Page images
PDF
EPUB

interdisant les étalages les dimanches et jours fériés devant les boutiques et magasins, sauf en ce qui concerne le commerce de détail des produits alimentaires et des liquides, et reconnaît que le pouvoir attribué au maire dans le but d'assurer la sûreté et la commodité du passage sur la voie publique implique le droit de déterminer les diverses catégories de commerçants qui peuvent être exceptés de l'interdiction.

Il est à noter que l'arrêté déclaré légal visait une délibération du conseil municipal invitant l'administration à interdire les étalages sur la voie publique les dimanches et jours fériés dans le but de procurer aux employés de commerce le repos du dimanche. N'est-ce pas là ce que le Conseil d'État appelle un détournement de pouvoirs? Le maire n'a-t-il pas usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel la loi les lui a donnés ?

859. Circulation des voitures. La circulation des voitures intéresse essentiellement la sûreté et la commodité du passage. Elle a fait, à Paris et dans une foule de villes, l'objet de nombreux règlements qui s'appliquent surtout aux voitures publiques. Les pouvoirs du maire, à cet égard, sont très étendus. Ainsi, il a été jugé que la disposition d'un règlement par lequel le maire, pour prévenir les encombrements et restreindre le nombre des voitures sur certaines lignes très fréquentées, n'accorde qu'à une seule entreprise de voitures omnibus le droit de s'arrêter pour prendre ou décharger des voyageurs en route, se justifie comme mesure de police, n'est pas incompatible avec le principe de la liberté industrielle et doit être observée tant qu'elle n'a pas été réformée par l'autorité supérieure. (Cass. 14 novembre 1868, Roux; Cons. d'Ét. 7 décembre 1888, Ponthas, Revue générale d'administration, 1889, t. I, p. 63.)

Le Conseil d'État a cependant décidé, en 1870, que le maire excéderait ses pouvoirs en prenant un arrêté de ce genre pour assurer l'exécution des traités portant concession à une compa

gnie du droit exclusif de prendre, dans toute l'étendue de la commune, ou de déposer des voyageurs à destination ou en provenance des localités desservies par cette compagnie (2 août 1870, Bouchardon). La jurisprudence du Conseil d'État semble donc plus sévère que celle de la Cour de cassation, et la question de savoir si le maire a fait un légitime usage de ses droits. de police, ou bien, s'il s'est proposé de favoriser un monopole, sera toujours assez délicate à trancher.

[ocr errors]

que

860. Mais on admet sans conteste le maire a le droit de réglementer le service des voitures de place dans l'intérieur de la commune, de leur assigner des lieux de stationnement', de les assujettir à un tarif obligatoire affiché dans l'intérieur de chaque voiture. (Cass. 27 février 1875, Sylva.)

Il peut également interdire aux cochers des voitures de remise de faire des chargements sur certains points déterminés et de faire stationner leur voiture sur la voie publique 2 (même arrêt), et soumettre ces voitures à une vérification préalable. (Cass. 13 décembre 1884, Chabert.)

L'arrêté municipal qui réglemente les voitures de remise est applicable aux voitures de grande remise se louant à la journée, à la semaine, au mois, et marchant sur commande, à prix débattu. (Cass. 11 juillet 1885, Chabert.)

La nécessité d'une autorisation préalable peut être étendue aux omnibus de gare des hôtels qui font, en outre, le service de ville. (Cass. 20 avril 1893, Lemaire.)

Par contre, l'autorité municipale ne peut, sans excès de pouvoirs, réglementer les voitures faisant un service public de promenades dans une ville et ses environs, si elles ne station

1. Pour les tarifs des droits de stationnement, voir article 133, 7o, nos 1478 et suiv. 2. A été cependant annulé pour détournement de pouvoirs un arrêté du maire de Nevers interdisant à tout conducteur de voiture de remise de circuler sur la voie publique dans le but de recruter des voyageurs et de satisfaire aux réquisitions en dehors des lieux de remisage autorisés par l'administration. Cette mesure avait été prise dans le but de protéger un adjudicataire auquel la ville avait concédé le droit de faire stationner des voitures sur la voie publique. (Cons. d'Ét. 9 août 1889, Ro

nent pas sur la voie publique, si elles n'acceptent d'autres clients que ceux qui ont retenu leur place à l'avance, si elles ne s'arrêtent en route ni pour prendre ni pour déposer des voyageurs. (Cons. d'Ét. 5 mai 1889, Cook et Ansaldi.)

861. Le maire peut, à plus forte raison, interdire aux voitures le passage de certaines rues, à certaines heures ou certains jours, notamment pendant les fêtes publiques ou les marchés. Ainsi, il a été jugé que l'airêté du maire d'Alger interdisant la circulation des tramways pendant la matinée du 14 juillet était légal. (Cons. d'Ét. 24 janvier 1899.)

862. Le Conseil d'État a, au contraire, déclaré illéga! l'arrêté interdisant d'une manière générale aux voitures de circuler autrement qu'au pas. (Cons. d'Ét. 16 juin 1893, Tréport.) Cette décision paraît en opposition avec un arrêt de la Cour de cassation qui a reconnu la légalité d'un arrêté interdisant à toute personne à cheval ou conduisant une voiture de parcourir les rues de la ville autrement qu'au pas (10 novembre 1900, Mialou). Cette contradiction apparente s'explique par des circonstances de fait.

[ocr errors]

863. Le maire peut aussi pour assurer la sécurité de la circulation, interdire le passage des voitures et bestiaux sur une promenade publique. Il suffit, pour que l'arrêté soit légal, que la voie à laquelle il se rapporte ait, en fait, le caractère de promenade publique. (Cons. d'Ét. 27 janvier 1882, Pascal.)

La légalité de l'ordonnance de police qui interdit d'une manière absolue, à Paris, la circulation des voitures-annonces a même été reconnue par le Conseil d'État (30 mars 1900, Hostein; 24 janvier 1902, Biché et Ci); mais une ordonnance interdisant d'une manière absolue la circulation des haquets a été annulée (4 août 1902, Chambre syndicale des entrepreneurs de transport).

864. d) Edifices menaçant ruine.

La loi confie au

maire le soin de pourvoir à la sûreté du passage dans les voies publiques par la réparation ou la démolition des édifices menaçant ruine.

Le mode de procéder, en pareil cas, était déterminé autrefois par les déclarations du roi des 18 juillet 1729 et 18 août 1730, rendues pour la ville de Paris, mais que la jurisprudence du Conseil d'État déclarait applicables à toute la France.

La loi du 21 juin 1898 (livre III du Code rural) détermine aujourd'hui dans ses articles 3, 4, 5 et 6 la procédure à suivre.

865. Lorsqu'une maison ou construction bordant une voie publique menace ruine, il y a lieu d'en ordonner la réparation, si elle en est susceptible, ou la démolition dans le cas contraire.

C'est ce qui résulte de l'article 3 de la loi nouvelle : « Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques longeant la voie ou la place publique, lorsqu'ils menacent ruine, et qu'ils pourraient par leur effondrement compromettre la sécurité. »

Les pouvoirs du maire s'exercent non seulement sur les édi...fices qui bordent la voie publique, mais encore sur ceux qui la longent à quelque distance, s'ils sont suffisamment rapprochés pour que leur effondrement puisse nuire à la circulation ou compromettre la sécurité. (Rapport de M. de Ladoucette, Journ. offic. du 30 octobre 1893, p. 1141.) Telle était au surplus la jurisprudence antérieure. (Cass. 3 janvier 1863, Gossot1.)

866. S'il y a péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, provoque la nomination, par le juge de paix, d'un homme de l'art, qui est chargé d'examiner l'état des bâtiments dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination. Si le rapport de cet expert constate l'urgence ou le

1. Le Conseil d'État a récemment confirmé cette jurisprudence par arrêt du 5 août 1901. Il a, il est vrai, annulé l'arrêté, mais parce qu'il ne résultait pas des pièces du dossier que la chute du bâtiment, séparé de la voie publique par un mur, put constituer une atteinte à la sécurité publique (Ancy-le-Franc).

péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité. Dans le cas où ces mesures n'auraient point été exécutées dans le délai imparti par la sommation, le maire a le droit de faire exécuter d'office, et aux frais du propriétaire, les mesures indispensables (art. 5). Il est ensuite procédé conformément à l'article 4, qui s'applique aussi bien dans ce cas que lorsque le péril n'est pas imminent.

867. Sous l'empire de la jurisprudence antérieure, s'il y avait urgence et péril imminent, le maire, après avoir fait dresser procès-verbal par des gens de l'art, et l'avoir dénoncé au propriétaire, pouvait ordonner, sous sa responsabilité, toutes les mesures qu'il jugeait nécessaires pour la sécurité publique et même faire exécuter d'office la démolition sans jugement préalable. L'article 5 de la loi du 21 juin 1898 ne permet plus au maire que d'ordonner des mesures provisoires et, sur le refus du propriétaire, de faire exécuter seulement les mesures absolument indispensables'. Il ne peut donc plus y avoir maintenant démolition sans jugement, car les mesures indispensables une fois prises, on peut attendre, et aller devant le conseil de préfecture.

868. S'il n'y a pas péril imminent (ou lorsque, en cas de péril imminent, les mesures prescrites par l'article 5 ont été remplies et ont paré à toute éventualité de danger immédiat), porte l'article 4, l'arrêté prescrivant la réparation ou la démolition du bâtiment menaçant ruine est notifié au propriétaire, avec sommation d'avoir à effectuer les travaux dans un délai déterminé et, s'il conteste le péril, de faire commettre un expert chargé de procéder contradictoirement, et au jour fixé par l'arrêté, à la constatation de l'état du bâtiment, et de dresser rapport. Si, au jour indiqué, le propriétaire n'a point fait cesser

1. Ces mesures indispensables sont l'étayage, l'étançonnement ou l'évacuation. (Discussion au Sénat, séance du 7 mai 1890, Journ. off. du 8, M. Peaudecerf, rapporteur.)

« PreviousContinue »