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Auteurs des bons Ouvrages devroient jouir d'une parfaite tranquillité. On a fouvent remarqué que lorsqu'un Ouvrage eft critiqué, ce n'eft pas l'Auteur de l'Ouvrage qui fubit la plus délicate épreuve. Le Public, intelligent, fe réferve le droit de juger le Cenfeur; & fi la critique eft injufte & fauffe, le mépris dont elle eft payée fe mefure à l'idée de fupériorité que tout Cenfeur fait préfumer avoir voulu donner de foi. On ne doit pas fe diffimuler les difficultés de la critique. Rien de plus rare, après les bons livres, que les bons Juges de livres; pour les juger, difoit Malherbe, il faut fcience & confcience. Cette réunion n'eft pas fi commune qu'on pourroit le penfer.

Convaincu, par principe & par fen timent, qu'il falloit une bafe à la morale univerfelle, l'Auteur des nouveaux paradoxes a épuisé toutes les différentes preuves de l'exiftence de Dieu, de la néceffité de la morale & de notre immortalité. Les raifonnemens qu'il a employés ne mènent point au dogme trifte & froid de l'indifférence. L'indifférence, comme l'obferve très bien notre Philofophe, eft le principe de l'homme qui n'en a point; c'eft le plus grand mal que

le pyrrhonifme ait pu faire à la terre: l'indifférence dans les arts conduit à la barbarie; dans la vie fociale, elle produic des êtres vils & fans caractères; dans la la Religion, elle fait des Athées. La faine philofophie, dont cet Ecrivain prend la défenfe, s'éloigne également de tous ces excès fi propres à avilir l'homme & à nuire à la fociété. Les Philofophes, dignes de porter ce nom glorieux, uniffent la vertu au génie, & n'admettent d'autres principes que ceux qui peuvent rendre l'homme heureux ici bas & dans l'économie future. C'eft fe couvrir d'opprobre que de calomnier ceux qu'on doit regarder plutôt comme les bienfaiteurs de l'humanité. C'eft le comble de l'injuftice que de les confondre avec ces Auteurs qui voudroient renverfer les règles immuables des mœurs, & qui n'admettant point la diftinction du bien & du mal, ne reconnoiffent point le Légiflateur fuprême, qui doit récompenfer l'un & punir l'autre. Autant l'Auteur des Paradoxes montre de zèle pour la faine philofophie, autant il manifefte fon indignation contre ceux qui ofent méconnoître l'origine & la deftination de l'homme, & qui ne lui offrent que la perfpective

du néant pour le confoler dans les traverfes & dans les maux auxquels il'est expofé dans le cours de la vie.

L'accufation de plagiat, qu'on n'em. ploye que pour dégrader la perfonne du Philofophe, & pour éloigner le vulgaire de la lecture de l'Ecrivain qu'on calommie, n'est le plus fouvent que la ressource de l'envie & de la médiocrité. L'Auteur des Paradoxes juftifie plufieurs Ecrivains célèbres qu'on a cherché à Alétric par cette odieufe imputation; & l'apologie qu'il fait de ces Ecrivains le conduit à traiter la fameufe queftion de la preffe. Il est plus aifé de prouver que les loix peuvent & doivent fixer des limites à la liberté d'écrire, que de les déterminer avec cette fageffe impartiale qui difcute également les inconvéniens & les avantages. On regarde comme un principe incontestable qu'une faculté fi naturelle & fi utile ne doit & ne peut être gênée qu'autant que le bien de l'Etat, cette loi fuprême, l'exige. Il n'eft pas cependant auffi facile qu'on fe l'imagine de démêler les circonstances ou l'intérêt public l'or donne. La vérité n'a point à craindre les attaques de l'erreur. Multiplier les com bats, c'eft multiplier fes triomphes. C'est

fouvent du choc des opinions que naît certe lumière bienfaisante qui éclaire tous les efprits, & qui termine enfin toutes ces vaines & ridicules difputes fouvent fi contraires à l'ordre public & à la tranquillité des Citoyens.

On trouve à la fuite de ces differtations une nouvelle édition des Lettres de Brutus fur les chars anciens & modernes, où l'Auteur employe toute fon érudition contre ce genre de luxe qui a tant de fois produit des malheurs & des défordres dans la fociété. M. de Voltaire, en recevant la première édition de cet Ouvrage, a écrit cette Lettre de remerciement à l'Auteur."Monfieur, il y a deux ans » que je ne fors point de chambre, & que » la vieilleffe & les maladies qui accablent » mon corps très foible, me retiennent prefque toujours dans mon lit. Je ne pren drai point contre vous le parti de ceux qui vont en carroffe: tout ce que je puis » vous dire, c'eft qu'un homme qui écrit " auffi bien que vous, mérite au moins » un carroffe à fix chevaux; vous voulez qu'on foit porté par des hommes, j'irai bientôt ainfi dans ma Paroiffe fuppofé qu'on veuille bien m'y rece » voir. En attendant, j'ai l'honneur d'être

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» avec la plus profonde eftime & la plus » vive reconnoiflance ».

Difcours fur l'Education, prononcés au Collége Royal de Rouen, fuivis de notes tirées des meilleurs Auteurs anciens & modernes ; auxquels on a joint des réflexions fur l'amitié. Par M. Auger, Prêtre, Profeffeur d'Eloquence au Collège de Rouen, de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres & Arts de la même ville. A Paris, chez Durand, Libraire, rue Galande.

Cet Ouvrage ne peut être que fort utile aux pères & aux mères qui font jaloux de bien élever leurs enfans. La faine morale qu'il refpire, & les notes excellentes qui font tirées de Platon, Plutarque, Montaigne, Locke, Fénélon, Rollin, M. Rouffeau, rendent ces Difcours très intéreffans. Ce Profeffeur, que le zèle feul du bien public anime, fe fait un devoir & un plaifir d'avouer que l'Emile de M. Rousseau est un riche tréfor où l'on trouve fur l'éducation une foule de vérités neuves & lumineuses, les réflexions les plus juftes & les plus fenfées, la morale la plus pure & la plus

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