'académie, & même dans l'art des étoffes de foie qui doit paroître fous fes aufpices, & cela dans le tems où cette publicité ne nuiroit pas à notre commerce.

(Soit que le goût des étoffes du grand genre, etane confidérablement diminué, on ait fait beaucoup moins d'ufage de la grande tire, depuis & avant cette invention, foit d'autres raifons, elle ne s'eft guère étendue au-delà des regifires & des falles de l'académie).

VELOURS

SECTION VIII

S. PREMI E R.

du Velours.

ELOURS (villofus), étoffe de foie velue d'un côté, quelquefois des deux côtés, à deux endroits, & même de deux couleurs oppofées, l'une d'un côté, l'autre de l'autre.

On fait du velours plein (planus), tout uni, fans figures, ni rayures: du velours quatre poils, trois poils, deux poils, un poil & demi ( quartarii, tertii, bini, fefqui villi); un petit velours de dernière forte, qu'on appelle renforcé ( quaterni texti). On

fait un velours mince, mais figuré ( fimplex figuratus); à ramages, diverfifié par plufieurs figures ou couleurs (variatus coloribus vel figuris ); à fond d'or, d'argent, de farin ( cum texto aureo, argento, &c.); du velours raz ( derafus, &c ). On fait des velours frifés, découpés & frifés, à la Reine, à carreaux, cannelés, chinés, &c.

L'invention des velours eft très-ancienne dans l'Inde; les premières idées qu'on en eut en Europe, ainfi que du fatin, peuvent être reculées aux tems où le luxe Afiatique s'y répandit, par conféquent fous les empereurs Romains, quant à

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