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III

La Chambre élue le 14 octobre 1877 était réunie depuis peu de semaines quand elle fut saisie, par M. Eschassériaux, d'une proposition relative au mode de révocation des maires élus (15 décembre); par M. Robert Mitchell, d'une proposition relative à l'élection des maires et adjoints des communes chefs-lieux de canton par les conseils municipaux (15 décembre); et enfin, par MM. André Folliet et Pascal Duprat (séance du 26 novembre) d'une proposition considérable en 162 articles, reproduisant, sauf certaines modifications, les dispositions du projet de MM. de Marcère et Jules Simon, avec les amendements adoptés en première lecture pour la partie consacrée à l'organisation municipale. Les auteurs avaient seulement passé sous silence tout ce qui se rapporte à l'électorat municipal, qui occupait 35 articles dans le projet de M. de Marcère, et aux opérations électorales.

La proposition de loi de MM. Pascal Duprat et Folliet a été prise en considération le 4 juin 1878 (au rapport de M. Sarrien); mais la commission chargée de l'examiner ne fut nommée que le 29 avril 1880. Cette commission a choisi pour rapporteur M. Jozon.

Le projet de loi, tel qu'il est sorti des délibérations de la commission, s'écartait peu de la proposition de MM. Pascal Duprat et Folliet; il repoussait cependant une innovation importante que les auteurs avaient empruntée aux législations de Belgique et d'Italie et qui consistait à remettre le pouvoir exécutif dans la commune à un comité composé du maire et des adjoints. La commission avait pensé, avec raison, que ce système d'administration collective, contraire à nos traditions, était très difficilement réalisable, vu le nombre excessif des petites communes en France.

Un rapport supplémentaire fut fait au nom de la commission par M. Langlois, relativement à l'organisation municipale de Paris, et déposé le 5 février 1881. Il concluait au maintien pur et simple de la loi du 14 avril 1871, avec cette réserve que l'élection des conseillers aurait lieu au scrutin de liste par arrondissement; mais les pouvoirs de la Chambre ayant pris fin, le projet de la commission ne put être discuté.

IV

Dès le commencement de la nouvelle législature, le 21 novembre 1881, M. Folliet reprit le projet qu'il avait présenté de concert avec M. Pascal Duprat.

Quelques jours après (28 novembre 1881), M. Ferdinand Dreyfus et plu

1. Cette partie avait été également supprimée par la commission de la Chambre des députés, qui avait, au contraire, conservé les dispositions relatives aux opérations électorales. 2. Les propositions de MM. Eschassériaux et Robert Mitchell n'ont pas été prises en considération.

sieurs de ses collègues déposèrent une proposition de loi qui n'était autre que le projet adopté par la commission l'année précédente et dont M. Jozon avait été le rapporteur.

Ces deux propositions furent prises en considération dans la séance du 31 janvier 1882 et renvoyées à une commission de 22 membres'.

Le 23 janvier 1882, MM. Cunéo d'Ornano, Jules André et autres déposaient, à leur tour, un projet de loi qui fut également renvoyé, le 31 janvier, à l'examen de la même commission.

Avant que la Chambre fût mise en mesure de statuer sur l'ensemble de ces diverses propositions, le Gouvernement demanda l'urgence pour deux projets portant sur des points spéciaux qui firent l'objet des lois des 28 mars et 5 avril 1882, la première attribuant aux conseils municipaux dans les chefs-lieux de département, arrondissement et canton, la nomination des maires et adjoints; la seconde, abrogeant les dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'adjonction des plus imposés.

Enfin, le 25 mars 1882, M. Goblet, ministre de l'intérieur, avait déposé, au nom du Gouvernement, un projet de loi qui avait pour but d'augmenter les pouvoirs des conseils municipaux et de conférer à la commission départementale la tutelle des communes confiée, jusque-là, au préfet 2.

La commission des lois municipales choisit son président, M. de Marcère, pour rapporteur et déposa son rapport le 19 décembre 1882.

Le projet de loi qu'elle proposait réservait la question de Paris et ne s'occupait que des autres communes. La première délibération, commencéc le 8 février 1883, a occupé les séances des 10, 12, 13, 17, 22, 26, 27 février et er mars 1883.

Pour la seconde délibération, la commission déposa un rapport supplémentaire (24 avril 1883), accompagné d'un nouveau texte contenant d'assez nombreuses modifications à la rédaction adoptée en première lecture et, notamment, une série d'articles nouveaux sur les opérations électorales (art. 16 à 29)3.

La discussion, commencée le 2 juillet 1883 et poursuivie dans les séances des 5, 6 et 7, fut interrompue par des travaux plus urgents et par les vacances parlementaires. Reprise le 25 octobre, elle s'est continuée les 27, 29 octobre, 5, 6, 8 et 10 novembre, pour se terminer ce dernier jour.

1. Cette commission était composée de MM. de Marcère, président ; Bastid (Adrien), szer¿taire; Peulevey, Rojer, Sarrien, Dubost, Rémoiville, Graux, Mauguin, Dreyfus, Durand, Le Cherbonnier, Hippolyte Faure, Bienvenu, Borriglione, Marcou, Lechevallier, Poujade, Folliet, Mercier, Ribot et Cadet.

M. Mercier succéda, en 1884, dans la présidence de la commission à M. de Marcère lorsque celui-ci fut élu sénateur.

2. La commission chargée de l'examen des propositions de loi municipale s'est prononcee contre ce projet. (Voir Rapport de M. de Marcère, séance de la Chambre du 19 décembre 1882.) Il a été retiré par décret du 8 février 1883.

3. Ce rapport contient, en outre, l'examen de diverses propositions de loi qui avaient été renvoyées à l'examen de la commission, savoir: 1° une proposition de M. de Lanessan, véritable loi d'organisation municipale en 151 articles; 2 une proposition de M. Delattre, qui était plutôt un exposé de do trines qu'un projet de loi; 3 une proposition de M. Cunéod'Ornano sur la nomination des répartiteurs. (Voir art. 67 de la loi.)

Le projet, voté par la Chambre, fut transmis au Sénat le 19 novembre 1883.

Le Sénat en confia l'examen à une commission de 9 membres1, qui choisit pour rapporteur M. Demôle.

Le rapport fut déposé le 26 janvier 1884. La première délibération s'ouvrit le 5 février et se continua les 7, 8, 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 18 f'vrier; la seconde commença le 29 février et se termina le 15 mars.

Le Sénat avait apporté au texte voté par la Chambre un certain nombre de modifications, dont la plupart, portant sur des détails de rédaction, obtinrent l'adhésion de la Chambre, à qui le projet fut renvoyé et qui l'examina de nouveau dans ses séances des 20, 21 et 22 mars 1884, sur le rapport de M. Ferdinand Dreyfus.

Les seuls points sur lesquels l'accord ne se fit pas, à la suite de ce renvoi, étaient les suivants : 1o délai d'un mois, suspensif d'exécution, accordé au préfet pour examiner les délibérations réglementaires; 2o compétence en matière d'octrois; 3° obligation des communes de suppléer à l'insuffisance des ressources des fabriques; 4o création de commissions intercommunales, repoussée par le Sénat, maintenue par la Chambre.

Le Sénat délibéra de nouveau sur le projet dans ses séances des 28 et

29 mars.

Il donna satisfaction à la Chambre des députés sur la question des octrois et sur celle des fabriques, mais il maintint pour le surplus ses précédentes résolutions.

Le texte arrêté par le Sénat en troisième délibération et transmis immédiatement à la Chambre des députés, fut accepté par celle-ci sans discussion ni modification (séance du 31 mars 1884).

L'accord se trouvant ainsi complet entre les deux Chambres, la loi fut promulguée au Journal officiel du 6 avril 1884 avec la date du 5.

La loi municipale étant, dans sa dernière forme, une proposition d'initiative parlementaire, le Gouvernement n'a pas eu à intervenir dans la préparation et la discussion autant qu'il aurait pu le faire, si l'initiative du projet lui avait été laissée. Le ministre de l'intérieur a pris cependant une très large part aux derniers débats, tant au Sénat qu'à la Chambre des députés, et il a été assisté par M. Gilbert Le Guay, conseiller d'État, directeur de l'administration départementale et communale, délégué à cet effet par décret.

V

La loi du 5 avril 1884 ne s'applique pas à Paris. La commission de la Chambre des députés, qui avait, ainsi que nous l'avons dit plus haut, ré

1. La commission était composée de MM. Magnin, président; Émile Lenoël, secrétaire Ribière, colonel Meinadier, Barne, Barbey, Comparan, Garrisson, Demôle.

servé cette partie de son travail, a déposé, le 22 mars 884, un projet spécial sur l'organisation municipale de cette ville (Rapport de M. Le Cherbonnier). Ce projet, qui comprenait 59 articles, ne pouvant être discuté avant les élections municipales, fixées au 4 mai par la loi du 3 janvier 1884, la Chambre en a distrait la partie relative au mode d'élection du conseil, qui fut discutée d'urgence dans la séance du 29 mars.

Après avoir hésité entre les divers systèmes proposés: élection au scrutin de liste par arrondissement, élection au scrutin de liste par grandes sections, élections au scrutin de liste sans sections, la Chambre s'était arrêtée au deuxième système, divisant Paris en quatre sections, qui devaient élire un nombre de conseillers proportionné au chiffre des électeurs, inscrits dans chacune d'elles. Le Sénat a substitué à ce système le scrutin de liste par arrondissement, avec attribution de quatre conseillers à chaque arrondissement (séance du 3 avril 1884). La Chambre des députés, saisie de nouveau, a (séance du 5 avril) maintenu son précédent vote. Le Sénat, persistant, de son côté, dans ses préférences pour le vote par arrondissement, a, pour terminer le débat, prononcé le rejet pur et simple de la loi (séance du 7 avril). L'organisation municipale de Paris resta donc régie par la loi du 14 avril 1871 et les élections du 4 mai se firent au scrutin uninominal par quartier 1,

VI

Le 5 juin 1888, le cabinet présidé par M. Floquet présenta un projet de loi sur les Syndicats de communes (no 2743 des impressions de la Chambre). Ce projet, qui permettait à plusieurs communes de former entre elles, pour un objet déterminé, un syndicat, fit, au rapport de M. Doumer (no 2899), l'objet de deux délibérations à la Chambre des députés (séances du 22 janvier et du 7 mars 1889). Il fut approuvé avec quelques modifications qui laissaient le fond intact.

Porté au Sénat, le 8 avril 1889 (no 100 des impressions), par M. Constans, ministre de l'intérieur, il rencontra le même accueil favorable; la première délibération eut lieu fe 3 décembre 1889, sur un rapport de M. Emile Labiche (no 2 des impressions). Mais, au cours de la discussion, M. de Marcère proposa, au lieu de voter la loi comme projet distinct, d'en faire l'objet d'un titre supplémentaire à la loi municipale. La commission promit d'étudier cette proposition et les articles furent votés en seconde délibération (séance du 17 décembre 1889), avec les nos 169 à 180, comme devant former le titre VIII de la loi du 5 avril 1884.

1. Deux lois spéciales ont déclaré applicables à Paris l'article 54 de la loi du 5 avril 1884 qui règle la publicité des séances du conseil municipal (L. du 5 juillet 1886) et l'article 41 relatif à la durée des pouvoirs des conseillers municipaux (L. du 2 avril 1896). Sous ces réserves, Paris continue à être régi par la législation antérieure. (Voir au commentaire les nos 2214, 2224 et 2225.)

Cette modification et quelques autres rectifications de texte nécessitèrent le renvoi à la Chambre. Le projet fut déposé par M. Constans le 8 février 1890 (no 341). Il fit l'objet d'un rapport favorable de M. Joseph Reinach (no 396) et, dans sa séance du 6 mars 1890, la Chambre adopta sans y rien changer le texte voté par le Sénat.

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La loi a été promulguée le 21 mars 1890 dans la forme suivante : Article unique. Il est ajouté à la loi du 5 avril 1884 un titre ainsi conçu (Suit le texte du titre VIII.)

VIII

La loi de 1884 n'a pas échappé au sort commun de toutes les lois administratives qui se transforment rapidement au fur et à mesure des besoins

nouveaux.

La loi du 4 février 1901, sur l'acceptation des dons et legs, en élargissant la compétence des assemblées municipales, a modifié les articles 68, 8o, 111 et 112 de la loi municipale.

La loi du 7 avril 1902, sur les impositions et emprunts des communes, a supprimé un paragraphe de l'article 133 et modifié les articles 141, 142 et 143.

La loi de finances du 25 février 1901 (art. 50) en élevant à 60,000 francs le chiffre à partir duquel les communes peuvent avoir un receveur municipal spécial, a modifié les deux premiers paragraphes de l'article 156.

Indépendamment de ces trois lois, qui ont changé le texte de la loi municipale, il en est une foule d'autres qui, sans toucher directement à la rédaction des articles, ont cependant sur l'organisation ou les attributions des municipalités une influence considérable.

Nous citerons notamment la loi du 29 décembre 1897 sur les boissons hygiéniques qui a profondément modifié le régime des octrois communaux, la loi du 15 février 1902 sur la santé publique, la loi du 21 juin 1898 (Code rural) sur la salubrité publique et la police sanitaire des animaux, la loi du 19 avril 1901 sur l'affouage communal, les lois des 9 juillet 1889 et 22 juin 1890 sur la vaine pâture, la loi du 15 juillet 1893 sur l'assistance médicale, etc., etc.

Nous en parlerons au cours des explications qui vont suivre.

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