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Quand l'Aquilon, doublant l'horreur & la froi

dure,

Charge encor le tableau des maux de la nature.
Il chafle des côteaux, dans le fond des vallons
Ces humides tapis de neige & de glaçons.
Et lance en même temps, fur les cimes pelées,
Les flocons entaflés dans le creux des vallées.
Ces tourbillons, ces corps l'un à l'autre opposés
Ce choc des élémens l'un par l'autre brisés,
Troublant le Voyageur dans le champ qui va

cille,

L'enferment avec bruit dans un globe mobile.
Il marche ; l'orbe cede. Où diriger les pas!
Près de lui, loin de lui fe preffent les frimats,
Et le ciel & la terre, & les objets fenfibles
A les yeux étonnés deviennent invifibles.

Mais il ne reste plus de traces de nos maux
Quand le soleil vainqueur entre dans lesGémeaux.
Quels transports ravislans! quel charme inexpri-
mable!

Zéphyr, en dévançant une Déesse aimable,
Par un fouffle paifible & plein de volupté,
Epanche mollement la vie & la fanté.
Il fe joue, & tout prend une face nouvelle;

qu'on nomme les fleps ou déferts, que dans les provinces intérieures de l'Empire.

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L'Idalie eft aux lieux rajeunis par fon aile.
Sous les aftres de l'Ourfe on trouve le Lignon,
La folie a banni l'ennui de ce canton.

Le fentiment s'éveille & s'enflamme fans ceffe.
Echo prolonge au loin le cri de l'alégresse,
Ce cii délicieux, le fignal du printemps;
Et l'enfant de Paphos eft le Dieu de nos fens.
La loi qu'il nous impofe eft la feule adorée.
On s'abreuve à longs traits dans fon urne sacrée.
Que la tendre Euphrofine & les touchantes Sœurs,
Inclinent pour Chloé plus que pour les grandeurs;
Une Damne titrée au fond de l'âine enrage

De céder d'agrémens aux Nymphes du village♬

C'est un affront, dit-on, fait à la qualité. *
Ah! rien ne plaît au cœur fans la fimplicité.
En vain à le parer Dorphife fe tourmente,
L'art éblouit fans doute & la nature enchante.

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Ce n'eft point par degrés que Flore en nos climats
Aflemble les atours & reprend les appas.
A peine le Zéphyr careffe la prairie,
A peine ces climats font rendus à la vie,
Que le front de Cybele eft nuancé d'émaur.
L'émeraude a percé l'écorce des rameaux,
Et déjà Philomèle au fein d'un verd bocage,
De les accens perlés charme le voifinage.

*Vers de la Comédie de Nanine.

Des parfums du matin les airs font impregnés.
Dans cet enchantement, dans ces temps fortunés,
Le Laboureur confie au gué:et qu'il fillone
Des tréfors qu'en deux mois il décuple & moif-
fonnc. *

Dans le cœur de l'été pénétrons fous le ciel,
Où l'on voit dominer les remparts d'Arcangel;
Minuit fonne, & le jour éclaire ces contrées. **

*On a cherché à exprimer deux vérités dans ce vers; l'une, qu'entie Molcou & Pétersbourg ilne s'écoule guères que deux mois depuis le temps qu'on feme les grains en Mars, jufqu'à celui où on fait la récolte. L'autre, que les femences ripportent dix grains pour un. C'est même quelque chofe de commun en Ingrie, en Estonie & ea LiVoti:.

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** Ces vers font imités d'un morceau de la Pétréade de feu M. Lomonofow, où Pierie le Grand eft repréfenté naviguant fur la Mer Blanche. En voici la traduction littérale. « L'aftre du jour atteint minuit & ne cache point la face ar» dente dans l'abyíme. Il paroît comme une montagne de flammes au deffus des vagues, & étend un éclat pourpré de derriere les glaçon » Au milieu d'une nuir merveilleuse, éclairée de tous les rayons du foleil, les fommets dorés

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De l'Océan du Nord les vagues azurés,
Ecument de fatigue en rompant le rayon
D'un difque, qui fe meut fans quitter l'horisom
L'édifice pompeus, aux ailes blanchiflantes,
Qui vole en effleurant les plaines mugillantes,
Par les nœuds du commerce arrêté fur ces bords,
Vatranfporter au loin nos utiles tréfors;.*
Sans avoir entrevu dans fes courses célebres,
Ni lesfaphirs des nuits, ni l'aftre des ténebres.
Aux bornes de ces mers, quels colofles brillans
Semblent toucher les cieux de leurs fronts mena-

çans?

Leur afpect fait frémir. Ces maffes formidables.
Sont l'onde transformée en rocs inaltérables.
Le fluide, durci par d'éternels hivers,
Plus haut que l'Apennin s'éleve dans les airs,
Des monftres à fes pieds, méditant fa ruine,

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* Prefque toutes les matchandifes qui fortent de Ruffie font des objets de premiere néceffité, comme le chanvre, le fer, le cuivre, les mâts,, les bois de conftruction, la cire, le fuif, &c. & les grains, branche nouvelle de commerce que le: pays doit à l'augufte Catherine II. On croira difficilement à quel point ce dernier article augmente Kexportation qui fe fait par Arcangel..

Ne peuvent ébranler fa profonde racine;
Et lorfque le foleil tempere fes ardeurs,
Ces prifmes merveilleux répetent les couleurs.
Hélas! où m'emportai-je, & quel espoir m'abufe!
Pour rendre ces objets il nous faudrait ta Mule.
Elle leule pourrait, fur ces bords écartés,
Deffiner noblement ces locales beautés.

O! combien j'applaudis, alors que ton génie
Des habitans des champs m'offre la bonhommie,'
Leurs vertus fans apprêts, leurs fêtes fans lan-
gueur.

La chafteté, la foi, l'équité, la candeur,
La franchise adorable & les amours finceres
Semblent être en dépôt fous les toits folitaires :-
Dans ces humbles hameaux que dédaignent les
Grands,

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On y trouve, au lieu d'or, de paisibles momens.
La médiocrité ne connaît point d'alarmes.
Après un long travail le repos a des charmes.
Le plaifir eft plus pur quand il n'eft point payé,
Et qui n'eft pas oifif n'eft jamais ennuyé.
Je les vois quelquefois ces Bergers, ces Bergeres,
Ces Villageois contens au feuil de leur chaumieres:
Que je méprile alors nos lambris faftueux!

Le calme eft dans mon cœur, la gaîté fous mes yeux;

Il ne manque plus rien au bonheur de ma vic

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