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il n'a été rien épargné pour affurer fa deftinée. Le prix, pour chaque année, fera de 30 liv. franc de port, pour les abonnés ; & de 36 liv. pour ceux qui ne le font point. L'Auteur s'oblige à donner pour étrennes, à ses abonnés, un treizième cahier qui contiendra la vie des Littérateurs & des Artiftes contemporains des grands hommes dont il aura donné l'hiftoire pendant l'année. Les grands hommes, dont il fera mention cette année, formeront une hiftoire complette du règne de Louis XV.

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Le premier cahier de cette importante collection vient de paroître ; il nous offre le portrait & l'hiftoire du Maréchal de Saxe. Quoique Maurice, Comte de Saxe, foit né, nous dit l'Hiftorien, » dans une terre étrangère, la France qu'il adopta, & qu'il rendit triom» phante, a droit de l'infcrire dans fes » Fastes & de le compter parmi fesHéros. » La patrie du grand homme eft le pays qui fut le théâtre de fa gloire.

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Maurice, né à Drefde, le 19 Octo"bre 1696, fut l'unique fruit des amours d'Augufte II, Electeur de Saxe, & de » la Comteffe de Conismarck, Suédoife, qui comptoit des Miniftres & des Hé

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。ros parmi fes ancêtres; fa beauté fut le » moindre des dons qu'elle reçut de la » nature; fupérieure à fon fexe, par l'af» femblage de tous les talens qui forment » le grand homme, l'Europe l'eût comp

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tée parmi fes premiers Souverains, si ,, la naiffance l'eût appelée au gouverne» ment d'un Empire: mais fi elle n'eut point de Couronne, elle eut du moins » la gloire d'affervir un grand Roi. Née » tendre & fenfible, fes foibleffes fem» blent avoir été anoblies & par celui

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qui en fut l'objet, & par celui qui en » étoit le fruit. Augufte étoit le Prince le » plus accompli de fon fiècle; Maurice » devint le Héros du fien. Les demi» Dieux de l'antiquité ont eu une tache originelle. La naiffance d'Hercule n'a point flétti la mémoire d'Alc mène ; on refpecta des erreurs & des fautes dont on retiroit le fruit, & le merveilleux les confacra.

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» Les premiers penchans de Maurice „fe manifeftèrent pour la guerre, Les exercices militaires furent les feuls » amusemens de fon enfance; un beau » cheval excitoit fes tranfports, & fon » unique paffion étoit de le dompter : à J'exemple d'Achille à Scyros, il s'élan

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çoit avec enthoufiafme fur des armes, » pour en examiner la forme & en effayet la trempe. Contempteur dédaigneux de toutes les frivolités qui captivent l'en» fance, il fembloit parvenu à la maru» rité, fans le fecours du temps. L'édu »cation Allemande a quelque chofe de plus viril que la nôtre; nous abandon» nons l'enfance & la jeaneffe à des Hif trions plus propres à former des Héros » de théâtre, qu'à donner des défenfeurs » à la patrie : preflés de jouir, nous difpenfons les jeunes gens d'être effentiels; il nous fuffit qu'ils foient aimables. ,, Mais heureufement nous commençons à nous appercevoir de nos erreurs.

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Ce fut contre la France que Maurice fir fon apprentiffage de guerre, à l'école d'Eugène & de Malbouroug, Généraux bien dignes de former un pareil Elève. L'Hiftorien fait, à ce fujet, une réflexion fur les jeux de la fortune, qui fe plaît à tromper la prévoyance humaine. Eugène né en france, & dédaigné par elle, en devient la terreur. Maurice, né en Allemagne, y apprend l'art de vaincre ; il fait l'effai de fes talens militaires contre la -France, & en devient dans la fuite le foutien.

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L'Hiftorien, fans entrer dans le détail des expéditions militaires du Comte de Saxe, n'omet cependant rien de ce qui peut aflurer à ce Général la gloire d'avoir été le plus grand Capitaine de fon fiècle. La célèbre victoire de Fontenoi fut due principalement à fa vigilance & à fa capacité. Ce Général cependant étoit alors prefque mourant. Il fe fit traîner dans une voiture d'ofier, pour vifiter tous les poftes. Pendant l'action, il monta à cheval; fon extrême foibleffe faifoit craindre, à tout moment, qu'il n'expirât: c'eft ce qui fit dire au Roi de Pruffe, dans une Lettre qu'il écrivit, long-temps après, » qu'agi»tant, il y a quelques jours, la question de favoir quelle étoit la bataille de ce fiècle qui avoit fait le plus d'honneur au Général, les uns avoient proposé » celle d'Almanza, & les autres celle de » Tutin; mais qu'il étoit d'avis que c'étoit » celle qu'un Général, à l'agonie, rem» porta fur les ennemis de la France.

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Maurice a étendu les limites de l'art de la guerre, non feulement par fes travaux, mais encore par un Ouvrage inftructif, qu'il appeloit modeftement les réve ries. C'est ce dont le lecteur pourra fe convaincre, en lifant cette hiftoire ; & après

avoir vu ce grand homme à la tête des armées, il prendra fans doute plaifir à le fuivre avec l'Hiftorien, prefque dans l'intérieur de fa maison, à l'examiner dans fon déshabillé, à prêter l'oreille à fes converfations les plus familières. Ce Général, habile à pénétrer dans les cœurs, recherchoit la valeur modefte, pour l'em. ployer, & refufoit fa confiance à ces fanfarons, toujours empreßlés à demander fes ordres pour marcher à l'ennemi. » Ces charlatans, difoit-il, reffemblent au cheval de bronze, qui a toujours le pied levé & qui ne marche jamais.

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Quand on lui propofoit une attaque où il falloit facrifier quelques foldats: » Dif. férons, répondoit il, de quelques jours; le plus beau fuccès eft celui qui coûte le moins de fang; un Grenadier m'eft » précieux, il faut vingt ans pour le rem » placer.

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La confiance dont l'honoroit le Monarque lui attiroit une foule d'importuns, qui follicitoient des grâces. Incapable de tromper par de fauffes promeffes, il leur difoit avec ingénuité: » Meffieurs, » je fuis bien le maître de faire caffer des » jambes & des bras; je les épargne, quand je puis mais je ne difpofe pas

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