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être prononcée, que l'absence à trois convocations soit établie, il faut, en outre, que le conseil municipal n'ait pas admis comme légitimes les excuses présentées par l'intéressé. Cette disposition, empruntée à l'article 26 de la loi du 21 mars 1831, n'avait pas été reproduite par la loi de 1855. Si donc le conseil municipal a reconnu la légitimité des excuses présentées par le conseiller, le préfet ne peut plus agir.

Mais si l'intéressé ne présente pas d'excuses au conseil municipal, le préfet devra-t-il néanmoins appeler cette assemblée à

prononcer sur les causes de l'absence et à les apprécier d'office? C'est dans ce sens que le Conseil d'État avait interprété la loi du 21 mars 1831. « Considérant, dit un arrêt du 29 juillet 1847, qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 21 mars 1831, le préfet ne peut déclarer démissionnaire tout membre d'un conseil municipal qui aurait manqué à trois convocations successives qu'autant que le conseil municipal a reconnu que les motifs d'absence n'étaient pas légitimes; considérant que le préfet du Cher a déclaré démissionnaire le sieur X....., sans avoir appelé le conseil municipal à reconnaître si les motifs d'absence de ce conseiller municipal étaient légitimes... »

Mais on pourrait induire de certaines paroles du rapporteur de la Chambre des députés, que nous rappelons plus bas, que cet avis préalable du conseil municipal n'est plus aujourd'hui indispensable. Dans ce système, il serait toujours loisible au conseil municipal de légitimer l'absence en acceptant les excuses présentées; mais si l'intéressé n'en présente pas, il ne serait pas nécessaire d'appeler le conseil à statuer sur des excuses non présentées et le conseiller qui ne justifie pas d'excuses reconnues légitimes, pourrait être déclaré démissionnaire, après toutefois avoir été mis en demeure de présenter ses explications devant le préfet. On peut invoquer, dans ce sens, une décision ministérielle du 24 juillet 1879 (Marne).

que

Tant le Conseil d'État ne se sera pas prononcé sur ce point, il sera, toutefois, plus prudent d'appeler le conseil municipal à délibérer sur la légitimité de l'absence.

Il nous paraît hors de doute, en tout cas, que le conseil municipal n'est pas obligé de mettre le conseiller en demeure de fournir ses explications devant lui, comme il sera appelé à le faire devant le préfet; le conseil pourrait donc se prononcer sur la légitimité des excuses sans avoir entendu l'intéressé; c'est ce qui résulte du rejet, à la Chambre des députés (séance du 7 juillet 1883), d'un amendement de M. Cunéo d'Ornano qui demandait qu'après deux absences, le conseiller fût averti par le maire et mis ainsi en demeure de faire agréer ses excuses. Le rapporteur a objecté que ce n'était pas devant ses collègues, mais devant le préfet que le conseiller devait fournir ses explications.

Le refus du conseil municipal de se prononcer sur la légitimité des excuses ne saurait arrêter l'action du préfet, qui peut passer outre (jurisprudence du ministère de l'intérieur).

409.- La loi ne définit pas et ne pouvait guère définir quelles sont les excuses légitimes. Le conseil municipal a donc, à cet égard, un pouvoir d'appréciation souverain, au moins quand il déclare l'excuse légitime, car le préfet est toujours, ainsi que nous le verrons, libre d'admettre une excuse rejetée par le conseil.

Parmi les excuses que l'on considérait comme légitimes sous l'ancienne législation, nous citerons: l'absence pour cause de service militaire, l'emprisonnement pour dettes, l'internement dans un établissement d'aliénés.

410. Si le conseil municipal n'a pas admis l'excuse comme légitime, le préfet peut déclarer le conseiller démissionnaire ; mais il n'est pas forcé de le faire. La question était discutable sous le régime la loi du 21 mars 1831, qui portait : « Le préfet déclarera démissionnaire... » ; elle n'est pas douteuse avec le texte actuel, qui dit : « Le conseiller... peut être dé

claré démissionnaire. >>

Le préfet ne doit pas statuer sans avoir mis le conseiller en

demeure de fournir des explications. L'ancienne jurisprudence était fixée en ce sens (Cons. d'Ét. 19 mars 1863, Camus; 10 février 1860, Bezou) et la loi nouvelle le déclare expressément. Cette mise en demeure préalable est indispensable dans tous les cas et alors même que le conseil municipal aurait déjà entendu les explications de l'intéressé et rejeté ses excuses. Cela ressort des explications du rapporteur à la séance de la Chambre du 7 juillet 1883.

411. Les maires et adjoints peuvent, comme les simples conseillers municipaux, être déclarés démissionnaires d'office de leur mandat de conseiller. (Avis de la section de l'intérieur du Conseil d'État du 4 juillet 1892, Revue générale d'adminis tration, 1892, t. II, p. 435.)

412. Le conseiller déclaré démissionnaire peut, dans les dix jours de la notification, se pourvoir devant le conseil de préfecture et, si le conseil de préfecture rejette sa réclamation, déférer l'arrêté du conseil au Conseil d'Etat.

La loi ne fixant pas de délai spécial pour le recours, il faut en conclure que l'intéressé aura pour agir le délai ordinaire de deux mois. (L. 22 juillet 1889, art. 57; Cons. d'Ét. 9 décembre 1892, Bastelica [solution implicite].)

Le recours a un effet suspensif. (Cons. d'Ét. 26 juillet 1889, Neiguelay.)

Ce recours doit être formé par l'intermédiaire d'un avocat au Conseil. L'exception écrite dans les articles 36 et 40 de la loi du 5 avril 1884 ne s'étend pas à ce cas. (Cons. d'Ét. 4 nov. 1887, Franqueville.)

Mais l'intéressé ne pourrait déférer directement au Conseil d'État l'arrêté préfectoral. Son recours serait non recevable, alors même qu'il serait fondé sur un prétendu excès de pouvoirs du préfet. (Cons. d'Ét. 9 décembre 1864, Brucosté.)

413.- La décision par laquelle un préfet refuserait, malgré

la demande d'un conseil municipal, de déclarer un conseiller démissionnaire, pourrait-elle être attaquée par le conseil ou un de ses membres? L'affirmative semblerait résulter d'une décision du Conseil d'État du 16 janvier 1846 (Léaux); mais la législation a été modifiée depuis ce temps; les voies de recours ont été précisées et il paraît bien ressortir des textes nouveaux que le recours n'est ouvert qu'au conseiller seul dont l'exclusion a été prononcée. Sur quoi, d'ailleurs, se fonderait un recours, puisque le droit du préfet de ne pas prononcer la démission est incontestable ?

-

414. Un conseiller non installé peut, aussi bien que ses collègues qui ont pris possession de leur siège, être déclaré démissionnaire s'il manque à trois séances. Il en serait autrement s'il déclarait n'avoir jamais accepté le mandat. (Voir n° 317.)

415. La démission d'office n'entraîne aucune inéligibilité. Le conseiller déclaré démissionnaire pourrait donc se présenter aux élections faites en vue de pourvoir à son remplacement et être valablement élu. (Cons. d'Ét. 20 juin 1891, Bousserancourt.)

416.

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Démissions volontaires.

Avant la loi de 1884, on ne considérait la démission volontaire qu'un conseiller donnait de ses fonctions comme définitive et comme ayant un effet légal qu'autant qu'elle avait été acceptée par le préfet.

On concluait de ce principe: qu'une démission donnée pouvait être retirée tant qu'elle n'avait pas été acceptée (Cons. d'Ét. 6 juin 1873, Lambert);

Que le conseiller démissionnaire continue à compter parmi les membres en exercice, tant que sa démission n'a pas été acceptée; et que cette démission ne crée pas une vacance à

laquelle il doive être pourvu avant l'élection du maire (Cons. d'Et. 3 août 1877, Longchamps; 24 novembre 1882, Belpech);

Que les fonctions de maire intérimaire pouvaient être confiées à un conseiller dont la démission n'avait pas été acceptée (Décis. Min. Int. 1882);

Que l'on pouvait suspendre ou dissoudre le conseil municipal démissionnaire en refusant d'accepter sa démission (Cons. d'Ét. 13 février 1869, Tirard).

417.- Aujourd'hui les démissions n'ont plus besoin d'être acceptées; elles sont réputées définitives à partir du jour où le préfet en a accusé réception. Si le préfet ne répond pas, l'intéressé envoie une seconde fois sa démission par lettre recommandée et la démission est définitive un mois après ce nouvel envoi. Nous pensons que si l'intéressé a pris le soin de faire constater le premier envoi par lettre recommandée, un second envoi serait inutile et que, même en l'absence de tout accusé de réception, la démission serait définitive un mois après la date de l'envoi.

Le conseiller démissionnaire ne pourra donc plus retirer sa démission dès que le préfet lui en aura accusé réception ou un mois après l'envoi constaté par lettre recommandée. (Cons. d'Ét. 12 juin 1885, Châlons-sur-Marne.) Mais tant qu'il n'aura pas reçu l'accusé de réception, il peut la retirer même quand l'accusé de réception est envoyé. (Cons. d'Ét. 25 mai 1889, Revel; 16 décembre 1899, Lauzerte, Revue générale d'administration, 1900, t. I, p. 30.)

1. La rédaction primitive du dernier paragraphe de l'article 60 était ainsi conçue : « Les démissions sont adressées au sous-préfet: elles ne sont définitives qu'à dater du jour où le préfet a fait notifier au conseiller démissionnaire qu'il lui en était donné acte. » Elle a été modifiée dans la séance de la Chambre des députés du 7 juillet 1883 par l'adoption d'un amendement de M. Remoiville. De son côté, le Sénat a substitué les mots un mois après le nouvel envoi de la démission » à ceux-ci « après le renvoi » qui se trouvaient dans le texte adopté par la Chambre. Cette expression paraît d'ailleurs avoir été le résultat d'une simple faute d'impression et avoir été mise pour leur envoi.

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